Les lèvres mensongères font horreur à l'Éternel, tandis que ceux qui agissent avec fidélité lui sont agréables. Proverbes 12:22 «C'est ce qui sort de l'homme qui le rend impur. En effet, c'est de l’intérieur, c'est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, les adultères, l'immoralité sexuelle, les meurtres, les vols, la soif de posséder, les méchancetés, la fraude, la débauche, le regard envieux, la calomnie, l'orgueil, la folie. Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l'homme impur.» Marc 7:20-23 Un témoin fidèle ne ment pas, tandis qu’un faux témoin dit des mensonges. Proverbes 14:5 « Vous, vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement et il ne s'est pas tenu dans la vérité parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il profère le mensonge, il parle de son propre fond, car il est menteur et le père du mensonge. » Jean 8:44 Si les paroles distinguées ne conviennent pas à un fou, les paroles mensongères conviennent d’autant moins à un noble. Proverbes 17:7 « Écarte de ta bouche la fausseté, éloigne de tes lèvres les détours ! Proverbes 4:24 Craindre l'Éternel, c'est détester le mal. L'arrogance, l'orgueil, la voie du mal et la bouche perverse, voilà ce que je déteste. » Proverbes 8:13 « Pierre lui dit : «Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu aies menti au Saint-Esprit et gardé une partie du prix du champ? […] Comment as-tu pu former dans ton cœur un projet pareil? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.»Actes 5:3-4Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort.Apocalypse 21.8
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lundi 7 décembre 2015

MISE AU POINT BRILLANTE DE CLAUDE SUR SON BLOG ORTHODOXOLOGIE

SUR LE BLOG DE CLAUDE
À LIRE ET RELIRE

Quelquefois je suis pris d'un certain découragement (St Ephrem prie Dieu pour moi !) à voir tous ces flirts obscènes (et donc de bien mauvais augure en vérité) entre des hiérarques présentés comme orthodoxes et des hétérodoxes qui ne pensent qu'à gonfler et satisfaire leur ego, déjà bien encombrant pour leur avancement spirituel, en soignant leur carrière internationale sans plus se préoccuper de leurs troupeaux interloqués, indignés voire révoltés et qui ont du mal à avaler une nourriture désormais autant industrielle qu'artificielle formatée comme la nourriture terrestre selon les lois impératives et intrusives de l'échange global de tous les biens à consommer…


extrait de La seconde venue du Christ par St Ephrem Le Syrien
"Chers frères,

Écoutez ce que je dois dire à propos de la Seconde et redoutable Venue de notre Seigneur et Dieu Jésus-Christ. […]

Les évêques seront invités à rendre des comptes sur leur mode de vie, ainsi que sur leur troupeau. Ils seront invités à rendre compte des moutons qui leur ont été confiés officiellement, qui leur ont été livrés par le Christ, berger suprême, de sorte qu'ils puissent conduire ces moutons au salut. Si par négligence quelque brebis a été perdue, le sang de la brebis perdue devra être payé par eux. De la même manière les prêtres seront jugés également ; ils rendront compte de leur paroisse. Et de la même manière chaque fidèle sera invité à rendre compte de sa maison, de sa femme, de ses enfants et de tous les autres membres de sa famille, et de la façon dont il les a nourris « par les mots et les conseils selon le Seigneur », comme l’Apôtre le commande. (Ephésiens 6: 4)
Tout sera étudié à propos de leurs œuvres et leurs actes, pour les rois et les archontes, les riches et les pauvres, les grands et les petits. "Nous allons tous comparaître devant le tribunal de Christ, afin que chacun puisse rendre compte de leurs mauvaises ou bonnes actions, qui ont été commis dans cette vie corporelle (2e Corinthe. 5:10)".
Les actes de chacun d'entre nous feront l'objet d'une enquête et seront révélés devant les anges et les hommes. Tous les ennemis du Christ seront destitués de tout pouvoir et leur autorité sera abolie (1Corinthiens 15:24). Puis, comme il est écrit, le mouton sera séparé d'avec les boucs (Matthieu 25:32)."


jeudi 20 novembre 2014

"Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous !" la prière des 3 vieillards

Il y a tout bientôt 6 ans, en 2008, j'avais publié ce texte de Tolstoï d'où est tiré ce film bienvenu, Vous êtes trois, nous sommes trois ! Film orthodoxe, le voici à nouveau. Il m'est cher à cause d'Oтец Илиа que j'aimais tant. Le Seigneur se souvienne de son humble serviteur prêtre Élie dans son Royaume. Puissiez-vous prendre plaisir à le lire ou le relire…


Père Élie [Oтец Илиа ] de Bienheureuse et éternelle Mémoire adorait cette histoire de Tolstoï qu'il trouvait drôle, elle me plaît beaucoup également et je la trouve pleine de divine sagesse même si l'on sait que l'auteur de ces "Histoires populaires de la Volga" d'où est tiré ce récit avait pris des distances "certaines" avec l'Église Orthodoxe pour développer ses propres mythes, illusions et utopies dont il aurait été bien inspiré de les soumettre pareillement à sa critique en l'alimentant avec le même humour voire la même insolence parfois.
J'en ai trouvé par bonheur la traduction sur WikiSource (Mille mercis au traducteur et à celui qui a mis en ligne le texte !) et je ne résiste pas à l'envie de vous la faire partager... cliquez sur "lire la suite" à la fin du texte du message pour savoir la fin savoureuse et édifiante de cette histoire.

