LA TOUTE SAINTE DÉIPARE, GÉNITRICE DE DIEU
LA DIVINE MATERNITÉ [2]
La tradition orthodoxe n’a pas cru nécessaire d’édicter aucun dogme à propos de la Mère de Dieu. La seule affirmation dogmatique la concernant fut celle du concile d’Éphèse répondant aux Nestoriens, et ce dogme ne la touche qu'indirectement. Du fait de la réalité de l'Incarnation du Christ, de l’unité de Dieu devenant pleinement homme en prenant chair de la Vierge, celle-ci doit être considérée comme «génitrice de Dieu», en grec Theotokos [en latin Deipara, en français Déipare]. C’est par cette expression qu’elle est le plus souvent nommée dans l’Église orthodoxe. Le sens premier de sa figuration au sein de l’icône de la Nativité est directement lié au dogme du concile d’Ephèse. La présence de la Mère de Dieu prouve la réalité de l'Incarnation de Dieu. Celui qui naît de son sein à cette heure précise n’est pas un homme normal qui serait «adopté» par Dieu par la suite, au baptême du Jourdain, ainsi que l'enseignaient les Nestoriens. Celui qui naît d’elle est réellement Dieu. Dès les premiers instants de son existence terrestre, c'est-à-dire dès le développement du fœtus, l’homme qui se crée dans le sein de la Vierge, qui sera assumé par Joseph en lui imposant le nom de Jésus, est parfaitement homme et parfaitement Dieu.
La glorification de la Mère de Dieu est donc directement liée dans la Tradition orthodoxe au rôle prépondérant qu’elle a joué dans ce mystère de l’Incarnation.
Il est donc naturel que la figure de la Mère de Dieu tienne une telle place dans l’icône de la Nativité, puisque c’est dans cet événement qu’elle a joué le plus grand rôle. La Nativité constitue le sommet de sa coopération à l’œuvre divine et représente pour elle une certaine glorification, comme l’est toute naissance pour une femme. Or cette glorification est pleinement personnelle.
En effet, la Mère de Dieu a été beaucoup plus qu’un simple facteur biologique dans l'Incarnation du Sauveur. En acceptant de recevoir en elle le Fils de Dieu, de lui offrir une forme humaine issue de sa chair et de son sang, elle n’a pas été un simple instrument dans la main de Dieu mais une personne libre et agissant en pleine conscience.
Celle qui représente l'humanité
Rappelons-nous que, lors de l’Annonciation, la Vierge Marie s’est trouvée confrontée à un choix terrible, engageant le devenir de toute l’humanité et de toute la création. Car elle a été totalement libre d’accepter ou de refuser le désir de Dieu d’accomplir le salut du monde et sa déification dans l’Incarnation. C’est bel et bien volontairement qu’elle est devenue la Mère de Dieu. Rien ne lui a été imposé par Dieu. En s’abaissant jusqu’à devenir un homme, Dieu a condescendu à demander le consentement de l’humanité, exprimé par la plus humble de ses messagères, la plus insignifiante aux yeux des hommes, mais aussi la plus pure et la plus sainte.
L’Évangéliste saint Luc qui a relaté cet événement de l’Annonciation, a mis en parallèle par le jeu de la construction littéraire le doute de Zacharie, le père de saint Jean-Baptiste, et l'acceptation dans la foi de Marie. La tradition est allée beaucoup plus loin encore en comparant le dialogue entre Marie et l’Archange avec le dialogue entre Ève et le serpent au Paradis. Ève acceptant la suggestion du Tentateur désobéit à Dieu et entraîna Adam et toute l’humanité dans la Chute. Marie reçoit l’annonce de l’Ange, obéit à Dieu et apporte ainsi au monde l’accomplissement du Salut voulu et offert par Dieu, accepté par l’humanité en la personne de la Vierge.
extrait d'une étude de l'Archimandrite Gabriel
Higoumène du Saint monastère St Nicolas de la Dalmerie
parue dans la revue Paix n°80
et publiée avec permission de son auteur
(à suivre )
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