Si quelqu'un, en effet, veut aimer la vie et voir des jours heureux, qu'il préserve sa langue du mal et ses lèvres des paroles trompeuses, qu'il se détourne du mal et fasse le bien, qu'il recherche la paix et la poursuive. 1 Pierre 3:10-11 Les lèvres mensongères font horreur à l'Éternel, tandis que ceux qui agissent avec fidélité lui sont agréables. Proverbes 12:22 «C'est ce qui sort de l'homme qui le rend impur. En effet, c'est de l’intérieur, c'est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, les adultères, l'immoralité sexuelle, les meurtres, les vols, la soif de posséder, les méchancetés, la fraude, la débauche, le regard envieux, la calomnie, l'orgueil, la folie. Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l'homme impur.» Marc 7:20-23 Un témoin fidèle ne ment pas, tandis qu’un faux témoin dit des mensonges. Proverbes 14:5 « Vous, vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement et il ne s'est pas tenu dans la vérité parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il profère le mensonge, il parle de son propre fond, car il est menteur et le père du mensonge. » Jean 8:44 Si les paroles distinguées ne conviennent pas à un fou, les paroles mensongères conviennent d’autant moins à un noble. Proverbes 17:7 « Écarte de ta bouche la fausseté, éloigne de tes lèvres les détours ! Proverbes 4:24 Craindre l'Éternel, c'est détester le mal. L'arrogance, l'orgueil, la voie du mal et la bouche perverse, voilà ce que je déteste. » Proverbes 8:13 « Pierre lui dit : «Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu aies menti au Saint-Esprit et gardé une partie du prix du champ? […] Comment as-tu pu former dans ton cœur un projet pareil? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.»Actes 5:3-4Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort.Apocalypse 21.8
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mardi 19 mars 2019

P. Andrew - Questions-Réponses : Le Nationalisme… Brenton Tarrant



source : 
Questions and Answers (March 2019)
 From Recent Correspondence de P. Andrew Phillips
extrait :

Q: Pourquoi le patriarcat de Constantinople a-t-il créé une nouvelle organisation pour les schismatiques et les hérétiques en Ukraine et l'a ensuite reconnue?

R: Il y a plus de deux décennies, l'américano-polonais Zbigniew Brzezinski proclamait la nécessité pour le Département d'État américain de mettre en place un schisme dans le monde orthodoxe, à la suite de la prise de contrôle du patriarcat par les États-Unis en 1948. Les États-Unis l'ont déjà fait en flattant le nationalisme grec à Istanbul, vivement soutenu par les ambassadeurs américains notoires à Kiev et à Athènes. Il ne fait maintenant aucun doute que ce schisme de la foi orthodoxe sera permanent et que les nationalistes et d'autres laïcs (libéraux et militants LGBT) qui ont infiltré quelques autres églises locales se joindront à ce patriarcat qui soutient les schismatiques.

Cependant, il y aura aussi des fidèles orthodoxes dans le patriarcat de Constantinople qui se joindront à nous. C’est avant tout le schisme tant attendu du monde grec orthodoxe qui a subi l’occidentalisation au cours des cent dernières années. L’occidentalisation se termine toujours par un schisme, comme nous l’avons vu en Russie dans les années vingt. Cependant, le schisme est petit, celui d'un groupe dissident occidentalisé, de quelques centaines de milliers contre plus de 220 millions dans l'Église.

Q: Pourquoi y a-t-il encore en Russie des gens qui pensent que Staline était un grand homme?

R: Pourquoi y a-t-il encore des Britanniques qui pensent que Churchill était un grand homme? En d’autres termes, la réponse est qu’il était le chef du pays à l’époque de la victoire sur le fascisme en 1945. En d’autres termes, la réponse est due au nationalisme. Churchill était en fait très impopulaire auprès des gens ordinaires au Royaume-Uni (c'est pourquoi il a été écarté à une très grande majorité en 1945). Il était détesté pour Gallipoli, sa haine des mineurs, son manque total de compréhension envers les pauvres et, à l’étranger, pour le gazage des Kurdes, la famine du Bengali dans laquelle des millions de personnes sont mortes et son incroyable racisme, semblable à celui de Hitler, seulement envers les races non blanches.

De même que certains Russes nationalistes oublient que Staline était un étranger, un Géorgien et avait causé la mort de millions et de millions de Slaves, on oublie également que Churchill était un demi-américain et profondément un suprémaciste blanc. En Russie, des nationalistes et des xénophobes marginaux (souvent des antisémites) adorent également Ivan IV («le Terrible»), responsable de la mort d’au moins 2 000 innocents. Il était tout de même beaucoup moins «terrible» que ses contemporains, les Tudors : Henri VIII et Élisabeth Ier ont tué au moins 150 000 personnes entre eux).

Q: Avez-vous parlé de l'attaque terroriste en Nouvelle-Zélande dans vos sermons dimanche dernier? Et que pensez-vous de ce massacre?

A: Je n'en ai certes pas parlé! Les gens viennent à l'église pour prendre de la distance par rapport à ces évènements tellement macabres de ce monde. C'est la dernière chose dont ils veulent entendre parler. Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu.


Qu'est-ce que j'en pense? 


Je suis choqué qu'on ait laissé la possibilité à Tarrant, ce suprémaciste blanc néo-nazi, de commettre cette tuerie. Sémyon Baykov, l'ataman des cosaques de Zabaykal à Sydney, avait déjà signalé à plusieurs reprises au gouvernement australien ses activités terroristes en Ukraine. Il s'était battu pour le régime fasciste de Kiev contre les combattants de la liberté des orthodoxes du Donbass. (Le gouvernement australien avait ignoré ses rapports). Qui se ressemble s'assemble, les fascistes se battent avec les fascistes.

lundi 29 février 2016

Un condensé de la politique internationale des dernières années : le danger grandissant d’une forme moderne du fascisme ?

Pourquoi la montée du fascisme est à nouveau la question
Par John Pilger

La récente 70e commémoration de la libération d’Auschwitz fut l’occasion de nous remémorer les grands crimes du fascisme dont l’iconographie nazie est gravée dans notre conscience. Le fascisme est considéré comme de l’histoire ancienne, comme dans ces vieux films tremblotants de chemises noires marchant au pas, leur criminalité aussi terrifiante qu’évidente. Et pourtant dans nos sociétés libérales, alors même que des élites va-t-en guerre nous poussent au devoir de mémoire, le danger grandissant d’une forme moderne du fascisme est ignoré. Car c’est leur fascisme.


