Les lèvres mensongères font horreur à l'Éternel, tandis que ceux qui agissent avec fidélité lui sont agréables. Proverbes 12:22 «C'est ce qui sort de l'homme qui le rend impur. En effet, c'est de l’intérieur, c'est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, les adultères, l'immoralité sexuelle, les meurtres, les vols, la soif de posséder, les méchancetés, la fraude, la débauche, le regard envieux, la calomnie, l'orgueil, la folie. Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l'homme impur.» Marc 7:20-23 Un témoin fidèle ne ment pas, tandis qu’un faux témoin dit des mensonges. Proverbes 14:5 « Vous, vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement et il ne s'est pas tenu dans la vérité parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il profère le mensonge, il parle de son propre fond, car il est menteur et le père du mensonge. » Jean 8:44 Si les paroles distinguées ne conviennent pas à un fou, les paroles mensongères conviennent d’autant moins à un noble. Proverbes 17:7 « Écarte de ta bouche la fausseté, éloigne de tes lèvres les détours ! Proverbes 4:24 Craindre l'Éternel, c'est détester le mal. L'arrogance, l'orgueil, la voie du mal et la bouche perverse, voilà ce que je déteste. » Proverbes 8:13 « Pierre lui dit : «Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu aies menti au Saint-Esprit et gardé une partie du prix du champ? […] Comment as-tu pu former dans ton cœur un projet pareil? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.»Actes 5:3-4Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort.Apocalypse 21.8
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mercredi 1 août 2018

Le Pharisianisme, délice suprême du malin

La lecture dernier article Bigoterie de Laurence sur son blog  Chroniques de Pereslav m'a d'abord incité à en faire un petit commentaire sur son blog mais je n'ai pu résister à en faire un plus gros sur le mien que voici :


 Le Pharisianisme est ce qui réjouit hautement le malin:  quand le croyant se fait le premier persécuteur de ses "frères", le malin exulte.
Prétendre respecter et faire respecter les principes religieux au nom de Dieu jusqu'à considérer ses coreligionnaires comme l'ennemi à soumettre et à abattre, c'est économiser du travail pour le persécuteur numéro 1 des croyants, c'est pour lui "pain béni" c'est le cas de le dire.

Sectaire, fanatique, dominateur, tyrannique, totalitaire, orgueilleux et hypocrite, sans pitié ni miséricorde, prêt à juger, condamner, corriger, punir, frapper voire tuer s'il le faut pour (con)vaincre le pécheur désigné par le zélote,  tel est le pharisien de toutes les époques et de toutes les religions.

Le pharisaïsme se rabat systématiquement sur tout ce qui est désir de vie éternelle, d’infini, de divin. Pharisiens hypocrites les juifs de l’époque du Christ, Pharisiens hypocrites les juifs de notre époque, Pharisiens hypocrites les traditionalistes catholiques comme les protestants, Pharisiens hypocrites les musulmans, Pharisiens hypocrites les orthodoxes moralistes, ritualistes ou légalistes. Ce n’est pas difficile de comprendre le rejet de toute religion, sauf que le pharisaïsme est tout simplement une tentation constante de n’importe quelle religion, qu’elle soit laïque ou affirmée comme religion.

Le Christ authentique abhorre les pharisiens et sans cesse oppose la miséricorde à toute la sévérité hypocrite et mortifère des hommes de tous les temps.

Faut-il rappeler, à tous ces pseudo zélotes contemporains, l'Évangile que n'ont pas l'air d'avoir ni écouté, ni lu, ni étudié ces pharisiens intraitables…

