Les lèvres mensongères font horreur à l'Éternel, tandis que ceux qui agissent avec fidélité lui sont agréables. Proverbes 12:22 «C'est ce qui sort de l'homme qui le rend impur. En effet, c'est de l’intérieur, c'est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, les adultères, l'immoralité sexuelle, les meurtres, les vols, la soif de posséder, les méchancetés, la fraude, la débauche, le regard envieux, la calomnie, l'orgueil, la folie. Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l'homme impur.» Marc 7:20-23 Un témoin fidèle ne ment pas, tandis qu’un faux témoin dit des mensonges. Proverbes 14:5 « Vous, vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement et il ne s'est pas tenu dans la vérité parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il profère le mensonge, il parle de son propre fond, car il est menteur et le père du mensonge. » Jean 8:44 Si les paroles distinguées ne conviennent pas à un fou, les paroles mensongères conviennent d’autant moins à un noble. Proverbes 17:7 « Écarte de ta bouche la fausseté, éloigne de tes lèvres les détours ! Proverbes 4:24 Craindre l'Éternel, c'est détester le mal. L'arrogance, l'orgueil, la voie du mal et la bouche perverse, voilà ce que je déteste. » Proverbes 8:13 « Pierre lui dit : «Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu aies menti au Saint-Esprit et gardé une partie du prix du champ? […] Comment as-tu pu former dans ton cœur un projet pareil? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.»Actes 5:3-4Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort.Apocalypse 21.8
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vendredi 31 août 2018

☦️ L'irréductibilité de l'Orthodoxie avec le christianisme occidental

SUR LE BLOG de CLAUDE



Extrait de L'INTERVIEW DE PÈRE GABRIEL BUNGE

[…] Au cours des siècles, une mentalité liturgique et spirituelle totalement différente s'est développée en Occident. Cela a eu des conséquences inévitables : Déjà au Moyen Âge, les iconostases disparaissaient peu à peu, les églises étaient construites sans égard pour l'orientation, le canon iconographique n'était pas suivi, et il n'y avait pas de vieux chants liturgiques. Ces faits sont bien connus des spécialistes de l'histoire de la liturgie et de l'art religieux.
La réforme liturgique initiée par le Concile Vatican II a intentionnellement placé un homme au centre. En conséquence, les offices catholiques ont commencé à ressembler de moins en moins à la Divine Liturgie orthodoxe et sont devenus de plus en plus semblables aux services des communautés protestantes. Ainsi, la sécularisation en Occident a conduit au développement d'une mentalité liturgique et spirituelle très différente de la mentalité orthodoxe, qui était essentiellement identique à la mentalité de l'époque des saints Pères.[…]


  1. Interview de Père Gabriel ( Bunge): L'ORTHODOXIE A-T-ELLE BESOIN D'ORDRES MONASTIQUES ? (1)
  2. Interview de Père Gabriel ( Bunge): L'ORTHODOXIE A-T-ELLE BESOIN D'ORDRES MONASTIQUES ? (2)
  3. Interview de Père Gabriel ( Bunge): L'ORTHODOXIE A-T-ELLE BESOIN D'ORDRES MONASTIQUES ? (3)
  4. Interview de Père Gabriel ( Bunge): L'ORTHODOXIE A-T-ELLE BESOIN D'ORDRES MONASTIQUES ? (4)
  5. Interview de Père Gabriel ( Bunge): L'ORTHODOXIE A-T-ELLE BESOIN D'ORDRES MONASTIQUES ? (5)
  6. Interview de Père Gabriel ( Bunge): L'ORTHODOXIE A-T-ELLE BESOIN D'ORDRES MONASTIQUES ? (6)


dimanche 19 novembre 2017

DE L’ORIENT À L’OCCIDENT orthodoxie et catholicisme par P. Placide Deseille

Aux Editions des Syrtes



« De l’Orient à l’Occident » de Père Placide Deseille

20,00€ TTC

Préface de Bernard Le Caro
  • Avant-propos
  • Étapes d'un pèlerinage : autobiographie du père Placide
  • Les étapes d'une évangélisation : de Jérusalem à la Gaule
  • L'inculturation du christianisme en Occident entre le IVe et le VII siècles
  • Aux sources du monachisme occidental : des Pères d'Égypte à saint Benoît de Nursie
  • Aux origines d'une divergence : saint Augustin et la théologie trinitaire
  • Histoire d'une déchirure : orthodoxie et catholicisme moderne
  • La spiritualité catholique romaine et la tradition orthodoxe
  • Dieu « sensible au cœur » selon Pascal et selon les Pères orientaux
  • Divergences et convergences entre la tradition orthodoxe et la tradition occidentale
  • La Révolution française, l'Europe et l’orthodoxie
  • Le Mont-Athos et l'Europe
  • La présence orthodoxe en Europe occidentale
  • Signification et rôle de la diaspora orthodoxe en Europe occidentale
  • Orthodoxie, uniatisme et œcuménisme
  • Points de vue orthodoxes sur l'unité des chrétiens
  • Être chrétien orthodoxe aujourd'hui
  • Conclusion : quelques exigences de la vie chrétienne

Père Placide 
Présentation de l’éditeur : 

« Si les divergences principales entre l’orthodoxie et les confessions occidentales sont aujourd’hui connues, les racines de celles-ci, ainsi que leurs implications sur la vie spirituelle ont été peu traitées en langue française. Peu de choses sont connues sur la période qui a précédé le schisme de 1054 et qui l’a préparé. C’est, entre autres, cette lacune que vient compléter l’ouvrage du père Placide, de façon positive et avec discernement, en cherchant « la confession et non la confrontation ». Dans cet esprit, il sait déceler également ce qui, en Occident, a gardé un parfum d’orthodoxie après le schisme. En même temps qu’une œuvre, ces pages retracent le parcours de l’archimandrite Placide Deseille. Ayant vécu depuis son adolescence dans un monastère cistercien et ayant étudié en profondeur les sources bibliques et patristiques, il est devenu orthodoxe au Mont Athos et porte en Occident, depuis plus de quarante ans, le témoignage de la tradition de l’Église des dix premiers siècles, toujours vivante dans l’orthodoxie. Comme le dit l’higoumène du monastère de Simonos Petras, il s’agit d’un « témoignage authentique de la vie orthodoxe et du monachisme athonite dans un environnement quasiment déchristianisé et dans une société en décomposition ». L’ouvrage part de l’Orient des premiers siècles pour arriver en Occident au XXIe siècle : des racines chrétiennes de la France avec une foi commune à l’Occident et à l’Orient, puis ses déviations, notamment au niveau de son repli sur l’augustinisme, pour arriver à la Révolution française. Mais ce livre ne se cantonne pas à l’histoire ancienne, abordant les problèmes actuels de l’Église orthodoxe et sa façon de les résoudre. La sincérité et la profondeur de la démarche du père Placide, sa connaissance approfondie de la tradition spirituelle et théologique occidentale, et son expérience de l’orthodoxie donnent à sa parole une autorité unique. L’archimandrite Placide (Deseille), né en 1926, entre à l’abbaye cistercienne de Bellefontaine en 1942 à l’âge de seize ans. Il fonde en 1966 avec d’autres moines un monastère de rite byzantin à Aubazine en Corrèze. En 1977, les moines décident de devenir orthodoxes et en février 1978, ils deviennent moines au Mont Athos. Rentré en France peu après, père Placide fonde le monastère Saint-Antoine-le-Grand, à Saint-Laurent-en-Royans (Drôme) dans le Vercors, et en devient l’higoumène. Dans son sillage naît le monastère de la Protection de la Mère de Dieu, plus connu aujourd’hui sous le nom de monastère de Solan. Il a enseigné à l’Institut Saint-Serge, et est également auteur et traducteur de plusieurs ouvrages sur la spiritualité et le monachisme orthodoxes. »

 Pour toutes les publications des Editions des Syrtes, voir le catalogue ICI


vendredi 27 octobre 2017

Pâques catholique et Pâques orthodoxe en Grèce vues par l'écrivain Hans Christian Andersen

Hans Christian Andersen (1805-1875) fut un auteur et poète danois prolifique, qui «introduisit l'idée de la fantasy dans les histoires pour enfants, préparant le terrain pour Lewis Carroll dans les années 1860. Et créant un monde distinct de jouets et d'animaux qui parlent pour enfants, il a eu un effet profond sur les classiques de l'enfance, tels que «Le vent dans les saules» et «Winnie l'ourson». (Hans Christian Andersen: La vie d'un conteur)


Voici un extrait des mémoires de voyage de Hans Christian Andersen, A Poet's Bazaar: A Journey to Greece, Turkey and Up the Danube, sur les festivités de Pâques en Grèce au XIXe siècle, plus précisément au début des années 1840.