Le fascisme est considéré comme de l’histoire ancienne, comme dans ces vieux films tremblotants de chemises noires marchant au pas, leur criminalité aussi terrifiante qu’évidente. Et pourtant dans nos sociétés libérales, alors même que des élites va-t-en guerre nous poussent au devoir de mémoire, le danger grandissant d’une forme moderne du fascisme est ignoré. Car c’est leur fascisme.

«Déclencher une guerre d’agression.., ont déclaré les juges du tribunal de Nuremberg en 1946, est non seulement un crime international mais de plus le pire crime international car, par rapport aux autres crimes de guerre, il contient en lui toute la malfaisance des autres crime de guerre réunis.»

Si les nazis n’avaient pas envahi l’Europe, Auschwitz et l’holocauste ne se seraient jamais produits. Si les États Unis et leurs alliés n’avaient pas commencé leur guerre d’agression en Irak en 2003, près d’un million de personnes seraient encore en vie aujourd’hui et l’État islamique ne serait pas en train de nous menacer de sa sauvagerie. Ce dernier est le rejeton du fascisme moderne, nourri par les bombes, les bains de sang et les mensonges de ce théâtre surréaliste que l’on appelle les actualités.

Vue générale du camp d’extermination à Auschwitz 26 janvier 2015. (Reuters/Laszlo Balogh)


Comme pendant la période fasciste des années 1930 et 1940, des mensonges y sont débités avec le débit d’un métronome grâce à des médias omniprésents et répétitifs et leur étroite censure par omission. La catastrophe libyenne par exemple.

En 2011, l’Otan a effectué 9 700 bombardements sur la Libye, dont plus d’un tiers ont atteint des cibles civiles. Des obus à uranium enrichi furent utilisés. Les villes de Misurata et Syrte furent rasées. La Croix-Rouge a retrouvé des fosses communes et l’UNICEF a rapporté que «plus de la moitié des enfants tués avaient moins de 10 ans.»

Le dirigeant Libyen Muammar Gaddafi.
 (Reuters/Filippo Monteforte)
La sodomie publique du président libyen Mouammar Kadhafi à l’aide d’une baïonnette rebelle fut accueillie par la secrétaire d’état américaine avec ces mots: «Nous sommes venus, nous avons vu, il est mort». Son assassinat ainsi que la destruction de son pays ont été justifiée par un mensonge classique: il planifiait un génocide contre son propre peuple. «Nous savions que si nous attendions un jour de plus, Benghazi, une ville de la taille de Charlotte, aurait subi un massacre qui aurait eu des répercussions sur toute la région et aurait créé une tache sur la conscience du monde», a prétendu le président Obama.

Mais c’était une invention des milices islamistes qui subissaient une défaite face aux forces gouvernementales libyennes. Ils ont dit à Reuters qu’il y aurait un véritable bain de sang, comme au Rwanda. Rapporté le 14 mars 2011, ce mensonge fut la première étincelle du déluge de feu de l’Otan, présenté par David Cameron comme une intervention humanitaire.
Secrètement approvisionnés et entraînés par les services spéciaux britanniques, beaucoup de ces rebelles deviendront membres de cet État Islamique dont la dernière vidéo en date montre la décapitation de 21 chrétiens coptes kidnappés à Syrte, la ville même qui fut rasée par les bombardements de l’Otan, en leur nom.

Icône des Saint Martyrs coptes de Lybie par Nikola Saric

Pour Obama, Cameron et Hollande [plutôt Sarkozy en l’occurrence, NdT], le véritable crime de Kadhafi était l’indépendance économique de la Libye et son intention déclarée d’arrêter de vendre les plus grandes réserves de pétrole africaines en dollar américains. Le pétrodollar est un des piliers de la puissance impériale américaine. Kadhafi a eu l’audace de planifier la mise en place d’une monnaie africaine commune, adossée à l’or, de créer une banque pour toute l’Afrique et de pousser à l’union économique entre pays pauvres ayant des ressources en matières premières prisées. Que cela soit réalisable ou pas, rien que d’y penser était intolérable aux États-Unis, alors qu’ils se préparaient justement à pénétrer en Afrique et à corrompre les gouvernements africains avec leur partenariat militaire.

Lybie après l'attaque de l'OTAN

A la suite de l’attaque de l’Otan sous couvert d’une résolution du Conseil de sécurité, Obama a, selon les écrits de Garikai Chengu, «confisqué les 30 milliards de dollars de la Banque centrale libyenne que Kadhafi avait mis de coté pour la mise en place d’une banque centrale africaine et d’une monnaie commune à l’Afrique, un
dinar-or [qui mettrait en péril le Dollar et l’Euro NdT]».



La guerre humanitaire contre la Libye a suivi un modèle cher au cœur des libéraux occidentaux, spécialement dans les médias. En 1999, Bill Clinton et Tony Blair ont envoyé l’Otan bombarder la Serbie car, ont-ils menti, les Serbes étaient en train de commettre un génocide contre les habitants d’origine albanaise dans la province sécessionniste du Kosovo. David Scheffer, l’ambassadeur américain contre les crimes de guerre (sic), a prétendu que pas moins de 225 000 personnes d’origine albanaise âgées de 14 à 59 an pourraient avoir été assassinées. Clinton et Blair évoquèrent le spectre de l’Holocauste et l’esprit de la Deuxième Guerre mondiale. Les héroïques alliés de l’Occident étaient les membres de l’Armée de libération du Kosovo, dont les actes criminels furent mis de côté. Le secrétaire aux Affaires étrangères, Robin Cook, leur a dit de l’appeler n’importe quand sur son portable.