Lire par exemple Matthieu 23  et voyez comme les insulte le Doux Seigneur…

Alors Jésus parla aux foules et à ses disciples, : en disant les scribes et les pharisiens se sont assis dans la chaire de Moïse.  Toutes les choses donc qu'ils vous disent, gardez-les et faites-les ; mais ne faites point selon leurs œuvres, car ils disent et ne font pas ; mais ils lient des fardeaux pesants et difficiles à porter, et les mettent sur les épaules des hommes, tandis qu'eux-mêmes, ils ne veulent pas les remuer du doigt.  Et toutes leurs œuvres, ils les font pour être vus des hommes ; car ils élargissent leurs phylactères, et ils allongent les franges de leurs vêtements.  Ils aiment la première place dans les festins, et les premiers sièges dans les synagogues, et les salutations dans les places publiques, et être appelés par les hommes : Rabbi, Rabbi !  Mais vous, ne vous faites point appeler Rabbi ; car un seul est votre Maître ; et vous tous, vous êtes frères. Et n'appelez personne sur la terre votre père ; car un seul est votre Père, celui qui est dans les cieux.  Et ne vous faites point appeler directeurs, car un seul est votre Directeur, le Christ. Mais le plus grand d'entre vous sera votre serviteur ;  et quiconque s'élèvera sera abaissé, et quiconque s'abaissera sera élevé.  
Mais malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous dévorez les maisons des veuves sous prétexte de faire de longues prières ; c'est pourquoi vous subirez un jugement plus rigoureux. 
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous fermez devant les hommes le royaume des cieux ; car vous-mêmes, vous n'y entrez point, et vous n'y laissez pas entrer ceux qui veulent entrer. 
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous parcourez la mer et la terre pour faire un seul prosélyte, et quand il l'est devenu, vous le rendez fils de la géhenne deux fois plus que vous. 
Malheur à vous, conducteurs aveugles ! qui dites : Si quelqu'un a juré par le temple, cela n'est rien ; mais celui qui a juré par l'or du temple est obligé. 
Insensés et aveugles ! car lequel est le plus grand, l'or, ou le temple qui a sanctifié l'or ?
 Et si quelqu'un, dites-vous, a juré par l'autel, cela n'est rien ; mais celui qui a juré par l'offrande qui est dessus, est obligé. 
Aveugles ! car lequel est le plus grand, l'offrande, ou l'autel qui sanctifie l'offrande ?  Celui donc qui a juré par l'autel, jure par l'autel et par tout ce qui est dessus ; et celui qui a juré par le temple, jure par le temple et par celui qui l'habite.  Et celui qui a juré par le ciel, jure par le trône de Dieu et par celui qui est assis dessus. 
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous payez la dîme de la menthe, et de l'aneth, et du cumin, et vous avez laissé de côté les charges plus lourdes de la loi, le jugement, et la miséricorde, et la fidélité. Voilà les choses qu'il fallait faire, et ne pas laisser de côté les autres. 
Conducteurs aveugles, qui coulez le moucheron, mais qui avalez le chameau. 
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous nettoyez le dehors de la coupe et du plat, mais au dedans ils sont pleins de rapine et d'intempérance.  Pharisien aveugle, nettoie premièrement le dedans de la coupe et du plat, afin que le dehors aussi devienne net. 
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous ressemblez à des sépulcres blanchis, qui paraissent beaux par dehors, mais qui, au dedans sont remplis d'ossements de morts et de toute impureté.  De même vous aussi, au dehors vous paraissez justes aux hommes, mais au dedans vous êtes pleins d'hypocrisie et d'iniquité. 
Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites ! parce que vous bâtissez les tombeaux des prophètes et ornez les sépulcres des justes,  et que vous dites : Si nous eussions été du temps de nos pères, nous n'eussions pas été leurs complices dans le meurtre des prophètes. Ainsi vous témoignez contre vous-mêmes que vous êtes fils de ceux qui ont tué les prophètes. Et vous, comblez la mesure de vos pères ! 
Serpents ! race de vipères ! comment pourrez-vous échapper au jugement de la géhenne ? C'est pourquoi, voici, je vous envoie des prophètes, et des sages, et des scribes ; il en est que vous ferez mourir et que vous crucifierez ; et il en est que vous fouetterez dans vos synagogues et que vous chasserez de ville en ville afin que vienne sur vous tout le sang juste répandu sur la terre, depuis le sang d'Abel, le juste, jusqu'au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez tué entre le temple et l'autel. 
En vérité, je vous dis que tout cela viendra sur cette génération. Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l'avez pas voulu ? Voici, votre maison vous est laissée déserte.  Car je vous le dis : vous ne me verrez plus, dès maintenant, jusqu'à ce que vous disiez : Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur.


Maxime le minime

jeudi 1 juin 2017

Pas vu pas pris ! Après moi le déluge ! Du passé faisons table rase !

