Juifs, chrétiens et musulmans: l'Espagne médiévale ne fut pas l'éden multiculturel qu'on croit
Professeur de littérature arabe et historien, Serafin Fanjul vient de publier une somme magistrale, Al-Andalus. L’invention d’un mythe (L’Artilleur, 2017). En développant une réflexion poussée sur l’identité nationale espagnole, il bat en brèche le mythe d’un paradis multiculturel mis en place par les huit siècles de domination musulmane. Loin d’une symbiose entre chrétiens, juifs et musulmans, Al-Andalus formait une société foncièrement inégalitaire, guerroyant contre les royaumes chrétiens du Nord, soumettant les minorités en son sein. Entretien (2/2)
Causeur. Dans votre essai Al-Andalus. L’invention d’un mythe(L’Artilleur, 2017), vous déconstruisez l’image idyllique de l’Espagne musulmane que certains intellectuels espagnols ont construite a posteriori. En comparant certaines périodes d’Al-Andalus à l’Afrique du Sud sous l’Apartheid, ne commettez-vous pas un anachronisme ?
Serafin Fanjul. Je n’établis pas un parallèle entre al-Andalus et l’apartheid sud-africain, je dis seulement qu’il y a une certaine similitude entre les deux. Et en vérité, cette similitude existe en raison de la séparation des communautés religieuses et raciales, des droits très supérieurs accordés aux musulmans et au-contraire des statuts inférieurs qu’avaient les membres des deux autres communautés. Il y avait aussi entre les musulmans des différences de degré de noblesse et de prééminence selon leur appartenance au groupe des berbères, des muladis (les chrétiens d’origine hispanique convertis à l’islam), des arabes « baladis » (les premiers à avoir pénétré dans la péninsule, en 711) et des arabes commandés par Baldj, arrivés en 740.
Dans al-Andalus, les personnes n’avaient de valeur et n’étaient des sujets de droit qu’en tant que membres d’une communauté et non pas en tant qu’individus. La pierre de touche était évidemment les mariages mixtes. Il était impossible pour une musulmane de se marier avec un chrétien ou un juif, et il était même difficile pour une femme « arabe d’origine » de se marier avec un muladi (un chrétien converti à l’islam) en vertu du concept de Kafa’a (proportionnalité), et dans la mesure ou celle-ci était considérée comme ayant un sang de niveau supérieur. Quand la domination politique et militaire a été inversée et que les musulmans sont devenus minoritaires, la situation a été maintenue mais cette fois au détriment de ces derniers.
Les textes écrits dans al-Andalus abondent en allusions discriminatoires et insultantes contre les chrétiens et les juifs. Ces derniers se sont matérialisées, pour ne citer que quelques exemples, par la persécution antichrétienne du IXe siècle à Cordoue, par le pogrom de 1066 à Grenade, par les déportations de juifs au Maroc au XIIe siècle, ou par les fuites massives de chrétiens et de juifs vers l’Espagne chrétienne dès le IXe siècle.
Vous décrivez un choc des civilisations et d’un état de guerre quasi-permanents entre chrétiens, juifs et musulmans…
La première fois que j’ai lu l’expression « choc des civilisations » ce n’est pas sous la plume d’Huntington, mais dans l’œuvre majeure de Fernand Braudel La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II, dont la publication remonte à 1949. Je crois interpréter correctement Braudel en affirmant pour ma part, en accord avec lui, que la langue nous égare en suggérant derrière le syntagme « choc des civilisations » l’idée de grandes confrontations guerrières. Il ne s’agit pas du tout de cela, mais plutôt de confrontations quotidiennes à petite échelle, réitératives, dans la vie courante, entre des cosmogonies différentes, des notions de base, des conceptions du monde dissemblables, des morales civiques ou sexuelles, des concepts politiques élémentaires, mais qui sont déterminants dans la relation des êtres humains avec le pouvoir : la soumission totale ou l’exercice de droits et la conscience de posséder des droits. Et cela sans entrer dans des questions plus concrètes comme la position de la femme ou celle des minorités religieuses, qui heureusement ont été depuis longtemps dépassées en Europe, alors que dans les pays musulmans elles demeurent intactes ou suscitent des convulsions graves lorsqu’elles sont débattues.
