Si quelqu'un, en effet, veut aimer la vie et voir des jours heureux, qu'il préserve sa langue du mal et ses lèvres des paroles trompeuses, qu'il se détourne du mal et fasse le bien, qu'il recherche la paix et la poursuive. 1 Pierre 3:10-11 Les lèvres mensongères font horreur à l'Éternel, tandis que ceux qui agissent avec fidélité lui sont agréables. Proverbes 12:22 «C'est ce qui sort de l'homme qui le rend impur. En effet, c'est de l’intérieur, c'est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, les adultères, l'immoralité sexuelle, les meurtres, les vols, la soif de posséder, les méchancetés, la fraude, la débauche, le regard envieux, la calomnie, l'orgueil, la folie. Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l'homme impur.» Marc 7:20-23 Un témoin fidèle ne ment pas, tandis qu’un faux témoin dit des mensonges. Proverbes 14:5 « Vous, vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement et il ne s'est pas tenu dans la vérité parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il profère le mensonge, il parle de son propre fond, car il est menteur et le père du mensonge. » Jean 8:44 Si les paroles distinguées ne conviennent pas à un fou, les paroles mensongères conviennent d’autant moins à un noble. Proverbes 17:7 « Écarte de ta bouche la fausseté, éloigne de tes lèvres les détours ! Proverbes 4:24 Craindre l'Éternel, c'est détester le mal. L'arrogance, l'orgueil, la voie du mal et la bouche perverse, voilà ce que je déteste. » Proverbes 8:13 « Pierre lui dit : «Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu aies menti au Saint-Esprit et gardé une partie du prix du champ? […] Comment as-tu pu former dans ton cœur un projet pareil? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.»Actes 5:3-4Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort.Apocalypse 21.8
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mardi 25 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (9) par Père André BORRELY : Saint Augustin, un génie (trop) solitaire... (1)

Considérable aura été l'influence de St Augustin sur l'Occident chrétien jusqu'en ce 21ème siècle. En Europe occidentale, en Afrique du Nord, on s'exprimait et pensait en latin. A Constantinople, la langue parlée était le grec. Or, d'une part, le latin est une langue juridique et militaire, et d'autre part les Latins cessèrent de comprendre le grec. L'exemple le plus intéressant parce que le plus lourd de conséquences jusqu'à nos jours, est l'incapacité de la Romanité tardive à apprendre le grec à un homme comme saint Augustin. Celui-ci bâillait aux corneilles durant les cours de grec dans son adolescence et ne dépassa jamais, en grec, le niveau qu'atteignent nos bacheliers d'aujourd'hui, en latin. Lorsque Augustin composa son traité Sur la Trinité, l'absence d'ouvrages rédigés en latin sur le dogme trinitaire était à peu près complète. Ce qu'avaient publié sur ce sujet Tertullien, Novatien, Foebade d'Agen, Hilaire de Poitiers et Ambroise de Milan, était très inférieur à ce qu'à la même époque avaient aussi publié sur le même sujet s. Athanase, s. Basile, s. Grégoire de Nazianze, s. Grégoire de Nysse et Didyme l'Aveugle. Or, ces ouvrages n'avaient pas été traduits en latin pour la plupart. Un homme comme Tertullien, au 3ème siècle, était encore bilingue. Ce ne sera plus le cas d'Augustin. 

Selon que vous pensez en grec ou en latin vous ne pensez pas toujours la même réalité. Les Latins disent sacrement quand les Orthodoxes disent mystère. La mentalité occidentale a tendance à hypertrophier la pensée rationnelle et juridique au point de dessécher l'intelligence des symboles en insistant trop sur le concept juridique de validité. On est tenté de réduire le sacrement à ce qu'on pourrait appeler le minimum indispensable pour qu'il soit valide. D'une manière générale, ce qui. jusqu'à ce jour encore oppose le plus l'Orthodoxie et l'Occident chrétien, c'est la profondeur de la pénétration de la mentalité juridique dans toutes les manifestations de l'existence humaine : le mariage et le divorce, le péché et la confession, la rédemption et le salut, le sacerdoce et l'autorité dans l'Église. 
(à suivre)



samedi 22 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (8) par Père André BORRELY : Un autre Christianisme (2)

Tertullien
Cette approche foncièrement juridique, voire judiciaire du péché et du salut, a vu le jour avec Tertullien, qui fut le premier à le concevoir en termes de droit romain.