Sur le site Contrepoints on peut lire cet extrait d’un article à propos du projet gouvernemental de

 « Moralisation de la vie politique » 


"EN DÉMOCRATIE, CHACUN CHOISIT SA MORALE[…] Il n’est pas question d’analyser ici les dispositions de la nouvelle loi en préparation, ni de traiter de sa pertinence. Il s’agit de dissocier droit et éthique et de rappeler que si le droit s’impose à tous, y compris aux politiciens, il n’existe aucune règle morale à caractère général et absolu en démocratie.Il est donc tout à fait abusif d’évoquer la « moralisation ». Pourquoi ? Parce que ce régime politique autorise chacun à choisir sa morale en toute liberté. La liberté de conscience permet à chaque personne de choisir ou de ne pas choisir sa religion, son idéologie, les principes qui vont déterminer ses actions.La morale de l’un n’est donc pas la morale de l’autre et personne ne peut considérer qu’une pratique quelconque est immorale de façon absolue. Tout juste peut-elle être contraire à la morale d’autrui.Il n’existe pas en démocratie de morale publique unanimement reconnue. Nous vivons aujourd’hui dans le relativisme moral puisqu’il n’existe plus de religion officielle imposant des contraintes éthiques.[…]" par Patrick Aulnas.
Voilà qui est dit de façon claire et directe et l’on peut en toute logique s’étonner en effet que La Morale – c’est-à-dire une morale universelle ou au moins commune à un peuple ou une culture – que l’on a chassée par la porte fasse son retour par la fenêtre…

Mais en vérité une morale s’est substituée à la précédente depuis pas mal de temps maintenant. Elle est caractérisée, assez simplement d’ailleurs, par l’impérieuse obligation – sévèrement sanctionnée en cas de contravention – de considérer comme nouvelle norme tout ce qui était naguère du domaine de la transgression et ceci dans tous les domaines. Plus brièvement il est désormais « normal » de transgresser ce qui était naguère « normal ». Ce qui est considéré comme faute (voire délit ou encore crime) concerne désormais non seulement tout acte contraire aux nouvelles bonnes mœurs mais, également, aussi bien l’expression sous toutes ses formes de la remise en question des nouvelles normes que toute « entrave » active à la nouvelle situation de liberté désormais acquise « de haute lutte » par toutes sortes de mouvements « de libération », activistes, militants et propagandistes depuis au moins les années 70. C’est en gros tout ce que l’on appelle le « politiquement correct ». Cela entraîne désormais la promulgation de lois, décrets et injonctions visant à traquer tout ce qui pour l’époque est « immoral » … On peut même dire qu’une nouvelle Inquisition s’est désormais installée qui n’a pas tardé à se mettre à l’ouvrage.
Étrangement, alors que tout comportement individuel, particulier, est donc reconnu par la loi et doit être socialement accepté par tous sans exception, sans restriction, il demeure un domaine qui ne semble pas touché par cette libéralisation tous azimuts c’est celui de l’argent.

C’est l’objet de l’article ci-dessus cité dont j’ai extrait un passage.

Alors pourquoi est-il permis, voire conseillé, de jouir de tout, à sa guise, sans que l’on admette la moindre contrainte, critique et encore moins censure sauf de l’acquisition de la richesse et de la réussite dans son entreprise ? Voilà qui heurte les principes d’un libéralisme cohérent.

Il semble simplement que tous puissent être consommateurs mais qu’ils doivent le rester sans se singulariser dans le domaine du gain de l’argent. Du moins au niveau du discours… parce qu’en réalité de nos jours, c’est le règne du « Pas vu pas pris !» qui domine accompagné immédiatement par « Après moi le déluge ! » et forcément soutenu par « Du passé faisons table rase ! ».  Bien entendu c’est le règne de l’hypocrisie et du mensonge.

Dans La Fable des abeilles, plus connue par son sous-titre, Les vices privés font le bien public (1705), Bernard Mandeville prend le contre-pied de la pensée classique : ce ne serait pas de la vertu mais de l’égoïsme de chacun qu’il faut attendre le bien public. Mandeville préfère les maisons closes aux maisons de charité, fait l’apologie de la cupidité, de l’exploitation et de la malhonnêteté, et déconsidère l’altruisme, la frugalité et la mesure.(source)

Il semble que nous soyons dans une époque transitoire qui peine à se débarrasser de toute cette « pensée classique » qui imposait des impératifs moraux empêchant de « jouir sans entraves » à son gré. C’est une époque où l’on a encore mauvaise conscience et où l’on n’est pas encore vraiment « libéré ». La conscience de la transgression des valeurs du passé demeure d’ailleurs au point que d’une part, l’on a besoin de militer périodiquement voire constamment pour s’en détacher en en rejetant violemment toute référence, et que l’on est obligé de vivre dans une totale hypocrisie, celle des vertus publiques faisant écran aux vices cachés. Du moins pour ce qui concerne l’argent. La censure demeure ici. On peut être malhonnête mais il faut être assez habile pour éviter que cela se sache. Somme toute, et pour faire (peut-être un peu) vite, le puritanisme anglo-saxon et/ou l’islam colleront assez bien à cette nouvelle mentalité qui rejette majoritairement la tradition chrétienne (assimilée à la morale catholique essentiellement) suspectée de tous les maux.  

