La vraie foi orthodoxe [1]



Certes  il n'y a pas lieu de juger une Église au  nombre de pécheurs qui la composent ni à la gravité des péchés qui y sont commis… pourtant on dit aussi qu'on connaît l'arbre à ses fruits… et alors là je dois dire que les derniers scandales qui se sont produits au coeur même du principal centre spirituel et du lieu de pélerinage le plus prisé et le plus sacré de millions de catholiques devraient en inviter au moins quelques uns  de plus à s'interroger sur l'origine de tels maux. Je lisais il y a peu que certains catholiques étaient désormais confrontés à la "tentation" de passer à l'Orthodoxie, mais je ne suis pas sûr que le mot "tentation" soit le bon mot, ni en même temps que l'indignation légitime provoquée par un tel scandale moral soit suffisante à fonder solidement une conversion réelle.

Mais passons à des choses plus sérieuses… Voilà des décennies que l'on traite plus mal les zélotes orthodoxes que les hétérodoxes (du même mouvement d'ailleurs, étrangement, qu'au Vatican l'on traite  plus mal les Uniates que les Orthodoxes) allez comprendre les motivations des hiérarques : en haut lieu on a des raisons que la raison du coeur des peuples de fidèles ne connaît point. Les choses étant ce qu'elles sont aujourd'hui - c'est à dire de dégénérescence avancée de la foi chrétienne - il est peut être temps d'écouter davantage les zélotes, non pas en tant que schismatiques intransigeants qui alimentent la division (provoquée d'ailleurs par les oecuménistes confusionnistes bienveillants eux-mêmes), mais en tant que fidèles transmetteurs de la foi orthodoxe tout simplement.

Voici donc, pour un rappel à temps et à contre temps (2 Timothée 4:2), des extraits, en quelques parutions, de l'ouvrage Le nouveau catéchisme contre la foi des Pères  paru en 1993  dans la collection La Lumière du Thabor des éditions L'Âge d'homme en réponse au nouveau Catéchisme de l'Église catholique promulgué et publié solennellement par le Vatican en 1992.

En ce sens la prière qui figure dans ce texte orthodoxe est reproduite ici :

"Que Notre Dieu très bon qui veut que toute âme arrive à la connaissance de la Vérité éclaire tous ceux de nos lecteurs qui nous liront avec désir spirituel. Par les prières de nos Pères saints, Seigneur Jésus-Christ Notre Dieu, aie pitié de nous !" 





Il ne saurait y avoir de concession en matière de foi.

Saint Marc d’Éphèse

Pour ma part, je n’ai jamais polémiqué, que je sache, ni avec les Grecs ni avec personne. Je ne crois pas, en effet, que les hommes de bien aient rien de mieux à souhaiter que de pouvoir, autant qu’ils le peuvent, et connaître et exposer la vérité en soi dans son authentique réalité. Dès le moment que cette vérité, quelle qu’elle soit, est démontrée avec rectitude et sans erreur, dès lors qu’elle est clairement établie, par là même toute affirmation étrangère, prît-elle le masque de la vérité, sera réputée étrangère à la vérité telle qu’elle se présente en soi, dissemblable, spécieuse plutôt qu’authentique.

Saint Denys l’Aréopagite, Lettre à Polycarpe

INTRODUCTION

Le critère de la vérité permettant de distinguer, dans l’Église, la vérité de l’hérésie a été énoncé au Ve siècle par saint Vincent de Lérins : « Dans l’Église catholique elle-même, il faut veiller à s’en tenir à ce qui a été cru partout, toujours et par tous » (Commonitorium, 2). Et le Synodicon de l’Orthodoxie, résumant l’œuvre du saint septième Concile œcuménique, a énoncé une fois pour toutes la norme de la foi orthodoxe, quand il a dit : « Comme les Prophètes ont vu, comme les Apôtres ont prêché, comme les Pères ont dogmatisé, comme l’Église a reçu, nous aussi, nous croyons, nous prêchons, nous enseignons ».