Bombardement de la Yougoslavie


Centre-ville de Pristina après l'attaque de l'OTAN
Quand les bombardements de l’OTAN furent terminés et la plus grande partie des infrastructures de la Serbie en ruine, ses écoles, ses hôpitaux, ses monastères et même la station de télévision nationale, les équipes d’enquêteurs internationaux débarquèrent au Kosovo pour y trouver les preuves de cet holocauste. Le FBI ne trouva pas une seule fosse commune et rentra bredouille. L’équipe espagnole fit de même, jusqu’à ce que son chef dénonce avec colère une pirouette sémantique par les machines à propagande de guerre. Un an plus tard, le tribunal des Nations Unis pour la Yougoslavie annonça le décompte final des morts au Kosovo: 2 788. Nombre incluant les combattants des deux bords ainsi que les Serbes tués par l’Armée de libération du Kosovo. Il n’y a eu aucun génocide. L’holocauste n’était qu’un mensonge. L’attaque de l’Otan reposait donc sur une manipulation.

après l'attaque de l'OTAN


Mais derrière ces mensonges se cachait une raison sérieuse. La Yougoslavie était unique, indépendante, une fédération multiethnique qui a servi de pont politique et économique durant la Guerre Froide. La majorité de ses services et de sa capacité de production était publiques. Fait inacceptable pour une Communauté européenne en expansion, surtout pour l’Allemagne tout juste réunifiée et qui commençait à se tourner vers l’Est pour capturer ses marchés naturels dans les provinces de Croatie et de Slovénie. Au moment où les Européens se réunissaient à Maastricht en 1991 pour deviser sur le projet de mise en place de la catastrophique zone euro, un accord secret fut conclu, l’Allemagne reconnaîtrait la Croatie. C’en était fini de la Yougoslavie.

après l'attaque de l'OTAN

A Washington, les États-Unis veillèrent à ce que l’économie yougoslave en difficulté ne puisse bénéficier d’un prêt de la Banque mondiale. L’Otan, qui n’était plus à cette époque qu’une relique de la guerre froide, renaissait comme instrument de l’impérialisme. En 1999, à la conférence de paix du Kosovo à Rambouillet, en France, les Serbes furent soumis aux tactiques vicieuses des vainqueurs. L’accord de Rambouillet comporte l’annexe secrète B, rajoutée le dernier jour par la délégation américaine, qui demandait l’occupation militaire de toute la Yougoslavie et la mise en place d’une économie libérale ainsi que la privatisation de tout le domaine public. Aucun État souverain ne peut signer un tel accord. Alors la punition a suivi rapidement. Les bombes de l’Otan ont plu sur le pays sans défense. Ce fut un avant goût des catastrophes qui frapperont l’Afghanistan, l’Irak, la Syrie, la Libye et dernièrement l’Ukraine.


Depuis 1945, plus d’un tiers des membres des Nations unies – 69 pays – ont souffert, entre les mains du fascisme moderne américain, en partie ou totalement, de l’un de ces sévices: ils ont été envahis, leurs gouvernements renversés, leurs mouvements populaires réprimés, leurs élections manipulées, leur population bombardée, leurs économies malmenées et soumises à un embargo connu sous le nom de sanctions. L’historien britannique Mark Curtis compte le nombre de victimes en millions. À chaque fois un gros mensonge était utilisé.

«Ce soir, pour la première fois depuis le 11 septembre, notre mission de combat est terminée.» Tels furent les mots d’ouverture du discours sur l’état de l’Union en 2015. En réalité, il reste encore 10 000 troupes et 20 000 mercenaires américains en Afghanistan, pour une durée indéterminée. «La plus longue guerre de l’histoire des États-Unis a pris fin de manière responsable», a dit Obama. En fait, plus de civils ont été tués en 2014 en Afghanistan qu’au cours d’aucune autre année depuis que les Nations unies en font le décompte. La majorité ayant été tuée – civils comme soldats – durant la période de présidence d’Obama.



La tragédie afghane concurrence les crimes épiques en Indochine. Dans son livre tant vanté, Le grand échiquier: La primauté américaine et ses impératifs stratégiques, Zbigniew Brzezinski, le père de la politique étrangère américaine de l’Afghanistan à nos jours, écrit que si les États-Unis devait contrôler l’Eurasie et dominer le monde, ils ne pourraient supporter une démocratie populaire, parce que «la poursuite du pouvoir n’est pas quelque chose qui entraîne la passion du peuple… La démocratie n’est pas l’amie de la mobilisation impériale». (Le Grand Échiquier, 1998) Il a raison. Comme WikiLeaks et Edward Snowden l’ont révélé, un État policier est en train d’usurper la démocratie. En 1976, Brzezinski, qui était alors conseiller à la Sécurité nationale du président Carter, fit ses preuves en portant un coup mortel à la première et seule période démocratique afghane. Qui connait cette période de l’histoire?



Dans les années 1960, une révolution populaire balaya l’Afghanistan, le plus pauvre pays sur terre, renversant finalement le régime aristocratique en 1978. Le Parti démocratique populaire d’Afghanistan (PDPA) a formé un gouvernement et déclaré un programme de réformes qui comprenait l’abolition du féodalisme, la liberté de religion, des droits égaux pour les femmes et la justice sociale pour les minorités ethniques. Plus de 13 000 prisonniers politiques furent libérés et les fichiers de la police brûlés en place publique.

Emblème du PDPA 

Le nouveau gouvernement introduisit les soins médicaux gratuits pour les plus pauvres. Le servage fut aboli et un vaste programme contre l’illettrisme lancé. Pour les femmes, les gains furent immenses. A la fin des années 1980, la moitié des étudiants universitaires étaient des femmes; elles formaient aussi la moitié du contingent de médecins, un tiers des fonctionnaires et la majorité des instituteurs. «Toutes les filles, se souvient Saira Noorani, une femme chirurgien, pouvaient aller à l’école et à l’université. Nous pouvions aller où bon nous semblait et porter ce que l’on aimait. On avait l’habitude de sortir le vendredi soir dans les cafés pour écouter de la musique ou au cinéma pour y voir le dernier film indien. Tout a commencé à aller de travers quand les moudjahidines ont commencé à gagner. Ils tuaient les instituteurs et brulaient les écoles. On était terrifiés. C’était étrange et triste de penser que ces gens étaient aidés par l’Occident »

Le gouvernement PDPA était soutenu par l’Union soviétique, même si, comme l’ancien secrétaire d’État l’a admis plus tard «il n’y avait aucune preuve d’une complicité soviétique dans cette révolution». Alarmé par les succès croissants des mouvements de libération à travers le monde, Brzezinski décida que si le gouvernement PDPA réussissait en Afghanistan, son indépendance et ses réussites risquaient d’offrir la menace d’un exemple prometteur.

Le 3 juillet 1979, la Maison Blanche décida de soutenir secrètement les groupes tribaux fondamentalistes connus comme les moudjahidines, un soutien dont le coût monta jusqu’à plus de 500 millions de dollars par an en fourniture d’armes et autre assistance. L’objectif était de renverser le premier gouvernement laïque et réformiste d’Afghanistan. En aout 1979, l’ambassade américaine à Kaboul rapporta que «les intérêts supérieurs des États Unis… seraient servis par la destitution [du gouvernement PDPA], quelles qu’en soient les conséquences pour les réformes sociales et économiques en Afghanistan».

