Comment est-ce qu’une chose, et surtout la connaissance d’un Dieu, peut le mieux s’acquérir ? par une démonstration, ou par l’énergie de la foi ? Et qu’est-ce qui précède ? La foi agissante, ou la démonstration par des discours ? Ces philosophes répondirent à cela que la foi active précédait, et que c’était elle qui donnait une connaissance certaine. Vous avez fort bien répondu, leur dit Antoine, parce que la foi procède de l’opération de l’âme ; tandis que la Dialectique ne procède que de l’art de ceux qui l’ont inventée. Et ainsi, les personnes qui ont une foi ferme, non seulement n’ont pas besoin de la démonstration des discours, mais elle leur est tout à fait inutile. Ainsi vous travaillez à établir par des raisons ce que nous connaissons très bien par le moyen de la foi, et souvent vous ne pouvez pas même expliquer par vos paroles les choses que nous concevons très facilement, parce que l’opération de la foi est beaucoup plus forte que tous vos arguments philosophiques.
Ainsi nous autres, chrétiens, nous n’établissons pas nos mystères sur la sagesse des raisonnements des Grecs, mais sur la puissance de la foi qui nous vient de Dieu par Jésus-Christ. Et pour vous faire connaître que ce que je dis est vrai, vous voyez que bien que nous ignorions les lettres, nous ne manquons pas de croire en Dieu, d’autant que nous jugeons par ce qu’il a fait, quelle est sa providence en toutes choses. Et pour vous témoigner encore combien notre foi est puissante, nous ne nous appuyons par elle que sur Jésus-Christ ; tandis que vous, vous vous appuyez sur des contestations de sophistes.
Mais ce qui est encore plus admirable, c’est que personne ne persécute votre religion. Elle est à l’honneur parmi vous dans toutes les villes. Les chrétiens au contraire sont persécutés ; et notre religion ne cesse pas toutefois de fleurir et de croître au préjudice de la vôtre. Les adorations que vous rendez aux idoles, bien qu’accompagnées des acclamations des peuples, et comme protégées de tous côtés par des remparts, ne cessent pas de s’affaiblir de jour en jour ; et au contraire, la foi que nous avons en Jésus-Christ, et la doctrine de l’Église, bien qu’elle passe pour ridicule parmi vous, et qu’elle ait été si souvent persécutée par les empereurs, s’est déjà répandue par toute la terre. Car quand a-t-on jamais vu la connaissance de Dieu reluire ainsi, la tempérance et la chasteté éclater à un si haut point et la mort être devenue méprisable, sinon depuis que la Croix de Jésus-Christ a commencé à paraître dans le monde ? Or qui peut douter de cela, en voyant dans l’Église tant de martyrs faire si peu de cas de la mort, par l’amour qu’ils ont pour Jésus-Christ, et tant de vierges, enflammées de ce même amour, conserver leurs corps si purs et si chastes ? N’avons-nous pas là des marques invincibles pour faire connaître que la foi en Jésus-Christ est la seule véritable foi pour honorer Dieu comme il doit l’être ? Et ne témoignez-vous pas que vous n’avez pas de foi, puisque pour appuyer votre croyance, vous n’avez recours qu’à des arguments ? Et nous, au contraire, selon ce qu’a dit notre Maître, nous ne nous appuyons pas sur les persuasions de la sagesse humaine, mais nous persuadons par la foi, qui précède manifestement tout cet appareil et toute cette recherche de discours et de paroles.