Elle s'est poursuivie avec St Ambroise, évêque de Milan et St Augustin qui tous deux considèrent la mort du Christ comme une satisfaction pour la peine due par le péché des hommes. Thomas d'Aquin fait sienne la définition augustinienne du péché et cette définition est juridique. Pour l'évêque d'Hippone comme pour Thomas, le péché consiste à vouloir retenir ou acquérir ce que ne permet pas la justice. C'est tout ce qui est contra legem aeternam, contre la loi éternelle. 

Augustin - Ambroise de Milan - Thomas d'Aquin

 Au contraire, en Russie, non seulement il ne s'est pas produit d'hypertrophie du sentiment de culpabilité, mais on a assisté à une contestation existentielle du juridisme. Les fols en Christ assumaient la culpabilité d'autrui sans protester. Ils transgressaient les conventions sociales, couraient le risque de l'irresponsabilité sociale. Ils contestaient l'imposture de ceux qui croient croire, les appelant ainsi à se convertir en manifestant eux-mêmes un dépouillement du moi si profond qu'ils étaient convaincus que le péché est le fait de tous, la croix commune de l'Église. Mais pas du tout dans le sens où l'a entendu la théologie occidentale du péché originel. L'Orient chrétien de l'Abbé Isaac n'a jamais admis que le Dieu qui est ontologiquement l'Amour puisse tenir pour coupable un petit d'homme qui vient de naître. 

Pour les Latins, ce n'est pas assez de voir le fils succéder à son père, il faut le voir s'identifier avec lui, de sorte qu'ils soient, non pas seulement l'un à la suite de l'autre, mais pour ainsi dire l'un dans l'autre, comme incorporés l'un à l'autre.

Tout le genre humain fait corps avec Adam. A travers la succession des générations humaines, une communauté radicale unit toute la multitude des êtres humains en un grand corps unique, étroitement soudé à son chef. Dans ce grand corps le péché originel s'écoule naturellement, de la tête dans tous les membres.



Mais ici nous devons mesurer l'influence considérable qu'exerça chez les Latins l’œuvre de St Augustin et notamment sa polémique contre Pélage et Julien d'Eclane. Le monde byzantin demeura étranger à la perspective occidentale. Pour l'Orthodoxie, le péché est nécessairement un acte libre de la personne, il ne saurait être expliqué par la nature. Le Patriarche St Photios considère comme une hérésie la croyance en un péché de nature, en une faute héréditaire, sexuellement transmissible. Il n'est de péché que personnel et qui engage la responsabilité et la liberté humaines. 

Il s'agit de bien traduire le 12ème verset du 5ème chapitre de l’Épitre aux Romains. 
La  première partie du verset ne fait pas problème : Διὰ τοῦτο (voilà pourquoi) ὥσπερ δι’ ἑνὸς ἀνθρώπου (de même que c'est par l'entremise d'un seul homme) ἡ ἁμαρτία εἰς τὸν κόσμον εἰσῆλθεν (que le péché a fait son entrée dans le monde) καὶ διὰ τῆς ἁμαρτίας ὁ θάνατος (et par la péché la mort) καὶ οὕτως εἰς πάντας ἀνθρώπους ὁ θάνατος διῆλθεν (et qu'ainsi la mort a passé dans tous les hommes)

