Remettre l’I.A. à sa bonne place d’esclave par Philippe Guillemant

 


« Revenons à mes amis mystifiés par l’I.A. : la plupart d’entre eux sont pourtant déjà ouverts à la spiritualité, à l’existence de l’âme, etc., et devraient pour cette raison ne pas sombrer dans la confusion entre le langage et la pensée.  Que nenni ! Ayant l’impression que l’I.A. leur donne parfois des réponses créatives, voire intuitives, ils préfèrent lui attribuer des capacités « émergentes », une sorte d’esprit qui émergerait de la complexité de l’algorithme, plutôt que prendre acte tout simplement de la pauvreté des capacités de leur propre cerveau, en comparaison à celui de l’I.A.

 

Le problème est que nous avons tellement été habitués à croire que notre intelligence provenait de notre cerveau (ce qui est vrai seulement dans sa partie exécutive) que nous ne nous résignons pas à faire preuve d’humilité face à la leçon que nous apprend l’I.A. : nos qualités humaines ne résident pas dans notre cerveau ! L’intelligence elle-même, qui est une faculté d’adaptation, ne provient pas de notre cerveau, excepté dans son aspect exécutif une fois les décisions prises, ce qui relève toutefois d’une confusion entre intelligence et performance. L’intelligence implique en effet avant tout la capacité à faire les bons choix, sans quoi il n’y aurait pas d’adaptation possible. Or cette capacité sous-entend une intention et à tout le moins la faculté de ressentir les conséquences de ses choix. Or la conscience est indispensable à ce niveau-là.

 

Je parle de la conscience du bon, de la conscience du bien et de la conscience du beau (les 3 B). La vraie intelligence humaine est dans la capacité de reconnaître le vrai (ou bon) du faux, le bien du mal ou encore le beau du laid. Elle est dans notre capacité à prendre en conséquence des décisions ou des positions justes, face à la complexité et à la subtilité des situations. Sans oublier le fait que l’intelligence réelle intègre le potentiel de la conscience à attirer certains futurs, y compris lorsqu’ils paraissent impossibles à réaliser.

 

Et même lorsqu’on suppose que l’I.A. nous apporte quelque chose de nouveau qui n’est pas proprement humain, on se trompe lourdement. Pour ce qui est de la « fausse intelligence exécutive » qu’elle incarne, nous n’avons là que de l’humain : l’intelligence du web ou des datas qui nourrissent l’I.A., l’intelligence dans l’algorithme (petit bout de code), l’intelligence des développeurs, l’intelligence de la société qui oriente son apprentissage et par-dessus tout, l’intelligence de l’utilisateur, lorsqu’il a compris qu’il avait affaire à un outil et ne s’est pas laissé subjuguer par ses performances.

 

Tout ceci ne veut pas dire que je vais m’abstenir personnellement d’utiliser l’I.A. Bien au contraire, étant conscient de ce que je peux lui confier et de ce dont je dois conserver le contrôle, je risque de faire de véritables prouesses avec l’IA. La question de savoir si elle sera ou non profitable à l’humain dépend ainsi de notre positionnement devant elle : 

 

-  Soit, nous choisissons de rester dans l’ignorance ou l’incompréhension engendrée par la mystification entretenue par l’oxymore « Intelligence Artificielle », et nous deviendrons esclaves de ceux qui financent, nourrissent et manipulent l’I.A. en vue d’un contrôle.

 

-  Soit, nous choisissons de nous éveiller à la véritable nature de l’humain et de la réalité et nous parviendrons alors à remettre l’I.A. à sa bonne place d’esclave, pour ne jamais lui déléguer la moindre de nos décisions, mais la laisser nous instruire de la meilleure des façons possibles, via le multivers de réponses possibles et contradictoires dont elle dispose.

 

En conclusion je vous propose de méditer cette phrase de Kant dans « Critique de la raison pure » : 

 

 "L'intelligence d'un individu se mesure à la quantité d'incertitudes qu'il est capable de supporter ".»

Philippe Guillemant


Philippe Guillemant est un ingénieur physicien français diplomé de l'Ecole Centrale Paris et de l'Institut de Physique du Globe. Il est Docteur en Physique et Habilité à Diriger des Recherches. Il exerce son activité au CNRS (UMR 7343, laboratoire IUSTI de Polytech' Marseille) où il est Ingénieur de Recherche Hors Classe.  Spécialiste d'intelligence artificielle, ses travaux ont débouché sur la création de deux entreprises innovantes licenciées par le CNRS: Synapsys et Uratek, qui lui ont valu plusieurs distinctions dont le Cristal du CNRS.Il mène aujourd'hui une recherche fondamentale en physique de l'information.Il est l'auteur de la théorie de la double causalité (ou de l'espace-temps flexible), un modèle de création de la réalité fondé sur le libre arbitre via la rétrocausalité, présenté dans ses cinq livres "La Route du Temps" (Le Temps Présent, 2010 & 2014), "La Physique de la Conscience" (Trédaniel, 2015), "Le Pic de l'Esprit" (Trédaniel, 2017), "Le grand virage de l'humanité" (Trédaniel, 2021 & 2023) et "La physique du futur lumineux" (Trédaniel, 2023), mais aussi synthétisé et mis en scène dans le film documentaire de Jean-Yves Bilien "La Route de la Conscience" (Big Bang Boum films, 2015). Ce modèle conduit, entre autres choses, à une explication rationnelle de la synchronicité qui débouche sur un véritable « pont » entre la Science et la Spiritualité.


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