État français : pénuries à tous les étages
Publié le 28 juillet 2022
La situation n’est pas réjouissante : alors que l’État français entend se mêler de tout et régir la vie de ses habitants presque dans ses moindres dimensions, non seulement cette prétention se fait au prix d’un endettement faramineux (choix de société, diront certains) et de déficits permanents, mais cette politique de gribouille se fait sans vision du lendemain, sans réelle perspective, et sans aucune rigueur ni efficacité.
Un constat accablant qui met en jeu tant le présent que notre avenir, qui s’en trouve lourdement hypothéqué.
Mauvaise allocation des ressources, gabegies généralisées, incapacité à prévoir : l’état des lieux est consternant. Si encore les fonctions régaliennes étaient correctement assurées… Mais non.
Pénuries à tous les niveaux
Il ne s’agit pas ici d’établir un diagnostic complet, très loin de là. Ni un inventaire à la Prévert de toutes les gabegies de l’État. Le périmètre est trop large, et les sources sont déjà nombreuses, dans certains cas très détaillées. Très sommairement et sans aucune hiérarchie, je vous propose un petit aperçu rapide et instantané (très incomplet) de ce à quoi on peut assister en observant grossièrement la vie quotidienne, rien qu’à partir de l’actualité récente.
Une simple photographie en dit long sur l’état de la gestion publique de notre pays :
Pénurie d’infirmières
Elle dure depuis fort longtemps. Fruit d’un secteur suradministré, l’épisode covid a révélé l’ampleur de la catastrophe et suscité des démissions en cascade, contraignant les pouvoirs publics à tenter de colmater les brèches tant bien que mal et un peu dans la panique.
Pénurie de médecins hospitaliers
Là encore, le poids de la bureaucratie se fait sentir. On ne cesse de parler de crise des urgences, qui s’étend de jour en jour. Le malaise est grand et le problème pas prêt d’être résolu.
Pénurie de médecins de ville
Erreurs dans la gestion du Numerus clausus, problème des déserts médicaux, attaques en règle contre la médecine libérale, la mainmise de plus en plus grande de l’État là encore signe l’aggravation de la déchéance.
Pénurie de masques au début de la crise du covid
Tout le monde se souvient de la mascarade dont il a été question. L’affaire est peu glorieuse et symptomatique de la qualité de la gestion prévisionnelle de l’État dans les missions qu’il s’est attribuées, mais qu’il n’assume pas correctement.
Pénurie d’enseignants
Comment avons-nous pu en arriver là ? Crise des vocations, perversions du système, lourdeurs administratives et poids inouï du personnel administratif non enseignant dans cette grosse machine, gestion concentrée, manque de reconnaissance, désamour du métier, conditions de plus en plus difficiles, laxisme et idéologie, les causes sont nombreuses et les symptômes ceux d’un naufrage. D’où le recours aux job datings, dont on a beaucoup parlé, et de sombres perspectives à venir pour ce mammouth impossible à réformer en l’état (tout au moins en l’État).
Pénurie de Canadairs
Une fois de plus, on en a reparlé cet été à l’occasion des feux de forêts. La France semblait plutôt bien dotée, comparativement à d’autres pays. Mais le constat s’aggrave d’année en année : les équipements sont dramatiquement vieillissants, parfois obsolètes. Contraignant nos soldats du feu à se battre de plus en plus en héros avec les moyens du bord, en attendant des investissements qui se font attendre dans le renouvellement incontournable des flottes.
Pénuries d’électricité ?
Rien n’est encore sûr, si ce n’est le constat d’une mauvaise gestion du parc de centrales nucléaires, en raison des politiques contradictoires en la matière depuis un certain nombre d’années. Plus aucune nouvelle centrale n’a été mise en service depuis près de 25 ans, alors même que la durée de vie d’une centrale était estimée à 40 ou 50 ans au départ.
Faute d’investissements suffisants, c’est la production d’électricité en France qui est mise en question. Face à la crise annoncée, et en attendant les mises en œuvre concrètes, la réponse offerte se fait… par la nationalisation : plus de 9 milliards de dépenses par l’État pour financer cette nationalisation, qui auraient été plus utiles en investissements directs.
Pénuries dans le ferroviaire ?
Même chose : gabegies, endettement faramineux, gestion chaotique, Etat omniprésent et omnipotent qui éponge régulièrement les dettes, graves problèmes de maintenance, la situation n’est pas brillante. Et ce n’est pas la timide ouverture (forcée) à la concurrence qui y changera grand-chose.
Pénuries alimentaires
Certes, la guerre en Ukraine, les intempéries et mauvaises récoltes y sont pour quelque chose, mais l’offre n’est pas la seule cause… et l’interventionnisme là encore n’est pas étranger à ce qui se produit.
Retraites, logement, infrastructures routières, etc.