Et voici le passage que Grecs et Latins ont compris de manière divergente. En grec, dans le seul texte considéré par tous les chrétiens comme normatif on lit : εφ'ω παντες ημαρτον. Parce que les chrétiens occidentaux (notamment les Allemands et les Français) sont très supérieurs aux Orthodoxes en matière d'exégèse historicocritique, ils savent depuis longtemps que les Latins, en traduisant εφ'ω παρ iv Θuο ont fait un beau contresens. En effet, ils ont traduit εφ'ω παντες ημαρτον par in quo ornes peccaverunt et ont compris en lequel — c'est-à-dire en Adam — tous ont péché, prenant ω pour un masculin alors que les Grecs y ont vu un neutre. La forme εφ' ω est une contraction entre επti et le pronom relatif ω au neutre. En 1915 déjà, le P. Lagrange écrivait : εφ'ω ne peut signifier « dans lequel», mais seulement «parce que». Il est inutile d'insister sur ce point reconnu par les exégètes catholiques les plus autorisés. Écrites en 1915, ces lignes honorent grandement le P. Lagrange. La traduction fidèle au texte grec est la suivante : Voilà pourquoi, de même que c'est par 1 `entremise d'un seul homme que le péché a fait son entrée dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort a passé en tous les hommes, parce que tous ont péché.
Ce qui est totalement incompréhensible, c'est qu'en 1931, 16 ans après la publication de la traduction de l'épître par le P. Lagrange, tel dominicain ait pu trouver profonde et vraiment nouvelle.., la grande doctrine augustine-thomiste de l'incorporation au premier homme. (à suivre)
 

mardi 18 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (7) par Père André BORRELY : Un autre Christianisme (1)

Genèse de la sécularisation en Occident

Venons-en alors au second texte de s.© Je ne vous aurai pas fait perdre votre temps et votre bienveillante attention sera récompensée si je parviens à vous faire sentir combien, d'une certaine façon, on a affaire, pourrait-on dire, à un autre Christianisme.

Voici donc ce qu'écrit l'Abbé Isaac : Ce n'est aucunement pour nous libérer des péchés, ou pour quelque autre motif que notre Seigneur est mort, mais uniquement afin que le monde ressente l'amour de Dieu pour sa création. Si cette admirable épopée n'avait eu d'autre raison que la rémission de nos péchés, il aurait suffi d'un autre moyen pour la réaliser ... N'ayons donc pas honte d'assumer une telle prise de conscience au sujet des mystères du Dessein de salut de notre Seigneur. Car; si nous leur donnons pour motif le rachat des péchés, nous diminuons tout à fait la portée de la mort du Christ et de sa venue dans le monde ... Alors, si nous n'avions pas péché, le Christ ne serait donc pas venu ni ne serait mort, car il n'y aurait pas eu de raison à ce que Dieu revêtît notre corps, qu'il a dû revêtir à cause des péchés du monde... Et si la mort n'avait pas dominé sur nous par la tyrannie du péché, ce mystère de la révélation dans la chair n'aurait pas existé, et les hommes et les anges auraient été coupés de toute cette lumière et de toute cette connaissance. Il conviendrait alors de rendre grâce au péché, puisque c'est à lui que nous devrions d'avoir reçu tous ces biens, et que c'est à lui qu'il nous faudrait attribuer toutes ces merveilles... Mais il n'en est pas ainsi ! De grâce ! Ne restons pas à la surface des Écritures...
(...) Bossuet avait été formé dans une tradition théologique selon laquelle, d'une part, le péché est essentiellement la transgression d'une loi et, d'autre part, l'Incarnation est une oeuvre de justice au moins autant que d'amour. 
Mais parler de mérite issu de notre libre-arbitre surnaturalisé par la grâce, c'est indiquer un type d'action ayant pour conséquence que la personne à l'égard de laquelle on mérite, nous doit, en retour de notre action, une récompense déterminée. Et dire que la liberté humaine a le pouvoir d'acquérir des mérites à l'égard de Dieu, c'est attribuer à cette liberté la capacité de déterminer en Dieu l'obligation de récompenser l'homme sous peine de se déjuger lui-même. D'aucuns en sont arrivés à parler de droit strict à la vie éternelle pour l'homme en état de grâce. Ceux-là avaient-ils lu, dans le troisième évangile, la parabole du pharisien et du publicain ? La même perspective essentiellement juridique a conduit nombre de chrétiens à considérer qu'après avoir reçu de Dieu le pardon, le ou la pénitent(e) doit encore fournir une expiation. C'est le propre d'une vision juridique de tout l'ensemble de la vie chrétienne de voir surtout dans le péché le fait d'enfreindre des principes formels et conventionnels, impersonnels et abstraits. On voit dans le pécheur l'homme qui contrevient à des règles utilitaires de comportement et de bienséance sociale. Le salut est alors senti comme une justification et une expiation individuelles. Ce que le Dr. Hesnard avait appelé en 1949 l'univers morbide de la faute envahi par la peur égocentrique de transgresser. Le confesseur devient une sorte de juge des âmes siégeant au tribunal de la pénitence. Cette approche foncièrement juridique, voire judiciaire du péché et du salut, a vu le jour avec Tertullien, qui fut le premier à le concevoir en termes de droit romain.(à suivre)