Je n’ai jamais écrit qu’il y avait un état de guerre permanent dans la péninsule ibérique médiévale entre deux blocs antagoniques et irréductibles. Et cela parce que je sais parfaitement que cela n’a pas été le cas jusqu’à ce que la Reconquête se consolide comme grand projet national au XIIe et XIIIe siècles. Je sais aussi, bien sûr, qu’il y a encore eu par la suite des alliances croisées avec des royaumes de taïfas musulmans, des interventions de troupes chrétiennes (même franques) ou musulmanes contre des princes chrétiens comme cela avait été le cas depuis le IXe siècle.
Le monde d’Averroès et Maimonide était-il si apocalyptique ?
Je ne crois pas qu’il soit très heureux de citer Averroès et Maïmonide comme deux exemples de liberté de pensée et de confraternité des communautés dans al-Andalus. Averroès était un néoplatonicien qui a été persécuté en tant que libre penseur par les Almohades. Quant au juif Maïmonide, il a été obligé de s’islamiser. Exilé au Maroc avec sa famille, il est allé ensuite en Égypte où il est retourné au judaïsme. Découvert et dénoncé par un habitant d’al-Andalus, il a été accusé d’apostasie et n’a pu finalement sauver sa vie que grâce à l’intervention du cadi Ayyad. Maïmonide expose bien sa position et son état d’esprit à l’égard des chrétiens et des musulmans dans son Épitre au Yémen.
Comment en arrivez-vous à justifier politiquement l’expulsion des juifs et des morisques (maures convertis au christianisme) de l’Espagne chrétienne ?
J’essaie seulement d’expliquer ces événements. Nous ne pouvons pas nous limiter à voir les événements du passé comme bons ou mauvais, alors qu’ils sont tout simplement irréversibles. La seule chose que nous puissions faire, c’est de nous en rapprocher le plus honnêtement possible pour essayer de les comprendre. Et dans le cas ou notre bonne foi et notre volonté régénératrice sont sincères, il nous faut essayer de ne pas les répéter.
C’est malheureusement toute l’Europe médiévale qui s’est appliquée à marginaliser et persécuter les juifs, avec de fréquents massacres et des mises à sac de quartiers juifs. Dans l’Espagne chrétienne, ce mouvement s’est produit plus tard. Si en 1212 les troupes castillanes d’Alphonse VIII ont protégé les juifs de Tolède contre les francs venus à cette occasion, en revanche, en 1348 et 1391, la situation était radicalement différente. Il y a eu alors une grande quantité de morts, d’exactions et de conversions forcées. Les juifs convertis au christianisme et ceux qui avaient maintenu leur foi, après les tentatives de conversion massive des années 1408-1415, ont cependant coexisté tout au long du XVe siècle. Au début, les Rois catholiques ont essayé de faire en sorte que les juifs et les mudéjares (musulmans) demeurent sur les lieux où ils vivaient et conservent leurs fonctions. Ils dépendaient directement du roi, payaient un impôt spécial de capitation et recevaient en échange une protection face a la société, mais toujours avec l’idée qu’à long terme on parviendrait à les convertir. Au XIIe et XIIIe siècles les communautés juives de l’Espagne chrétienne avaient augmenté considérablement alors que celles d’al-Andalus en étaient venues à disparaitre en raison de l’action des Almohades. A la même époque, la persécution des juifs redoublait en Europe. Cette attitude générale a fini par atteindre l’Espagne, stimulée par le fait que quelques juifs se livraient à l’usure et participaient au recouvrement des impôts, motifs qui irritaient les populations exploitées les plus pauvres et les incitaient à des réactions aussi brutales que totalement injustes. Jean Ier, en 1390, et Isabelle Ière, en 1477, avaient dû freiner les ardeurs belliqueuses des membres les plus exaltés du clergé.
Quelle était la situation des sujets juifs du royaume catholique de Castille ?