Nombreux sont les autres domaines où nous pourrions étendre le raisonnement et montrer en quoi la gestion par l’État se trouve nettement déficiente. Mais nous l’avons dit, il ne s’agit pas de dresser un inventaire à la Prévert.
Même les fonctions régaliennes sont touchées
Si au moins nous pouvions dire que l’État assure bien ses fonctions régaliennes, celles qui seules pourraient trouver une légitimité, même aux yeux d’une grande partie de ceux qui désavouent l’intervention publique dans tous les domaines de l’existence. Mais non. Là non plus la situation n’est pas du tout satisfaisante.
À vouloir se mêler de tout, l’État n’est plus à même d’assurer de manière satisfaisante ce pour quoi il pourrait trouver sa justification. Les financements manquent (la volonté aussi, sans doute). Trop d’argent (à crédit) est dépensé à foison partout, la pénurie se répercute donc dans les fonctions essentielles de maintien de l’ordre et de la paix.
Pénurie de policiers
À l’instar des enseignants, la police a perdu de son prestige. Trop souvent, ses représentants ne sont même plus respectés, pire, agressés sauvagement. Manque de reconnaissance et de soutien, effectifs insuffisants, difficultés à recruter, missions pas toujours clairement définies, moyens matériels nettement déficients, là encore à travers le poids de la bureaucratie, les politiques contradictoires, le malaise palpable, l’impunité des délinquants relâchés faute de places de prison ou par le jeu des remises de peine, le constat est une nouvelle fois accablant.
Et pourtant, l’insécurité est grandissante (ou le fameux « sentiment d’insécurité » selon les détracteurs, à qui on peut présenter le lien hypertexte évocateur que H16 porte à notre connaissance dans l’un de ses éditos), rendant nécessaire une plus grande efficience en la matière.
Pénurie dans le milieu judiciaire
Il s’agit hélas d’une question récurrente. La protection des droits et des libertés est fondamentale. Mais elle est très mal assurée. Faute de moyens ou faute d’organisation à la hauteur ? Toujours est-il que l’État de droit est en question.
Et cela rejoint le point précédent : comment la police peut-elle correctement assurer ses missions si la cohésion avec la Justice est mal assurée ? Si la confiance n’est pas restaurée, le sentiment d’impunité se développe, et les lourdeurs tant administratives que matérielles ne sont pas là pour aider à résoudre le problème. Pourtant, des solutions existent. Encore faut-il une véritable volonté politique au bout…
Pénurie en armement
Il me semble avoir entendu cette information (à vérifier) selon laquelle la France ne tiendrait pas beaucoup plus que trois jours à partir de son stock de munitions actuelles si elle connaissait une guerre comparable à celle qui a lieu actuellement en Ukraine.
Après avoir connu l’étrange défaite de 1940, on a peine à croire que l’Histoire pourrait se répéter à ce point. Et pourtant, même si la France est l’une des toutes premières puissances militaires au monde, la vétusté de ses matériels, le manque d’investissements et de renouvellements, les choix politiques contradictoires, en ont fait selon l’IFRAP « le parent pauvre de nos finances publiques ».
Heureusement, l’argent magique coule à flots
En conclusion, même si nous sommes encore loin de l’économie de la pénurie, que l’économiste Janos Kornai décrivait dans les années 1980 en évoquant l’économie soviétique, et que nous ne sommes pas (encore) au stade où en est rendu le Venezuela, nous ne pouvons que déplorer et nous inquiéter de la montée en puissance de toutes ces pénuries, et de l’incapacité de notre pays – par la médiocrité de nos dirigeants et surtout la perversité de notre système politique – à se remettre en question.
La seule chose que notre gouvernement actuel sait bien faire, et que certains opposants lui jalousent : sa capacité à émettre des « chèques » de toutes sortes (là aussi à crédit, et sans compter), non tournés vers de véritables investissements d’avenir, ainsi que le souhaiteraient de nombreux économistes favorables à un certain interventionnisme, mais pour soigner un électorat par nature ingrat et qui ne le lui rendra pas, non content de devoir se contenter de ce « pas encore assez », et pour acheter très temporairement une paix sociale bien illusoire.
Plus que jamais l’Argent Magique coule à flots. Et les Français s’y habituent. Après nous le déluge…
Mais la véritable situation de la France est celle du décrochage qu’elle connaît. Pour l’instant, on continue d’endormir les Français qui, (mal) nourris aux mamelles de l’État, en réclament toujours plus tout en se sentant toujours davantage frustrés et mécontents. Cela ne pourra cependant pas durer. Comme en Grèce naguère, gare aux réveils difficiles !
Quant aux politiques responsables de cet état de déchéance, ils ne seront plus là. Personne ne se souviendra qu’ils étaient à l’origine des maux du jour. D’autres paieront…
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