La Pâque des catholiques en Italie, et particulièrement à Rome, est grandiose, fascinante; c'est un spectacle élevé de voir cette masse immense d'êtres tomber à genoux dans la Place Saint-Pierre, et recevoir une bénédiction. La fête de Pâques en Grèce ne peut pas montrer une telle magnificence, ses ressources sont trop petites; mais après avoir vu les deux, on arrive à la conviction qu'à Rome c'est une fête qui, dans sa gloire et sa splendeur, sort de l'Église pour le peuple ; mais en Grèce c'est une fête qui coule du cœur et des pensées du peuple, de leur vie même ; l'Église n'est qu'un maillon de la chaîne. Avant Pâques, il y a un jeûne long et rigoureux, religieusement observé, les paysans vivant presque entièrement de pain, d'oignon et d'eau.

Le journal athénien est apparu le vendredi saint avec une bordure noire, en souvenir de la mort du Christ : le titre de la vignette était un sarcophage avec un saule pleureur, et au-dessus il y avait un poème sur la Passion de Lutzos. La fête elle-même a commencé ce soir-là. Je suis allé à l'église principale ; elle était splendidement illuminée et complètement pleine: devant l'autel se tenait un cercueil de verre, attaché avec des plaques d'argent. Le cercueil contenait des roses fraîches destinées à représenter le Sauveur mort. Un étrange bourdonnement de voix de la communauté priante a sonné à travers la maison de Dieu! Des prêtres, vêtus de couleurs vives, et des évêques, allaient et venaient devant l'autel où ils lisaient les prières. A neuf heures du soir, la musique sacrée a commencé, et la procession est partie de l'église par la rue principale, jusqu'au palais. De ma fenêtre j'ai pu voir commodément la procession se déplaçant lentement ; c'était l'une des plus solennelles que j'aie jamais vues. C'était une nuit étoilée scintillante, si douce et si calme! Chaque spectateur aux balcons et fenêtres ouvertes se tenait avec une bougie allumée dans sa main. La musique nous montait de la rue, l'odeur de l'encens emplissait l'air. La musique funèbre provenait des groupes militaires comme si le peuple portait son roi dans sa tombe. Le cercueil contenant des roses rouges fraîches était entouré de prêtres ; au-dessus était accroché un long voile rouge de deuil tenu par les chefs d'état et les officiers supérieurs du royaume. Une foule de ces officiers, et puis la grande masse des gens, tous, comme je l'ai dit, avec des bougies allumées, fermaient la procession. Il y avait un calme, une tristesse ou une dévotion visible, qui agissaient sur tous les esprits. L'évêque a fait un court discours devant le palais où se tenaient le roi et la reine, puis le roi a embrassé le saint Évangile. Pendant toute la cérémonie, il y eut une sonnerie monotone de cloches, toujours deux coups, puis une courte pause.

Jour et nuit, l'église fut remplie de monde. Le roi, la reine et toute la cour étaient là à minuit avant le jour de Pâques: les prêtres priaient et pleuraient autour du cercueil fleuri; toute la communauté a prié en silence. L'horloge a sonné les douze heures et alors l'évêque avancé et a proclamé  : "Le Christ est ressuscité!"

"Le Christ est ressuscité!" a éclaté dans toutes les langues. Les tambours et les trompettes se sont fait entendre fortissimo ; la musique a joué les danses les plus animées! Tout le monde s'est jeté au cou, s'est embrassé et s'est écrié joyeusement: "Le Christ est ressuscité!" On a entendu ensuite des coups de feu à l'extérieur; des fusées s'élançaient dans l'air, des torches étaient allumées, des hommes et des jeunes gens, chacun avec une chandelle à la main, dansaient en une longue file à travers la ville. Les femmes ont allumé des feux, ont préparé des agneaux et les ont rôtis dans les rues. Les petits enfants, qui avaient tous de nouveaux fez et de nouvelles chaussures rouges, dansaient dans leurs chemises autour des feux, s'embrassaient, et s'exclamaient comme leurs parents: «Le Christ est ressuscité!» J'aurais pu accueillir chacun de ces enfants vers mon coeur et exulter avec eux. "Le Christ est ressuscité!" C'était touchant, beau et élevait l'âme.

On peut dire que tout était cérémonie; et on peut ajouter, certainement avec une certaine vérité, que les réjouissances exprimaient certes la satisfaction du peuple que le jeûne rigoureux soit terminé, et que maintenant ils puissent manger leur agneau et boire leur vin mais j'ose dire qu'il y avait quelque chose de plus ; c'était un véritable et sincère jubilé religieux. Le Christ était dans leurs pensées, comme sur leurs lèvres. « Le Christ est ressuscité! » C'était une assurance mutuelle d'un fait qui n'était pas vécu comm un événement du passé. Non, c'était comme s'il avait eu lieu cette nuit-là, et dans ce pays, c'était comme s'ils en avaient eu l'assurance par leur oreilles à ce moment-là, et pour la première fois.
Il y avait de la musique et de la danse partout dans la capitale, et dans chaque petite ville dans tout le royaume. Tout travail était suspendu, tout le monde ne pensait qu'au plaisir; il n'y avait que danse et joie, près du temple de Thésée et sous les colonnes de marbre de Zeus. La mandoline tintait, et les anciens se joignaient aux chants ; et dans la joie générale on entendait les mêmes paroles de bienvenue et d'adieu: « Le Christ est ressuscité! »
(version française de la source par Maxime le minime )

dimanche 27 août 2017

[3] Le schisme entre les Ultramontains et les Vieux-Catholiques


2. Les innovations occidentales au risque des Pères

Au sein de la théologie occidentale s’est déroulée une véritable guerre civile 8. En effet, chaque fois que les Pères anciens ont été édités, étudiés et mieux connus, cette redécouverte du christianisme en ses sources a provoqué une crise dans la théologie. L’opposition entre la tradition ancienne, que l’Église catholique prétend suivre, et les doctrines plus récentes qu’elle a admises ou même inventées, devient manifeste dès que l’on confronte la doctrine des Pères grecs, latins, syriaques ou autres, aux enseignements des scolastiques quels qu’ils soient.

Pour le montrer, nous utiliserons trois exemples. 

Tout d’abord, la querelle qui a eu lieu, en France, pendant des siècles, autour de la constitution de l’Église. 
Ensuite, la controverse de l’augustinisme. 
En troisième lieu, les débats sur la vision de Dieu, qui portent « sur la nature même des expériences spirituelles les plus élevées auxquelles les hommes sont appelés dans ce monde-ci et dans le monde à venir 9 ».

a) L’ecclésiologie de la papauté face à l’ancienne ecclésiologie

La doctrine de l’Église et du rôle du Pape a été, dans l’Occident, la source d’un conflit qui a duré jusqu’au XIXe siècle et qui s’est achevé dans le schisme entre les ultramontains et les Vieux-Catholiques.

La lutte entre les deux conceptions de l’Église avait commencé sous les carolingiens, mais pour comprendre ce qui s’est passé à cette époque-là, il faut remonter aux événements tragiques pour l’Église des Gaules qui l’ont précédée immédiatement.

Sous les rois mérovingiens, en effet, l’Église avait été décapitée, les Maires du Palais ayant transformé les évêchés et les monastères en de simples fiefs, qu’ils attribuaient à des évêques et à des abbés ignorant tout de la religion.

« Aussi peut-on dire, écrit l’abbé Guettée, que l’Église Franke n’eut bientôt plus d’évêques, et qu’elle n’eut pour chefs que des guerriers... Si ces prétendus évêques faisaient des visites pastorales, c’était pour piller les peuples et rançonner des prêtres qui n’étaient, à leurs yeux, que des vassaux ; ils se croyaient non pas les pères, mais les maîtres du clergé; non pas les pasteurs du peuple, mais des seigneurs 10... »

Cette décadence explique la suite. « L’Église de France ayant abdiqué, pour ainsi dire, sa propre direction, après l’invasion des barbares qu’elle subit à la fin du VIIe siècle; la papauté la gouverna par les Carolingiens 11... Il y eut des réclamations contre cette action immédiate de la papauté dans le gouvernement des Églises particulières, et ce fut pour soutenir ses prétentions que l’on composa alors la collection des fausses décrétales. Cette collection ne fut pas adoptée généralement en France. Les plus grands évêques, comme Agobard et Hincmar, réclamèrent énergiquement en faveur de l’ancien droit. La papauté soutint ses prétentions. De là, les premières luttes gallicanes et ultra-montaines qui se sont modifiées avec le temps mais qui durent encore12 ».