« L’archevêque d’Arkhangelsk avait pris place sur un bateau qui faisait voile de cette ville au monastère de Solovki. Parmi les passagers se trouvaient aussi des pèlerins et de ceux que l’on nomme « saints ». Le vent soufflait en poupe, le temps était beau, il n’y avait ni roulis ni tangage. Les pèlerins, les uns couchés ou mangeant, les autres assis par tas, devisaient entre eux. L’archevêque sortit de sa cabine et se mit à marcher d’un bout à l’autre du pont. Arrivé à la proue, il vit un groupe qui s’y était rassemblé. De la main, un petit paysan désignait quelque chose au large et parlait tandis que les autres l’écoutaient. L’archevêque s’arrêta, regarda dans la direction indiquée par le petit paysan : rien de visible que la mer rutilant sous le soleil. L’archevêque s’approcha pour mieux écouter. Le petit paysan l’ayant aperçu ôta son bonnet et se tut. Les autres de même, à la vue de l’archevêque, se découvrirent et s’inclinèrent avec respect. – Ne vous gênez pas, mes amis, dit le prélat. Je suis venu, moi aussi, écouter ce que tu dis, brave homme. – Le petit pêcheur nous parlait des vieillards, dit un marchand qui s’était enhardi. – De quels vieillards s’agit-il ? demanda l’archevêque, et il vint près du bastingage s’asseoir sur une caisse. Raconte-moi donc cela, je t’écoute. Que montrais-tu ? – Là-bas, cet îlot qui pointe, dit le paysan en indiquant devant lui à bâbord. Il y a là-bas, dans cette île, des vieillards qui vivent pour le salut de leur âme. – Où donc y a-t-il une île ? demanda l’archevêque. – Tenez, veuillez regarder en suivant ma main. Voyez ce petit nuage, eh bien ! un peu à gauche au-dessous, il y a comme une bande étroite. L’archevêque regarda. L’eau miroitait au soleil. Faute d’habitude il n’apercevait rien. – Je ne la vois pas, dit-il. Et quels sont donc les vieillards qui vivent dans cette île ? – Des hommes de Dieu, répondit le paysan. Il y a longtemps que j’entends parler d’eux, mais je n’avais jamais eu l’occasion de les voir. Or, l’an dernier, je les ai vus. Et le pêcheur raconta comment, parti pour la pêche l’année précédente, une tempête l’avait jeté sur cet îlot qui lui était inconnu. Au matin, comme il explorait les lieux, il tomba sur une petite hutte au seuil de laquelle il vit un vieillard, et d’où ensuite deux autres sortirent. Ils lui donnèrent à manger, firent sécher ses vêtements et l’aidèrent à réparer son bateau. – Comment sont-ils d’aspect ? s’enquit l’archevêque. – L’un est petit, légèrement voûté, très vieux. Il porte une soutane vétuste et doit être plus que centenaire. La blancheur de sa barbe tourne au vert ; cependant il sourit toujours et il est pur comme un ange des cieux. L’autre, un peu plus grand, est vieux aussi et porte un caftan tout déguenillé. Sa barbe chenue s’étale, jaunâtre, mais l’homme est fort : il a retourné mon bateau comme un simple baquet avant que j’eusse le temps de lui donner un coup de main. Lui aussi a l’air radieux. Le troisième est très grand, sa barbe lui descend jusqu’aux genoux comme un fleuve de neige. Il est tout nu, sauf une natte en guise de ceinture. – Ont-ils causé avec toi ? demanda l’archevêque. – Ils besognaient en silence et se parlaient fort peu. Il leur suffit d’un regard pour qu’ils se comprennent. J’ai demandé au plus vieux s’ils vivaient là depuis longtemps. Il se renfrogna, murmura quelque chose, comme si décidément il était fâché. Mais aussitôt le petit vieux le saisit par la main, sourit, et le grand se tut. Rien qu’une parole de douceur et un sourire. Tandis que le paysan parlait ainsi, le navire s’était rapproché des îles. – Voici qu’on l’aperçoit tout à fait maintenant, dit le marchand. Veuillez la regarder, Éminence, ajouta-t-il avec un geste. L’archevêque regarda et il vit en effet une bande noire : c’était un îlot. L’archevêque regarda, puis il passa de l’avant du navire à l’arrière pour questionner le pilote. – Quel est donc cet îlot qu’on aperçoit là-bas ? – Il n’a pas de nom. Il y en a un grand nombre par ici. – Est-il vrai que trois vieillards y vivent pour le salut de leur âme ? – On le dit, Éminence. Mais je n’en sais rien. Des pêcheurs, à ce qu’on prétend, les auraient vus. Mais ce sont peut-être des racontars. – Je voudrais m’arrêter un peu dans cet îlot, voir ces vieillards, dit le prélat. Comment faire ? – Impossible au navire d’accoster, répondit le pilote. On le pourrait en canot ; mais il faut demander l’autorisation au commandant. On alla chercher le commandant. – Je voudrais voir ces vieillards, dit l’archevêque. Ne pourrait-on me conduire là-bas ? Le commandant eut une réponse évasive : – Pour ce qui est de pouvoir le faire, on peut le faire ; mais nous perdrons beaucoup de temps, et j’ose déclarer à Votre Éminence qu’il ne vaut vraiment pas la peine de les voir. J’ai entendu dire que ces vieillards étaient stupides. Ils ne comprennent rien et sont muets comme des carpes. – Je désire les voir, insista le prélat. Je paierai pour la peine : qu’on m’y conduise. Il n’y avait rien à faire. En conséquence, des ordres furent donnés aux matelots et l’on changea la disposition des voiles. Le pilote ayant tourné le gouvernail, le navire mit le cap sur l’île. On apporta une chaise à l’avant pour le prélat qui s’assit et regarda. Pendant ce temps, les pèlerins, qui s’étaient aussi rassemblés à l’avant, tenaient les yeux fixés vers l’île. Ceux dont les regards étaient le plus perçants voyaient déjà les pierres de l’île et montraient une petite hutte. Il y en eut même qui distinguaient les trois vieillards. Le commandant prit sa longue-vue, la braqua dans la direction, puis la passant à l’archevêque : – C’est exact, dit-il, voyez sur le rivage, à droite du gros rocher, il y a trois hommes debout. À son tour, l’archevêque regarda par la lunette après l’avoir mise au point. En effet, trois hommes étaient debout sur le rivage : l’un grand, l’autre moindre et le troisième de très petite taille. Ils se tenaient par la main. Le commandant s’approcha de l’archevêque : – C’est ici, Éminence, que nous devons stopper. Si vraiment vous y tenez, vous prendrez place dans un canot pendant que nous resterons à l’ancre. Aussitôt on dénoua les filins, jeta l’ancre, largua les voiles. Puis on retira le canot et on le mit à la mer. Des rameurs y sautèrent ; l’archevêque descendit par l’échelle. Quand il fut assis sur le banc du canot, les rameurs donnèrent une poussée sur leurs avirons et s’éloignèrent dans la direction de l’île. Arrivés à la distance d’un jet de pierre, ils virent apparaître les trois vieillards : un grand tout nu, ceint d’une natte ; un de taille moyenne au caftan déchiré et un petit, voûté, couvert d’une vieille soutane. Tous trois se tenaient par la main. Les rameurs s’arrêtèrent pour amarrer l’embarcation. L’archevêque descendit. Les vieillards firent un salut profond. L’archevêque les bénit, et eux le saluèrent encore plus bas. Puis l’archevêque leur adressa la parole : – J’ai entendu dire que vous étiez ici, vieillards du bon Dieu, afin de sauver votre âme en priant Notre Seigneur pour les péchés des hommes. Et j’y suis par la grâce de Dieu, moi indigne serviteur du Christ, appelé pour paître ses ouailles. Aussi ai-je voulu vous voir, hommes de Dieu, pour vous enseigner, si je le puis. Les vieillards sourirent en silence et se regardèrent. – Dites-moi comment vous faites votre salut et servez Dieu ? demanda le prélat. Le second des vieillards poussa un soupir et regarda le grand, puis le petit ; le grand se renfrogna et regarda le plus vieux. Quant à ce dernier, il dit avec un sourire : – Nous ignorons, serviteur de Dieu, comment on sert Dieu. Nous ne servons que nous-mêmes en pourvoyant à notre subsistance. – Comment faites-vous donc pour prier Dieu ? Et le petit vieux dit : – Nous prions en disant : « Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous. » Et à peine eut-il prononcé ces mots, que les trois vieillards levèrent les yeux vers le ciel et reprirent en chœur : – Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous. L’archevêque sourit et demanda : – Vous avez sans doute entendu parler de la sainte Trinité, mais vous ne priez pas comme il faut. Je vous aime beaucoup, vieillards du bon Dieu, je vois que vous voulez Lui être agréables, mais vous ne savez pas comment Le servir. Ce n’est pas ainsi qu’il faut prier. Écoutez-moi, je vais vous instruire. Ce n’est pas d’après moi-même que je vous enseignerai, mais d’après l’Ecriture sainte qui nous apprend comment Dieu a voulu qu’on Le prie. Et le prélat se mit à apprendre aux vieillards comment Dieu s’était révélé aux hommes : il leur parla de Dieu le Père, de Dieu le Fils et du Saint-Esprit… et il disait : – Dieu le Fils est descendu sur la terre pour sauver les hommes et leur enseigner à tous comment Le prier. Écoutez et répétez ensuite mes paroles. Et l’archevêque dit : – Notre Père. L’un des vieillards répéta : – Notre Père. Le second et le troisième à tour de rôle : – Notre Père. –… Qui êtes aux cieux. –… Qui êtes aux cieux… Mais le second des vieillards s’embrouilla dans les mots et ne prononça pas comme il fallait ; le vieillard nu ne parvenait pas non plus à bien articuler : les poils de sa moustache lui obstruaient les lèvres ; quant au petit vieux, un bredouillement inintelligible sortait de sa bouche édentée. L’archevêque répéta encore ; les vieillards répétèrent après lui. Ensuite le prélat s’assit sur une pierre et les vieillards, debout autour de lui, regardaient sa bouche et s’efforçaient de l’imiter pendant qu’il leur parlait. Toute la journée, jusqu’au soir, l’archevêque poursuivit sa tâche ; dix fois, vingt et cent fois il répétait le même mot, que les vieillards reprenaient ensuite. Quand ils s’embrouillaient, il les corrigeait en les obligeant à tout recommencer. L’archevêque ne quitta pas les vieillards qu’il ne leur eût enseigné tout le Pater. Ils étaient parvenus à le réciter d’eux-mêmes. Ce fut le second vieillard qui le comprit le plus vite et le redit tout d’une traite. Le prélat lui ordonna de le répéter plusieurs fois de suite jusqu’à ce que les autres eussent appris à le réciter. Le crépuscule tombait déjà et la lune montait de la mer quand l’archevêque se leva pour rejoindre le navire. Il prit congé des vieillards qui tous trois se prosternèrent devant lui. Le prélat les releva et, après avoir embrassé chacun d’eux, il les engagea à prier ainsi qu’il le leur avait enseigné. Puis il prit place dans l’embarcation et s’éloigna du rivage. Et tandis que l’archevêque revenait vers le navire, il entendit les trois vieillards réciter tout haut le Pater. Quand il accosta, on n’entendait plus leur voix, mais on les voyait encore au clair de lune, tous trois debout sur le même point du rivage, le plus petit au milieu, le grand à droite et le moyen à gauche. Une fois à bord, l’archevêque se dirigea vers l’avant, on leva l’ancre et le vent ayant gonflé les voiles poussa le navire qui reprit sa route. L’archevêque avait gagné la poupe et ne cessait de regarder l’îlot. Les vieillards étaient encore visibles, mais ils s’effacèrent bientôt, et l’on ne vit plus que l’îlot. Puis l’îlot s’évanouit de même, et il n’y eut plus que la mer qui scintillait au clair de lune. Les pèlerins s’étaient couchés pour dormir, et tout reposait sur le pont. Mais l’archevêque n’avait pas sommeil. Il se tenait seul à la poupe, regardant là-bas la mer où l’îlot avait disparu, et se rappelant les trois bons vieillards. Il songeait à leur joie quand ils eurent appris la prière. Et il remercia Dieu de l’avoir conduit là pour enseigner à ces vieillards les divines paroles. Assis sur le pont, l’archevêque songe en regardant la mer du côté où l’îlot a disparu. Soudain une lueur papillote à ses yeux : quelque chose comme une lumière qui vacille çà et là au gré des flots. Cela brille tout à coup et blanchoie sur le sillage lumineux de la lune. Est-ce un oiseau, une mouette, ou bien une voile qui pose cette tache de blancheur ? Le prélat cligne des yeux pour mieux voir : « C’est un bateau, se dit-il : sa voile nous suit. Il ne tardera certes pas à nous rejoindre. Tout à l’heure il était encore fort loin, maintenant on le distingue tout à fait. Et ce bateau n’a rien d’un bateau, la voile ne ressemble pas à une voile. Mais quelque chose court après nous et cherche à nous rattraper. » L’archevêque ne parvient pas à distinguer ce que c’est. Un bateau ? Non, et ce n’est pas un oiseau non plus. Un poisson ? Pas davantage. On dirait un homme ; mais il serait bien grand, et comment croire qu’un homme puisse marcher sur la mer ? L’archevêque se leva de son siège et alla trouver le pilote : – Regarde, qu’est-ce donc, frère ? Qu’y a-t-il là-bas ? demande l’archevêque. Mais déjà il voit que ce sont les trois vieillards. Ils marchent sur la mer, tout blancs, leurs barbes blanches resplendissent, et ils se rapprochent du navire qui a l’air d’être immobilisé. Le pilote regarde autour de lui, terrifié ; il quitte le gouvernail et crie tout haut : – Seigneur ! Les vieillards qui nous suivent en courant sur la mer comme sur la terre ferme ! Les pèlerins, qui avaient entendu, se levèrent et vinrent précipitamment sur le pont. Tous voyaient les vieillards accourir en se tenant par la main ; les deux du bout faisaient signe au navire de s’arrêter. Tous trois couraient sur l’eau comme sur la terre ferme, sans que leurs pieds parussent remuer. On n’eut pas le temps de stopper, que déjà ils étaient à hauteur du navire. Ils avancèrent tout près du bord, levèrent la tête et dirent d’une seule voix : – Serviteur de Dieu, nous avons oublié ton enseignement ! Tant que nous avons redit les mots, nous nous en sommes souvenus ; mais une heure après que nous eûmes cessé de les redire, un mot a sauté de notre mémoire. Nous avons tout oublié, tout s’est perdu. Nous ne nous rappelons rien de rien. Enseigne-nous de nouveau. L’archevêque fit un signe de croix, se pencha vers les vieillards et dit : – Votre prière a monté jusqu’à Dieu, saints vieillards. Ce n’est pas à moi de vous enseigner. Priez pour nous, pauvres pécheurs ! Et l’archevêque se prosterna devant les vieillards. Et les vieillards qui s’étaient arrêtés se détournèrent et reprirent leur chemin sur les eaux. Et jusqu’à l’aube il y eut une lueur sur la mer, du côté où les vieillards avaient disparu.