Reste à penser ce que peut faire un chrétien orthodoxe dans cette situation s'il veut se préoccuper de société… L'Église orthodoxe russe a produit quelques années après l'Église catholique-romaine un document sur une doctrine sociale… et les deux collaborent pour "moraliser" sans doute la vie en société. Est-ce le bon chemin de l'Orthodoxie ?
Maxime le minime


  

lundi 1 décembre 2014

ORTHODOXIE, CATHOLICITÉ, DOGMES, HÉRÉSIES, ÉGLISE, PERSONNE, INDIVIDU… par Christos YANNARAS


Un philosophe et théologien orthodoxe grec déconstruit les poncifs occidentaux sur le Christianisme

"Depuis le schisme entre l'orient et l'occident, en 1054, les deux parties de la chrétienté ont choisi un nom : La première partie s'appelle « Église catholique romaine », et l'autre partie « Église catholique orthodoxe ».
Cela signifie que le problème se trouve exactement à la compréhension du terme catholique : catholicité.
Nous avons deux conceptions : une conception romaine, et une conception orthodoxe.

Le terme orthodoxe ne disait pas beaucoup de choses à l’époque du schisme. C’est par la suite qu’on a utilisé ce terme pour préciser que l'Église orthodoxe est celle qui continue la même tradition que les apôtres et les pères de l'Église ont créée.

Depuis, de nos jours le terme a pris d’autres sens différents voire plutôt péjoratifs. Nous parlons d’orthodoxie freudienne, d’orthodoxie marxiste. Dans ce sens il s’agit de rester fidèles à la lettre d'une doctrine, à la doctrine de Marx, à la doctrine de Freud. Dans le sens péjoratif que le terme a pris, orthodoxe peut connoter une posture de fidélité au modèle plutôt servile et donc dénuée du courage de dépasser l’original, un conservatisme stérile et dépassé.

À l’époque donc pour préciser la différence par rapport à l'hérésie, on utilisait le mot « catholique », « catholicité » ; pour distinguer l'Église réelle des hérésies, c'est-à-dire des imitations de l'Église, on disait l'église « catholique » à laquelle on opposait le terme d’hérésie. Hérésie, αίρεσης en grec signifie : le « choix », je fais un choix. Je prends un morceau [ c’est le sens premier du mot secte qui vient du latin sectum, participe passé du verbe secare qui signifie couper NDR] et je donne à ce morceau les dimensions et la valeur du tout.  Le partiel devient le tout. Ça c'est l’airesis (αίρεσης ). Tandis que la catholicité représente une autre réalité.

Dans l'Église des premiers siècles la catholicité signifiait la « plénitude de la réalisation de la vérité de l'église ». C'est pourquoi on appelait « Église catholique » chaque Église locale, chaque réunion eucharistique, chaque communauté eucharistique.

C’est-à-dire que la communauté eucharistique, la communauté qui se rassemble pour offrir l'eucharistie, c’est l'Église catholique c'est à dire l'Église en plénitude. C'est l'Église entière. Cette compréhension du terme catholique, on la trouve déjà chez Aristote ; pour la tradition hellénique, la catholicité signifiait être « complet », être « entier ».

Pour comprendre cette notion de catholicité de chaque église locale comme actualisation de l’Église en plénitude on peut prendre les exemples qui suivent.
Ainsi pour connaître ce qu'est l'amour maternel, par exemple, il n’est pas besoin de rassembler toutes les mères de l'univers et d’étudier tous les cas de mères qui pratiquent l'amour maternel, l’amour d’une seule mère contient tout l’amour maternel en soi, et chaque mère l’actualise chaque fois qu’elle l’exerce.

De même pour savoir ce que signifie l’éros, il n’est pas nécessaire de rassembler tous les couples amoureux du monde. Non. Il suffit d’ « un seul » couple de vrais amoureux pour avoir toute la vérité de l’éros, comme il suffit d’une vraie mère pour comprendre, pour voir, pour palper la totalité, la plénitude de l'amour maternel.