La dissension séculaire qui opposa les gallicans aux ultra-montains, reposait donc sur cette usurpation première, contraire à l’ancien droit ecclésiastique, celui de la tradition apostolique ; et c’est la volonté paradoxale de maintenir des éléments d’ecclésiologie orthodoxe dans un contexte hérétique qui explique la chute des gallicans. « Le gallican voulait une papauté soumise aux canons, soumise au concile œcuménique qui était la plus haute autorité dans l’Église. Seulement il admettait, en théorie, le pape comme chef de l’Église de droit divin. C’était une inconséquence13 ».

Cette lutte intestine sur la constitution même de l’Église, qui devait aboutir à la grande erreur de l’infaillibilité pontificale, définie en 1870, témoigne éloquemment de la résistance de l’élément traditionnel, en même temps que de sa faiblesse dès qu’on le détache de la pierre de la vraie foi, de l’Église divino-humaine.

8. Voir Patric Ranson, Richard Simon ou du caractère illégitime de l’augustinisme en théologie, L’Âge d’Homme, Lausanne, 1990, qui introduit et justifie cette idée.11. Nous gardons l’orthographe de l’auteur, qui se conforme aux règles d’Augustin Thierry, soucieux de restituer la prononciation la plus juste des noms germaniques.
9. Mgr Photios, Une lecture orthodoxe, Revue des Deux Mondes, avril 1993, p. 80.
10. Abbé Guettée, Histoire de l’Église de France, III, Lyon-Paris, 1848, p.III. Sur l’abbé Guettée, voir l’Appendice du présent ouvrage.
12. Ibid, p. VIII. Le gallican essaye de maintenir le principe du droit de l’Église locale, face à l’ultramontain, partisan du pouvoir du pape.
13. W. Guettée, Souvenirs d’un prêtre romain devenu prêtre orthodoxe, Paris-Bruxelles, 1889, p. 180.




(in Le nouveau catéchisme contre la foi des Pères)
À SUIVRE

samedi 26 août 2017

[2] "Estrangement culturel" ou divergences théologiques ?

1. Les rapports entre l’Orient et l’Occident 


Est-il exact de dire qu’il y a eu une coupure entre l’Orient et l’Occident et que cette coupure a fait diverger les théologies ?


En fait, les rapports n’ont jamais cessé entre les deux parties de l’Empire Romain, même après qu’elles ont été séparées politiquement à cause des invasions barbares. D’autre part, même si ces régions avaient été séparées bien plus gravement, était- ce une raison pour se mettre à avoir des théologies différentes ? L’histoire de la Géorgie prouve que non. Elle a été complètement coupée du reste de l’orthodoxie et est restée orthodoxe. Ni les différences linguistiques, ni les différences culturelles n’imposent les innovations dogmatiques.

Plusieurs des textes dogmatiques importants de l’Église orthodoxe sont nés à l’occasion de rencontres dont chaque siècle a fourni sa moisson.
 Saint Photios, dans sa Mystagogie du Saint Esprit, répond aux arguments des carolingiens. Aux traités Contre les erreurs des Grecs, font pendant, durant le Moyen-Âge, les traités Contre les latins

Le Concile de Lyon (1274) est pour les moines de l’Athos l’occasion de grandes lettres dogmatiques. 

Au XIVe siècle, Grégoire Palamas dialogue avec le calabrais Barlaam et provoque la convocation de trois conciles qui rejettent la scolastique augustinisante de Barlaam.

 Thomas d’Aquin est traduit en grec et Callixte Angélicoudès le réfute 7

Lors du Concile de Florence (1439) les meilleurs théologiens des deux partis disputent du Purgatoire et du Filioque, avec des arguments subtils.

 En 1573, Jérémie II patriarche de Constantinople, noue avec les luthériens de Tübingen une correspondance restée célèbre. 

À partir du XVIIe siècle, les voyages et les contacts se multiplient. Catholiques et protestants essayaient de tirer chacun à soi les orthodoxes, victimes d’une situation politique des plus difficiles, la turcocratie, qui entravait les études théologiques. Aux confessions de foi non-orthodoxes de Cyrille Loukaris et de Pierre Moghila ont répondu divers Conciles, tenus à Jérusalem ou à Constantinople. La querelle de l’eucharistie, qui divisait protestants et catholiques, et où s’illustrèrent surtout le pasteur Claude et le janséniste Nicole, fut arbitrée par le patriarche Dosithée et le Concile de Jérusalem en 1672. Ce concile eut plusieurs éditions à Paris, La Haye, Londres, etc. Citons enfin la réponse des Patriarches Orientaux aux Anglicans non-jureurs (1716-25), les Conciles de 1691, 1722, 1727, 1838, qui sont des réponses à la propagande uniate et aux principales questions soulevées par la théologie latine. 
Avec la réponse de Grégoire VI à Pie IX qui l’invitait au Concile de Vatican I (1868) et l’Encyclique des Patriarches Orientaux répondant aux propositions de Léon XIII, en 1895, le dialogue s’établit très directement.

Bref, il est abusif de parler d’estrangement culturel.

Nous ne voulons pas nier les différences de mentalité qui affectent l’Orient et l’Occident ; mais suggérer que ces différences sont plutôt le résultat que la cause d’une divergence qui est, dans son principe, théologique.

Notes
7. Contre Thomas d’Aquin, voir La Lumière du Thabor, n° 25 Paris, 1990, p. 32-46 et no 26, p. 33-46.

(in Le nouveau catéchisme contre la foi des Pères)
À SUIVRE

vendredi 28 juillet 2017

Palamas, Traités démonstratifs sur la procession du Saint-Esprit.

Recension par Jean Claude Larchet  sur orthodoxie.com

Palamas, Traités démonstratifs sur la procession du Saint-Esprit Traduction du grec et annotation par Yvan Koenig, introduction de Jean-Claude Larchet, collection « Patrimoines », Éditions du Cerf, Paris, 2017, 200 p.

Les deux Traités démonstratifs (encore connus sous le nom de Traités apodictiques) sur la procession du Saint-Esprit, figurent parmi les toutes premières œuvres de saint Grégoire Palamas (1296-1359), et sont en tout cas ses pre­miers écrits théologiques. Grégoire était alors âgé de trente-huit ans et résidait à l’ermitage de Saint-Sabbas au Mont-Athos.

Rédigés au cours du premier semestre de 1334, ils sont dirigés contre la doctrine latine du Filioque. En même temps qu’ils réfutent cette dernière, ils consti­tuent une apologie de la foi orthodoxe. Le titre complet du pre­mier est : Premier traité apodictique, démontrant que l’Esprit Saint ne procède pas du Fils, mais seulement du Père ; celui du second : Second traité sur la procession du Saint-Esprit, prouvant qu’Il ne provient pas du Fils, et contre les citations de la divine Écriture proposées aujourd’hui par les Latins pour se défendre.

Les circonstances de leur rédaction sont les suivantes. En 1333, deux théologiens domini­cains – l’italien François de Camerino, évêque de Chersonèse et l’anglais Richard, évêque du Bosphore – avaient été envoyés par le pape à Constantinople pour relancer les discussions théologiques sur la question de la procession du Saint-Esprit, dans le cadre d’une nou­velle tentative d’union des Églises dont le pape et l’empereur Andronic III avaient pris conjointement l’initiative. Le théologien Barlaam avait été missionné par le Grand Domestique Jean Cantacuzène et l’empereur Andronic III pour être le représentant des Orientaux dans les débats qui se tinrent à Constantinople de la fin de l’année de l’année 1333 jusqu’en juin 1335.
Grégoire Palamas fut informé par ses amis de Thessalonique du développement des discussions et aussi du contenu des traités antilatins que Barlaam avait rédigés au cours de celles-ci. Deux points lui parurent problématiques: premièrement l’interprétation donnée par Barlaam de l’expression de Grégoire de Nazianze « Principe issu du Principe » appliquée au Fils, qui lui paraissait favorable au Filioque ; deuxièmement, l’affirmation par Barlaam, sur la base d’une mauvaise compréhension de l’apophatisme de Denys l’Aréopagite, de l’impossibilité de recourir en théologie au raisonnement apodictique (démonstratif et probant), ce qui ramenait les discussions sur la procession du Saint-Esprit à la relativité du raisonnement dialectique et les rendait finalement vaines.