mercredi 11 juillet 2012

Démocratie et Orthodoxie

"La démocratie est le pire des régimes, à l'exception de tous les autres" (W. Churchill)


"Nous, français, très souvent nous confondons démοcratie et réρublique.
 Les espagnols, les anglais, les belges, les hollandais les scandinaves n'ont pas de leçon de démocratie à recevoir de nous et pourtant le régime politique auquel ils adhèrent très majoritairement est un régime monarchique et non pas républicain. 
En Grande-Bretagne comme en Espagne et en Belgique, la monarchie est dite parlementaire en ce sens que le chef du gouvernement, nommé par la reine ou le roi, est responsable devant le Parlement. Élisabeth II, Juan Carlos, Albert II sont les représentants de l'État au titre de Chefs de l`État, ce sont des arbitres, et les garants de la continuité des institutions. La Grande Bretagne, la Belgique, l'Espagne sont des démocraties non républicaines, des monarchies démocratiques, et inversement il existe des républiques autoritaires, voire dictatoriales et corrompues à un point tel qu'on ne peut parler de démocratie à leur sujet. Le fait même qu'on puisse qualifier de bananières* certaines républiques prouve qu'il ne suffit nullement qu'un régime soit républicain pour que l'on ait affaire à une démocratie. 

Le Vocabulaire technique et critique de la philosophie d'Αndré Lalande définit le mot démοcratie : État politique dans lequel la souveraineté appartient â la ιοtalité des citoyens, sans distinction de naissance, de fortune ou de capacité. Le mot vient du grec δημοκρατία, (= souveraineté du peuple) qui lui-même est composé de δημος /dêmοs (= peuple) et κράτος / kratοs, pouvoir, souveraineté. Toutefois, le mot dêmos évoque la notion plus restrictive de citoyens (la citoyenneté n'étant pas fοrcément donnée à toute la population.