Les moudjahidines furent les précurseurs d’al-Qaida et de l’État islamique. Gulbuddin Hekmatyar, qui reçut des dizaines de millions de dollars en liquide, fut l’un des leurs. La spécialité d’Hekmatyar était le trafic d’opium et l’aspersion d’acide sur le visage des femmes qui refusaient de porter le voile. Invité à Londres, il fut présenté par le premier ministre Thatcher comme un combattant pour la liberté.

De tels fanatiques seraient restés dans leur monde tribal si Brzezinski n’avait pas initié un mouvement international pour promouvoir le fondamentalisme islamique en Asie Centrale et donc miné la politique séculaire de libération pour déstabiliser l’Union Soviétique, créant, ainsi qu’il l’écrit dans son autobiographie, quelques musulmans agités. Son grand plan coïncidait avec celui du dictateur pakistanais Zia ul-Haq pour dominer la région. En 1986, la CIA et l’agence pakistanaise de renseignement, l’ISI, commencèrent à recruter des gens a travers le monde pour rejoindre le djihad afghan. Le multi-millionnaire saoudien Oussama Ben Laden était l’un d’eux. Des volontaires, qui finalement rejoindront les talibans et al-Qaida, furent recrutés dans un collège islamique de Brooklyn, à New York, et reçurent un entrainement para-militaire dans un camp de la CIA en Virginie. Cette opération fut nommée Opération Cyclone. Son succès fut fêté en 1996 quand le dernier président PDPA d’Afghanistan, Mohammed Najibullah – qui venait de demander de l’aide à l’assemblée générale des Nations unies – fut pendu à un réverbère dans la rue, par les talibans.

Réunion avec le président Reagan avec les les leaders des moudjahidin afghans dans le Bureau ovale en 1983

Le retour de bâton de l’opération Cyclone et ses quelques musulmans agités arriva le 11 septembre 2001. L’opération Cyclone se transforma en guerre contre le terrorisme, dans laquelle un nombre incalculable d’hommes, de femmes et d’enfants vont perdre la vie dans tout le monde musulman, de l’Afghanistan à l’Irak, au Yémen, en Somalie et en Syrie. Le message des puissants était, et est toujours: «Vous êtes soit avec nous soit contre nous».

Le fil conducteur du fascisme, autrefois comme aujourd’hui, est le meurtre de masse. L’invasion américaine du Vietnam eut ses zones de tir à vue, sa comptabilité de cadavres et ses dommages collatéraux. Dans la province de Quang Ngai, ou j’étais basé, des milliers de civils furent tués par les États-Unis, même si l’on ne se souvient que d’un seul massacre, celui de My Lai. Au Laos et au Cambodge, le plus grand bombardement aérien de l’histoire a entrainé une époque de terreur marquée encore aujourd’hui par le spectacle de ces cratères de bombes se rejoignant jusqu’à former, vu du ciel, l’image d’un monstrueux collier. Les bombardements ont fourni au Cambodge son propre État islamique, les Khmers rouges dirigés par Pol Pot.


l’Agent Orange, un défoliant produit par des industriels tels que Dow Chemical ou Monsanto, pour tenter d’éradiquer la végétation qui cache les soldats du Vietminh

«A ceux qui marchent au pas, écrit l’historien Norman Pollock, se substitue une militarisation de la culture apparemment plus anodine. Et à un dirigeant grandiloquent se substitue un réformateur effacé, heureux dans son travail de planificateur et d’exécuteur des hautes œuvres, toujours souriant.»
Ce qui rapproche aussi l’ancienne et la moderne version du fascisme est le culte de la supériorité [le suprématisme, NdT]. «Je crois en l’exceptionnalisme américain de toutes les fibres de mon être», a déclaré Obama, faisant écho aux déclarations ultranationalistes des années 1930. Comme l’historien Alfred W. McCoy l’a souligné, c’est un homme dévoué à Hitler, Carl Schmitt, qui dit un jour : «Le souverain est celui qui décide de l’exception». Cela résume tout à fait l’américanisme, l’idéologie qui domine le monde actuel.

Qu’elle ne soit pas reconnue comme une idéologie prédatrice est le résultat d’un lavage de cerveau, lui-même non reconnu. Insidieux, caché, finement présenté comme un éclairage universel, son totalitarisme inonde la culture occidentale. J’ai moi-même grandi dans un environnement cinématographique à la gloire de l’Amérique, qui était presque toujours une déformation de la réalité. Je n’avais aucune connaissance du fait que l’Armée rouge avait détruit quasiment toute la machine de guerre nazie, au prix de la vie de 13 millions de ses soldats. Par comparaison, les pertes américaines, incluant celles du Pacifique, furent de 400 000 hommes. Hollywood avait inversé les faits.



La différence, de nos jours, tient à ce que le public des salles obscures est invité à s’accrocher au fauteuil sur la tragédie de psychopathes américains devant tuer des gens partout dans le monde – comme le fait le président des États-Unis lui-même. Symbole de la violence hollywoodienne, l’acteur et réalisateur Clint Eastwood, fut nominé pour un Oscar cette année pour son film American Sniper, film qui raconte l’histoire d’un assassin légal fou furieux. Selon le New York Times, «patriotique et pour toute la famille, ce film a battu tous les records d’audience dans ses premiers jours».

Il n’existe pas de film épique sur les flirts de l’Amérique avec le fascisme. Durant la Deuxième Guerre mondiale, l’Amérique (et la Grande-Bretagne) entrèrent en guerre contre la Grèce qui venait de se battre héroïquement contre le nazisme et résistait à l’avènement d’un fascisme grec. En 1967, la CIA aida une junte militaire fasciste à prendre le pouvoir à Athènes, comme elle le fit au Brésil et dans la plupart des pays d’Amérique latine. Les Allemands et les Européens de l’Est qui avaient collaboré avec les nazis et leurs crimes contre l’humanité reçurent l’asile aux États-Unis. Beaucoup furent bien soignés et leurs talents récompensés. Wernher von Braun, par exemple, fut à la fois le père de la fusée nazie V2 et du programme spatial des États Unis.

la fusée nazie V2


Dans les années 1990, alors que les anciennes républiques soviétiques, l’Europe de l’Est et les Balkans, devenaient des avant-postes militaires de l’Otan, on a donné leur chance aux héritiers du mouvement nazi ukrainien. Responsable de la mort de milliers de juifs, Polonais et Russes durant l’invasion de l’Union soviétique par les nazis, le mouvement fasciste ukrainien fut réhabilité et cette nouvelle vague considérée comme nationaliste par ceux qui gouvernent.