À la veille de l’expulsion de 1492, il y avait environ cent mille juifs dans la couronne de Castille et une vingtaine de mille en Aragon. Une minorité était riche, mais la majorité ne l’était pas (il s’agissait d’agriculteurs, d’éleveurs, d’horticulteurs, d’artisans du textile, du cuir et des métaux). La protection dans les terres des seigneurs de la noblesse était plus directe et plus efficace que celle du domaine royal. Les juifs y exerçaient des professions libérales comme la médecine en dépit des interdits. Parmi les juifs proches des Rois catholiques il y avait notamment Abraham Seneor, grand rabbin de Castille, Mayr Melamed, Isaac Abravanel, Abraham et Vidal Bienveniste. L’attitude des Rois catholiques n’était pas antijuive mais elle ne contribua pas non plus à éliminer l’hostilité populaire ni à contredire les arguments doctrinaux contre les juifs. Le plus grand connaisseur actuel de l’Espagne des Rois catholiques, Miguel Ángel Ladero Quesada, écarte les motifs économiques pour expliquer l’expulsion (qui était en fait plutôt préjudiciable pour les revenus de la Couronne). Il l’attribue plutôt à la volonté de résoudre le problème des convertis judaïsant, problème qui avait déjà justifié l’établissement de la nouvelle inquisition en 1478. On croyait alors que les juifs, par leur seule présence et en raison des liens familiaux qui les unissaient avec de nombreux convertis, contribuaient à empêcher l’assimilation ou l’absorption. D’autre part, comme les juifs n’étaient pas chrétiens, ils ne pouvaient pas faire l’objet d’enquêtes de la part de l’Inquisition. Le climat d’euphorie de la chrétienté triomphante après la prise de Grenade en 1492, aida les inquisiteurs à convaincre les Rois catholiques de la nécessité de l’expulsion. D’autant qu’à cette époque de plein affermissement du pouvoir royal, une idée se répandait de plus en plus: celle selon laquelle seule l’homogénéité de la foi pouvait garantir la cohésion du corps social, indispensable au bon fonctionnement de la monarchie. Nous savons aujourd’hui que ces idées étaient injustes et erronées, mais elles avaient alors cours dans toute l’Europe. Pour s’en convaincre, il suffit de rappeler l’antisémitisme féroce de Luther, la persécution des huguenots, des protestants en Espagne, en Italie et en France, ou des catholiques dans les différents pays d’Europe du nord au cours des siècles suivants.
Quant aux musulmans, je crois savoir qu’ils n’ont pas été épargnés par l’Espagne catholique…
La politique de la Couronne envers les musulmans a été erratique et souvent contradictoire. Les mudéjares (musulmans sous la domination des chrétiens) avaient subsisté depuis le XIIIe siècle bien qu’en nombre décroissant. L’expulsion comme châtiment pour rébellion (1264) à Niebla et Murcie, l’exil volontaire pour ne pas être soumis au pouvoir chrétien et l’attraction qu’exerçait le royaume de Grenade, avaient finalement vidé l’Andalousie occidentale de ses musulmans. Après la prise de Grenade, les mudéjares ont été autorisés à émigrer ou à rester en conservant leur religion, mais en 1498 les pressions pour qu’ils se convertissent ont été tellement fortes qu’elles ont provoqué la rébellion des Alpujarras (1499-1502) avec pour conséquence le décret de baptême forcé ou l’expulsion. La fuite volontaire et clandestine de morisques s’est ensuite accrue en raison des fatwas et des exhortations des jurisconsultes musulmans (al-Wansharisi, ibn Yuma’a) qui condamnaient la permanence en territoire chrétien pour ne pas s’exposer au danger de perdre la foi et de finir christianisé. En 1526, une nouvelle rébellion de morisques (crypto-musulmans officiellement chrétiens) a éclaté dans la Sierra d’Espadan et l’explosion finale, le grand soulèvement de Grenade, Almeria et Malaga, s’est produit en 1568. Dès le début du XVIe siècle, il a été interdit aux morisques de quitter l’Espagne en raison des effets négatifs que cela pouvait avoir sur les caisses de la Couronne. Il leur a été également interdit de s’approcher des côtes à moins de dix kilomètres pour éviter leur fuite ou les empêcher de collaborer activement avec les pirates barbaresques et turcs qui dévastaient le littoral espagnol.
Et la population catholique, était-elle aussi hostile que la Couronne aux ex-musulmans devenus morisques ?
L’hostilité de la population chrétienne à l’égard des morisques n’a fait qu’augmenter au cours des événements. Elle a culminé avec la prise de conscience de leur refus de s’intégrer dans la société majoritaire. A nouveau, le peuple et le bas clergé ont exacerbé leur antipathie pour les morisques, ce qui en retour a renforcé la haine et le rejet par ces derniers de la majorité dominante, un cercle vicieux qui ne pouvait être rompu que par le maillon le plus faible, en dépit des opinions contraires des autorités politiques les plus hautes, de la noblesse de certaines régions (qui avait des travailleurs morisques comme en Aragon et à Valence), voire du roi lui-même. Entre 1609 et 1614, environ trois cent mille morisques qui ont quitté l’Espagne surtout en direction du nord de l’Afrique.