Ces deux conceptions erronées de Barlaam comportaient aux yeux de Palamas le risque de déboucher sur un compromis d’union avec les Latins qui se ferait en faveur de leurs positions sur le Filioque.
Ce n’est qu’indirectement (en faisant lui-même usage de la démonstration) que Grégoire Palamas s’oppose dans ses deux traité aux positions méthodologiques de Barlaam, et c’est sur la question dogmatique qu’il se concentre essentiellement.

L’idée du P. Jean Meyendorff – qui détermine une grande partie de son interprétation de l’œuvre de saint Grégoire Palamas – selon laquelle ce dernier se serait déjà ici opposé à l’humanisme byzantin ne concerne en réalité qu’un point secondaire.

Grégoire Palamas réexamine en fait de manière critique la plupart des arguments en faveur du Filioque qui ont été présentés au XIIIe et au XIVe siècle par les Latins et leurs partisans, lors de discussions qui visaient en particulier à faire reconnaître par les orthodoxes l’expression « par le Fils », utilisée par certains Pères, comme un équivalent de l’expression « et du Fils » (Filioque), ou du moins comme compatible avec celle-ci.
Ses critiques, s’adressent aux Latins mais aussi aux « latinophrones », c’est-à-dire aux théologiens byzantins « pensant à la manière latine » et disposés à faire un compromis avec les Latins.

Beaucoup d’arguments latinophrones (c’est-à-dire conforme à la pensée des Latins) visés par Palamas sont des arguments qui ont été développés dans les siècles précédents, notamment dans les deux traités sur la procession du Saint-Esprit – ĺ – de Nicéphore Blemmydès (1198-1269), et surtout dans les Titres de Jean Bekkos, patriarche de Constantinople de 1275 à 1282, dont Grégoire Palamas a élaboré une réfutation à la même époque qu’il a rédigé les Traités démonstratifs: Contre Jean Bekkos).

Après la triste expérience du concile d’union de Lyon en 1274, les or­thodoxes se montraient sans aucun doute extrêmement méfiants à l’égard des tenta­tives unionistes dont l’initiative était périodique­ment prise par le pouvoir pour des raisons essentiellement poli­tiques et où celui-ci semblait, pour aboutir, prêt à favoriser tous les compromis dogmatiques quitte à brader la foi orthodoxe. Une dé­marche (qui n’avait pu aboutir en raison de la guerre civile) venait d’être faite récemment (1323-1327) auprès du Pape Jean XXII par Andronic II qui s’inquiétait de l’avancée des Turcs en Asie Mi­neure et souhaitait s’assurer l’appui de l’Occident. Dans le même temps, les Latins exerçaient à Constantinople une influence de plus en plus marquée. C’est à l’initiative d’Andronic III qui venait, en 1332, de for­mer une ligue avec Venise et les Hospitaliers de Rhodes, qu’avaient été entreprises les dernières négociations de 1333-1335 destinées à établir l’union des Églises. La vigoureuse condamnation du patriarche Jean Bekkos et des latinophrones par le concile des Blachernes réuni en 1285 (soit seulement cinquante ans auparavant) par le patriarche Grégoire de Chypre, avait sans aucun doute rendu les orthodoxes vigilants et par­ticulièrement exigeants en ce qui concerne question de la procession du Saint-Esprit qui apparaissait comme le principal point de divergence entre les deux Églises.

Les Traités démonstratifs semblent donc avoir été écrits pour dé­fendre la foi orthodoxe et réfuter la doctrine latine du Filioque à un moment où l’on avait tout lieu de craindre que, pour mener à bien des visées poli­tiques, l’empereur et le théologien Barlaam qu’il avait missionné pour mener les discussions fassent des concessions aux positions latines et réalisent à la hâte une union où la foi orthodoxe se trouverait sacrifiée. Cette idée est partagée par un spécialiste catholique de Palamas, R. E. Sinkewicz : « il apparaît que Palamas a réagi aux nouvelles de discussions renouvelées avec les Latins et a écrit aussi­tôt un ex­posé de la foi orthodoxe sur le sujet, afin de repousser par avance toute possibilité de compromis doctrinal. »
Les Traités ont une forme polémique très mar­quée ; ils attaquent les Latins d’emblée, de front, et en permanence, et ils se présentent moins comme une proposition de dialogue que comme une vigoureuse réfutation de la doctrine la­tine du Filioque – aussi bien dans sa forme classique que dans ses développements récents – corrélative d’une ferme apologie de la foi ortho­doxe.

Pour saint Grégoire Palamas comme pour tous les Pères qui ont défendu la doctrine orthodoxe de la procession du Saint-Esprit, la doctrine latine du Filioque ne peut faire l’objet d’aucun com­promis et même d’aucune négociation : le Filioque est une ajout illicite au Credo, qui contredit la foi de l’Église et paraît définiti­vement incompatible avec les enseignements du Christ, des Apôtres, des Pères et des Conciles.
P
L’ardeur mise par saint Grégoire Palamas dans les deux Traités démonstratifs à réfuter la doctrine latine du Filioque jusque dans ses développements les plus subtils et à défendre corrélativement la foi orthodoxe sur la procession du Saint-Esprit tient à la particulière importance qu’il reconnaît à cette question.
Sa position ferme s’oppose à la position conciliante que mon­traient les représentants de la tendance latinophrone qui, voyant dans l’union des Églises une tâche urgente qui devait aboutir coûte que coûte, minimisait l’importance de cette divergence et allait même jusqu’au relativisme dogmatique. Barlaam témoigne d’une telle attitude dans le discours qu’il a tenu à Avignon en 1339, en tant qu’ambassadeur de l’empereur, devant le pape Benoît XII pour lui présenter un nouveau plan d’union : l’union des Églises, affirmait-il, pouvait être réalisée sur la base d’une foi commune en la Trinité, chacune des deux Églises pouvant, en ce qui concerne la procession du Saint-Esprit, conserver sa propre doctrine, les théo­logiens des deux bords pouvant, s’ils le souhaitaient, poursuivre leurs discussions. Mais l’importance du Filioque était minimisée par les Latins eux-mêmes qui traditionnel­lement attribuaient la sé­paration des Églises plus à des raisons ecclésiologiques (en parti­culier le re­fus de reconnaître l’autorité suprême du pape de Rome) qu’à des raisons dogmatiques et considéraient les Orientaux comme schis­matiques, mais point comme hérétiques. Saint Grégoire Palamas lui-même note dans son Prologue que les Latins affirment que leur pensée est la même quant au fond et ne diffère qu’en ce qui con­cerne l’expression.

Face à ces points de vue des Latins et des latinophrones, saint Grégoire Palamas fait remarquer que l’ajout du Filioque au Credo paraît produire un changement minime, mais « apporte en réalité les bases de grands maux et beaucoup de dan­gereuses absurdités et de choses étrangères à la piété », montrant que, « en ce qui concerne Dieu, même la moindre chose ne saurait être petite »: une nouveauté qui concerne le Principe de toutes choses ne peut en effet qu’entraîner de nombreuses erreurs au su­jet de tout ce qui en dépend.
Pour saint Grégoire Palamas, la différence des deux conceptions est loin de ne correspondre qu’à une différence d’expression et, comme on dirait aujourd’hui, de « sensibilité » : les deux doctrines sont bel et bien fondamentalement contradictoires et donc, selon le principe logique élémentaire de non-contradiction, ne peuvent être toutes les deux vraies; elles ne sont donc ni complémentaires ni compatibles, mais exclusives l’une de l’autre: si l’une est vraie, l’autre est nécessairement fausse.

Le Filioque est une hérésie comparable et semblable à toutes les hérésies du passé, comme celles des ariens, des apollinaristes, des eunoméens ou des macédoniens…

Sa gravité se manifeste non seulement sur le plan dog­ma­tique, mais encore sur les plans ecclésiologique et spirituel (les trois plans étant indissolublement liés): il implique une rupture de communion et empêche le rétablissement de celle-ci.