Nous devons relativiser le concept de démocratie en nous référant au fait que l'Église n'est pas une démocratie, non point parce qu'elle ne le serait pas encore et qu'elle serait appelée à le devenir. A l'instar de l'Église romaine et à la différence du Protestantisme, l'Orthodoxie a un sacerdoce hiérarchique et sacramentel qui n'est pas une délégation reçue des fidèles, mais l'autorité, issue de l'ordination, permettant au prêtre et à l'évêque de célébrer et d'assurer à la communauté la garantie du témoignage apostolique. L'Église n'est pas la simple congrégation d'hommes adhérant à l'Évangile, une communauté indifférenciée, de type charismatique. Loin de vouloir donner en exemple quelques cas exceptionnels, l'Église a parfois pris position contre une approche trop démocratique de l'élection au sacerdoce. C'est ainsi que le 13° canon du Synode de Laodicée a formulé l'interdiction suivante : "On ne doit pas laisser á la foule l'élection de ceux qui sont destinés au sacerdoce". Qu'il soit catholique-romain ou orthodoxe, un prêtre n'est pas un pasteur dans le sens que les protestants donnent à ce mot pour désigner leurs ministres. Un pasteur protestant en retraite est comparable à un douanier ou à un instituteur retraité. Un prêtre est sacerdos in aeternum."
*A l'origine il s'est agi de pays peu développés, dont l'industrie reposait sur la seule production de bananes, et étaient dirigés par une petite ploutocratie autoritaireP. André Borrely

dimanche 20 mai 2012

Nouvelle lubie catholique : la hada œcuméniste !

ou comment faire flèche de tout bois...
et entraîner les naïfs(?) Protestants et Orthodoxes (voir l'article "Les fruits corrompus de l'œcuménisme" traduit par Claude ) qui ne connaissent semble-t-il véritablement rien des traditions bouddhistes ni rien non plus de la misère endémique de l'Eglise romaine qui la pousse à utiliser tout ce qu'elle peut trouver à l'est et à l'ouest voire en extrême-orient dans l'espoir de faire croire non seulement qu'elle est ouverte, œcuméniste , mais moderne, que dis-je "branchée" ! Bande de pauvres ploucs orthodoxes attardés ! Suivez donc notre exemple voyons ! Soyez à la page !

En réalité tout le monde sait qu'il n'y a plus grand monde dans ces églises romaines et qu'en outre ce qui s'y passe est affligeant la plupart du temps...

Je ne sais pas pourquoi les pompes romaines jouissent encore d'un tel prestige! 

L'on confond sans doute la beauté incontestable mais purement artistique des œuvres, la richesse, la magnificence et le caractère grandiose des édifices et des arts religieux issus de la chrétienté latine de la fin du Moyen-Âge avec la véritable profondeur spirituelle dont ils ne font aucunement preuve. L'on ne s'est pas encore aperçu que le passage de l'icône traditionnelle à la peinture réaliste accompagné du développement de la perspective effectué par les peintres du Trecento, par les Cimabue, les Simone Martini et les autres a entraîné le développement de l'art au détriment du spirituel jusqu'à en arriver en toute logique à transformer les lieux de culte en salles de concert ou en galerie de peinture (sans s'attarder sur les résidences secondaires, restaurants, boîtes de nuit etc.) et suivant irrésistiblement l'histoire de l'art à aboutir à la mort de l'art. L'art est mort et l'Eglise catholique romaine si elle n'est pas à l'agonie, il faut reconnaître qu'elle sent une drôle d'odeur....

La coquille est splendide mais... elle est vide !

Alors voilà un petit texte pour les Chrétiens ignorants des coutumes bouddhistes de type tibétain et qui pourraient stupidement croire que l'offrande d'une écharpe blanche passée autour du cou de celui à qui on l'offre serait de l'ordre de l'inspiration du Saint Esprit qui élirait de façon privilégiée sa demeure dans le clergé latin...


"Comment offrir la hada, un cadeau si précieux ? En général, quand on offre une hada, on la porte avec ses deux mains à hauteur d’épaules, puis tend les mains en avant en se courbant. Ainsi la hada arrive au niveau de la tête. La personne qui reçoit l’offrande doit pour ce faire la recueillir respectueusement des deux mains. La hada présente en somme les bonne intentions, la purté, la sincérité, le respect. Si on le précise, elle peut avoir des significations différentes selon les circonstances. A l’occasion d’une fête, on se la souhaite bonne en s’offrant une hada ; lors d’un mariage, on offre la hada aux mariés en espérant qu’ils restent unis et heureux jusqu’à la fin de leur vie ; et l’on peut également souhaiter la bienvenue à ses invités en leur présentant une hada. Au Tibet, on met même une petite étoffe de hada dans l’enveloppe avant de l’envoyer afin d’exprimer ses salutations. Une autre habitude intéressante est que les tibétains emportent une ou deux hadas avant de sortir, comme ça, s’ils tombent sur un ami ou un parent, ils peuvent la leur offrir. Mais on offre aussi des hadas dans des circonstances difficiles : par exemple, il est d’usage de passer une hada autour du cou d’une personne qui vient de décéder. On raconte qu’un jour, un serviteur, se trouvant démuni après la mort subite de son maître, un homme fortuné, ne trouva rien d’autre à faire que d’enrouler autour du cou du cadavre le licou de laine de sa vache. Plus tard cela devint une tradition. La tradition veut également que l’on mette une hada autour du cou d’un lama qui vient de partir pour l’autre monde. Par ce geste, on lui souhaite une prompte renaissance, ainsi qu’une réincarnation indubitablement reconnue."

mercredi 20 janvier 2010

POURQUOI JE SUIS UN ANTIŒCUMÉNISTE CONVAINCU…





 À propos de la semaine de l'unité et toute l'année, voici quelques arguments de différents ordres d'un chrétien orthodoxe ordinaire sans la moindre prétention théologique académique  :

  • Argument purement orthodoxe : ceux qui se sont séparés historiquement, théologiquement et spirituellement de l’Eglise doivent tout simplement y revenir en se débarrassant de leurs erreurs, car du schisme ils sont passés bien souvent à l’hérésie et ont perdu la source en ne s’abreuvant qu’à des dérivations dont les eaux sont pour le moins mêlées, peu potables et déconseillées pour la santé spirituelle. Dans l'histoire de l'Eglise, tant que le Patriarche romain demeurait fidèle à la Tradition orthodoxe , il était perçu comme garant de l'Orthodoxie, et pouvait être sollicité comme Primus (inter pares tout de même) mais à partir du moment où l'ego devient une tradition qui se pétrifie en statut (excusez les jeux de mots) le recours devient impossible et la Réforme qui a donné des légions d'ecclésioles n'a fait qu'imiter le geste inaugural romain.

- Alors bon, on peut taxer ça de sectarisme mais c’est tout simplement cohérent avec l’appellation "orthodoxe" ce ne peut qu’avoir une définition précise en dehors de laquelle on ne l’est pas. On est libre de ne pas adhérer… Personnellement je reste dans l’Orthodoxie parce qu’il est clair que c’est l’Eglise des origines, quelles que soient les prétentions des autres assemblées.
  • Argument concernant la spiritualité : je n’ai pas expérimenté dans ma chair de tout mon être, corps, âme et esprit, sans me payer de mots, pendant toutes ces années, cette recherche authentique de Dieu qui m’a vu partir d’un athéisme militant pour pratiquer ensuite différentes écoles bouddhiques avec chacune sa tradition forte… pour me joindre à un chœur dissonant ou chacun chante la partition qui lui « chante » et qui ne produit qu’une terrible cacophonie (dans tous les sens du mots), empruntant tout à tous, sans forcément le dire, ou comme si cela allait de soi. Utilisant tout hors contexte, sans les modes d’emploi idoines, tout en ayant perdu toute véritable tradition (qui implique une transmission ininterrompue de maître à disciple) et valorisant cette perte au nom d’un aggiornamento sans fin qu’il faudrait imiter. Et ainsi chargé de ce bazar hétéroclite, ne renonçant toujours pas officiellement à ses prétentions à apporter seul le salut au monde mais plutôt à regrouper tout le monde sous sa houlette. Non, il n'est pas très sûr de trouver là désormais quelque substantifique nourriture. L’authentique tradition orthodoxe me l’apporte, seule. Foin de ces mélanges indigestes.
- Alors là excusez-moi, je n’y peux rien c’est mon tempérament, mais l’expérimentation a à mes yeux une valeur (vieux précepte bouddhique sans doute me direz-vous... soit) qui prime sur la théorie, la théologie et la théocratie, donc, désolé, mais là encore c’est l’Orthodoxie que le Ciel m’a donnée en fin de compte et Il doit savoir ce qu’Il fait. J'y reste.