Il faut ici confronter langage et histoire pour comprendre le nouveau sens qu’a pris le terme de catholique.
Dans la période de la fin de l’empire romain d’occident, du IV° au VI °siècle, les populations en occident ont changé radicalement : de nouvelles races, de nouvelles nations sont entrées en Europe occidentale, elles ont démoli l'empire romain, elles ont créé une nouvelle situation historique, politique, sociale, etc... elles ont été baptisées, certes, mais parce qu'à l’époque, devenir chrétien, c'était un présupposé, une condition pour intégrer la civilisation.

De là a commencé leur progression, très lente, vers la civilisation et la culture.

À cette époque-là, chaque roi, ou chaque prince, ou chaque baron, qui avait un pouvoir dans la société féodale, qui régnait sur un domaine, et sur les hommes qui y vivaient, avait également la volonté de régner sur la religion dans son domaine, de la surveiller, de la contrôler et donc de prescrire ce qui était la norme en matière de christianisme. Il s’en est suivi que ce n’était plus l'Église qui avait la prérogative pour prendre les dispositions convenables de façon à ce que tous participent à la même réalité, au même mode d’existence.

De façon peut-être un peu schématique on pourrait faire le raccourci suivant : l'évêque de Rome, confronté à ce problème, l’a résolu en fondant une autre conception de la catholicité. Ce ne fut plus une conception « qualitative » ; la catholicité ne représentait plus, dans diverses circonstances concrètes, une actualisation de la vérité pleine et entière, mais on en eut une conception quantitative, et l’universalité de la vérité, la « catholicité », prit un sens géographique.

Les conséquences de ce choix sont décisives, car selon cette nouvelle conception, l'Église n'était alors plus précisée, définie par l'expérience, par la participation à l'événement ecclésial, à l'événement eucharistique, mais, par des critères objectifs : par exemple la fidélité à la doctrine, le respect de la « morale chrétienne ». Et quelqu’un, devait surveiller et contrôler cela, de sorte que les fidèles [en différents lieux] suivent vraiment les ordres d’un centre devenu nécessaire. Ce centre créé, il lui fallait une autorité, et pour asseoir cette autorité il fallait être « infaillible » on connait la suite…

Ainsi on a perdu, en occident, la conception de la catholicité de chaque église locale, le christianisme progressivement a glissé dans des conceptions « idéologiques », c'est pourquoi on insiste tellement (trop) sur la fidélité aux « dogmes », comme on dit. 

Mais qu'est-ce que c'était le dogme originellement ?

L'Église ne connaissait pas ce mot. Le mot « dogme » à l'époque de l'Évangile, on le trouve chez Luc qui écrit que le Caesar Auguste a produit un dogme. Que signifiait à l'époque « dogme » ?
Le mot provient du verbe δοκέω, c’est à dire « c'est mon avis », « je pense », « c’est mon opinion.
Cependant l'empereur de l'empire romain, utilisait cette formule en introduction à ses ordres, ses décrets (διάταγμα). Il disait par exemple : « Mon dogme...c'est mon dogme que je veux vous couper la tête », par exemple... « Voilà mon avis, il faut faire ça ! », mais ce qui peut sembler se présenter comme l’expression d’une simple opinion, était un décret impératif, une décision applicable obligatoirement pour tous. Ainsi, progressivement le terme dogme a pris un caractère d'obligation, et désormais on est obligé d'accepter ce que dit celui qui a l’autorité. Pourtant pendant huit siècles, sans conteste, l’Église n'a jamais utilisé le terme de « dogme ». Les décisions des conciles oecuméniques s'appelaient τερμίνη : ce qui signifie « extrémités », « frontières ». Frontière de quoi ? De l'expérience ecclésiale.

L'Église n'a pas une théorie à part, l'Église n'a rien à faire avec des idéologies. L'Église est tout d'abord et seulement une expérience : comment on peut participer à un mode de vie, à un mode de l'existence.
Cependant il a été nécessaire de trouver une formulation à cette expérience du moment que quelqu'un avait menacé cette expérience ; du moment que quelqu'un voudrait altérer cette expérience.
Voici encore un exemple parlant même s’il peut paraître naïf :
Tous, nous connaissons par expérience l'amour maternel. On ne devrait jamais avoir besoin de définir ce qu'est l'amour maternel.
Nous le connaissons tous ! Normalement tous ceux qui ont eu une mère, connaissent très bien ce que signifie l’amour maternel. Mais si la porte de notre maison s’ouvre, que quelqu’un entre et nous dit :
« Écoutez, l’amour maternel signifie ou suppose que la mère doit battre, battre son enfant dix fois par jour »… à ce moment là quelle sera votre réaction? Certainement vous répondrez « Non, ce que tu dis n'a rien à faire avec notre expérience, Notre expérience de l'amour maternel, n'a rien à faire avec ce que tu dis toi ! »
C'est exactement la même chose avec l’hérésie.