Renversement de Milosevic en Yougoslavie en l'an 2000.
Révolution des Roses en Géorgie en 2003.
Révolution orange en Ukraine en 2004.
Révolution blanche en Biélorussie en 2006 (échec).
Indépendance du Kosovo en 2008.
Révolution verte en Iran en 2009 (échoué).
Printemps arabe au Maghreb et au Moyen-Orient de 2010 à 2013 et déclenchement de la guerre en Syrie qui dure jusqu'à aujourd'hui.
Euromaidan en Ukraine en 2014 provoquant le renversement du président Ianoukovitch dans le but de sortir l'Ukraine de la zone d'influence de la Russie et qui a déclenché une guerre dans l'est de l'Ukraine dans la région du Donbass qui se poursuit encore.
Dans le contexte ce qui se passe en Catalogne ces jours-ci et particulièrement les événements du 1er Octobre, en raison du référendum illégal organisé par l'élite séparatiste catalane, on peut voir certaines similitudes entre ces événements et les diverses révolutions de couleur mentionnées ci-dessus.
Les méthodes de financement étrangers, le processus de "manifestation non-violente" selon la méthode Gene Sharp (la plupart des méthodes de Gene Sharp utilisés par les séparatistes ont été promues et certaines du fait par du gouvernement catalan lui-même, une des œuvres majeures de Sharp, De la dictature à la démocratie est disponible en téléchargement sur le site officiel de la Generalitat de Catalogne) et le soutien des médias, ONG et Think Tanks internationaux : CIDOB [Barcelona Center for International Affairs], DIPLOCAT [Conseil pour la diplomatie publique de la Catalogne], Thinkthank German Marshall Fund, Open Society Foundations de George Soros, Guillermo Fernández, Centre d'études stratégiques de La Haye… Voilà les trois facteurs principaux qui se reproduisent dans toutes les révolutions de couleur et qui se retrouvent également dans les manifestations en faveur de la sécession, qui ont lieu ces jours-ci en Catalogne.
Néanmoins vu la situation actuelle en Catalogne et ce qui s'y passe, on pourrait se demander à qui bénéficiera une révolution de couleur.
Si l'on considère l'évasion des banques et des entreprises catalanes vers une autre partie du territoire espagnol qui a eu lieu quelques jours après la conclusion du référendum, nous pouvons conclure que dans le cas où la Catalogne devient indépendante, sa seule issue financièrement serait de devenir un paradis fiscal où les entreprises sont taxées à un pourcentage très faible et, éventuellement, accompagné de la privatisation des entreprises publiques pour le reste.
Si l' on ajoute l'intérêt réciproque montré entre l' OTAN et l'oligarchie séparatiste catalane, il semble que la Catalogne indépendante resterait dans l' OTAN et en l'absence d'une armée propre sera forcée de permettre la mise en place d'une base de l' OTAN en Catalogne, qui servira les intérêts géostratégiques de cette organisation en Méditerranée.
Sixte Henri de Bourbon Parme : il faut se préparer à défendre l'unité de l'Espagne, "des Espagnes"
Déclaration de S.A.R. Sixte Henri de Bourbon Parme sur la question de l’indépendance catalane :
"Aux carlistes et à tous les Espagnols de bonne volonté, L'unité de l'Espagne doit être maintenue à tout prix !
Deux jours après le référendum séparatiste, organisé en Catalogne par un gouvernement autonome séditieux et illégitime, nous ne savons toujours pas si le gouvernement de fait d'Espagne va remplir son devoir et empêcher cette célébration.
L'heure est grave.
La propagande séparatiste déclenchée à l'étranger n'a pas été contrecarrée par les moyens dont l'Etat dispose.
Le gouvernement de Mariano Rajoy semble poursuivre la politique suicidaire d'ignorance de l'authentique tradition catalane, et de concessions au nationalisme qui, depuis plusieurs décennies, préparent la situation explosive qui d'ores et déjà est en cours. La Catalogne est une partie fondamentale et inséparable de la Couronne d'Aragon, partie intégrante de la monarchie espagnole. C'est une région éminemment espagnole.
Tout argument en sens contraire ignore la réalité et contredit l'histoire.