Confesser que le Saint-Esprit ne procède pas du Père seul, c’est, selon Grégoire, carrément s’exclure de Dieu et de la Sainte Trinité. On voit très clairement ici que Grégoire, loin de considérer la question du Filioque comme secondaire, y voit, plutôt que dans des raisons politiques ou autres, la principale source de la rupture de communion et de la séparation des Églises orthodoxes d’Orient et de l’Église de Rome et le princi­pal obstacle au rétablissement de cette communion et à la ré-union des Églises. « Jamais, dit-il aux Latins, nous ne vous accepterons en communion aussi longtemps que vous direz que l’Esprit est aussi du Fils (Filioque) ».
Selon Grégoire, la première étape de la démarche à suivre pour rétablir la communion et l’unité entre les Églises est que les Latins retirent le Filioque du Credo puisque celle formule y a manifeste­ment été ajoutée. Mais cela ne suffira pas : encore faut-il que la théologie latine s’accorde avec la foi orthodoxe dont témoigne « l’accord éclatant des Pères théophores ». Il propose donc que s’engagent des discussions théologiques en vue de retrouver un tel accord, et même de traiter de cette question au sein d’un concile, en prenant pour exemple les Pères qui, à propos d’autres questions controversées comme celle des deux natures, opérations et volontés du Christ, sont finalement retournés « à la paix com­mune dans la piété ». Grégoire rappelle avec émotion et nostalgie qu’il y avait autrefois un accord entre l’Église d’Orient et l’Église de Rome, et il considère que cet accord devrait pouvoir être retrouvé si cette dernière acceptait seulement de faire retour à l’ancienne foi commune définie par les grands conciles œcuméniques et par les Pères.

Les deux Traités démonstratifs de saint Grégoire Palamas avaient déjà été traduits en français par Emmanuel Ponsoye sous le titre Traités apodictiques sur la procession du Saint-Esprit (Éditions de l’Ancre, Paris-Suresnes, 1995). Yvan Koenig en propose ici une traduction nouvelle, nettement améliorée, et annotée par ses soins. L’introduction, qui occupe près de la moitié du volume, présente les circonstances et le contexte de la rédaction des traités et analyse ceux-ci dans le détail, étape par étape, pour en rendre la lecture plus aisée. Elle actualise et corrige sur certains points (en particulier la position de Palamas par rapport à Barlaam et à Grégoire de Chypre) l’introduction de la première édition.
Jean-Claude Larchet

mercredi 12 juillet 2017

De quelle union des Églises parlez-vous ? [2]

De quelle union des Églises parlez-vous Monsieur Gikas ? 

Le Filioque

par le professeur de Théologie de l'Université d'Athènes, Andreas Theodorou (†) 


Prof. Andreas Theodorou (1922-2004)


Selon la foi orthodoxe, l'Esprit Saint procède du Père seul et est envoyé dans le monde par le Fils afin de consolider l'œuvre de la rédemption accomplie par le Père à travers le Fils.
Sur ce point, saint Jean (15: 26) « Quand sera venu le Consolateur que je vous enverrai de la part du Père, l’Esprit de vérité qui procède du Père, lui, rendra témoignage de moi », est vraiment révélateur.
En conséquence, le présent "procède" se réfère à l'éternelle procession du Père, tandis que le futur «J'enverrai» se réfère à l'envoi temporel de l'Esprit (dans le monde), accompli par le Fils.

Cette croyance en la procession du Saint-Esprit du Père seul est donnée comme une confirmation infaillible par le symbole de foi de Nicée-Constantinople : «Qui procède du Père».

L'affirmation faite par les catholiques romains, selon laquelle le symbole de foi n'exclut pas explicitement la procession du fils ou sa redéfinition, est tout à fait négligeable.

En outre, tout le chœur des Pères grecs de l'Église confesse la procession du Saint-Esprit du seul Père, comme source de la Divinité, et que son envoi dans le monde se produit par le Fils.
Ainsi, saint Jean de Damas, le théologien dogmatique prééminent de l'Église, dans lequel aboutit la tradition dogmatique précédente, observe succinctement :

Le Saint-Esprit de Dieu [le Père], en tant que procédant de Lui, qui est aussi dit être l'Esprit du Fils, comme manifesté et communiqué à la création par Lui,
mais sans avoir son existence de Lui.
Cet acte de foi trouve son écho dans les livres dogmatiques les plus récents de l'Église orthodoxe. Dans cette troisième réponse [au théologien Luther de Tübingen], Le patriarche Jérémie II de Constantinople écrit :

En conséquence, aucun des enseignants de notre Église n'a dit que le Saint-Esprit procède du Fils, ou qu'il ait son existence du Fils, ou qu'il soit une émission du Fils, et aucun d'eux n'a jamais déclaré que le Fils est l'émetteur ou la cause de l'Esprit Saint. Tous proclament que l'Esprit est répandu, jaillit, sort, brille, est envoyé, est délivré et est donné par lui, sans ignorer que ces termes concernent la transmission des émanations.

Il est certainement vrai que dans l'enseignement de Saint Cyrille d'Alexandrie, il y a un certain manque de clarté concernant  la procession du Saint-Esprit (j'ai écrit un traité spécial à ce sujet). Une phrase maladroite de ce saint Père, qui a appelé l'Esprit "propre au Fils", a donné lieu à des controverses entre théologiens de son époque. Théodoret de Cyr  a fait la distinction suivante :

Si Cyril appelle l'Esprit "propre au Fils" en ce sens qu'il est co-naturel avec Lui et procède du Père, nous serons d'accord avec lui et reconnaîtrons son expression comme orthodoxe. Mais s'il utilise ce terme dans le sens où l'Esprit a son existence du Fils ou par le Fils, nous devrons répudier cette expression comme blasphématoire et impie.

M. Gikas (suivant en cela les opinions des catholiques romains) réfute cette vue complètement orthodoxe de Theodoret, qui était le théologien le plus important de l'école antiochienne de l'Église primitive, au motif que Theodoret a été condamné par le cinquième Concile œcuménique en tant que  nestorien (!), Ignorant le fait que ses écrits, et non sa personne, ont été condamnés, et pour d'autres raisons.

Maintenant, pourquoi Saint Cyrille dit-il que l'Esprit est «propre au Fils»? En raison de leur identité d'essence: "l'Esprit Saint procède de Dieu le Père, selon l'énoncé du Sauveur, mais Il n'est pas étranger au Fils".  Et: "ce qui provient de Lui [le Père] n'est pas étranger au Fils selon la définition de l'essence ".

Saint Cyrille n'enseigne pas le Filioque, et c'est en vain que les catholiques romains cherchent cette doctrine dans ses écrits.

Les formules verbales "est répandu" et "sort", selon lesquelles Cyrille caractérise la provenance de l'Esprit du Fils, ne se réfèrent pas à la provenance éternelle de sa propriété hypostatique (la procession), mais à son envoi dans le monde à un moment donné :
Et il est répandu, c'est-à-dire, provient de Dieu le Père comme d'une source, mais est accordé à la création par le Fils.

Enfin, M. Gikas attribue l'expression "à travers le Fils" à saint Grégoire de Nysse "dans le sens causal", c'est-à-dire que le Fils est cause de l'Esprit.
Il est vrai que l'exemple utilisé par ce Saint Père pour élucider le mystère de la procession du Saint Esprit tend à soutenir cette notion : c'est l'exemple des trois bougies dont la seconde reçoit sa lumière du premier et du troisième par la seconde, une fois que cette dernière a été allumée :
C'est comme si une flamme était divisée entre trois bougies, et que la cause de la troisième lumière soit la première flamme qui a allumé la dernière bougie  par transmission de celle du milieu.

Cependant, de l'enseignement plus général du Saint, il ressort que cette «médiation» du Fils n'est pas une médiation de l'essence, mais une médiation «conceptuelle». Dans la Divinité, il existe un ordre dans la Trinité, c'est-à-dire que les trois personnes sont énumérées de cette façon : d'abord, l'Un, puis
le second, puis le troisième (c'est-à-dire le Père-Fils-Esprit Saint). Le Père (le Premier) est conçu comme précédant le Fils (le Deuxième) logiquement, non temporellement, et le Fils (le Deuxième) est conçu comme précédant l'Esprit (le Troisième).
Le Père est donc conçu comme précédant le Fils,
Et à travers le Fils et cependant  avec Lui, le Saint-Esprit ... est conçu en étroite union, non subséquente à l'existence du Fils.
Ainsi, bien que les deux [autres] Personnes tirent leur existence du Père, le Fils, qui est logiquement considéré comme antérieur (à l'Esprit), est traité comme un intermédiaire entre le Père et l'Esprit, et l'Esprit étant connecté au Père à travers lui, comme un produit de l'essence du Père qui engendre le Fils, ou comme un produit de l'essence du Père, «qui est l'essence du Fils». Il est évident que dans la complexité de cette ligne de pensée, la préposition «à travers» n'a pas de signification dogmatique particulière. Ceci, en termes de base, est la vision orthodoxe de la question.

Mais pour l'Église occidentale, le Filioque n'est pas un problème doctrinal trivial ; C'est un dogme premier de foi. Tenant ce dogme de l'enseignement de saint Augustin, l'Église occidentale l'a adopté à un concile convoqué en 589 à Tolède, en Espagne, en ajoutant la phrase "et du Fils" au Symbole de Foi, en dépit des nombreuses réactions diverses en contradiction.
Après le schisme des Églises, l'Église occidentale l'a élevé à un dogme de foi (De Fide), en l'imposant comme vérité  pour la conscience croyante de l'Église et nécessaire au salut.