  • Arguments concernant la logique, la cohérence et la congruence : encore une fois l’Orthodoxie est une véritable Tradition, c'est-à-dire que non seulement elle n’existe pas sans transmission spirituelle véritable (d’où la place des moines et du peuple ordinaire et pas seulement des prélats dans les conciles et l’histoire de l’Eglise) mais que chaque élément de l’ensemble entre en résonance avec chaque autre élément et avec l’ensemble. L’on ne saurait détacher, détourner, extraire, ou déformer un de ces éléments sans que l’ensemble en soit affecté, d’où l’importance de ce que les détracteurs appellent les « querelles byzantines ». Il y a également congruence au sens de Carl Rogers c’est à dire correspondance exacte entre l'expérience et la prise de conscience. C’est ainsi qu'« un théologien, dit Évagre, est quelqu'un qui sait prier, et celui qui prie en esprit et en vérité est un théologien » (in Sur la prière). L’Orthodoxie avant tout n’est pas une institution bureaucratique, malgré l’inévitable manifestation récurrente de l’ego de quelques hiérarques haut placés, c’est du point de vue de son fonctionnement historique malgré les ratés, un système qui a sa cohérence et tout mélange créerait un parasitage peu profitable à l’avancement spirituel de chacun. On est loin des emprunts successifs autant qu’hasardeux de l’Eglise catholique moderne.

- Que dirais-je de plus si ce n’est qu’il n’y a rien là qui doive être harmonisé avec tout autre voie spirituelle, confession ou religion. Chaque système a sa cohérence et il serait néfaste à tous et contreproductif de faire un syncrétisme de mauvais aloi.

  • Argument concernant « l’unité transcendante des religions » : J’ai expérimenté différentes écoles bouddhiques et je peux dire qu’à aucun moment, même si chaque école se revendique comme héritière du Bouddha historique, il ne viendrait à l’idée d’aucune de faire une méditation commune avec une autre école.. Chacune a sa lignée de patriarches et de maîtres dans une transmission ininterrompue et s’il y a eu quelquefois quelques emprunts et des pratiques communes, chacune reste fidèle à sa tradition. D'ailleurs dès qu'un disciple s'est senti en désaccord avec son école il est allé fonder sa propre école à laquelle ses disciples sont restés fidèles. A l’intérieur même d’une grande école comme le Zen, le Soto diffère du Rinzai entre autres et chacun accorde le plus grand soin à la perpétuation fidèle de sa doctrine et de sa pratique. Ainsi en est-il également dans le Bouddhisme ésotérique du Tibet par exemple, chaque école, et elles sont nombreuses, reste fidèle à la transmission de sa lignée de maîtres, a une totale confiance en son enseignement et nulle idéologie globalisante ne saurait l’en dissuader au nom du Bouddha universel. Pourtant en Asie dans une grande tolérance l’on incline à penser non que tous les chemins mènent à Rome – mille excuses pour les œcuménistes stratégiques nostalggiques de l'empire – mais que chaque chemin mène au sommet de la montagne à condition de rester fidèle à la voie choisie.

Enfin voici pour finir, bien que j'en trouverais bien d'autres, un dernier argument :

  • Argument consensuel (?) : à l'intérieur d'une même Eglise, d'une même paroisse même si tout le monde suit les mêmes enseignements, les mêmes pratiques, les mêmes rites, il m'arrive bien souvent de penser que nous ne vivons pas la foi de la même façon voire que les gens n'ont pas tout à fait la même foi... est-ce à dire qu'il faudrait réunir les gens pour qu'ils expliquent comment et pourquoi et leur demander d'harmoniser à tout prix pour témoigner ensemble selon une même apparence aux yeux des autres ? Cela me paraît aussi irréaliste que de vouloir faire arriver tout le monde en même temps dans une course. Chacun suit son chemin spirituel à son rythme avec ce qui lui a été légué par ses ancêtres, son milieu familial, social, culturel, génétique et la grâce de Dieu, et chacun se débrouille avec ses bagages qui ne sont pas ceux du voisin ni par leur poids ni par leur nature...L'avantage d'être dans la même Eglise tout de même c'est d'avoir des points de repère communs, et l'avantage d'être dans l'Eglise orthodoxe c'est d'avoir des points de repère inchangés depuis des siècles et qui ont donné leurs fruits, ça aide. Que chacun cueille à l'arbre qui lui convient ! Attention tout de même, on en connaît qui se sont fourvoyés il y a fort longtemps et ça n'a pas donné de très bons résultats...

Voilà, cela me paraît suffisant pour non seulement ne pas être œcuméniste mais être même anti œcuméniste. Un seul argument pourrait vous heurter : celui qui se fonde sur ce que nous Orthodoxes avons le culot d’appeler la Vérité, et l’unique Eglise de Dieu, mais les autres devraient vous inciter à réfléchir et à cultiver votre propre jardin au lieu de chercher à tout mélanger en un tout indifférencié, sans couleur, sans saveur et sans odeur, universel quoi, autrement dit œcuménique. L’origine de l’hérésie est l’orgueil c’est toute la problématique du péché ancestral. Vouloir être comme des dieux, se substituer à Dieu pour recréer tout, par nous-mêmes les hommes, avec nos seules capacités, y compris l’Unité entre les hommes par la force, ou par la ruse.

Oh ! Cela donne des résultats, c’est vrai : plus on s’efforce de créer l’unité en forçant, ou en trompant le peuple par toutes sortes de subterfuges, plus on crée de la division, et devinez chez qui ? - Chez les Orthodoxes !… Diviser pour régner ? Oui c’est bien connu et efficace.
Que signifie le mot diable ? Entre autres, le Diviseur. A bon entendeur salut. Que chacun choisisse son camp ! Dieu reconnaîtra les siens…

PS: Faut-il encore une fois rappeler que s'efforcer de suivre la voie orthodoxe avec le plus de fidélité et de conviction possibles, n'empêche pas de considérer à priori tout être humain comme un frère. Et si le fidèle orthodoxe n'a pas du tout l'intention de faire de petits arrangements diplomatiques avec sa foi pour ménager la chèvre et le choux, rien ne l'empêche, non seulement de respecter tous ceux qui  -selon sa foi - sont dans l'errance, mais également de manger à leur table, de les inviter, les héberger, les soigner, les aider, voire les aimer tout simplement et d'être prêt à donner sa vie pour les défendre des hommes méchants. Nul besoin de savoir à quelle communauté appartient la personne à qui on sourit et vers qui va vers notre sympathie… Quoiqu'il soit de plus en plus préférable, de nos jours, de savoir si l'on en réalité affaire à un ennemi, car, bien que le Seigneur nous ait invité à aimer notre ennemi (Matthieu 5,44), Il n'a jamais dit que nous n'avions pas d'ennemis par là-même. À quoi il faut ajouter non seulement qu'il ne faut pas donner de perles à des cochons  (Matthieu 7,6) et que la véritable compassion n'exclut pas quelquefois la sévérité la plus grande dans les paroles (Matthieu 23) comme dans les actes (Jean 12, 13-16)…
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mardi 19 janvier 2010

Laissez-les : ce sont des aveugles qui conduisent des aveugles...