Cette vague a atteint son apogée quand l’administration Obama a misé 5 milliards de dollars sur un coup d’État contre le gouvernement élu en place. Les troupes de choc étaient formées de néo–nazis du Secteur Droit et de Svoboda. Parmi leurs dirigeants on retrouve Oleh Tyahnybok, qui a appelé à la purge de la mafia juive et moscovite et autres merdes telles que les homosexuels, les féministes et les gauchistes.

Milices Néo-nazies de Pravy Sektor

Ces fascistes font maintenant partie du gouvernement ukrainien issu du coup d’État. Le rapporteur de l’assemblée nationale ukrainienne, Andriy Parubiy, un dirigeant du parti au pouvoir, est aussi un co-fondateur de Svoboda. Le 14 février, Parubiy annonça qu’il partait pour Washington afin d’obtenir que «les États-Unis nous fournissent des armes de précision». S’il y arrive, cela sera considéré comme un acte de guerre par la Russie.

Aucun dirigeant occidental ne s’est insurgé contre cette renaissance du fascisme en plein cœur de l’Europe, à l’exception de Vladimir Poutine dont le peuple a perdu 22 millions de personnes dans l’invasion nazie qui arriva à travers les frontières de l’Ukraine. A la dernière Conférence sur la sécurité de Munich, l’assistante d’Obama pour les affaires européennes et eurasiennes, Victoria Nuland, a critiqué les dirigeants européens qui s’opposent à ce que les États-Unis arment le régime de Kiev. Elle a fait référence au ministre allemand de la défense en le traitant de «ministre du défaitisme». C’est Nuland qui avait organisé le coup d’État à Kiev. Elle est la femme de Robert D. Kagan, une figure du mouvement néo-conservateur et cofondateur de l’association d’extrême-droite Project for a New American Century (Projet pour un nouveau siècle américain). Elle a aussi été conseillère en politique étrangère de Dick Cheney.











L'incendie criminel la Maison des Syndicats à Odessa. (RIA Novosti/Maxim Voitenko)

Le coup d’État de Nuland ne s’est pas totalement déroulé comme prévu. L’Otan n’a pas pu s’emparer de l’historique et légitime base navale russe en Crimée. La population de Crimée, en grande majorité d’origine russe – qui fut illégalement annexée à l’Ukraine par Nikita Kroutchev en 1954 – a largement voté pour son rattachement à la Russie, comme elle l’avait fait dans les années 1990. Le référendum fut non imposé, populaire et sous observation internationale. Il n’y a pas eu d’invasion.

Dans le même temps, le régime de Kiev s’en est pris à la population d’origine russe dans l’est du pays avec la férocité d’un nettoyage ethnique. Tout en déployant des milices néo-nazies dans le style de la Waffen SS, ils ont assiégé et bombardé villes et villages. Ils ont affamé les populations, coupé l’électricité, gelé les comptes en banque, arrêté le versement des prestations sociales et des retraites. Plus d’un million de personnes ont traversé la frontière pour se réfugier en Russie. Réfugiés décrits dans les médias occidentaux comme des gens fuyant les violences causées par l’invasion russe. Le commandant de l’Otan, le général Breedlove, dont le nom et les actes pourraient avoir été inspirés par le Dr Strangelove [Dr Folamour, NdT] de Stanley Kubrick, annonça que 40 000 soldats russes se rassemblaient aux frontières. A l’âge des photos satellites, il n’en a trouvé aucune pour prouver ses affirmations.

Le peuple d’Ukraine de langue russe et bilingue, un tiers de la population, a longtemps cherché a créer une fédération qui puisse refléter la diversité ethnique du pays et qui soit autonome et indépendante de Moscou. La plupart ne sont pas des séparatistes, ils veulent simplement vivre en sécurité dans leur pays et s’opposent à la prise de pouvoir qui a eu lieu à Kiev. Leur révolte et la création de républiques autonomes sont venues en réaction aux attaques de Kiev. On l’a très peu expliqué au public occidental.

En mai 2014 à Odessa, 41 personnes d’origine russe furent brûlées vives au siège social des syndicats sous les regards de la police. Le dirigeant de Secteur Droit Dmytro Yarosh a considéré ce massacre comme encore un grand jour dans l’histoire de notre pays. Dans les médias britanniques et américains cela fut reporté comme une tragédie opaque résultant de bagarres entre nationalistes (les néo nazis) et séparatistes (les gens récoltant des signatures pour un référendum sur une Ukraine fédérale).

Dmytro Yarosh dirigeant de Secteur Droit 

Le New York Times a enterré l’affaire en traitant de propagande russe les avertissements sur la politique fasciste et antisémite des nouveaux clients de Washington. Le Wall Street Journal a condamné les victimes avec cet en-tête: «L’incendie mortel a été apparemment initié par les rebelles», dit le gouvernement. Obama a félicité la junte ukrainienne pour sa retenue.

Si Poutine était tombé dans le piège de venir défendre les rebelles, son statut de paria dans le monde occidental aurait justifié le mensonge d’une Russie envahissant l’Ukraine. Le 29 janvier, le général Viktor Muzhenko, haut commandant des armées ukrainiennes a, presque par inadvertance, rejeté la base même des sanctions occidentales quand il déclara de manière emphatique au cours d’une conférence de presse: «L’armée ukrainienne ne combat pas contre les troupes régulières russes», mais contre des «citoyens ordinaires», membres de «groupes armées illégaux»; il n’y avait plus d’invasion russe. Vadym Prystaiko, adjoint au ministre de la Défense, a lui, appelé à la guerre totale contre la Russie, une puissance nucléaire.

Le 21 février, le sénateur américain James Inhofe, un républicain de l’Oklahoma, a introduit un arrêté parlementaire pour autoriser l’exportation d’armes américaines vers Kiev. Au cours de sa présentation au Sénat, Inhofe a utilisé des photos qu’il a présentées comme des preuves de troupes russes franchissant la frontière ukrainienne, photos qui ont depuis été démasquées comme des faux. Cela m’a rappelé les fausses photos de Ronald Reagan d’une installation soviétique au Nicaragua et les fausses preuves de Colin Powell sur les armes de destruction massive en Irak.