Par conséquent, dans la nature des choses, cette Église ne peut pas concilier le Filioque conceptuellement avec notre enseignement, pas plus bien sûr, que nos pouvons le concilier avec notre enseignement. L'affirmation qu'il n'y a pas de contradiction essentielle entre les deux doctrines et que les deux enseignent la même chose, mais qu'elles l'expriment de différentes façons, est, de notre point de vue, irréaliste.
(version français par Maxime le minime)

(À SUIVRE)
notes :

1. St. John of Damascus, “Homily on Holy Saturday,” §4, Patrologia Græca, Vol. XCVI, col. 605B.
2. John Karmiris,  Dogmatic and Credal Monuments of the Orthodox Catholic Church] (Athens: 953), Vol. II, pp. 482-483.
3. eodoretos of Cyrus, in St. Cyril of Alexandria, Twelve Chapters Against ose Who Dare to Defend the Doctrines of Nestorios, Patrologia Græca, Vol. LXXVI,
col. 432D.
4. St. Cyril of Alexandria, ibid., Patrologia Græca, Vol. LXXVI, col. 433B.
5. Idem, Epistle 39, Patrologia Græca, Vol. LXXVII, col. 8A.
6. See Panagiotis Trembelas, Dogmatic theology of the Orthodox Catholic Church] (Athens: 959), Vol. I, pp. 288-289.
7. St. Gregory of Nyssa, On the Holy Spirit, Against the Macedonians and the Pneumatomachi, Patrologia Græca, Vol. XLV, col. 308B.
8. St. Gregory of Nyssa, Against Evnomios, Book I, Patrologia Græca, Vol. XLV, col. 369A 
9. See Trembelas, Dogmatikae,Vol. I, p. 293; Chrestos Androutsos, Sumbolkiae [Dogmatic theology],
 

dimanche 9 juillet 2017

De quelle union des Églises parlez-vous ? [1]

De quelle union des Églises parlez-vous Monsieur Gikas ?

par le professeur de Théologie de l'Université d'Athènes, Andreas Theodorou (†) 

Prof. Andreas Theodorou (1922-2004)
Dans le journal Βήμα du 22 mars 1992, un article de M. Emmanuel Gikas, ambassadeur au ministère des Affaires étrangères, a été publié, intitulé «L’Union des Églises n’est pas une utopie». Par «Églises», l'auteur ne comprend que les catholiques romains et les orthodoxes. Au sujet des communautés protestantes, et particulièrement de l'Anglicanisme, il ne dit rien. 

Il est évident que M. Gikas a été incité à écrire cet article par le refroidissement récent dans les relations entre le Papisme et l'Orthodoxie eu égard à l'ingérence politique du Vatican dans les affaires de l'Orient chrétien et l'activité pernicieuse de l'Unia au détriment des orthodoxes. 

Assez curieusement, il ne fait aucune mention de l'Unia, qui constitue le modèle ecclésiologique de l'union, comme la comprend le Pape, et constitue une pierre d'achoppement pour les efforts unionistes. 
On peut se demander pourquoi. 

Il parle d'une manière plutôt superficielle des différences qui séparent les deux Eglises, propose ses interprétations personnelles et préconise des mesures concrètes qui, à son avis, rendront possible l'union. 
Il semblerait que M. Gikas n'ait pas un sens profond de la nature des différences dogmatiques sur lesquelles se fonde l'éloignement entre les Églises, ou, pour le moins, ne leur attribue pas une signification correcte. 
Pour l'Église catholique orthodoxe, au contraire, cette question est particulièrement importante. Toute déviation de sa foi traditionnelle est une hérésie. 
C'est quelque chose qui dénature sa raison d'être et son oeuvre de sanctification. Pour l'amour de sa vérité, l'Orthodoxie a mené des luttes ardentes, a combattu contre les hérésies et n'a pas l'intention de s'écarter même d’un iota des dogmes qui lui ont été transmis par les Pères. 

En lisant l'article de M. Gikas, on a l'impression que l'auteur souhaite être impartial, mais que, malgré cela, il envisage les problèmes d’un œil catholique plutôt qu' orthodoxe et qu'il a une propension à une vision œcuméniste des choses; c'est-à-dire un certain minimalisme dogmatique et une tendance à relativiser, compromettre et brader les vérités divines de la foi. 


***

Mais examinons ces questions plus en détail.

Lorsqu'il expose ses thèses au début, M. Gikas écrit que «le Filioque est considéré à tort par certains comme divisant les Églises», C'est-à-dire qu'il constitue une différence insignifiante, ou plutôt, ne constitue en aucune façon une différence entre les Églises divisées, et il insinue que les nombreux conflits, les nombreux différends et la volumineuse littérature théologique consacrée à cette controverse créée des deux côtés sont devenus avec le temps une pure « bagatelle»!

Nous sommes désolés, mais nous ne pouvons pas accepter les points de vue exprimés par M. Gikas. Selon l'enseignement dogmatique orthodoxe, le Filioque n'est pas un simple théologoumène, c'est-à-dire une question de jugement théologique indépendant, que l'on peut accepter sans conséquences dogmatiques plus profondes (sans être considéré comme hérétique), mais une distorsion totale du Dogme de la foi concernant la sainte Trinité. Si nous acceptons que le Saint-Esprit procède également du Fils, nous détruisons l'ordre de la Trinité, confondons les propriétés hypostatiques des Personnes, inaltérables et incommunicables, et abolissons la monarchie dans la Divinité, c'est-à-dire que le Père est la source de la divinité, dont les deux autres personnes de la Trinité reçoivent leur existence, le Fils par la génération éternelle, et l'Esprit par procession; Et, enfin, la dignité de l'Esprit qui convient à  Dieu est diminuée et son œuvre sanctifiante et déifiante est dénaturée. Pour ces raisons, le Filioque est, pour nous, une hérésie trinitaire absolue qui détruit le concept du Dieu chrétien. L'Église catholique orthodoxe l'a toujours vue en tant que telle et a lutté contre elle.

(À SUIVRE)

mardi 8 mars 2016

ARCHIMANDRITE GABRIEL BUNGE : différentes interviews [1] La vie monastique





















Qu'est-ce que cela signifie d'être un chrétien?

Qu'est-ce qu'un moine ?  
Est-il possible de réformer la vie monastique? 
Quels sont les livres des saints Pères qu'il faut lire ? 
L'Archimandrite Gabriel Bunge, théologien bien connu et moine-ermite répond en français à ces questions



sur le site 


dimanche 13 décembre 2015

Sur le blog orthomonde.fr - Entretien avec Père Élie du monastère de la Transfiguration



extrait :

Est-ce qu’on peut dire que les starets ne sont présents que dans l’Orthodoxie ? 

 C’est une excellente question mais il est difficile d’y répondre. Si vous voulez le fond de mon cœur et ma petite expérience, il y a certainement des hommes spirituels en dehors de l’Orthodoxie. Mais les vrais hommes de Dieu qui ont une expérience de la vie avec Dieu, il n’y a que dans l’Orthodoxie qu’on les trouve. J’ai connu beaucoup d’hommes spirituels catholiques, qui ont une vie morale irréprochable, une charité extraordinaire, une connaissance très approfondie de la vie spirituelle. Mais simplement chez les pères spirituels orthodoxes il y a cette connaissance intime de la vie divine, de la vie avec Dieu et de Dieu. Ce n’est pas une question de perfection personnelle. C’est le charisme de l’Esprit Saint vivant dans l’Église. Les starets, si je puis les appeler comme ça, que j’ai connus en dehors de l’Orthodoxie  ont été comme des prophètes, si vous voulez, ils sont comme à la porte du Paradis. Mais pour eux le Paradis  le Royaume des cieux c’est une espérance alors que dans l’Orthodoxie le royaume des cieux est une expérience, pas pour l’avenir, pas pour après la mort mais dès maintenant. Mais il y a certes beaucoup d’hommes admirables. […]

jeudi 5 novembre 2015

SUR LE BLOG DE CLAUDE : Du Luthéranisme à l'Orthodoxie en passant par le Catholicisme

L'ITINÉRAIRE D'UN ANCIEN PROTESTANT DEVENU PRÊTRE CATHOLIQUE 
JUSQU'À SON RETOUR À L'ORTHODOXIE



Ne manquez pas de lire sur le Blog de Claude l'Entretien de Georges Maximo avec le prêtre orthodoxe Thomas Dietz, ancien prêtre catholique en 4 parties

extrait :