samedi 15 février 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (6) par Père André BORRELY : Le dévoiement de l'éloquence sacrée

Genèse de la sécularisation en Occident

J'en viens ainsi au texte de Bossuet. Le Vendredi saint 26 mars 1660, dans l'église parisienne des Minimes, Bossuet prononça une homélie dont voici un extrait:  "Il n'appartient qu'à Dieu de venger ses propres injures; et tant que sa main ne s'en mêle pas, les péchés ne un sont punis que faiblement ; à lui seul appartient de faire justice aux pécheurs : et lui seul a le bras assez puissant pour les traiter selon leur mérite. A moi, à moi, dit-il, la vengeance: eh ! Je leur saurai bien rendre ce qui leur est . Il fallait donc, mes frères, qu'il vînt lui-même contre son Fils avec toutes ses foudres, et puisqu'il avait mis en lui nos péchés, il y devait mettre aussi sa juste vengeance. Il 1'a fait, chrétiens, n'en doutons pas. C'est pourquoi le prophète Isaïe nous apprend que, non content de l'avoir livré à la volonté de ses ennemis, lui-même voulait être de la partie, l'a rompu et froissé par les coups de sa main toute-puissante. La malédiction de Dieu pénètre au-dedans et frappe Jésus-Christ dans ses puissances... Dieu lui montre cet œil enflammé : il le regarde, non de ce regard qui ramène la sérénité, mais de ce regard terrible qui allume le feu devant soi, dont il porte l'effroi dans les consciences ; il le regarde enfin comme un pécheur, et marche contre lui avec tout l'attirail de sa justice. "

Certes, je n'ignore pas le mot de Talleyrand : Tout ce qui est excessif est insignifiant. Cependant, on peut comparer ce texte à un verre grossissant. L'important est de lire le texte que grossit la loupe. Comment un évêque pouvait-il attirer un aussi grand nombre de fidèles et réaliser le tour de force d'introduire le sadisme dans la théologie de l'amour ? 