Il est douloureux de voir comment la région qui, depuis le XVIIIeme siècle, s'est révélée la plus contre-révolutionnaire et la plus antijacobine d'Espagne est aujourd'hui largement contrôlée par les révolutionnaires les plus extrémistes et par les jacobins les plus radicaux. De fait le nationalisme catalan est aussi jacobin, sinon plus, que le centralisme libéral ou autoritaire, et pour cette raison même il est anti-catalan.
Mon grand-oncle, Carlos VII, a restauré en 1872 la plénitude des privilèges de la Couronne d'Aragon, et notamment ceux de la Principauté de Catalogne.
La conspiration libérale, soutenue par les loges et par les puissances étrangères, empêcha la victoire du roi légitime d'Espagne, qui aurait évité les désastres ultérieurs.
Aujourd'hui, au-delà de toute autre revendication, il faut se préparer à défendre l'unité de l'Espagne, "des Espagnes", comme l'ont toujours fait les carlistes quand le pays était en danger.
Je demande aux carlistes et à tous les Espagnols de bonne volonté de collaborer, si nécessaire, avec les forces de sécurité et les forces armées pour arrêter la tentative séparatiste et pour préserver l'unité et l'indépendance de la Patrie, quelle que soit l'attitude finalement adoptée par le gouvernement actuel. Gardons présent à l'esprit le serment de nombre d'entre nous - le mien aussi, en tant que chevalier légionnaire - devant le drapeau rouge et jaune.
En exil, le 29 septembre 2017, Sixte Henri de Bourbon-Parme"
On ne répétera jamais assez à quel point cette société idéale de l'Andalousie médiévale dont on nous rebat tant les oreilles, où auraient déjà régné les Lumières avant l'heure et une si enviable tolérance universelle, donc un prétendu modèle pour nos sociétés contemporaines, n'est qu'un mythe d'autant plus dangereux qu'il est constamment relayé sous forme de matraquage par toutes sortes d'instances politiques, religieuses et médiatiques au point que c'est devenu une sorte de dogme indubitable. Il faut faire savoir que la vie des dhimmi, chrétiens et juifs, était majoritairement pour le moins difficile si bien qu'il s'en est suivi une résistance réelle dont on ne parle jamais, comme si le peuple avait subi avec délices cet asservissement. Il est plus que temps aujourd'hui, quand des groupes djihadistes du Maghreb comme du Moyen-Orient prêchent la reconquête de ce qu'ils considèrent comme leur appartenant de droit, de connaître la réalité des faits et de ce que nous promettent ces fanatiques nostalgiques de leur pouvoir totalitaire oppressif passé, et qu'ils cherchent, déjà sur place, en Europe, à imposer...
Le drame des chrétiens mozarabes
"Dès la conquête, Juifs et Chrétiens ont été soumis à la dhimma, un impôt spécial assorti de mesures vexatoires et de brutalités ce qui entretint les ferments de résistance.
En réalité, les libertés dont peuvent jouir les Chrétiens
demeurent très limitées. Les dhimmi doivent respecter très scrupuleusement
le pacte conclu avec les vainqueurs.
Si l'un d'entre eux ne s'acquitte pas du
tribut, il peut être réduit en esclavage ou puni de mort. Le pouvoir musulman
peut décréter en ce domaine la responsabilité collective de ses sujets chrétiens
et supprimer les privilèges accordés à toute la communauté en cas de
défaillance de l'un de ses membres.
Les Chrétiens doivent également se garder
de toute action pouvant être interprétée comme une provocation par les
Musulmans. Ils doivent dissimuler les croix, faire en sorte que, dans les
campagnes, les Musulmans ne puissent voir les porcs qu'ils élèvent, car cela
est considéré comme une injure faite au Prophète. Quand des troubles éclatent,
les communautés chrétiennes en font souvent les frais, comme ce fut le cas lors
de la révolte de la garnison arabe de Séville en 891.
La sécurité des musta'rib
(ceux «qui vivent comme les Arabes») est ainsi, parfois, un vain mot. Les
dhimmi se voient interdire le port d'une arme; ils ne peuvent monter à cheval
et doivent se contenter de mulets ou d'ânes sous peine du fouet et de la
prison. Diverses obligations vestimentaires doivent permettre de distinguer les
Croyants des «protégés». Ceux-ci doivent s'effacer quand ils croisent dans la
rue un fidèle de Mahomet. Leurs maisons doivent être moins hautes que celles de
leurs voisins musulmans, ils doivent l'hospitalité à tout Croyant qui la
demande et le paiement de la capitation les contraint à se prêter à des rituels
humiliants, les dhimmi devant se prosterner devant le percepteur, qui leur
assène parfois un soufflet avant de les repousser violemment.