Quand les premières hérésies ont commencé de contester l'expérience ecclésiale, l’Église a été menacée. Qu'est-ce que c'est l'Église ? Pas l'institution, pas l'idéologie comme nous le comprenons aujourd’hui.
L'expérience ecclésiale était menacée et les chrétiens avaient besoin de protéger leur expérience, alors on a convoqué des conciles, et les conciles ont donné des définitions, des termini (τερμίνη), c'est-à-dire qu’ils ont dit que, par exemple pour revenir à mon exemple naïf : l’amour maternel c'est la tendresse etc... de la part de sa mère... Mais quelqu'un qui a perdu sa mère quand il était très petit, bébé, il n'a jamais connu l'amour maternel ; celui-ci, il peut comprendre la définition que nous donnons sur l'amour maternel, mais il ne connait pas l'amour maternel. Ça, c'est très essentiel. On peut très bien savoir - même un athée - que le Dieu de l'Église est un Dieu Trinitaire, sans connaitre vraiment le Dieu trinitaire, sans savoir ce que l'Église vit à travers cette foi-confiance en un Dieu trinitaire, et pas en une Puissance suprême, etc... etc…

Pour revenir à la catholicité.

Donc la catholicité a pris un caractère géographique, idéologique ; toutes les idéologies ont besoin immédiatement d'une autorité, d’un mécanisme qui contrôle les convictions : la foi devient conviction, la foi n'a plus le sens de la confiance, de la particiption à une « expérience ». Qu'est-ce que nous faisons dans l'Église ? Et pourquoi nous sommes sauvés dans l'Église ? Parce qu'on se donne à l'Église, on a confiance, on aime et on est aimé ; et ce que nous espérons, c'est que.... l'Église, c'est-à-dire le Christ, sa mère, les saints, nous prennent dans leur amour et nous amènent à la vie « vraie », à la plénitude de nos possibilités existentielles, c'est ça le sens du terme « salut ».

Aujourd'hui, la plupart des chrétiens, si l’on se fie à ce que l’on entend dans les prédications et qu’on lit dans les livres, ont l'impression que le salut c'est un exploit individuel, et chaque chrétien essaie de devenir digne d'être sauvé. Mais qu'est-ce que signifie « être sauvé » comme individu ? Si moi je suis sauvé et mon enfant ne l’est pas… Quelle sorte de salut, est-ce là ?
Je n'ai pas besoin d'un salut individuel. J'ai besoin d'un corps qui incarne le salut, c'est à dire la vie libre de toute les conditions du créé, la vie comme image et réalisation de l'existence trinitaire.
Comme nous le disons en orient, la nova Roma, la nouvelle Rome qui a succédé à l'empire romain, quelques siècles après, ( le schisme a eu lieu au XI° siècle), a été soumise au XV° siècle sous l'occupation ottomane. Pratiquement, cela signifie qu'elle était exclue de l’histoire.

Toute la tradition hellénique, alexandrine, syriaque, etc... des premiers siècles, a été effacée et l'occident est resté seul ; et en même temps, pas simplement seul. L’occident a développé, progressivement, une culture, une civilisation avec une caractéristique qui reste jusqu'à aujourd'hui une énigme ; avec un dynamisme universel. Quelle en est la cause ?
Cela peut s’expliquer par le fait que l'occident a créé une civilisation fondée sur la primauté, la priorité absolue de l’individu.

À la suite du philosophe américain Thomas Kuhn qui a offert un schéma qui est assez utile pour systématiser la différence des civilisations, on a commencé de parler de paradigmes ; nous avons donc des paradigmes culturels. Qu'est-ce que signifie un paradigme culturel ?

Cela signifie un mode d'existence et de co-existence qui fonctionne comme modèle pour plusieurs sociétés, pour un certain temps.