[…] même de nos jours, il y a une forte tendance chez les orthodoxes en Russie de croire que, fondamentalement, il n'y a pas beaucoup de différence entre Orthodoxie et le catholicisme romain. Ce n'est pas vrai. La différence entre l'Orthodoxie et le catholicisme est beaucoup plus grande que la différence entre le protestantisme et le catholicisme. La conversion du catholicisme à l'Orthodoxie est beaucoup plus difficile. Pourquoi? Parce que dogmatiquement il y a un écart énorme. Ce qui m'a aidé, c'était que jaimais vraiment l'ecclésiologie, l'étude de la théologie de l'Église. Là, l'influence de l'ERHF fut très importante. Dans l'ERHF ils enseignent que l'Eglise catholique n'est pas une église sœur, mais une église de branche qui a rompu avec l'Orthodoxie. Elle était orthodoxe à un certain point, mais ensuite, elle a cessé d'être orthodoxe, car ils ont introduit un enseignement qui ne peut être accepté par l'Orthodoxie, et en tant que telle, elle est considérée comme hérétique pour nous. Mais nous avons une forte tendance à tout niveler et faire que tout ait l'air semblable!
Quand nous lisons les œuvres des saints pères, nous voyons qu'il n'en est pas du tout ainsi. Par exemple, saint Justin [Popovitch] dit clairement que nous avons des canons qui interdisent la prière commune avec les hérétiques et nous n'acceptons pas les catholiques. C'est logique. Imaginez ce qui arriverait si l'Eglise bulgare mettait en avant une thèse sur sa primauté et sa suprématie absolue dans l'Église. Que penserions-nous à ce sujet? Naturellement, nous penserions que c'est le début de l'hérésie. Avec les catholiques, cette hérésie a pris racine et est devenue une partie intégrante de leur système de croyance. Aujourd'hui, les catholiques sont encore moins enclins à céder qu'il y a 50 ou 100 ans. Ils tiennent leur propre terrain. Le Concile Vatican II n'a rien changé à cet égard. Malgré leur œcuménisme déclaré, les catholiques insistent fermement sur leurs points de vue. 
[…]

jeudi 25 décembre 2014

Encore un cadeau de Noël pour les retardataires… "L'ORTHODOXIE QU'EST-CE QUE C'EST ?" de L' archimandrite ÉLIE du monastère de la Transfiguration


Dans notre société, tout change vite :  les modes de vie comme les technologies. Nous nous sentons tantôt stimulés, tantôt déstabilisés par ces évolutions. Les repères sont flottants ou carrément perdus. La consommation nous promet bien-être et plaisir mais nous laisse insatisfaits. Nous sommes souvent déçus par les "sagesses" diverses et leur recettes pour être zen. Alors quoi ? Au-delà des modes passagères qu'est-ce qui peut nous rendre heureux ?
La tolérance est aujourd'hui un mot d'ordre qui permet presque tout mais le Christianisme est mal vu, taxé de passéisme. Et pourtant au milieu de  ce monde mouvant, violent, les chrétiens orthodoxes expérimentent la paix et la joie et ils en témoignent pour ceux qui les approchent. Leur vie "s'irradie d'une pleine lumière" disait déjà St Denys dans les débuts du Christianisme.

"Ah ? Vous êtes orthodoxes ?
 Mais vous êtes chrétiens ?
 Et quelles différences avec les Catholiques ?"

Ce livre abordable par tous, est à entrées multiples et peut se lire dans l'ordre ou dans le désordre selon les questionnements ou les centres d'intérêt. Les paragraphes nombreux mais courts, apportent éclaircissements  et précisions sur la foi et la vie orthodoxes dans une première partie, puis abordent les points de divergence avec les Catholiques. Aucun désir polémique, seulement la joie de faire connaître ce qui rend heureux les Orthodoxes, même au  cœur des difficultés. 

L'archimandrite Élie est le père spirituel du monastère de la Transfiguration (Dordogne) qui est une dépendance du  monastère de Simons Petra du mont Athos. Moine orthodoxe, il est implanté en France depuis quarante ans, et il connaît intimement le monde catholique qui l'entoure.

CE LIVRE EST VENDU AU PROFIT DE LA CONSTRUCTION DE L'ÉGLISE PASTRONALE DU MONASTÈRE DE LA TRANSFIGURATION

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vendredi 19 décembre 2014

SUR LE BLOG de CLAUDE deux excellents articles sur les errances de l'oecuménisme


1. 12 citations sur l'Orthodoxie, l'œcuménisme et le catholicisme romain



1. Œcuménisme: Inventé par les protestants. Adapté par les catholiques. Imposé aux orthodoxes. N'êtes-vous pas d'accord que c'est louche?
2. Beaucoup de protestants voient les catholiques avec générosité, les considèrent comme fondamentalement équivalents aux protestants. Les catholiques étendent le même esprit de générosité en considérant les orthodoxes comme essentiellement catholiques. Mais les différences sont fondamentalement plus profondes.
3. Ce que les orthodoxes, les catholiques, et les protestants ont en commun, est véritablement significatif.…LIRE LA SUITE ICI


2. La voix des Pères



Icône du Sinaï
L'Orthodoxie est la seule Eglise et la seule Vérité. Sa mission œcuménique ne peut pas être autre chose que la confession complète de cette Vérité. Le christianisme occidental a été trompé par le rationalisme (Orthologismos) et il a perdu le sens même et la possession du mystère divin, ainsi que la pleine réalisation du salut. 

Je considère qu'il est extrêmement important que l'on entende cette vérité aujourd'hui en utilisant tous les moyens possibles, puisque le danger de glisser vers les théories du relativisme est grande, même dans les rangs des théologiens orthodoxes.
Père Dumitru Staniloae

Soyez conscients de ne pas être corrompu par l'amour des hérétiques; pour cette raison n'acceptez aucune fausse croyance (dogme) au nom de l'amour.

Saint Jean Chrysostome
et aussi

Saint Théodore le Studite
Saint Antoine le Grand
Saint Marc d'Ephèse
Saint Nicéphore le Confesseur

…LIRE LA SUITE ICI

mardi 25 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (9) par Père André BORRELY : Saint Augustin, un génie (trop) solitaire... (1)

Considérable aura été l'influence de St Augustin sur l'Occident chrétien jusqu'en ce 21ème siècle. En Europe occidentale, en Afrique du Nord, on s'exprimait et pensait en latin. A Constantinople, la langue parlée était le grec. Or, d'une part, le latin est une langue juridique et militaire, et d'autre part les Latins cessèrent de comprendre le grec. L'exemple le plus intéressant parce que le plus lourd de conséquences jusqu'à nos jours, est l'incapacité de la Romanité tardive à apprendre le grec à un homme comme saint Augustin. Celui-ci bâillait aux corneilles durant les cours de grec dans son adolescence et ne dépassa jamais, en grec, le niveau qu'atteignent nos bacheliers d'aujourd'hui, en latin. Lorsque Augustin composa son traité Sur la Trinité, l'absence d'ouvrages rédigés en latin sur le dogme trinitaire était à peu près complète. Ce qu'avaient publié sur ce sujet Tertullien, Novatien, Foebade d'Agen, Hilaire de Poitiers et Ambroise de Milan, était très inférieur à ce qu'à la même époque avaient aussi publié sur le même sujet s. Athanase, s. Basile, s. Grégoire de Nazianze, s. Grégoire de Nysse et Didyme l'Aveugle. Or, ces ouvrages n'avaient pas été traduits en latin pour la plupart. Un homme comme Tertullien, au 3ème siècle, était encore bilingue. Ce ne sera plus le cas d'Augustin. 

Selon que vous pensez en grec ou en latin vous ne pensez pas toujours la même réalité. Les Latins disent sacrement quand les Orthodoxes disent mystère. La mentalité occidentale a tendance à hypertrophier la pensée rationnelle et juridique au point de dessécher l'intelligence des symboles en insistant trop sur le concept juridique de validité. On est tenté de réduire le sacrement à ce qu'on pourrait appeler le minimum indispensable pour qu'il soit valide. D'une manière générale, ce qui. jusqu'à ce jour encore oppose le plus l'Orthodoxie et l'Occident chrétien, c'est la profondeur de la pénétration de la mentalité juridique dans toutes les manifestations de l'existence humaine : le mariage et le divorce, le péché et la confession, la rédemption et le salut, le sacerdoce et l'autorité dans l'Église. 
(à suivre)



samedi 22 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (8) par Père André BORRELY : Un autre Christianisme (2)

Tertullien
Cette approche foncièrement juridique, voire judiciaire du péché et du salut, a vu le jour avec Tertullien, qui fut le premier à le concevoir en termes de droit romain.