Les Chrétiens ont
conservé la plupart de leurs églises, mais il leur est interdit d'en construire
de nouvelles. Le son des cloches est tout juste toléré, à condition d'être le
plus discret possible. Les cortèges de funérailles doivent être silencieux, les
croix sont confinées à l'intérieur des églises et des maisons privées. Les
processions et les cierges sont interdits quant aux cimetières des fidèles des
diverses religions, ils doivent être rigoureusement séparés.
Tout Musulman abjurant sa religion pour se convertir à celle
du Christ est condamné à mort. La même peine est appliquée à tout Chrétien
mettant en cause les croyances transmises par le Coran et la Sunna.
Les discriminations
judiciaires font que, pour un crime identique, Musulmans et dhimmi encourent
des peines différentes et les indemnités dues aux familles varient du simple au
double, voire au triple, selon la confession de la victime et du coupable.
Les autorités musulmanes respectent généralement les
conditions fixées lors de la conclusion du pacte de soumission des dhimmi car
elles ont intérêt à ménager une population procurant une ressource fiscale
précieuse mais, à l'inverse, le peuple des «vrais Croyants», soumis à
l'influence des prédicateurs malékites locaux, se montre beaucoup plus hostile,
et les muwalladun, les nouveaux convertis, sont parfois les plus intransigeants
vis-à-vis de leurs anciens coreligionnaires.
Les discriminations et vexations
subies quotidiennement vont contribuer au développement d'une volonté de
résistance. Celle-ci est d'abord spirituelle et s'exprime à travers le recours
au martyre. Le moine Perfectus, qui a dénoncé Mahomet comme un imposteur, est ainsi
exécuté mais la mort rapide de celui contre qui il a lancé une malédiction, contribue
à entretenir un climat d'exaltation religieuse qui explique, au milieu du IXe
siècle, l'épisode des «martyrs de Cordoue ». Le mouvement qui pousse alors de nombreux Chrétiens au martyre dure
ainsi pendant près d'une dizaine d'années, jusqu’à l'exécution de Saint Euloge, égorgé en 859.
La résistance n'est pas seulement spirituelle et l'histoire
d'AI-Andalus est ponctuée de nombreuses révoltes. Outre celles des Berbères, de
certains clans arabes associés à la conquête ou des muwalladun fraichement convertis, il faut compter aussi
avec celles des Mozarabes. Tolède se soulève ainsi en 852 et peut bénéficier
pendant trois quarts de siècle d'une large autonomie. Mérida entre également à
plusieurs reprises en rébellion au cours du IXesiècle. La dissidence la mieux
connue et la plus importante par son ampleur et sa durée est celle d'Omar ibn
Hafsun, qui persiste de 879 à 927. Le chef rebelle installe une base
inexpugnable à Bobastro, véritable nid d'aigle de la Serrania de Rondo et lance
à partir de là de multiples raids jusqu'à Séville, Cordoue, Grenade et Jaén, en
regroupant sous son autorité muwaladun mécontents et Mozarabes. Lui-même
converti, il se rallie au christianisme en 898 et, après sa mort, son fils
poursuit pendant plusieurs années la résistance. La révolte armée demeure
cependant le plus souvent vouée à l'échec et c'est le choix de l'exil que font
certains. Ils partent vers la marche d'Espagne, la future Catalogne, établie
par les Carolingiens au début du IXe siècle, ou vers le nord-ouest de la
péninsule, vers le réduit asturien où se développe un petit royaume appelé à
constituer l'un des premiers noyaux de la reconquête à venir. En 872, des
réfugiés fondent ainsi le monastère de Sahagùn qui sera bientôt l'un des grands
centres de rayonnement ibérique.
Au fil du temps, l'arrivée de ces Mozarabes dans les
royaumes chrétiens du nord contribue au développement d'un idéal de lutte
contre l'Islam, perçu comme la Bête qui orne les Commentaires que le moine
Beatus de Liébana fait alors de l'Apocalypsede Saint-Jean. Le pouvoir musulman veille également à l'éloignement des
populations insoumises et quelques indices laissent supposer l'existence de
déportations massives vers l'Afrique du Nord, un procédé généralisé par les
Almoravides au cours du XIIe siècle.