Par exemple, nous avons eu le paradigme newtonien, comme nous disons, c'est-à-dire : Toute notre vie, l'organisation de notre vie, la compréhension des conditions de la vie avec pour point de départ, on peut le dire, la physique de Newton. C'est-à-dire une conception de l'univers comme la somme des entités particulières. Des monades arithmétiques.
Ensuite on est passé au paradigme de la modernité, en restant plus ou moins fidèles au modèle newtonien. Malgré le progrès de la physique moderne, on reste encore emprisonné dans une image de l'univers et de la société - qui prime encore maintenant - comme somme des individus particuliers.
En grec, pour signifier « individu », nous avons le terme : atomon.
Atomon signifie une réalité une monade qu'on ne peut plus diviser, insécable. Si on prend un morceau de fer, par exemple, et qu’on le coupe au milieu, puis au milieu, puis au milieu, ainsi de suite... on arrive finalement à une monade qui n'est plus sécable. Ça, c'est le sens exact du terme atomon.

Cependant que nous continuons d'avoir cette conception, la physique moderne ou les sciences modernes, en général, progressent vers une conception de l'unité et aussi de la société comme un événement de relation, un dynamisme de relation, la relation se trouve au sein du monde, de la conception de l’individu ; la relation représente un événement, un dynamisme, quelque chose qu'on crée, tandis qu'un individu se définit comme monade arithmétique. Aujourd'hui dans nos sociétés, pour définir l’altérité de chacun de nous, nous avons une carte d'identité, un passeport, avec un numéro... Ce qui nous différencie, c'est le numéro, ce n'est pas l'altérité de l'existence de chacun de nous.

C’est ce qui structure la réalité humaine, la philosophie et l'Église aussi... L'Église a adopté le langage de son époque, et utilise le terme prosopon (πρόσωπο), qui est essentiellement différent. L’atomon (ατόμων ), l'individu, je répète est une monade arithmétique, le prosopo c'est une réalité. Le terme πρόσωπο est une synthèse de la préposition pros : vers quelque chose, et ops, génitif opos , qui signifie le visage. Alors le terme prosopon signifie j'ai le visage [orienté] vers quelqu'un, vers quelque chose, je suis avec en réalité, je suis en relation avec quelque chose.
C'est pourquoi nous ne pouvons connaître une personne humaine que, seulement par rapport à, à travers la relation avec elle.
Nous disons : « Vous connaissez monsieur X ? » - Non, non, j'ai entendu parlé de lui. Non, ça ce n'est pas une connaissance. «Vous le connaissez ? vous l'avez rencontré ? Vous avez une relation avec lui ? », et si cette relation avance, et vous pouvez parvenir à commencer « d'aimer » l'autre, c'est-à-dire mettre de côté les exigences de l'ego individuel, tous ses élans, ses instincts pour utiliser l'autre, posséder l’autre. Si on se libère de tout cela, on arrivera à aimer l'autre et, dès ce moment commence une autre connaissance de l'autre, de la personne, on reconnaît vraiment son altérité.
Alors le paradigme qui a été formé en occident après le schisme, et surtout à travers le développement au Moyen-Âge de la société médiévale, fut un modèle essentiellement et par principe individualiste.
La foi signifia des convictions individuelles, la morale représenta l'effort de chacun pour être fidèle aux ordres d'une loi, d’une conception de ce qu'il faut et ce qu'il ne faut pas, le salut fut vraiment une affaire proprement et purement individuelle ; tandis que dans l'Église tout ce qui est individuel est la mort. Pourquoi ? Parce que la mort c'est la conséquence naturelle des êtres créés. Quelque chose qui est créé, c'est-à-dire qui a un début, un commencement, est obligatoirement mortel, et arrive à sa fin ; tandis que si on transforme l'individu en une personne, ce que l'Église fait, alors on arrive à vaincre les conditions du créé, c'est pourquoi nous chantons la nuit de Pâques que le Christ par sa mort, a vaincu la mort, Il nous a donné cette possibilité de se libérer de la mort, c'est-à-dire d'arriver à réaliser en tant qu’Église ce que réalise l'événement existentiel que la Sainte Trinité : une vie libre de tout conditionnement, parce que c'est une existence qui s'identifie avec l'amour. La seule définition de Dieu que nous avons dans l'Église, c'est que Dieu « est » amour. L'amour n'est pas une qualité morale de Dieu c'est son mode d'existence. Et le mode d'existence de l'Église est exactement le même : se libérer de l'individualité et arriver à la réalité de l'amour, à la liberté de l'amour."
Christos Yannaras
(Reprise, modifications et tentative d’explicitation assumés par Maxime le minime, de la transcription littérale de la conférence de Christos Yannaras à la Paroisse Saint Jean de San Francisco (8 avril 2011) par D. Lorans-Nény - source)

dimanche 19 janvier 2014

L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE [3] par Père André BORRELY

Qu'est-ce donc que l'Orthodoxie?