Elle s'est poursuivie avec St Ambroise, évêque de Milan et St Augustin qui tous deux considèrent la mort du Christ comme une satisfaction pour la peine due par le péché des hommes. Thomas d'Aquin fait sienne la définition augustinienne du péché et cette définition est juridique. Pour l'évêque d'Hippone comme pour Thomas, le péché consiste à vouloir retenir ou acquérir ce que ne permet pas la justice. C'est tout ce qui est contra legem aeternam, contre la loi éternelle. 

Augustin - Ambroise de Milan - Thomas d'Aquin

 Au contraire, en Russie, non seulement il ne s'est pas produit d'hypertrophie du sentiment de culpabilité, mais on a assisté à une contestation existentielle du juridisme. Les fols en Christ assumaient la culpabilité d'autrui sans protester. Ils transgressaient les conventions sociales, couraient le risque de l'irresponsabilité sociale. Ils contestaient l'imposture de ceux qui croient croire, les appelant ainsi à se convertir en manifestant eux-mêmes un dépouillement du moi si profond qu'ils étaient convaincus que le péché est le fait de tous, la croix commune de l'Église. Mais pas du tout dans le sens où l'a entendu la théologie occidentale du péché originel. L'Orient chrétien de l'Abbé Isaac n'a jamais admis que le Dieu qui est ontologiquement l'Amour puisse tenir pour coupable un petit d'homme qui vient de naître. 

Pour les Latins, ce n'est pas assez de voir le fils succéder à son père, il faut le voir s'identifier avec lui, de sorte qu'ils soient, non pas seulement l'un à la suite de l'autre, mais pour ainsi dire l'un dans l'autre, comme incorporés l'un à l'autre.

Tout le genre humain fait corps avec Adam. A travers la succession des générations humaines, une communauté radicale unit toute la multitude des êtres humains en un grand corps unique, étroitement soudé à son chef. Dans ce grand corps le péché originel s'écoule naturellement, de la tête dans tous les membres.



Mais ici nous devons mesurer l'influence considérable qu'exerça chez les Latins l’œuvre de St Augustin et notamment sa polémique contre Pélage et Julien d'Eclane. Le monde byzantin demeura étranger à la perspective occidentale. Pour l'Orthodoxie, le péché est nécessairement un acte libre de la personne, il ne saurait être expliqué par la nature. Le Patriarche St Photios considère comme une hérésie la croyance en un péché de nature, en une faute héréditaire, sexuellement transmissible. Il n'est de péché que personnel et qui engage la responsabilité et la liberté humaines. 

Il s'agit de bien traduire le 12ème verset du 5ème chapitre de l’Épitre aux Romains. 
La  première partie du verset ne fait pas problème : Διὰ τοῦτο (voilà pourquoi) ὥσπερ δι’ ἑνὸς ἀνθρώπου (de même que c'est par l'entremise d'un seul homme) ἡ ἁμαρτία εἰς τὸν κόσμον εἰσῆλθεν (que le péché a fait son entrée dans le monde) καὶ διὰ τῆς ἁμαρτίας ὁ θάνατος (et par la péché la mort) καὶ οὕτως εἰς πάντας ἀνθρώπους ὁ θάνατος διῆλθεν (et qu'ainsi la mort a passé dans tous les hommes)

Et voici le passage que Grecs et Latins ont compris de manière divergente. En grec, dans le seul texte considéré par tous les chrétiens comme normatif on lit : εφ'ω παντες ημαρτον. Parce que les chrétiens occidentaux (notamment les Allemands et les Français) sont très supérieurs aux Orthodoxes en matière d'exégèse historicocritique, ils savent depuis longtemps que les Latins, en traduisant εφ'ω παρ iv Θuο ont fait un beau contresens. En effet, ils ont traduit εφ'ω παντες ημαρτον par in quo ornes peccaverunt et ont compris en lequel — c'est-à-dire en Adam — tous ont péché, prenant ω pour un masculin alors que les Grecs y ont vu un neutre. La forme εφ' ω est une contraction entre επti et le pronom relatif ω au neutre. En 1915 déjà, le P. Lagrange écrivait : εφ'ω ne peut signifier « dans lequel», mais seulement «parce que». Il est inutile d'insister sur ce point reconnu par les exégètes catholiques les plus autorisés. Écrites en 1915, ces lignes honorent grandement le P. Lagrange. La traduction fidèle au texte grec est la suivante : Voilà pourquoi, de même que c'est par 1 `entremise d'un seul homme que le péché a fait son entrée dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort a passé en tous les hommes, parce que tous ont péché.
Ce qui est totalement incompréhensible, c'est qu'en 1931, 16 ans après la publication de la traduction de l'épître par le P. Lagrange, tel dominicain ait pu trouver profonde et vraiment nouvelle.., la grande doctrine augustine-thomiste de l'incorporation au premier homme. (à suivre)
 

mardi 18 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (7) par Père André BORRELY : Un autre Christianisme (1)

Genèse de la sécularisation en Occident

Venons-en alors au second texte de s.© Je ne vous aurai pas fait perdre votre temps et votre bienveillante attention sera récompensée si je parviens à vous faire sentir combien, d'une certaine façon, on a affaire, pourrait-on dire, à un autre Christianisme.

Voici donc ce qu'écrit l'Abbé Isaac : Ce n'est aucunement pour nous libérer des péchés, ou pour quelque autre motif que notre Seigneur est mort, mais uniquement afin que le monde ressente l'amour de Dieu pour sa création. Si cette admirable épopée n'avait eu d'autre raison que la rémission de nos péchés, il aurait suffi d'un autre moyen pour la réaliser ... N'ayons donc pas honte d'assumer une telle prise de conscience au sujet des mystères du Dessein de salut de notre Seigneur. Car; si nous leur donnons pour motif le rachat des péchés, nous diminuons tout à fait la portée de la mort du Christ et de sa venue dans le monde ... Alors, si nous n'avions pas péché, le Christ ne serait donc pas venu ni ne serait mort, car il n'y aurait pas eu de raison à ce que Dieu revêtît notre corps, qu'il a dû revêtir à cause des péchés du monde... Et si la mort n'avait pas dominé sur nous par la tyrannie du péché, ce mystère de la révélation dans la chair n'aurait pas existé, et les hommes et les anges auraient été coupés de toute cette lumière et de toute cette connaissance. Il conviendrait alors de rendre grâce au péché, puisque c'est à lui que nous devrions d'avoir reçu tous ces biens, et que c'est à lui qu'il nous faudrait attribuer toutes ces merveilles... Mais il n'en est pas ainsi ! De grâce ! Ne restons pas à la surface des Écritures...
(...) Bossuet avait été formé dans une tradition théologique selon laquelle, d'une part, le péché est essentiellement la transgression d'une loi et, d'autre part, l'Incarnation est une oeuvre de justice au moins autant que d'amour. 
Mais parler de mérite issu de notre libre-arbitre surnaturalisé par la grâce, c'est indiquer un type d'action ayant pour conséquence que la personne à l'égard de laquelle on mérite, nous doit, en retour de notre action, une récompense déterminée. Et dire que la liberté humaine a le pouvoir d'acquérir des mérites à l'égard de Dieu, c'est attribuer à cette liberté la capacité de déterminer en Dieu l'obligation de récompenser l'homme sous peine de se déjuger lui-même. D'aucuns en sont arrivés à parler de droit strict à la vie éternelle pour l'homme en état de grâce. Ceux-là avaient-ils lu, dans le troisième évangile, la parabole du pharisien et du publicain ? La même perspective essentiellement juridique a conduit nombre de chrétiens à considérer qu'après avoir reçu de Dieu le pardon, le ou la pénitent(e) doit encore fournir une expiation. C'est le propre d'une vision juridique de tout l'ensemble de la vie chrétienne de voir surtout dans le péché le fait d'enfreindre des principes formels et conventionnels, impersonnels et abstraits. On voit dans le pécheur l'homme qui contrevient à des règles utilitaires de comportement et de bienséance sociale. Le salut est alors senti comme une justification et une expiation individuelles. Ce que le Dr. Hesnard avait appelé en 1949 l'univers morbide de la faute envahi par la peur égocentrique de transgresser. Le confesseur devient une sorte de juge des âmes siégeant au tribunal de la pénitence. Cette approche foncièrement juridique, voire judiciaire du péché et du salut, a vu le jour avec Tertullien, qui fut le premier à le concevoir en termes de droit romain.(à suivre)