L'ORTHODOXIE, CETTE INCONNUE (4e) par Père André BORRELY :

De même, la prière eucharistique des divines liturgies orthodoxes s'adresse à Dieu le Père d'une manière apophatique :... c'est Toi le Dieu ineffable, qu'il est impossible de considérer sous toutes tes faces, invisible, incompréhensible... Toi qui es sans commencement, indescriptible, immuable ..., créée à l'image, à la réplique de Dieu et pour lui ressembler Il faut donc tenir le même langage au sujet de l'homme en tant que personne et non point comme individu, au sujet de sa sexualité, de sa culture, et d'une manière générale pour tout ce qui touche à l'homme. Les sciences de l'homme sont des sciences de la nature humaine mais en aucune manière de la personne humaine unique au monde, imprévisible, incomparable, irreproductible. 

Et rien n'est plus incompatible avec cette vision foncièrement positive et optimiste de l'homme et du monde, que le dualisme

Si les chrétiens sont désunis, c'est bien parce qu'ils ont introduit la division entre la sainte Écriture et la Tradition, entre la parole et les rites sacramentels, entre les clercs et les laïcs, l'autorité et la liberté, la foi et les œuvres, le corps et l'âme, la pensée et la vie, la connaissance et l'amour, entre la foi et la raison, la philosophie et la théologie, entre les réalités spirituelles et les choses sensibles, le terrestre et le céleste, le temps et l'éternité, la contemplation et l'action, entre la nature et la personne, la nature et la grâce, ou entre la nature et le surnaturel. 

Et ce dualisme paraît s'être prolongé dans la société déchristianisée avec la théorie marxiste de la lutte des bourgeois et des prolétaires. Et on peut même se demander s'il n'y a pas un peu de cela dans un certain féminisme. 

 

 Par contre, rien ne manifeste mieux l'optimisme foncier de la vision de l'homme et du monde selon l'Orthodoxie, rien ne révèle mieux l'amour qui est la source intarissable de cet optimisme, que l'audace avec laquelle l'Église utilise le langage du corps pour évoquer des réalités spirituelles mais en aucune manière désincarnées. Il est du plus haut intérêt que, dans tout monastère orthodoxe, tout au long du Grand Carême, on lise à l'heure de Sexte, l'ouvrage d'un Abbé du monastère du Sinaï nommé Jean, qui vécut au 6 ème ou au 7 ème siècle. Le titre de ce livre est L'Échelle sainte. Or, avec la même surprise qu'en ouvrant le Cantique des cantiques puis la première épître de Jean, et en songeant que cet ouvrage est lu et médité par des moines et des moniales, on tombe sur la phrase suivante : Que l'éros physique ou : 1'amour charnel nous serve de modèle pour notre désir de Dieu. Et le même auteur écrit encore : Bienheureux celui qui a obtenu un désir de Dieu semblable à celui d'un amant passionné pour celle qu'il aime! 

Origène a écrit que les réalités que nous expérimentons dans le devenir, nous devons en éclairer la vision par l'expérience divinisante que nous faisons de l'Esprit. Mais il ajoute qu'inversement l'expérience que nous faisons de l'Esprit ne doit jamais être désincarnée, que pour être vraie, elle doit s'enraciner dans notre vie terrestre.(à suivre)

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