L’intensité de la campagne de dénigrement contre la Russie et la présentation de son président comme un méchant de foire ne ressemble à rien de ce que j’ai pu voir au cours de ma vie de journaliste. Robert Parry, un des journalistes d’investigation américain les plus réputés, qui a révélé le scandale Iran–Contra, a écrit récemment: «Aucun gouvernement occidental, depuis l’Allemagne hitlérienne, n’avait osé envoyer des troupes de choc nazies contre sa propre population, mais le régime de Kiev l’a fait et en toute conscience. Pourtant, le monde politico-médiatique a fait tout ce qu’il a pu pour cacher cette réalité, allant jusqu’à ignorer des faits clairement établis… Si vous vous demandez comment le monde pourrait tomber dans une troisième guerre mondiale – comme cela s’est passé pour la première il y a un siècle – tout ce que vous avez a faire est de regarder la folie en ce qui concerne l’Ukraine, folie qui se montre imperméable aux faits ou à la raison







Procés de Nuremberg. Les dirigeants nazis 1945-1946. (1er rang, g. à d. )Göring, Rudolf Heß, von Ribbentrop, Keitel (2ème rang, g. à d.) Dönitz, Raeder, von Schirach, Sauckel (Image de Wikipedia)

En 1946, le procureur du tribunal de Nuremberg a déclaré aux journaux allemands : «L’utilisation par les conspirateurs nazis de la guerre psychologique est bien connue. Avant chaque attaque majeure, à l’exception de celles reposant sur la rapidité d’action, ils démarraient une campagne de presse destinée à abaisser leurs victimes et à préparer psychologiquement le peuple allemand à l’attaque… Dans le système de propagande de l’État hitlérien, les armes les plus importantes furent la presse quotidienne et la radio

Dans le Guardian du 2 février, Timothy Garton-Ash a demandé, en mots clairs, une guerre mondiale. «Poutine doit être empêché, dit le titre. Et parfois seuls les armes peuvent arrêter les armes.» Il concéda que la menace d’une guerre puisse nourrir la paranoïa russe de l’encerclement, mais que cela n’était pas grave. Il fit la liste de l’équipement militaire nécessaire pour le boulot et conseilla ses lecteurs en affirmant que l’Amérique avait le meilleur équipement.




En 2003, le même Garton-Ash, alors professeur a Oxford, répéta la propagande qui entraina le massacre en Irak. Saddam Hussein, écrivait il, «a, comme l’a montré Colin Powell, accumulé de grandes quantités d’armes chimiques et biologiques et cache ce qui lui reste. Il est toujours en train d’acquérir des armes nucléaires». Il loua Blair comme un «Gladstonien, un chrétien libéral interventionniste». En 2006, il écrivit: «Maintenant nous faisons face au prochain grand défi occidental après l’Irak: l’Iran»



Ces proclamations – ou comme Garton-Ash préfère le dire, son ambivalence libérale torturée – sont assez courantes chez ceux qui, dans l’élite libérale transatlantique, ont signé un pacte faustien. Le criminel de guerre qu’est Tony Blair est leur idole déchue. Le Guardian, journal dans lequel le texte de Garton-Ash fut publié a mis en page une publicité pour un avion de chasse furtif américain. Sous l’image menaçante de ce monstre crée par Lockheed Martin s’étalent les mots: «Le F35. Grand pour la Grande Bretagne». Ce matériel [qui ne vole toujours pas, NdT] américain coûtera aux contribuables britanniques 1,3 milliards de livres, les modèles précédents ayant déjà fait des massacres à travers le monde. En parfait accord avec son annonceur, l’éditorial du Guardian a plaidé pour une augmentation des dépenses militaires.



La encore, cela suit un objectif sérieux. Les maitres du monde ne veulent pas seulement que l’Ukraine soit une base de missiles, ils veulent son économie. La nouvelle ministre des finances de Kiev, Nataliwe Jaresko, est une Américaine, ancienne fonctionnaire du Département d’État américain en charge des investissements à l’étranger. On lui a octroyé la nationalité ukrainienne en toute hâte.








Ils veulent l’Ukraine pour son gaz abondant. Le fils du vice-président Joe Biden est entré au conseil d’administration de la plus grosse compagnie pétrolière d’Ukraine. Les fabricants de graines génétiquement modifiées, comme le tristement célèbre Monsanto, veulent les riches terres cultivables de l’Ukraine.



Mais par dessus tout, ils veulent le puissant voisin de l’Ukraine, la Russie. Ils veulent balkaniser et démembrer la Russie pour exploiter la plus grande source de gaz naturel sur terre. Alors que l’Arctique fond, ils veulent contrôler l’océan Arctique et ses richesses énergétiques, tout comme les terres russes qui le longent. Leur homme à Moscou fut Boris Eltsine, un alcoolique, qui livra l’économie de son pays à l’Occident. Son successeur, Poutine, a rétabli la souveraineté russe. Tel est son crime.



Notre responsabilité ici est donc claire. Elle repose sur l’identification et la mise à nu des mensonges permanents des va-t-en guerre et à ne jamais collaborer avec eux. Elle est dans le réveil des grands mouvements populaires qui ont conduit une civilisation fragile vers des États modernes. Et, plus que tout, elle réside dans notre habileté à empêcher qu’ils ne nous écrasent. Si nous restons silencieux, leur victoire sur nous est assurée et l’holocauste est proche.

John Pilger
John Pilger, est un journaliste basé à Londres, il est aussi cinéaste et auteur. Il anime le site www.johnpilger.com.
(Traduit par Wayan, relu par jj et par Diane pour le Saker Francophone)



jeudi 7 août 2014

Les véritables intérêts américains en Ukraine

On pourrait se demander pourquoi tant d'insistance dans ce blog à montrer une autre version du conflit ukrainien que les médias aux ordres. Ne nous y trompons pas, si les choses continuent d'aller aussi mal et dans le même sens, ce ne seront pas des tonnes et des tonnes d'acier de l'OTAN (comme en ex-Yougoslavie pour écraser les Serbes) qui tomberont pas loin mais des missiles à tête nucléaire, tel est le risque réel. Et même si l'on croit naïvement que la guerre est encore plus loin que celle qui a eu lieu en ex-Yougoslavie et qu'elle ne nous touchera pas, on se trompe ; les retombées de cette guerre seront plus terribles et plus visibles que celles de Tchernobyl. Il est de notre devoir de chrétiens d'agir, de parler en faveur de la paix, sans angélisme, sans méprise autant que possible, l'esprit vigilant, sans utiliser des grilles d'interprétation dépassées et surtout en se préoccupant réellement de nos intérêts propres : ceux de nos pays d'Europe, ceux de nos peuples, ceux de nos enfants. 
Entretien d'abord publié sur le site   Atlantico et republié sur le site les-crises
avec Jean-Bernard Pinatel Général (2S) et dirigeant d’entreprise, Jean-Bernard Pinatel est un expert reconnu des questions géopolitiques et d’intelligence économique. Il est l’auteur de Carnet de Guerres et de crises, paru aux éditions Lavauzelle en 2014. 