"...si un aveugle conduit un aveugle,
ils tomberont tous deux dans une fosse
(Mathieu XV,14)

Les aveugles
Contemple-les, mon âme; ils sont vraiment affreux !
Pareils aux mannequins; vaguement ridicules;
Terribles, singuliers comme les somnambules;
Dardant on ne sait où leurs globes ténébreux.
Leurs yeux, d'où la divine étincelle est partie,
Comme s'ils regardaient au loin, restent levés
Au ciel;  on ne les voit jamais vers les pavés
Pencher rêveusement leur tête appesantie.
Ils traversent ainsi le noir illimité,
Ce frère du silence éternel. O cité !
Pendant qu'autour de nous tu chantes, ris et beugles,
Eprise du plaisir jusqu'à l'atrocité,
Vois! je me traîne aussi ! mais, plus qu'eux hébété,
Je dis : Que cherchent-ils au Ciel, tous ces aveugles ?
                             Baudelaire, Les Fleurs du Mal (XCII)

lundi 18 janvier 2010

ANAXIOS ! ἀνάξιος ! Un point c'est tout !



Dans l'ancienne version de mon blog j'avais titré à propos du blog de Ptimoine
"Moinillon à la libre parole"
Cela s'est avéré bien justifié très souvent...
Bravo pour la liberté d'expression et la défense de l'Orthodoxie !
C'est toujours le peuple orthodoxe ordinaire en communion avec ses moines
qui a rectifié les errances des hiérarques "un peu trop philautistes"
préférant sacrifier sur l'autel de ce qu'ils pensaient être l'intérêt de leur carrière
la Vérité et la Justice... et leur avancement spirituel par la même occasion.

C'est >><< que ça se passe ... c'est pas joli joli...
et ce n'est pas parce que je n'ai pas beaucoup de temps en ce moment que je vais laisser passer ça.

Un pasteur indigne ça existe
ça a toujours existé
mais ce n'est pas une raison pour le taire
ANAXIOS cela signifie INDIGNE !
Allez ZOU ! Du balai !
Chez lez Ktos et puis c'est tout, chacun dans son pré et les vaches...

mercredi 31 décembre 2008

DECLARATION COMMUNE DES HIERARQUES DES DIFFERENTES EGLISES en Terre Sainte sur les évènements meurtriers actuellement en cours dans la bande de Gaza

"Nous, les Patriarches, les Evêques et les chefs des Eglises chrétiennes à Jérusalem, profondément inquiets et choqués, suivons avec regret la guerre qui fait rage actuellement dans la bande de Gaza et la destruction, le meurtre et l'effusion de sang, en particulier à un moment où nous célébrons Noël, la naissance du Roi de l'amour et de paix.

En même temps que nous exprimons notre profonde tristesse à l'occasion du nouveau cycle de violence entre Israéliens et Palestiniens et de l'absence de paix dans notre Terre Sainte, nous dénonçons la poursuite des hostilités dans la bande de Gaza et de toutes les formes de violence et de meurtres de toutes les parties. Nous estimons que la poursuite de cette effusion de sang et cette violence ne conduiront pas à la paix et la justice mais nourriront davantage la haine et l’hostilité - et par là la poursuite de l'affrontement entre les deux peuples.

En conséquence, nous demandons à tous les officiels des deux parties du conflit de revenir à la raison et de s'abstenir de tous actes de violence, qui n’apportent que destruction et tragédie, et leur demandons instamment en revanche de travailler à résoudre leurs différends par des moyens pacifiques et non violents.

Nous appelons également la communauté internationale à assumer ses responsabilités et à intervenir activement et immédiatement pour arrêter l'effusion de sang et mettre fin à toute forme de confrontation, et à travailler dur et fort pour mettre un terme à la confrontation et supprimer les causes de conflit entre les deux peuples ; et enfin à résoudre le conflit israélo-palestinien avec une solution juste et globale fondée sur les résolutions internationales.

Aux différentes factions palestiniennes, nous disons: Il est temps de mettre fin à votre division et de régler vos différends. Nous demandons à toutes les factions à ce moment particulier de mettre les intérêts du peuple palestinien au-dessus des intérêts personnels des factions et de se diriger immédiatement vers la réconciliation nationale en utilisant tous les moyens non violents pour parvenir à une paix juste et globale dans la région.

Enfin, nous élevons nos prières vers l'Enfant dans la mangeoire pour qu’Il inspire les autorités et les décideurs des deux côtés, les Israéliens et les Palestiniens, de prendre des mesures immédiates pour mettre fin à la situation tragique actuelle dans la bande de Gaza. Nous prions pour les victimes, les blessés et les cœurs brisés. Puisse, le Seigneur Dieu Tout-Puissant accorder à tous ceux qui ont perdu des êtres chers la consolation et la patience. Nous prions pour tous ceux qui vivent dans la panique et la peur : Puisse Dieu les bénir dans le calme, la tranquillité et la paix véritable.

Nous demandons à tous d'observer le dimanche prochain, 4 Janvier, comme une journée pour la justice et la paix dans la terre de la paix."

+ Patriarche Théophile III, Patriarcat grec orthodoxe
+ Patriarche Fouad Twal, Patriarcat Latin.
+ Patriarche Torkom II, Patriarcat apostolique arménien orthodoxe.
+ P.Pier Battista Pizzaballa, ofm, Custode de la Terre Sainte
+ Anba Abraham, Patriarcat orthodoxe copte.
+ Archevêque Swerios Malki Mourad, Patriarcat orthodoxe syrien.
+ Abune Matthias, Patriarcat orthodoxe éthiopien
+ Mgr Paul Nabil Sayyah, Exarchat patriarcal maronite.
+ Évêque Suheil Dawani, Eglise épiscopale de Jérusalem et du Moyen-Orient.
+ Évêque Munib Younan, Eglise évangélique luthérienne de Jordanie et de Terre Sainte.
+ Mgr Pierre Malki, Exarchat patriarcal syro-catholique
+ Mgr Youssef Zre'i, exarchat patriarcal gréco-catholique.
+ P.Raphael Minassian, Exarchat catholique patriarcal arménien

(Traduction de l'anglais en français par Maxime)

mercredi 3 décembre 2008

Tolstoï : "Les trois vieillards" « Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous. »


Père Élie [Oтец Илиа ] de Bienheureuse et éternelle Mémoire adorait cette histoire de Tolstoï qu'il trouvait drôle, elle me plaît beaucoup également et je la trouve pleine de divine sagesse même si l'on sait que l'auteur de ces "Histoires populaires de la Volga" d'où est tiré ce récit avait pris des distances "certaines" avec l'Église Orthodoxe pour développer ses propres mythes, illusions et utopies dont il aurait été bien inspiré de les soumettre pareillement à sa critique en l'alimentant avec le même humour voire la même insolence parfois.
J'en ai trouvé par bonheur la traduction sur WikiSource (Mille mercis au traducteur et à celui qui a mis en ligne le texte !) et je ne résiste pas à l'envie de vous la faire partager... cliquez sur "lire la suite" à la fin du texte du message pour savoir la fin savoureuse et édifiante de cette histoire.

