L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (7) par Père André BORRELY : Un autre Christianisme (1)
Genèse de la sécularisation en Occident
Venons-en alors au second texte de s.© Je ne vous aurai pas fait perdre votre temps et votre bienveillante attention sera récompensée si je parviens à vous faire sentir combien, d'une certaine façon, on a affaire, pourrait-on dire, à un autre Christianisme.
Venons-en alors au second texte de s.© Je ne vous aurai pas fait perdre votre temps et votre bienveillante attention sera récompensée si je parviens à vous faire sentir combien, d'une certaine façon, on a affaire, pourrait-on dire, à un autre Christianisme.
Voici donc ce qu'écrit l'Abbé Isaac :
Ce n'est aucunement pour nous libérer des péchés, ou pour quelque autre motif que notre Seigneur est mort, mais uniquement afin que le monde ressente l'amour de Dieu pour sa création. Si cette admirable épopée n'avait eu d'autre raison que la rémission de nos péchés, il aurait suffi d'un autre moyen pour la réaliser ... N'ayons donc pas honte d'assumer une telle prise de conscience au sujet des mystères du Dessein de salut de notre Seigneur. Car; si nous leur donnons pour motif le rachat des péchés, nous diminuons tout à fait la portée de la mort du Christ et de sa venue dans le monde ... Alors, si nous n'avions pas péché, le Christ ne serait donc pas venu ni ne serait mort, car il n'y aurait pas eu de raison à ce que Dieu revêtît notre corps, qu'il a dû revêtir à cause des péchés du monde... Et si la mort n'avait pas dominé sur nous par la tyrannie du péché, ce mystère de la révélation dans la chair n'aurait pas existé, et les hommes et les anges auraient été coupés de toute cette lumière et de toute cette connaissance. Il conviendrait alors de rendre grâce au péché, puisque c'est à lui que nous devrions d'avoir reçu tous ces biens, et que c'est à lui qu'il nous faudrait attribuer toutes ces merveilles... Mais il n'en est pas ainsi ! De grâce ! Ne restons pas à la surface des Écritures...
(...) Bossuet avait été formé dans une tradition théologique selon laquelle, d'une part, le péché est essentiellement la transgression d'une loi et, d'autre part, l'Incarnation est une oeuvre de justice au moins autant que d'amour.
Mais parler de mérite issu de notre libre-arbitre surnaturalisé par la grâce, c'est indiquer un type d'action ayant pour conséquence que la personne à l'égard de laquelle on mérite, nous doit, en retour de notre action, une récompense déterminée. Et dire que la liberté humaine a le pouvoir d'acquérir des mérites à l'égard de Dieu, c'est attribuer à cette liberté la capacité de déterminer en Dieu l'obligation de récompenser l'homme sous peine de se déjuger lui-même. D'aucuns en sont arrivés à parler de droit strict à la vie éternelle pour l'homme en état de grâce. Ceux-là avaient-ils lu, dans le troisième évangile, la parabole du pharisien et du publicain ?
La même perspective essentiellement juridique a conduit nombre de chrétiens à considérer qu'après avoir reçu de Dieu le pardon, le ou la pénitent(e) doit encore fournir une expiation. C'est le propre d'une vision juridique de tout l'ensemble de la vie chrétienne de voir surtout dans le péché le fait d'enfreindre des principes formels et conventionnels, impersonnels et abstraits. On voit dans le pécheur l'homme qui contrevient à des règles utilitaires de comportement et de bienséance sociale. Le salut est alors senti comme une justification et une expiation individuelles. Ce que le Dr. Hesnard avait appelé en 1949 l'univers morbide de la faute envahi par la peur égocentrique de transgresser. Le confesseur devient une sorte de juge des âmes siégeant au tribunal de la pénitence.
Cette approche foncièrement juridique, voire judiciaire du péché et du salut, a vu le jour avec Tertullien, qui fut le premier à le concevoir en termes de droit romain.(à suivre)
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