ICÔNES SUR VERRE ROUMAINES (2)
Considérations au sujet des icônes sur verre
à travers le temps (suite)
à travers le temps (suite)
"Ceux qui n’ont pas compris les icônes sur verre sont en petit nombre ; en échange ceux qui les ont découvertes et les ont admirées sont légion et ils deviennent chaque jour plus nombreux, non seulement dans leur patrie, mais partout où elles ont été présentées honorablement. Dès le siècle dernier, George Bariţiu, historien et le fondateur de la presse roumaine de Transylvanie, écrivait dans sa revue « Foaie pentru minte, inimă şi lileralură» (1847): « Il est vrai que les églises moldo-roumaines sont pleines d'icônes de Nicula, village et monastère de Transylvanie, que les pauvres peintres-paysans - dont la plupart sont analphabètes exécutent avec une admirable facilité ». L'historien George Oprescu, qui ne s'est occupé qu'incidemment de ce phénomène artistique (ce qui a entraîné certaines confusions dans ses ouvrages d'art populaire), a su néanmoins définir la peinture de Nicula en critique avisé et analyste subtil. Il affirme que les peintres de Nicula travaillaient « avec des couleurs d'une violence inouïe, mais vibrantes, chaudes, franches ... » Il estime que ces icônes sont l'un des produits « les plus inattendus et les plus frappants issus des mains du peuple, d'une saveur et d'un accent inoubliables ».
Bien que Nicolae Iorga ait rangé sous l'étiquette d'« arts mineurs» toute la création artisanale du paysan roumain - faisant, selon nous, une erreur de jugement sur les icônes dans le contexte de l'art populaire, lorsqu'il soutient que « dans cet art populaire (...) la peinture est de moindre importance» - il parvient néanmoins à la conclusion que, dans cette peinture, « c'est au fond l'âme véritable du peuple qui s'exprime »...
V.G. Paleolog se souvient que Brancusi admirait les peintres d'icônes d'autrefois. «Les faiseurs de croix et les peintres d'icônes - disait-il travaillaient pour leur propre plaisir et poussés par la foi. Leur métier était sacré et ils avaient la conscience d'une mission à accomplir ». Plus près de notre temps, retenons cette judicieuse opinion de Petre Comarnescu: « Dans les peintures sur verre, surtout dans celles de Nicula, il existe un expressionnisme populaire situé entre la naïveté et le tragique, qui nous enchante et nous émeut ... »; ou encore cette appréciation de l'esthéticien de haute classe qu'était George CaIinescu: « Les icônes sur verre sont nombreuses et d'une rare beauté artistique, les musées et les hommes de goût les collectionnent avec soin, les historiens d'art les étudient ». Des déclarations enthousiastes ont été formulées par de nombreux étrangers - historiens d'art, critiques, artistes, hommes de lettres, journalistes - tel le critique Paul Caso qui, après avoir visité l'exposition ouverte à Bruxelles, écrivait dans « Le Soir »: «Vous serez séduit par cet ensemble où palpite l'âme de la Roumanie, tel un bouquet de coquelicots et de bleuets »; ou bien encore le critique Hans Redeker qui, après le vernissage d'une exposition à La Haye, soulignait que « par son authenticité, son humanisme, son charme décoratif, son coloris éclatant et la tradition de cet art si proche de la vie du peuple, (les icônes) sont dignes de toute notre admiration ». Différentes initiatives d'Etat ou particulières ont, évidemment, contribué à la faveur dont jouissent actuellement les icônes sur verre: acquisitions massives par les musées; expositions, surtout à l'étranger; publication par les Editions Meridiane d'albums en langues étrangères; publication d'études en volume ou dans des revues; organisation d'expositions permanentes dans le cadre des musées; activités et émulation déployées par les collectionneurs particuliers. Cependant, ce ne sont là que les effets de causes plus profondes, qui relèvent, d'une part, d'une tout autre conception qu'au début du siècle quant à la manière d'aborder l'œuvre d'art et, d'autre part, de la modification radicale de la mentalité du paysan roumain, survenue vers le milieu du siècle à la suite des transformations essentielles qui se sont produites dans les conditions socioéconomiques de son existence, transformations bien connues et auxquelles nous nous sommes du reste référé au début de la présente étude. Le XXe siècle a modifié profondément l'optique de l'univers artistique. Créateurs, critiques et historiens d'arts, le public cultivé lui-même se sont trouvés devant des prises de position proprement révolutionnaires, telles que les arts plastiques n'en avaient jamais connues depuis que l'art existe dans ce monde. Après l'apparition de la peinture naïve du Douanier Rousseau au Salon des Indépendants de 1886, mais surtout depuis que Picasso a lancé en 1907 son manifeste cubiste, illustré par sa composition longuement étudiée Les Demoiselles d'Avignon, l'histoire de la peinture est entrée dans la seconde ère capitale de son existence. Parmi les divers courants qui se disputaient le premier rôle dans cette révolution artistique, on compte aussi la peinture « naïve » (ou primitive, comme elle a parfois été nommée). Par son entrée dans le circuit de l'art moderne, les règles traditionnelles de la composition, de l'anatomie, de la perspective, des proportions, de l'harmonie ont été abolies ou éludées et, avec le temps, le monde s'est habitué à accueillir sans choc ces productions élaborées sous le signe de l'originalité, qualité indispensable pour qui veut s'affirmer à travers la concurrence qui règne de notre temps dans la production artistique.