« L’archevêque d’Arkhangelsk avait pris place sur un bateau qui faisait voile de cette ville au monastère de Solovki. Parmi les passagers se trouvaient aussi des pèlerins et de ceux que l’on nomme « saints ». Le vent soufflait en poupe, le temps était beau, il n’y avait ni roulis ni tangage. Les pèlerins, les uns couchés ou mangeant, les autres assis par tas, devisaient entre eux. L’archevêque sortit de sa cabine et se mit à marcher d’un bout à l’autre du pont. Arrivé à la proue, il vit un groupe qui s’y était rassemblé. De la main, un petit paysan désignait quelque chose au large et parlait tandis que les autres l’écoutaient. L’archevêque s’arrêta, regarda dans la direction indiquée par le petit paysan : rien de visible que la mer rutilant sous le soleil. L’archevêque s’approcha pour mieux écouter. Le petit paysan l’ayant aperçu ôta son bonnet et se tut. Les autres de même, à la vue de l’archevêque, se découvrirent et s’inclinèrent avec respect. – Ne vous gênez pas, mes amis, dit le prélat. Je suis venu, moi aussi, écouter ce que tu dis, brave homme. – Le petit pêcheur nous parlait des vieillards, dit un marchand qui s’était enhardi. – De quels vieillards s’agit-il ? demanda l’archevêque, et il vint près du bastingage s’asseoir sur une caisse. Raconte-moi donc cela, je t’écoute. Que montrais-tu ? – Là-bas, cet îlot qui pointe, dit le paysan en indiquant devant lui à bâbord. Il y a là-bas, dans cette île, des vieillards qui vivent pour le salut de leur âme. – Où donc y a-t-il une île ? demanda l’archevêque. – Tenez, veuillez regarder en suivant ma main. Voyez ce petit nuage, eh bien ! un peu à gauche au-dessous, il y a comme une bande étroite. L’archevêque regarda. L’eau miroitait au soleil. Faute d’habitude il n’apercevait rien. – Je ne la vois pas, dit-il. Et quels sont donc les vieillards qui vivent dans cette île ? – Des hommes de Dieu, répondit le paysan. Il y a longtemps que j’entends parler d’eux, mais je n’avais jamais eu l’occasion de les voir. Or, l’an dernier, je les ai vus. Et le pêcheur raconta comment, parti pour la pêche l’année précédente, une tempête l’avait jeté sur cet îlot qui lui était inconnu. Au matin, comme il explorait les lieux, il tomba sur une petite hutte au seuil de laquelle il vit un vieillard, et d’où ensuite deux autres sortirent. Ils lui donnèrent à manger, firent sécher ses vêtements et l’aidèrent à réparer son bateau. – Comment sont-ils d’aspect ? s’enquit l’archevêque. – L’un est petit, légèrement voûté, très vieux. Il porte une soutane vétuste et doit être plus que centenaire. La blancheur de sa barbe tourne au vert ; cependant il sourit toujours et il est pur comme un ange des cieux. L’autre, un peu plus grand, est vieux aussi et porte un caftan tout déguenillé. Sa barbe chenue s’étale, jaunâtre, mais l’homme est fort : il a retourné mon bateau comme un simple baquet avant que j’eusse le temps de lui donner un coup de main. Lui aussi a l’air radieux. Le troisième est très grand, sa barbe lui descend jusqu’aux genoux comme un fleuve de neige. Il est tout nu, sauf une natte en guise de ceinture. – Ont-ils causé avec toi ? demanda l’archevêque. – Ils besognaient en silence et se parlaient fort peu. Il leur suffit d’un regard pour qu’ils se comprennent. J’ai demandé au plus vieux s’ils vivaient là depuis longtemps. Il se renfrogna, murmura quelque chose, comme si décidément il était fâché. Mais aussitôt le petit vieux le saisit par la main, sourit, et le grand se tut. Rien qu’une parole de douceur et un sourire. Tandis que le paysan parlait ainsi, le navire s’était rapproché des îles. – Voici qu’on l’aperçoit tout à fait maintenant, dit le marchand. Veuillez la regarder, Éminence, ajouta-t-il avec un geste. L’archevêque regarda et il vit en effet une bande noire : c’était un îlot. L’archevêque regarda, puis il passa de l’avant du navire à l’arrière pour questionner le pilote. – Quel est donc cet îlot qu’on aperçoit là-bas ? – Il n’a pas de nom. Il y en a un grand nombre par ici. – Est-il vrai que trois vieillards y vivent pour le salut de leur âme ? – On le dit, Éminence. Mais je n’en sais rien. Des pêcheurs, à ce qu’on prétend, les auraient vus. Mais ce sont peut-être des racontars. – Je voudrais m’arrêter un peu dans cet îlot, voir ces vieillards, dit le prélat. Comment faire ? – Impossible au navire d’accoster, répondit le pilote. On le pourrait en canot ; mais il faut demander l’autorisation au commandant. On alla chercher le commandant. – Je voudrais voir ces vieillards, dit l’archevêque. Ne pourrait-on me conduire là-bas ? Le commandant eut une réponse évasive : – Pour ce qui est de pouvoir le faire, on peut le faire ; mais nous perdrons beaucoup de temps, et j’ose déclarer à Votre Éminence qu’il ne vaut vraiment pas la peine de les voir. J’ai entendu dire que ces vieillards étaient stupides. Ils ne comprennent rien et sont muets comme des carpes. – Je désire les voir, insista le prélat. Je paierai pour la peine : qu’on m’y conduise. Il n’y avait rien à faire. En conséquence, des ordres furent donnés aux matelots et l’on changea la disposition des voiles. Le pilote ayant tourné le gouvernail, le navire mit le cap sur l’île. On apporta une chaise à l’avant pour le prélat qui s’assit et regarda. Pendant ce temps, les pèlerins, qui s’étaient aussi rassemblés à l’avant, tenaient les yeux fixés vers l’île. Ceux dont les regards étaient le plus perçants voyaient déjà les pierres de l’île et montraient une petite hutte. Il y en eut même qui distinguaient les trois vieillards. Le commandant prit sa longue-vue, la braqua dans la direction, puis la passant à l’archevêque : – C’est exact, dit-il, voyez sur le rivage, à droite du gros rocher, il y a trois hommes debout. À son tour, l’archevêque regarda par la lunette après l’avoir mise au point. En effet, trois hommes étaient debout sur le rivage : l’un grand, l’autre moindre et le troisième de très petite taille. Ils se tenaient par la main. Le commandant s’approcha de l’archevêque : – C’est ici, Éminence, que nous devons stopper. Si vraiment vous y tenez, vous prendrez place dans un canot pendant que nous resterons à l’ancre. Aussitôt on dénoua les filins, jeta l’ancre, largua les voiles. Puis on retira le canot et on le mit à la mer. Des rameurs y sautèrent ; l’archevêque descendit par l’échelle. Quand il fut assis sur le banc du canot, les rameurs donnèrent une poussée sur leurs avirons et s’éloignèrent dans la direction de l’île. Arrivés à la distance d’un jet de pierre, ils virent apparaître les trois vieillards : un grand tout nu, ceint d’une natte ; un de taille moyenne au caftan déchiré et un petit, voûté, couvert d’une vieille soutane. Tous trois se tenaient par la main. Les rameurs s’arrêtèrent pour amarrer l’embarcation. L’archevêque descendit. Les vieillards firent un salut profond. L’archevêque les bénit, et eux le saluèrent encore plus bas. Puis l’archevêque leur adressa la parole : – J’ai entendu dire que vous étiez ici, vieillards du bon Dieu, afin de sauver votre âme en priant Notre Seigneur pour les péchés des hommes. Et j’y suis par la grâce de Dieu, moi indigne serviteur du Christ, appelé