LE VRAI PÈRE NOËL


Le père noël était grec. C’est en premier lieu ce qu’il faut rectifier. Le père Noël était un évêque orthodoxe. Le père Noël venait d’Asie Mineure, pas du pôle Nord. Et son vrai nom est Saint Nicolas.

Ce qui suit est la véritable histoire de Saint Nicolas et se termine par le récit étrange de la façon dont le monde moderne a tenté de transformer notre saint en mythe – d'abord  en un petit elfe nordique, puis en un mystérieux merveilleux père Noël qui apportait des cadeaux de nuit , puis en un gros et jovial fournisseur de Coca Cola, et finalement en un vendeur de voitures d’occasion avec une fausse barbe – et  voilà pourquoi nous n’en resterons pas là. 

 Nicolas Évêque de Myre

Commençons par le début. Il est certain qu'au début du quatrième siècle, a existé un saint évêque, nommé Nicolas, à Myre, port situé sur la côte sud de l'Asie mineure (Turquie moderne), qui est décédé le 6 décembre (19 décembre). Comment savons-nous cela? Parce que l’Église a toujours honoré les saints hommes et femmes en célébrant la Divine Liturgie le jour de leur mort. Et à Myre, on s'est toujours souvenu de cet évêque le 6 décembre, car il est maintenant honoré dans le monde orthodoxe. L'Asie mineure était alors grecque sur les plans culturel et linguistique. Une importante communauté orthodoxe grecque est d'ailleurs restée en Lycie jusque dans les années 1920.



Les histoires racontées à propos de la vie de Saint Nicolas ne sont pas documentées. Elles ne sont pas semblables aux Évangiles qui ont été écrits pendant la vie de beaucoup de personnes qui connaissaient personnellement Jésus, de sorte que, s'il y avait eu des erreurs majeures, elles auraient été corrigées. Pour autant que nous le sachions, il n’y a personne qui aurait connu l’évêque Nicolas qui ait écrit à son sujet. Des récits le concernant n’apparaissent pour la première fois que des siècles après sa vie. Il n’y a donc pas lieu de considérer les histoires qui le concernent plus que ce qu’elles sont, ni moins que ce qu’elles sont, car elles parlent du caractère de cet homme qui a laissé une impression si profonde sur son peuple qu’il s’est pour toujours souvenu de lui comme un saint. Quoi qu’il en soit, l’histoire la plus importante de Saint Nicolas s’est déroulée après sa mort, car, comme pour beaucoup de saints, c’est après sa vie sur terre que ses œuvres ont laissé le plus de traces. Nous y arriverons dans un instant. Mais pour l'instant, voici quelques-unes des histoires qui ont été racontées à propos de Saint Nicolas.

On dit que Nicolas est né de parents chrétiens dans la ville de Patara, dans les terres de Myre, et qu'il portait le nom de son oncle Nicolas, évêque de Patara. On dit que même lorsqu'il était bébé, il refusait de se nourrir les jours de jeûne orthodoxe, les mercredis et les vendredis. (Si cela vous semble extrêmement improbable, considérez qu'il en est de même de l'enfance de certains Anciens (starets) grecs du XXe siècle.)

Voici l’histoire de la manière dont Nicolas est devenu évêque de Myre. Le jeune Nicolas avait été fait prêtre. L'évêque de Myre était décédé et les anciens étaient dans l'impasse sur le choix du remplaçant. L'un d'entre eux a alors rêvé que le premier homme qui arriverait au premier office à l’église (Orthros / Matines) le dimanche suivant serait son évêque. Le père Nicolas était en visite à Myre et, étant pieux, il est arrivé tôt à l’église, c'est alors tous ont dit : «Oui, Nicolas sera notre évêque». Il se peut que l'histoire soit plus étoffée que cela. Il est rare que des hommes soient choisis évêques sans avoir déjà acquis une réputation établie.

Il y a beaucoup d'histoires sur le personnage de Nicolas. Certaines peuvent avoir eu lieu avant qu'il ne devienne évêque ou même après sa mort. Encore une fois peuvent-elles  être documentées ? Non. Ont-elles été élaborées au fil des ans ? Presque certainement, car il en existe depuis longtemps des versions quelque peu différentes. Mais elles parlent toutes de sa miséricorde et de sa charité, de sa foi orthodoxe, du pouvoir de ses prières et de la force de sa personnalité. C'est ce dont ses gens se souvenaient de lui.