On n'aperçoit pas spontanément la différence qui pouvait séparer la volupté éprouvée par le Roi prétendument très-chrétien et sa Cour en écoutant Bossuet et la jouissance que les empereurs de la Rome païenne offraient aux contemporains de celles et de ceux dont Tertullien a pu dire : sanguis martyrum, semen christianorum, le sang des martyrs est une semence de chrétiens. Pas une fois Bossuet ne prononce le mot amour. Au contraire, dans une quinzaine de lignes seulement, Monsieur de Meaux accumule dix-sept mots ou membres de phrase qui présentent l'Incarnation comme une affaire judiciaire, comme une vendetta, une punition. Si l'Abbé Isaac s'était trouvé dans l'église des Minimes, le 26 mars 1660, je suis prêt à parier qu'il aurait eu le même comportement que l'Αρδtre Jean à Éphèse, selon Eusèbe de Césarée et St Irénée de Lyon:
Étant allé aux bains, il aperçut Cérinthe à l'intérieur ; il bondit alors hors des Thermes sans s'être baigné, en s'écriant : «Sauvons-nous, de peur que les Thermes ne s'écroulent, car à l'intérieur se trouve Cérinthe, l'ennemi de la vérité ! » Il est vrai que, dans le texte sur le cœur compatissant, l'Abbé Isaac prie en larmes à toute heure.., pour les ennemis de la vérité. Il aurait prié pour Bossuet, dans cette église au cours d'une célébration où on laissait cet évêque défigurer le christianisme et le rendre hideux. Mais la question de fond qui se pose est de savoir comment on avait pu en arriver là.

Un tel texte témoigne d'une conception globale de tout le Christianisme. On s'engage dans la perspective profondément anti-évangélique d'une théologie juridique du péché dont on croit que le contraire est la vertu alors que c'est la foi et l'amour. Une telle théologie ne peut s'inscrire que dans le contexte d'une théologie juridique de la rédemption et de la confession, avec les concepts de satisfaction, de mérite, d'expiation, de justification, etc. Petit à petit, le juridisme a métastasé dans toutes les manifestations de l'existence chrétienne : dans la conception des sacrements et particulièrement du mariage ainsi que de l'autorité et de la primauté dans l'Église. (à suivre)

jeudi 26 janvier 2012

DIVINISATION ou JUSTIFICATION ? "d'une planète à une autre" par André Borrely


"Toute une conception du christianisme qui n'a pas disparu et ne semble pas près de disparaître, ce dont le mouvement  œcuménique ferait bien de s'occuper."


Père André Borrely, est depuis des années préoccupé de  "contribuer, si modestement que ce fût, à redonner au mouvement  œcuménique le tonus spirituel qui présentement lui fait terriblement défaut"  autant que "d'annoncer la Bonne Nouvelle aux hommes du 21ème siècle d'une manière qui ne soit pas inacceptable pour eux, incompréhensible pour ne pas dire révoltante et méprisable, comme ce fut souvent le cas, hélas, dans le passé à cause de la caricature que firent trop souvent subir au christianisme les chrétiens les plus en vue." Il a fait paraître en février mars 2011 dans le numéro 135 de la Revue Orthodoxes à Marseille un article incontournable sur une des différences fondamentales qui séparent le christianisme occidental (catholicisme et protestantismes réunis) de l'Orthodoxie, je vous invite à en lire quelques extraits.