Les spécialistes ne sont pas
pleinement d'accord à propos de l'évolution respective des communautés
chrétienne et musulmane, mais il semble admis que l'équilibre qui s'était
maintenu, quant au volume de la population, en faveur des Mozarabes jusqu'au
début du Xe siècle se trouve inversé à la fin de celui-ci. En 1126 cependant,
les Mozarabes de Grenade se révolteront contre les nouveaux maîtres almoravides
de l'Espagne musulmane et appelleront à leur secours le roi d'Aragon, mais
celui-ci ne remporte qu'une victoire sans lendemain et ne peut s'emparer de la
ville. Les rebelles sont alors contraints de se replier avec Alphonse le
Batailleur jusqu'à la vallée de l'Èbre où ils vont contribuer au peuplement
chrétien d'une région restée très longtemps musulmane et où les Mudejares
devenus les Morisques demeureront nombreux jusqu’au début du XVIIe siècle" (extrait d'un article de Jean Kappel)
La colonisation française a duré 132 ans, l'occupation musulmane en Espagne a duré 781ans.
Dans le premier cas on ne cesse de rabâcher les méfaits de la présence française et de glorifier la juste lutte du peuple "algérien" pour son indépendance, cependant que de l'autre on ne cesse de vanter les mérites de la domination musulmane sur l'Espagne et de considérer la 'Reconquista' comme illégitime... La 'Reconquista' n'aurait donc pas été la juste lutte d'un peuple dominé pour retrouver sa liberté et son identité et le droit d’un peuple à disposer de lui-même ?
Le peuple espagnol aurait tiré plus de bénéfices que d'inconvénients à subir la loi islamique ? Quel est ce mythe ? Par qui est-il entretenu ? Quels intérêts sert-il ?
Lisez l'interview de Serafín Fanjul, l'un des plus prestigieux arabistes espagnols. Ancien
directeur du Centre culturel hispanique du Caire, professeur de
littérature arabe à l’Université autonome de Madrid, membre de
l’Académie Royale d’Histoire depuis 2011 et qui a consacré sa vie à
l’étude de l’Islam comme phénomène religieux, sociologique, économique
et politique.
Deux poids, deux mesures.
De la part de musulmans nostalgiques de leur empire perdu, on peut comprendre tout à fait un discours valorisant la domination passée... sauf que la "civilisation" musulmane contemporaine ne peut en rien prétendre apporter au monde occidental ni de nouvelles connaissances scientifiques, techniques ou philosophiques, ni le raffinement oriental (réservé aux princes tout de même) du mode de vie d'une certaine époque, ni la moindre créativité artistique... Ce n'est pas l'édification de mosquées visibles par tous, de plus en plus grades et nombreuses en Europe, l'installation et la prolifération volontaristes (semble-t-il) de population dans les grandes métropoles jusque dans les campagnes les plus reculées, le port ostentatoire de vêtements associés à la culture islamique, l'imposition croissante de coutumes alimentaires religieuses et d'une division sexuelle de la société tout cela dans un esprit revanchard stratégique évident qui peut redorer un blason perdu il y a longtemps... Mais ceci peut expliquer cela.
Du côté européen c'est incompréhensible...
On ne peut comprendre cette cécité volontaire sur le passé qui veut justifier et légitimer la force guerrière pour soumettre et dominer un peuple, lui imposer ses valeurs et son mode d'organisation sociale, ses mœurs.
De la même façon il est absolument sidérant que des femmes européennes valorisent d'une quelconque manière une religion et un mode de vie qui ne visent qu'à les assujettir à un homme, faute de quoi n'appartenant à personne elles appartiennent à tous et chaque homme peut en faire ce que bon lui semble car c'est ainsi que c'est dans les têtes et dans la réalité ! Car c'est cela la fonction du voile de tout temps - (malgré tous les détournements possibles de la part des femmes) : le marquage public d'une clôture, l'emballage d'un objet, pour en signaler, en l'enfermant dans un vêtement hermétique, la propriété exclusive. Le voile par conséquent signale publiquement celle qui appartient déjà à un homme, en lui opposant implicitement celle qui n'étant pas voilée, et s'offrant ainsi aux yeux désirants de tous les mâles, peut être légitimement considérée comme s'offrant à tous donc comme une prostituée disponible en puissance.