pour paître ses ouailles. Aussi ai-je voulu vous voir, hommes de Dieu, pour vous enseigner, si je le puis. Les vieillards sourirent en silence et se regardèrent. – Dites-moi comment vous faites votre salut et servez Dieu ? demanda le prélat. Le second des vieillards poussa un soupir et regarda le grand, puis le petit ; le grand se renfrogna et regarda le plus vieux. Quant à ce dernier, il dit avec un sourire : – Nous ignorons, serviteur de Dieu, comment on sert Dieu. Nous ne servons que nous-mêmes en pourvoyant à notre subsistance. – Comment faites-vous donc pour prier Dieu ? Et le petit vieux dit : – Nous prions en disant : « Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous. » Et à peine eut-il prononcé ces mots, que les trois vieillards levèrent les yeux vers le ciel et reprirent en chœur : – Vous êtes trois, nous sommes trois, ayez pitié de nous. L’archevêque sourit et demanda : – Vous avez sans doute entendu parler de la sainte Trinité, mais vous ne priez pas comme il faut. Je vous aime beaucoup, vieillards du bon Dieu, je vois que vous voulez Lui être agréables, mais vous ne savez pas comment Le servir. Ce n’est pas ainsi qu’il faut prier. Écoutez-moi, je vais vous instruire. Ce n’est pas d’après moi-même que je vous enseignerai, mais d’après l’Ecriture sainte qui nous apprend comment Dieu a voulu qu’on Le prie. Et le prélat se mit à apprendre aux vieillards comment Dieu s’était révélé aux hommes : il leur parla de Dieu le Père, de Dieu le Fils et du Saint-Esprit… et il disait : – Dieu le Fils est descendu sur la terre pour sauver les hommes et leur enseigner à tous comment Le prier. Écoutez et répétez ensuite mes paroles. Et l’archevêque dit : – Notre Père. L’un des vieillards répéta : – Notre Père. Le second et le troisième à tour de rôle : – Notre Père. –… Qui êtes aux cieux. –… Qui êtes aux cieux… Mais le second des vieillards s’embrouilla dans les mots et ne prononça pas comme il fallait ; le vieillard nu ne parvenait pas non plus à bien articuler : les poils de sa moustache lui obstruaient les lèvres ; quant au petit vieux, un bredouillement inintelligible sortait de sa bouche édentée. L’archevêque répéta encore ; les vieillards répétèrent après lui. Ensuite le prélat s’assit sur une pierre et les vieillards, debout autour de lui, regardaient sa bouche et s’efforçaient de l’imiter pendant qu’il leur parlait. Toute la journée, jusqu’au soir, l’archevêque poursuivit sa tâche ; dix fois, vingt et cent fois il répétait le même mot, que les vieillards reprenaient ensuite. Quand ils s’embrouillaient, il les corrigeait en les obligeant à tout recommencer. L’archevêque ne quitta pas les vieillards qu’il ne leur eût enseigné tout le Pater. Ils étaient parvenus à le réciter d’eux-mêmes. Ce fut le second vieillard qui le comprit le plus vite et le redit tout d’une traite. Le prélat lui ordonna de le répéter plusieurs fois de suite jusqu’à ce que les autres eussent appris à le réciter. Le crépuscule tombait déjà et la lune montait de la mer quand l’archevêque se leva pour rejoindre le navire. Il prit congé des vieillards qui tous trois se prosternèrent devant lui. Le prélat les releva et, après avoir embrassé chacun d’eux, il les engagea à prier ainsi qu’il le leur avait enseigné. Puis il prit place dans l’embarcation et s’éloigna du rivage. Et tandis que l’archevêque revenait vers le navire, il entendit les trois vieillards réciter tout haut le Pater. Quand il accosta, on n’entendait plus leur voix, mais on les voyait encore au clair de lune, tous trois debout sur le même point du rivage, le plus petit au milieu, le grand à droite et le moyen à gauche. Une fois à bord, l’archevêque se dirigea vers l’avant, on leva l’ancre et le vent ayant gonflé les voiles poussa le navire qui reprit sa route. L’archevêque avait gagné la poupe et ne cessait de regarder l’îlot. Les vieillards étaient encore visibles, mais ils s’effacèrent bientôt, et l’on ne vit plus que l’îlot. Puis l’îlot s’évanouit de même, et il n’y eut plus que la mer qui scintillait au clair de lune. Les pèlerins s’étaient couchés pour dormir, et tout reposait sur le pont. Mais l’archevêque n’avait pas sommeil. Il se tenait seul à la poupe, regardant là-bas la mer où l’îlot avait disparu, et se rappelant les trois bons vieillards. Il songeait à leur joie quand ils eurent appris la prière. Et il remercia Dieu de l’avoir conduit là pour enseigner à ces vieillards les divines paroles. Assis sur le pont, l’archevêque songe en regardant la mer du côté où l’îlot a disparu. Soudain une lueur papillote à ses yeux : quelque chose comme une lumière qui vacille çà et là au gré des flots. Cela brille tout à coup et blanchoie sur le sillage lumineux de la lune. Est-ce un oiseau, une mouette, ou bien une voile qui pose cette tache de blancheur ? Le prélat cligne des yeux pour mieux voir : « C’est un bateau, se dit-il : sa voile nous suit. Il ne tardera certes pas à nous rejoindre. Tout à l’heure il était encore fort loin, maintenant on le distingue tout à fait. Et ce bateau n’a rien d’un bateau, la voile ne ressemble pas à une voile. Mais quelque chose court après nous et cherche à nous rattraper. » L’archevêque ne parvient pas à distinguer ce que c’est. Un bateau ? Non, et ce n’est pas un oiseau non plus. Un poisson ? Pas davantage. On dirait un homme ; mais il serait bien grand, et comment croire qu’un homme puisse marcher sur la mer ? L’archevêque se leva de son siège et alla trouver le pilote : – Regarde, qu’est-ce donc, frère ? Qu’y a-t-il là-bas ? demande l’archevêque. Mais déjà il voit que ce sont les trois vieillards. Ils marchent sur la mer, tout blancs, leurs barbes blanches resplendissent, et ils se rapprochent du navire qui a l’air d’être immobilisé. Le pilote regarde autour de lui, terrifié ; il quitte le gouvernail et crie tout haut : – Seigneur ! Les vieillards qui nous suivent en courant sur la mer comme sur la terre ferme ! Les pèlerins, qui avaient entendu, se levèrent et vinrent précipitamment sur le pont. Tous voyaient les vieillards accourir en se tenant par la main ; les deux du bout faisaient signe au navire de s’arrêter. Tous trois couraient sur l’eau comme sur la terre ferme, sans que leurs pieds parussent remuer. On n’eut pas le temps de stopper, que déjà ils étaient à hauteur du navire. Ils avancèrent tout près du bord, levèrent la tête et dirent d’une seule voix : – Serviteur de Dieu, nous avons oublié ton enseignement ! Tant que nous avons redit les mots, nous nous en sommes souvenus ; mais une heure après que nous eûmes cessé de les redire, un mot a sauté de notre mémoire. Nous avons tout oublié, tout s’est perdu. Nous ne nous rappelons rien de rien. Enseigne-nous de nouveau. L’archevêque fit un signe de croix, se pencha vers les vieillards et dit : – Votre prière a monté jusqu’à Dieu, saints vieillards. Ce n’est pas à moi de vous enseigner. Priez pour nous, pauvres pécheurs ! Et l’archevêque se prosterna devant les vieillards. Et les vieillards qui s’étaient arrêtés se détournèrent et reprirent leur chemin sur les eaux. Et jusqu’à l’aube il y eut une lueur sur la mer, du côté où les vieillards avaient disparu.