Il y a l'histoire de trois filles dont le père était si pauvre qu'il n'avait pas d'argent pour leur dot, de sorte qu'elles n'avaient d'autre choix que de se vendre à la prostitution, de peur de mourir de faim. Mais quand chacune a atteint sa majorité, un sac d'or pour sa dot a été trouvé sur le sol le matin. Pour la troisième, le père a alors fait le guet et a surpris Nicolas en train de jeter l'or par la fenêtre. Le fin mot de l'histoire? Mgr Nicolas était généreux et a offert ces cadeaux en secret. Les orthodoxes croient qu'il le fait toujours - et je ne parle pas du mythe du Père Noël. (Parfois, je vais raconter en détail comment il a fondé l’église Saint Nicolas de Cedarburg. 



Il y a l'étrange histoire de trois garçons qui ont été enlevés par un aubergiste qui a mis leurs corps dans son saloir ( ou dans un baril de cornichons selon les versions). Saint Nicolas savait où les trouver, il les a sauvés et leur a redonné vie. Les gens se souvenaient que Nicolas faisait des merveilles et qu'il se souciait des enfants. Il est devenu leur patron. L'Église l'appelle toujours Saint Nicolas le thaumaturge.



Il a été raconté que, lors d’un voyage de Nicolas par mer en Terre sainte, il y eut une terrible tempête, et qu’alors les passagers l'ont supplié de prier. Ce qu’il a fait, et immédiatement, la tempête a cessé. À Myre, quand les gens partaient en mer, ils demandaient toujours à leur évêque Nicolas de prier pour eux, ce que font toujours les marins et les voyageurs orthodoxes. Il est devenu le patron des marins et des voyageurs, en particulier de ceux qui naviguent sur la mer.



Il y a une histoire à propos de trois soldats (certains disent des généraux) de Myre qui avaient été faussement accusés de trahison et condamnés à mort. Mgr Nicolas s'est alors rendu chez le gouverneur Avlavios pour intervenir, mais en vain. Il est donc apparu dans un rêve nocturne au nouvel empereur chrétien Constantin, l'effrayant et le menaçant d'un feu de l'enfer s'il ne libérait pas les trois hommes ; ce qu’il a fait. Nicolas aimait et protégeait son peuple et disposait de pouvoirs mystérieux.




On a appris qu'il y avait une famine à Myre et le capitaine d'un navire transportant du grain sur la Méditerranée a rêvé d'un évêque qui lui est apparu et lui a ordonné de détourner son navire vers Myre. Lorsqu'il est arrivé pour apporter de la nourriture aux gens, il a vu Mgr Nicolas et a reconnu l'homme qu'il avait vu dans son rêve. Certains saints, même au XXe siècle, ont eu ce pouvoir de paraître en deux endroits à la fois.



On dit aussi que l’évêque Nicolas a assisté au premier concile œcuménique de Nicée en 325. Quand l'hérétique Arius s'est levé et a commencé à chanter ses rengaines sur le Christ, comment «il fut un temps où il n'était pas», Nicolas fut tellement outré qu'il perdit son sang-froid, se leva et donna un coup de poing à Arius. Il fut bien sûr jeté hors du Conseil et interdit de servir comme évêque pendant un certain temps. Certains disent que la Toute Sainte lui  est apparue pour le réconforter. Cela pourrait expliquer pourquoi les archives du concile de Nicée ne mentionnent pas la présence de Nicolas de Myre, alors même qu'il vivait non loin de là. Peut-être. Le fait est que Nicolas était zélé dans la foi. Cette histoire a donné lieu à de nombreuses images intéressantes - et également à une très «mémorable» reconstitution historique au jour de la Saint Nicolas à Saint Nicolas, Cedarburg! Ou si vous préférez, c’en est une version moderne un peu moins respectueuse.



Toutes ces histoires montrent le caractère de l’évêque Nicolas, comment il est demeuré dans la mémoire de ceux  qui l'ont aimé.