1. L'évêque de Meaux et celui de Ninive
[...] Il y a, dans l' oeuvre d'un homme comme Bossuet, telle page qui ne peut pas ne pas apparaître comme abominable aux yeux d'un agnostique ou d'un athée de notre temps. Dans son Sermon sur la Passion de Jésus-Christ, prêché le vendredi saint 26 mars 1660 dans l'église des Minimes, Bossuet montre jusqu'où peut aller une théologie du salut toute entière centrée sur les concepts de justice, de juste, de mérite, de justification, de punition, d'injure et qui ignore totalement l'idée de divinisation, le prédicateur préférant parler de la vengeance divine. Dans la peinture des souffrances de l'Homme-Dieu que ce sermon entend faire, J. Calvet, en 1930, appréciait la franchise de l'expression et un élément d'émotion et de beauté'. Nos contemporains — baptisés devenus agnostiques et athées et avec eux le chrétien que je m'efforce de devenir — ne peuvent voir dans un tel texte que l'expression d'un sadisme divin, expression qui fait de ce genre de littérature le plus puissant des émétiques' : Il n'appartient qu'à Dieu de venger ses propres injures; et tant que sa main ne s 'en mêle pas, les péchés ne sont punis que faiblement ; à lui seul appartient de faire, comme il faut, justice aux pécheurs; et lui seul a le bras assez puissant pour les traiter selon leur mérite. « A moi, à moi », dit-il, la vengeance : hé ! Je leur saurai bien rendre ce qui leur est dû ... Il fallait donc, mes frères, qu'il vînt lui-même contre son fils avec tous ses foudres, et puisqu'il avait mis en lui nos péchés, il y devait mettre aussi sa juste vengeance. Il l'a fait, Chrétiens, n'en doutons pas. C'est pourquoi le même prophète nous apprend que, non content de l'avoir livré à la volonté de ses ennemis, lui-même, voulant être de la partie, l'a rompu et froissé par les coups de sa main toute-puissante ... Jugez, Messieurs, où va ce supplice; ni les hommes ni les anges ne le peuvent jamais concevoir. 
Si maintenant quittant Bossuet, nous entreprenons de consulter un immense starets tel que saint Isaac le Syrien, nous passons véritablement d'une planète à. une autre. Et c'est là que l'on peut mesurer la profondeur abyssale, vertigineuse de l'erreur consistant à dévoyer l'œcuménisme en cherchant à en faire le moyen de parvenir à une union des  Églises qui ne réaliserait en rien l'unité de l'Église. Car enfin, ou bien c'est Bossuet qui témoigne de l'authenticité du christianisme, ou bien c'est l'Abbé Isaac. On ne peut pas ne pas convenir qu'il faut choisir. 
En effet on ne saurait imaginer un chrétien plus éloigné de Bossuet que l'Abbé Isaac (640-700) né dans l'actuel Qatar (dans le Golfe Persique). Ordonné évêque, il renonça, au bout de cinq mois seulement, à exercer ses fonctions épiscopales pour se retirer comme anachorète dans les montagnes. L'Abbé Isaac écrit : Il serait fort odieux et tout à fait blasphématoire de prétendre que la haine et le ressentiment existent chez Dieu, même envers les démons, ou de s'imaginer quelque autre faiblesse ou passion, ou tout ce qui serait impliqué dans l'idée de rémunération du bien ou du mal, sous la forme d'une rétribution, qui serait applicable à cette nature glorieuse... Ce n'est aucunement pour nous libérer des péchés, ou pour quelque autre motif ; que notre Seigneur est mort, mais uniquement afin que le monde ressente l'amour de Dieu pour sa création. Si cette admirable épopée' n'avait eu d'autre raison que la rémission de nos péchés, il aurait suffi d'un autre moyen pour la réaliser.... La miséricorde est opposée à la justice...l'usage que Dieu fait de sa justice ne fait pas le poids devant sa miséricorde... (l'Incarnation et la mort du Sauveur sur la croix eurent lieu) non pas pour nous racheter de nos péchés, ni pour aucune autre raison, mais uniquement afin que le monde se rendit compte de l'amour que Dieu porte à sa création ... L'amour de Dieu était ... l'unique motif de l'Incarnation du Verbe, et non pas la nécessité de racheter l'humanité du péché.*
Et je tiens à insister sur un point très important. Non seulement la recomposition de l'unité visible entre les chrétiens n'est envisageable que dans la direction indiquée par un starets de l'envergure spirituelle de l'Abbé Isaac, mais encore faut-il préciser que seule la manière dont ce dernier comprend la vie en Christ peut amener nos contemporains agnostiques ou athées à éprouver pour le christianisme du respect et non plus l'envie de le vomir. Certes, l'acte de foi ne peut être qu'un acte libre de la personne humaine."
*Hilarion Alfeyev. L'univers spirituel d'Isaac le Syrien Coll. Spiritualité orientale, n°76, 2001, pp. 46 ; 48-49. Isaac le Syrien. Œuvres spirituelles-II. 41 Discours récemment découverts. Coll. Spiritualité orientale, n°81, 2003,pp. 273-274.