Le Credo de Nicée-Constantinople résume le contenu de la foi chrétienne :

Je crois en un seul Dieu, le Père tout-puissant,
Créateur du ciel et de la terre
et de toutes les choses visibles et invisibles.
Et en un seul Seigneur, Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles,
Lumière de Lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré, non créé, consubstantiel au Père, par qui tout a été fait.
Qui, pour nous hommes, et pour notre salut, est descendu des cieux,
s’est incarné du Saint Esprit et de Marie la Vierge, et s’est fait homme.
Il a été crucifié pour nous, sous Ponce Pilate,
a souffert et a été enseveli
et Il est ressuscité le troisième jour selon les Écritures. Et Il est monté au ciel et siège à la droite du Père,
d’où Il reviendra en gloire juger les vivants et les morts et Son règne n’aura point de fin.
Et en l’Esprit Saint, Seigneur qui donne la vie,
qui procède du Père,
qui est adoré et glorifié avec le Père et le Fils,
qui a parlé par les prophètes.
En l’Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique. Je confesse un seul baptême en rémission des péchés. J’attends la résurrection des morts
et la vie du siècle à venir. Amen.

Ce Credo a été composé par les Pères réunis en Concile à Nicée (325) puis à Constantinople (381), et accepté par la conscience de l’Église. Les Conciles œcuméniques suivants – Éphèse (431), Chalcédoine (451), Constantinople (553), Constantinople (680) – l’ont confirmé et ont interdit de faire la moin- dre modification matérielle à son texte, pour éviter toute tentative hérétique. Le Septième Concile Œcuménique, réuni à Nicée en 787, a déclaré : « À tous les hérétiques, anathème » et « Si quelqu’un rejette une tradition, quelle qu’elle soit, de l’Église, écrite ou non-écrite, qu’il soit anathème », car les Apôtres ont enseigné par leurs écrits, leurs paroles et leurs actes (II Th. 2, 15). Enfin le saint Concile de 879, à Constantinople, qui a réuni, en personne ou par leurs légats, les cinq Patriarcats de l’Église – Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem – a condamné solennellement, sous peine de déposition et d’anathème, ceux qui oseraient faire la moindre addition, suppression ou modification au Credo, dans lequel il a « fondé et érigé la base du salut ».

L’auteur d’une innovation qui contredit, si peu que ce soit, la foi reçue, accuse, par là-même, cette foi des Apôtres d’être imparfaite ou insuffisante. Or, le jour de la Pentecôte, les Apôtres ont été conduits « dans toute la vérité ». Ils n’ont pas reçu un catalogue de dogmes, mais la grâce de la glorification, de la déification. La dogmatique orthodoxe n’a d’autre but que de protéger cette expérience, de la garder possible.

Au Credo, à tout le dépôt de la foi1 transmis par le Christ à son Église, défini par les Conciles et conservé par les canons de l’Église, et à toute la tradition, l’Église orthodoxe adhère in- défectiblement. Si ces vérités et ces traditions étaient des choses humaines, le temps les aurait fait perdre. Et quand nous di- sons l’Église, nous entendons la communion de tous, car comme le rappelait l’Encyclique des Patriarches Orthodoxes, c’est à la communion d’amour de tout le corps du Christ qu’a été donné l’infaillible proclamation de la vérité : « Chez nous, ni les Patriarches, ni les Synodes n’ont jamais pu introduire de nouveau- tés, parce que le défenseur de la religion, c’est le corps même de l’Église, ou le peuple lui-même, qui veut que son culte demeure éternellement inchangé et identique à celui de ses Pères 2... »

Il est vrai que, de nos jours, certains ne cessent de flétrir ceux qui se tiennent à la solidité de la foi orthodoxe comme s’ils étaient des retardataires, attachés à des formes surannées. Toutefois, les vrais orthodoxes savent que Jésus-Christ est le même hier, et aujourd’hui, et éternellement (Hébr. 13, 8). Ils connaissent par expérience que « quiconque s’est uni à la Vérité, sait bien qu’il marche sur la voie droite, même si la foule le rappelle à l’ordre... Pour sa part, il a pleine conscience de ne pas être le fou que prétendent les autres et il sait que la possession de la vérité simple, perpétuelle, immuable l’a délivré tout au contraire de la fluctuation instable et mobile à travers les multiples variations de l’erreur 3 ».

