SUR LE SCANDALE (3) : péché et libre-arbitre par St Jean Chrysostome


Mais, à peine avons-nous répondu à cette difficulté, qu’on en soulève une nouvelle : Pourquoi, nous demande-t-on, Dieu a-t-il fait l'homme ainsi ? Il ne l’a pas fait ainsi ; n’en croyez rien: autrement Il ne l’aurait pas châtié. (…)

Dès lors que nous reconnaissons dans la nature le principe des choses que nous n'imputons pas à faute, nous reconnaissons aussi, lorsque nous signalons quelque chose de fautif, que la faute naît de la volonté.

 Ne produisez donc pas de ces raisonnements sophistiqués, n'alléguez pas des paralogismes des arguments plus fragiles que des toiles d'araignée répondez plutôt à ce que je vais vous dire :
N’est-il pas vrai que Dieu a créé tous les hommes ? C’est une vérité manifeste de tout point. 
Pourquoi donc tous les hommes ne possèdent-ils pas le même degré de vertu ou de vice? 
Comment se fait-il que les uns soient honnêtes, probes, équitables, et que les autres soient méchants et pervers? 
Si la volonté n’exerce sur ce point aucune nuance, et si tout dépend de la nature, pourquoi ceux-ci pratiquent-ils le vice et ceux-là la vertu? 
Supposez que la nature nous ait faits mauvais, personne ne pourrait être bon; qu’elle nous ait faits tous bons, personne ne pourrait être mauvais. Tous les hommes n’ayant qu’une seule et même nature, ils devaient tous être ou ceci ou cela, ou tous bons, ou tous mauvais. 
Répondrait-on que la nature a fait que les uns soient bons, que les autres soient mauvais, encore que ce soit insoutenable au point de vue de la raison, les choses une foi réglées ainsi ne devraient plus changer; car l'inviolabilité est le caractère des lois naturelles. 
Réfléchissez-y, en effet : nous sommes tous en condition mortelle et passible; quelques efforts qu’il fasse, jamais un homme ne s’élèvera jusqu’à l'impassibilité. 
Or, nous voyons pourtant bien des hommes, de méchants devenir bons, de bons devenir méchants, par le zèle des uns et par la négligence des autres; preuve incontestable que ce n’est pas l'oeuvre  de la nature ; car, je le répète, les dons de la nature sont invariables, et pour les acquérir tout effort est inutile. 
De même que nous n'avons besoin d’aucun effort pour en arriver à voir et à entendre, nous ne devrions avoir besoin d’aucun effort pour acquérir la vertu, si elle était un don de la nature. 
Pourquoi, dans ce cas, la nature aurait-elle fait des méchants, quand il lui était facile de faire tous les hommes vertueux? Mais non, elle n’a pas fait les méchants. — D’où vient donc le mal, demanderez-vous ? (à suivre)

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