Il anime aussi le blog : Géopolitique-Géostratégie
 La véritable raison pour laquelle les États-Unis se préoccupent tant de l’Ukraine tout en se foutant éperdument des Ukrainiens
Les Etats-Unis déploient beaucoup d'énergie pour identifier les auteurs de l'attaque contre l'avion de la Malaysian Airlines et ont été très prompts à montrer du doigt les pro-russes.
Les États-Unis, depuis le début des troubles en Ukraine, se sont clairement positionnés contre les pro- russes. Un soutien aux relents de guerre froide, qui n'a rien à voir avec les intérêts des Ukrainiens.

Atlantico : Les Etats-Unis déploient beaucoup d'énergie pour identifier les auteurs de l'attaque contre l'avion de la Malaysian Airlines et ont été très prompts à montrer du doigt les pro-russes. Quel intérêt ont-ils à leur faire porter le chapeau ?
Jean-Bernard Pinatel : Dès la chute du mur de Berlin en novembre 1989, les stratèges et les hommes politiques américains ont perçu une menace principale : c’est qu’un rapprochement puis une alliance entre l’Europe et la Russie ne contesterait la suprématie mondiale des Etats-Unis qui leur permet, en toute impunité, de s’immiscer dans les affaires intérieures d’un pays, voire de lui faire la guerre et d’imposer un droit international conforme à leurs intérêts comme la encore récemment montré l’affaire de la BNP.

Cette réalité incontestable nécessite un rappel historique pour être admise.
En 1997, l’ancien conseiller national à la sécurité des États-Unis, Zbigniew Brzezinski, publia sous le titre « Le grand échiquier » un livre où adoptant les deux concepts, forgés par Mackinder, d’Eurasie et d’« Heartland ». Il reprenait à son compte sa maxime célèbre : « qui gouverne l’Europe de l’Est domine l’Heartland ; qui gouverne l’Heartland, domine l’Ile-Monde ; qui gouverne l’île-Monde domine le Monde ». Il en déduisait : « Pour l’Amérique, l’enjeu géopolitique principal est l’Eurasie ». Dans une autre publication(1), il explicitait sa pensée: « Si l’Ukraine tombait, écrivait-il, cela réduirait fortement les options géopolitiques de la Russie. Même sans les états de la Baltique et la Pologne, une Russie qui garderait le contrôle de l’Ukraine pouvait toujours aspirer avec assurance à la direction d’un empire eurasien. Mais, sans l’Ukraine et ses 52 millions de frères et sœurs slaves, toute tentative de Moscou de reconstruire l’empire eurasien menace d’entraîner la Russie dans de longs conflits avec des non slaves aux motivations nationales et religieuses. ».

Entre 2002 et 2004, pour mettre en œuvre cette stratégie, les États-Unis ont dépensé des centaines de millions de dollars afin d’aider l’opposition ukrainienne pro-occidentale à accéder au pouvoir. Des millions de dollars provinrent aussi d’instituts privés, comme la Fondation Soros et de gouvernements européens. Cet argent n’est pas allé directement aux partis politiques. Il a transité notamment par des fondations et à des organisations non gouvernementales qui conseillèrent l’opposition, lui permettant de s’équiper avec les moyens techniques et les outils publicitaires les plus modernes. Un câble américain du 5 janvier 2010, publié sur le site Wikileaks (réf. 10WARSAW7), montre l’implication de la Pologne dans la transition et l’effort démocratique des anciens pays de l’Est. Le rôle des ONG y est notamment exposé (2). Les câbles Wikileaks témoignent de l’effort constant et de la volonté continue des États-Unis d’étendre leur sphère d’influence sur l’Europe de l’Est, comme en Ukraine. 


L'Ukraine connaît une véritable guerre civile. Pourtant personne en Occident ne dénonce l'ardeur avec laquelle le gouvernement ukrainien tente de mater les séparatistes. Quel est le réel intérêt des Américains à fermer les yeux sur cette réalité et à soutenir le gouvernement ukrainien ? Qu'ont-ils à y gagner ? 

L’Etat ukrainien est une construction de Staline et n’existe de manière indépendante que depuis 1990, à l’issue de la dislocation du bloc soviétique. Il n’a existé auparavant qu’entre 1917 et 1921, entre la chute du Tsarisme en 1917 et la victoire des bolchevicks qui ont éclaté cet Etat naissant en 4 parties. La partie ex-russe de l’Ukraine, avec Kiev pour capitale, berceau historique de la civilisation et de la culture Russe, est intégrée à l’URSS tandis que la partie ex-autrichienne, avec Lviv pour ville principale, est rattachée à la Pologne. La petite Ukraine « transcarpatique » vota son rattachement à la Tchécoslovaquie et quant à la Bucovine, sa minorité ukrainienne se résigna à son rattachement à la Roumanie.
Mais l’Ukraine n’est pas pour autant une nation. Les Ukrainiens n’ont aucune histoire commune. Bien au contraire. Durant la seconde guerre mondiale, quand à l’été 1941, l’Ukraine est envahie par les armées du Reich, les Allemands sont reçus en libérateurs par une partie de la population ukrainienne. Au contraire à l’Est du pays, ils rencontrent une forte résistance de la part de la population locale qui se poursuivit jusqu’en 1944. En représailles, les Allemands traquent les partisans, et brûlent des centaines de villages. En avril 1943, une division SS Galicie est constituée à partir de volontaires ukrainiens dont les descendants ont constitué le fer de lance des révolutionnaires de la place de Maïdan (3). Cette division SS a notamment été engagée par les Allemands en Slovaquie pour réprimer le mouvement national slovaque. Mais les pro-occidentaux ukrainiens et les Américains ont tout fait, à la fin de la guerre, pour jeter un voile sur les atrocités commises par cette division et ne retenir que le combat antisoviétique. Néanmoins, les historiens estiment que plus de 220 000 Ukrainiens s’engagèrent aux côtés des forces allemandes durant la Seconde Guerre mondiale pour combattre le régime soviétique.
Ce rappel historique permet de comprendre pourquoi la guerre civile est possible et pourquoi la partie des forces ukrainiennes constituées de soldats de l’Ouest peuvent utiliser chars et avions contre les séparatistes de l’Est.
Le Président Ukrainien avec la complicité du silence de la majorité des hommes politiques et des médias occidentaux mène une véritable guerre contre une partie de sa population avec la même violence que celle que l’on reproche au dictateur syrien. De plus, les forces armées ukrainienne sont conseillées par des forces spéciales et des mercenaires américains.