La première partie du mot se retrouve dans orthographe, orthophoniste, orthopédie. En grec, ορθος est un adjectif indiquant une idée de rectitude, de correction.
Quant à la seconde partie, il s'agit du grec δοξα qui a le double sens d'opinion et de réputation qui est la somme des opinions que les gens ont de vous et s'ils sont très nombreux à avoir de vous une excellente opinion, vous entrez dans la gloire. L'Orthodoxie, c'est donc le fait d'avoir sur Dieu des opinions droites, exactes et d'autre part de rendre gloire à Dieu comme il convient. C'est la Lex credendi, la Règle de foi, et la Lex orandi, la Règle de prière des Latins. Si cette théologie est plus proche de la sagesse et de la prière liturgique que de la science, si elle prise fort l'intelligence sans jamais la confondre avec l'intellectualité, qui est souvent d'autant moins intelligente qu'elle est intellectuelle, si Dieu dans sa sagesse fit un berceau pour son Fils, c'est parce que l'on peut dire de la théologie telle que l'expérimente l'Orthodoxie ce que Shelley a écrit de l'expérience artistique : A thing of beauty is a joy for ever. Or, si la théologie orthodoxe sapientielle et liturgique est une source éternelle de joie, c'est parce que la totalité de la foi orthodoxe peut être résumée dans la formule célèbre de saint Athanase: Dieu est devenu homme afin que l'homme devienne Dieu. Tout le Christianisme est concentré dans l'événement de la divino-humanité. En la personne du Fils, le Dieu tri-unique expérimente la totalité de ce qui est humain, hormis le péché qui déshumanise l'homme. Mais si Dieu a pénétré l'humanité à une telle profondeur, comment ne pas se souvenir du récit de la création, dans le livre de la Genèse – Dieu vit que cela était rudement bon, fameux –, comment ne pas convenir que le corps ne saurait être tenu pour un tombeau, une prison, un appendice encombrant, que la matière ne saurait être mauvaise en soi dès lors que Dieu en fit un berceau pour son Fils. Je pense que de toutes les formes qu'a prises le Christianisme dans l'histoire, l'Orthodoxie est celle qui est allée le plus loin dans l'interprétation de la divino-humanité : son refus du moralisme, du juridisme et du pessimisme, la puissance festive et résurrectionnelle de ses célébrations liturgiques, sa familiarité avec l'événement de la mort, tout cela vient de la foi orthodoxe en la divino-humanité. Si l'Orthodoxie a quelque chose à offrir humblement mais résolument pour le partage œcuménique, c'est bien, me semble-t-il, la certitude que lorsque chacun d'entre nous – dans un mois, dans un an – frappera en tremblant aux portes du Royaume, on ne lui demandera pas s'il a été généreux mais vrai, on ne cherchera pas à savoir s'il aura été pur mais dur. Si convaincu que je sois de la véracité des paroles que prononce le prêtre orthodoxe au décours de chaque liturgie : το πλήρωμα της εκκλησίας σου φύλαξον, Κύριε, Seigneur, garde la plénitude de ton Église, je suis pareillement convaincu que l'Esprit souffle où il veut, c'est-à-dire au-delà des frontières visibles et conceptualisables de l'Orthodoxie. Aussi, permettez-moi d'évoquer un souvenir. Je venais de célébrer un enterrement et je me dirigeais avec mon épouse vers la sortie du cimetière. Nous entendîmes alors les pas de quelqu'un qui se hâtait de nous rejoindre. C'était un ami du défunt qui voulait me dire ceci : « Je tenais à vous remercier pour cette célébration et votre homélie. Je n'ai pas la foi, mais si je l'avais, c'est de cette manière que je voudrais l'avoir. » Cet agnostique avait senti qu'il y a dans l'Orthodoxie quelque chose de sui generis, de spécifique, que je voudrais tenter, non point de démontrer, de prouver, mais plutôt de suggérer, de balbutier, d'évoquer. (à suivre)