Bien que Nicolae Iorga ait rangé sous l'étiquette d'« arts mineurs» toute la création artisanale du paysan roumain - faisant, selon nous, une erreur de jugement sur les icônes dans le contexte de l'art populaire, lorsqu'il soutient que « dans cet art populaire (...) la peinture est de moindre importance» - il parvient néanmoins à la conclusion que, dans cette peinture, « c'est au fond l'âme véritable du peuple qui s'exprime »...
V.G. Paleolog se souvient que Brancusi admirait les peintres d'icônes d'autrefois. «Les faiseurs de croix et les peintres d'icônes - disait-il travaillaient pour leur propre plaisir et poussés par la foi. Leur métier était sacré et ils avaient la conscience d'une mission à accomplir ». Plus près de notre temps, retenons cette judicieuse opinion de Petre Comarnescu: « Dans les peintures sur verre, surtout dans celles de Nicula, il existe un expressionnisme populaire situé entre la naïveté et le tragique, qui nous enchante et nous émeut ... »; ou encore cette appréciation de l'esthéticien de haute classe qu'était George CaIinescu: « Les icônes sur verre sont nombreuses et d'une rare beauté artistique, les musées et les hommes de goût les collectionnent avec soin, les historiens d'art les étudient ». Des déclarations enthousiastes ont été formulées par de nombreux étrangers - historiens d'art, critiques, artistes, hommes de lettres, journalistes - tel le critique Paul Caso qui, après avoir visité l'exposition ouverte à Bruxelles, écrivait dans « Le Soir »: «Vous serez séduit par cet ensemble où palpite l'âme de la Roumanie, tel un bouquet de coquelicots et de bleuets »; ou bien encore le critique Hans Redeker qui, après le vernissage d'une exposition à La Haye, soulignait que « par son authenticité, son humanisme, son charme décoratif, son coloris éclatant et la tradition de cet art si proche de la vie du peuple, (les icônes) sont dignes de toute notre admiration ». Différentes initiatives d'Etat ou particulières ont, évidemment, contribué à la faveur dont jouissent actuellement les icônes sur verre: acquisitions massives par les musées; expositions, surtout à l'étranger; publication par les Editions Meridiane d'albums en langues étrangères; publication d'études en volume ou dans des revues; organisation d'expositions permanentes dans le cadre des musées; activités et émulation déployées par les collectionneurs particuliers. Cependant, ce ne sont là que les effets de causes plus profondes, qui relèvent, d'une part, d'une tout autre conception qu'au début du siècle quant à la manière d'aborder l'œuvre d'art et, d'autre part, de la modification radicale de la mentalité du paysan roumain, survenue vers le milieu du siècle à la suite des transformations essentielles qui se sont produites dans les conditions socioéconomiques de son existence, transformations bien connues et auxquelles nous nous sommes du reste référé au début de la présente étude. Le XXe siècle a modifié profondément l'optique de l'univers artistique. Créateurs, critiques et historiens d'arts, le public cultivé lui-même se sont trouvés devant des prises de position proprement révolutionnaires, telles que les arts plastiques n'en avaient jamais connues depuis que l'art existe dans ce monde. Après l'apparition de la peinture naïve du Douanier Rousseau au Salon des Indépendants de 1886, mais surtout depuis que Picasso a lancé en 1907 son manifeste cubiste, illustré par sa composition longuement étudiée Les Demoiselles d'Avignon, l'histoire de la peinture est entrée dans la seconde ère capitale de son existence. Parmi les divers courants qui se disputaient le premier rôle dans cette révolution artistique, on compte aussi la peinture « naïve » (ou primitive, comme elle a parfois été nommée). Par son entrée dans le circuit de l'art moderne, les règles traditionnelles de la composition, de l'anatomie, de la perspective, des proportions, de l'harmonie ont été abolies ou éludées et, avec le temps, le monde s'est habitué à accueillir sans choc ces productions élaborées sous le signe de l'originalité, qualité indispensable pour qui veut s'affirmer à travers la concurrence qui règne de notre temps dans la production artistique.
Commentaires