Les Etats-Unis et Obama veulent ainsi provoquer une réaction brutale de la Russie qui pourrait faire renaître une guerre froide entre l’Ouest et l’Est. Poutine a bien compris le piège que lui tend Obama, « prix Nobel de la Paix ». Après avoir déconseillé aux séparatistes ukrainiens de faire un référendum, il n’a pas reconnu son résultat (4) et fait preuve d’une modération qui étonne tous les observateurs indépendants alors que des chars et des avions attaquent une population russophone. 

En quoi l'Ukraine empêche-t-elle la constitution d'un bloc Europe-Russie ? Pourquoi les Etats-Unis tiennent-ils tant à l'empêcher ? 
Les américains n’ont cessé de faire pression sur les européens pour intégrer l’Ukraine et la Géorgie dans l’OTAN, ce qui constituerait une provocation inacceptable pour la Russie. Heureusement, les leaders européens ne se sont pas pliés à cette volonté de Washington qui ne servirait que les intérêts américains. De même, si Poutine cédait à la pression de ses ultranationalistes et intervenait ouvertement en Ukraine, les Etats-Unis auraient atteint leur objectif stratégique et la guerre froide se réinstallerait en Europe au détriment de nos intérêts fondamentaux. 

Pourquoi l'Europe se soumet-elle ? A-t-elle vraiment un intérêt à souscrire à la stratégie américaine ? 
Beaucoup de leaders européens ont été formés aux Etats-Unis. Ils sont membres de « Think-Tanks américains ou transatlantiques » ou de fondations comme l’« American Foundation » qui financent largement leurs prestations et leurs voyages. L’Atlantisme est certes fabriqué par la conscience que nous partageons les mêmes valeurs démocratiques avec la nation américaine mais aussi par la multitude d’intérêts personnels de nombreux leaders européens dont le niveau de vie dépend de leur soumission de fait aux intérêts de l’Etat américain.
Néanmoins, de plus en plus d’Européens commencent à faire la différence entre l’Etat américain qui est, de fait, dirigé par des lobbies dont le plus important est le lobby militaro-industriel (5) et la nation américaine dont les valeurs et le dynamisme économique et culturel possèdent un pouvoir attractif incontestable et qui reste pour les jeunes européens une magnifique école de vie professionnelle.

Angela Merkel et les Allemands sont à la pointe de cette prise de conscience car ils n’ont toujours pas accepté l’espionnage industriel permanent auquel la NSA les soumet. De plus, la révélation des écoutes du portable d’Angela Merkel a fortement choqué le pays. Le Spiegel du 3 novembre 2013 réclamait même en couverture l’asile politique pour Edward Snowden : « Asil Für Snowden ». Les plus grands quotidiens européens dont le Monde ont publié de larges extraits de ses révélations.
Le 10 juillet 2014, le gouvernement allemand a annoncé l'expulsion du chef des services secrets américains pour l'Allemagne, dans le cadre d'une affaire d'espionnage de responsables allemands, au profit de Washington, une mesure sans précédent entre alliés au sein de l'Otan. "Il a été demandé au représentant des services secrets américains à l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique de quitter l'Allemagne", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Steffen Seibert, dans un communiqué. L'expulsion intervient "en réaction d'un manque de coopération constaté depuis longtemps dans les efforts pour éclaircir" l'activité d'agents de renseignement américains en Allemagne, a expliqué un député allemand, Clemens Binninger, président de la commission de contrôle parlementaire sur les activités de renseignement, qui s'est réunie jeudi à Berlin.

En France, l’ancien Premier ministre Michel Rocard, le sociologue Edgar Morin, les anciens ministres Luc Ferry et Jack Lang ou encore l'ex-eurodéputé Daniel Cohn-Bendit ont lancé une pétition dans laquelle ils demandent au président François Hollande, à son Premier ministre, Manuel Valls, et au ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, d'accueillir Edward Snowden "sans tarder, sous le statut de réfugié politique".
Malheureusement pour la France et l’Europe, François Hollande qui reste comme une partie de l’intelligentsia française fasciné par Obama et Laurent Fabius qui a longtemps bénéficié des avantages des fondations américaines n’ont pas encore pris conscience qu’ils mettaient ainsi en cause les intérêts stratégiques de la France et de l’Europe.

(1) Traduit de : Zbigniew Brzezinski: « Die einzige Weltmacht – Amerikas Strategie der Vorherrschaft », Fischer Taschenbuch Verlag, pp.15/16.
(2) Le National Endowment for Democracy (NED) (en français, Fondation nationale pour la démocratie) est une fondation privée à but non lucratif des États-Unis dont l’objectif déclaré est le renforcement et le progrès des institutions démocratiques à travers le monde. La plus grande part de ses fonds provient du département d’État des États-Unis, avec approbation du Congrès. L’ancien directeur de la CIA, William Colby, déclarait en 1982, dans le Washington Post, à propos du programme de la NED : « Il n’est pas nécessaire de faire appel à des méthodes clandestines. Nombre des programmes qui [...] étaient menés en sous-main, peuvent désormais l’être au grand jour, et par voie de conséquence, sans controverse ». William I. Robinson, Promoting Polyarchy: Globalization, US Intervention, and Hegemony [archive], Cambridge university Press, 1996, 466 p., pp. 87-88.
(3) Il ne faut pas oublier que les manifestants de la place de Maïdan ont contraint un Président pro-russe démocratiquement élu en 2012 a quitter le pouvoir. Il a été chassé de sa capitale par des manifestants où l’on a vu se côtoyer des groupes paramilitaires ultranationalistes affichant des signes nazis et qui refusent l’Europe mais aussi par des citoyens de la classe moyenne (professeurs, étudiants, dirigeants de PME) qui souhaitent le rattachement à l’Union européenne..
(4) approuvé par 89% des votants
(5) Le budget de Défense américain représentait, en 2013, 640 milliards de dollars. Autant que le Budget réuni des 9 pays suivants : Chine 188, Russie 88, Arabie Saoudite 67, France 61, Grande-Bretagne 58, Allemagne 49, Japon 49, Inde 48, Corée du Sud 33. Source SIPRI