L'influence de cette mentalité exogène est déjà notable dans le métissage dont on nous vante tant les mérites : dans la façon grossière voire ordurière, dont les jeunes gens mâles pensent pouvoir désormais s'adresser aux jeunes filles qu'ils croisent dans les rues des villes. Dans les bagarres entre filles et garçons dans les établissements scolaires où les garçons n'hésitent plus à frapper avec leurs poings voire leurs pieds les filles que les reliquats de notre culture médiévale courtoise incitaient plutôt à protéger naguère.
De quelle cohabitation peut-on rêver ? Selon quel équilibre ? De quelle mutuelle et réciproque tolérance parle-t-on ?
Dans les pays majoritairement musulmans, la condition du chrétien est de plus en plus "problématique" et les persécutions croissantes qui semblent encore plus violentes depuis la pseudo démocratisation de ces pays ne laissent guère d'autre alternative que celle du martyre ou de l'exil. En fait tout le monde (?) voit bien désormais que les mouvements d'"opposition" et de "libération" du "printemps arabe" tant vantés par l'occident, sont pour la plupart monopolisés par des mouvements islamistes violents et sectaires qui ont enfin trouvé le moyen de s’"exprimer" en effet - et surtout par les armes - c'est à dire d'opprimer librement les plus faibles jusqu'à leur élimination physique avec la volonté même d'éradiquer leur mémoire de leur propre terre natale depuis des siècles pourtant...
Eu égard à la réalité de cette mythique tolérance, que vaut la diplomatie de nos hiérarques orthodoxes, suivant encore une fois l'exemple papal, quand ils offrent des Corans de valeur aux représentants officiels de l'Islam dans leur pays - descendants de leurs persécuteurs - alors que par ailleurs ils convoquent la police qui intervient sans ménagement contre des zélotes parfaitement orthodoxes au demeurant, irritants certes par leur entêtement à ne pas vouloir commémorer leur supérieur hiérarchique lors de leurs offices mais cantonnés dans une péninsule lointaine qui, pour être sacrée, reste largement en dehors de l'actualité...?
Est-ce que l'école de théologie de Halki est réouverte ?
Est-ce que cela empêche les projets de transformation d'église multiséculaires en mosquées ?
L'on n'a guère vu que cela mettait un frein définitif aux persécutions des Chrétiens au Moyen Orient ni en Turquie ni ailleurs. Cela semble aussi vain que le refuge que les uniates pensaient trouver jadis auprès de la Papauté...
D'autre part à quoi sert-il que les Arabes chrétiens aient participé de toutes leurs forces activement à la libération de leur pays du joug étranger ?
A quoi sert-il qu'ils aient travaillé de toute leur intelligence pour servir au développement de leur pays bien aimé ?
A quoi cela sert-il qu'ils aient sincèrement et avec conviction défendu et magnifié la culture arabe dont ils se se sentent entièrement partie prenante tout en se revendiquant légitimement chrétiens. (c'est à dire d'une foi plus ancienne que l'islam) ?
Mais cela ne rebute pas les touristes qui continuent d'affluer pour visiter l’Égypte des pyramides (tellement mystérieuse et fascinante cette Egypte, n'est-ce pas ?) ; les recherches archéologiques font de nouvelles découvertes tous les ans pour l'intérêt de tous les amateurs du monde entier, les romans historiques à thème pharaonique prolifèrent et se vendent comme des petits pains... mais les Coptes, qui sont les vivants descendants de cette culture antique, sont toujours persécutés... et très peu d'occidentaux s'intéressent à leur situation de plus en plus difficile. Certes ils ne pratiquent plus la religion des pharaons mais ils ont dans leur héritage ethnique, linguistique et artistique beaucoup à transmettre spirituellement au monde entier. Ils ne sont pas que des trieurs de décharges publiques...
L'Apartheid à leur égard n'est dénoncé par personne. Pas de boycott comme naguère vis à vis de l'Afrique du sud. Le mépris, les insultes, les persécutions, les conversions forcées, les viols, les massacres qui font partie de la routine et qui s'exacerbent quand les conditions socio-politiques se dégradent dans n'importe quel sens, suscitent moins d'indignation que l'enfermement pour deux ans de deux militantes athées après un happening "musical" dans une cathédrale....
Laissez un peu tomber la plongée et les pyramides !