En divers endroits, il est également devenu (pour des raisons que je ne peux pas expliquer) le saint patron des archers, des voleurs repentants, des brasseurs, des prêteurs sur gages, des étudiants - et des prostituées! peut-être pour qu'il puisse les sauver de leur métier?

L’œuvre de Saint Nicolas après sa mort

La suite des événements peut être  documentée : après la mort du vieil évêque Nicolas, son corps a commencé à exsuder un liquide odorant - habituellement appelé myrrhe, car personne ne sait ce que c'est en réalité. Les gens à l'époque ont fait un jeu de mots sur "la myrrhe de Myre". (Là encore, on peut se rappeler qu’un certain nombre de saints orthodoxes sont également «ruisselants de myrrhe».) Cette myrrhe se mit à suinter dans sa tombe, ayant des qualités de guérison. Cela pourrait aussi ressembler à de la superstition, sauf que cela se produit encore. Son corps incorrompu continue à exsuder un liquide odorant. 



 Ci-dessus, la tombe originale de Nicolas à Myre. Ci-dessous, l'église Saint Nicolas de Myre - n'est plus utilisée, la Turquie est ce qu'elle est.



D’autres miracles ont commencé à se produire ailleurs. Au cours de sa vie, il était naturel que le peuple de Nicolas demande: «Mgr Nicolas, prie pour nous». Après la mort de Nicolas, il était tout aussi naturel que les gens continuent à lui demander ses prières. (Nous, les orthodoxes, demandons l'intercession de ceux que nous aimons et de ceux dont nous estimons que les prières sont puissantes, à la fois avant et après leur mort.) Et après sa mort, quand les gens ont demandé: «Saint Nicolas, prie pour nous», les choses ont commencé à se produire. Des malades ont été guéris. Des gens sont venus dire qu'ils l'avaient vu, qu'il leur avait parlé – parfois  dans des rêves, parfois quand ils étaient réveillés. Un navire qui se dirigeait vers Myre a traversé une autre tempête et, lorsque les gens ont crié: «Saint Nicolas prie pour nous, sauve-nous», la tempête s'est à nouveau arrêtée. Cela est souvent représenté dans les icônes de Saint-Nicolas, le saint apparaissant du ciel dans un nuage près du navire en proie à la tempête - comme dans notre icône usée et très embrassée à l'entrée de l'église Saint Nicolas de Cedarburg. Myre est rapidement devenue un lieu de pèlerinage et l’est restée pendant de nombreux siècles.



C’est ainsi que la réputation de Saint Nicolas grandit - non pas à la suite d’un décret officiel de l’Église, mais de bouche à oreille. Sa dévotion se répandit dans tout l'est de la Méditerranée, puis au nord et à l'ouest, et des miracles attribués à Saint Nicolas ont commencé à se produire dans de nombreux endroits. De partout dans le monde chrétien, dans tous les siècles, il y a des histoires de ses apparitions, de ses guérisons et d'autres miracles. (Un jour, dans un autre article, je vous en dirai plus sur «Les miracles de Saint Nicolas».)

Au fil des siècles, Nicolas est devenu le deuxième saint le plus populaire au monde, après la Mère du Seigneur. Plus d'églises portent son nom en Russie et en Angleterre que n'importe quel autre saint. Les icônes orthodoxes l'imaginent toujours tel qu'il était. Il a le même aspect chez tous: un vieil évêque avec une barbe, vêtu de ses habits rouges, portant un livre de l’Évangile. Le 6 décembre est une grande fête dans l'Église orthodoxe et figure également sur les calendriers de l'Église catholique romaine et des églises anglicanes. (version française de la source par Maxime)




Commentaires

Maxime le minime a dit…
J'y pense : d'habitude on nous rabâche "le Christianisme a "récupéré" les fêtes païennes pour en faire des fêtes chrétiennes et asseoir son pouvoir sur ces pauvres gens qui vivaient tellement librement auparavant…"
Eh bien c'est bizarre avec St Nicolas, on dirait que c'est le contraire et c'est plutôt le non-chrétien qui a détourné un saint tout ce qu'il y a de plus chrétien pour en faire un mythe laïc et raconté n'importe quoi sans rapport avec la réalité historique. N'est-ce pas ?