Le Catéchisme de L’Église Catholique repose sur deux idées : d’une part, le catéchisme se donne pour la transmission du « dépôt de la foi » et cette foi est unique (§§ 172-175) ; d’autre part, le dogme catholique est un « développement » de la foi originelle, celle du premier millénaire chrétien, à laquelle l’Église orthodoxe est restée fidèle – nul ne le conteste 4. C’est dire que, à partir des grandes invasions, la foi chrétienne se serait épanouie dans des cadres historiques et culturels différents, en Orient, celui de l’Église grecque, et en Occident, celui de l’Église latine. Cette différenciation progressive aurait pour conséquence que ces mondes religieux auraient fini par ne plus se comprendre, et par se séparer 5. C’est ce qu’on appelle l’estrangement, ou éloignement culturel progressif 6, aboutissant au schisme de 1054. Or, pour deux raisons essentielles, cette conception ne peut être acceptée :

- Il est inexact de parler d’estrangement.
- La dogmatique catholique n’est pas un développement de la doctrine des Apôtres et des Pères, mais elle est en contradiction avec elle sur des points fondamentaux.
Le présent livre a pour but de démontrer le second de ces deux points. Sur le premier, nous ferons deux remarques.

1) Le dialogue n’a jamais cessé entre les deux parties de l’ancien Empire romain. Il n’est pas juste de dire qu’il renaît aujourd’hui après des siècles de silence.

2) Le « catholicisme » est le résultat d’un conflit qui a duré en Occident pendant plusieurs siècles, du VIIe au XIe à peu près. Ce conflit s’est déroulé non pas entre l’Orient et l’Occident, mais à l’intérieur de l’Occident. Après la rupture de communion entre l’Orient et l’Occident, les Pères de l’Église sont apparus comme une source continuelle de difficultés et d’opposition à la théologie occidentale.

Notes :
1. I Tim. 6, 20 et II Tim. 1,14.
2. Encyclique de 1848, § 17. Texte grec dans Jean Karmiris, Monuments dogmatiques et symboliques de l’Église catholique orthodoxe (Ta Dogmatika kai Symbolika Mnemeia tês orthodoxou katholikes Ekklesias), t. 2, Athènes, 1953, p. 920. Texte français : Encycliques des Patriarches Orthodoxes de 1848 et 1895, Paris, 1988, p. 40.
3. Saint Denys l’Aréopagite, Les Noms Divins, 7, 4.
4. « Pour l’intercommunion avec les orthodoxes, dit le cardinal Ratzinger, l’Église catholique ne doit pas insister nécessairement sur l’acceptation des dogmes du second millénaire » (Irénikon, 56, 1983, p. 235). En effet, c’est à peu près à partir de l’an mil que les catholiques ont commencé d’introduire dans le dogme les innovations que refusent les orthodoxes.
5. « Pendant plusieurs siècles, les Églises d’Orient et d’Occident suivirent chacune leur propre voie, unies cependant par la communion fraternelle dans la foi et la vie sacramentelle. » (Décret sur l’œcuménisme, Unitatis Redintegratio de 1964, chapitre 3).
6. Voir Y. Congar, Neuf Cents Ans Après, Notes sur le « Schisme oriental » , extrait de l’ouvrage 1054-1954 L’Église et les Églises, Chevetogne, 1954, p. 7-8, 94-95.

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