Si quelqu'un, en effet, veut aimer la vie et voir des jours heureux, qu'il préserve sa langue du mal et ses lèvres des paroles trompeuses, qu'il se détourne du mal et fasse le bien, qu'il recherche la paix et la poursuive. 1 Pierre 3:10-11 Les lèvres mensongères font horreur à l'Éternel, tandis que ceux qui agissent avec fidélité lui sont agréables. Proverbes 12:22 «C'est ce qui sort de l'homme qui le rend impur. En effet, c'est de l’intérieur, c'est du cœur des hommes que sortent les mauvaises pensées, les adultères, l'immoralité sexuelle, les meurtres, les vols, la soif de posséder, les méchancetés, la fraude, la débauche, le regard envieux, la calomnie, l'orgueil, la folie. Toutes ces choses mauvaises sortent du dedans et rendent l'homme impur.» Marc 7:20-23 Un témoin fidèle ne ment pas, tandis qu’un faux témoin dit des mensonges. Proverbes 14:5 « Vous, vous avez pour père le diable et vous voulez accomplir les désirs de votre père. Il a été meurtrier dès le commencement et il ne s'est pas tenu dans la vérité parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il profère le mensonge, il parle de son propre fond, car il est menteur et le père du mensonge. » Jean 8:44 Si les paroles distinguées ne conviennent pas à un fou, les paroles mensongères conviennent d’autant moins à un noble. Proverbes 17:7 « Écarte de ta bouche la fausseté, éloigne de tes lèvres les détours ! Proverbes 4:24 Craindre l'Éternel, c'est détester le mal. L'arrogance, l'orgueil, la voie du mal et la bouche perverse, voilà ce que je déteste. » Proverbes 8:13 « Pierre lui dit : «Ananias, pourquoi Satan a-t-il rempli ton cœur, au point que tu aies menti au Saint-Esprit et gardé une partie du prix du champ? […] Comment as-tu pu former dans ton cœur un projet pareil? Ce n'est pas à des hommes que tu as menti, mais à Dieu.»Actes 5:3-4Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort.Apocalypse 21.8

jeudi 29 juin 2017

Démocratie et totalitarisme belliqueux par Alexandre ZINOVIEV

« Depuis la fin de la guerre froide, […] on assiste à une décadence vertigineuse de la démocratie, à tous les niveaux et dans toutes les sphères de la vie publique des pays occidentaux, témoignant d’une tendance très puissante au totalitarisme généralisé. J’appelle cela le totalitarisme occidental. […] La course du monde occidental vers le totalitarisme est occultée par le voile épais de la désinformation, de la propagande idéologique et du mensonge qui surpassent ceux de l’époque hitlérienne et stalinienne, tant par leurs moyens techniques et leur ampleur que par leur pénétration intellectuelle et leur hypocrisie. Le totalitarisme belliqueux de l’Occident s’avance sous le déguisement de l’humanisme, de la démocratie, de la lutte pour les droits de l’homme, de la justice. Mais par sa nature, ses actes et ses conséquences, ce totalitarisme est plus terrible et plus dangereux que ses précédents hitlérien et stalinien. En effet, il ne se dévoile pas, il est plus profond et ne rencontre aucune opposition sérieuse […]. »
 « Une guerre contre l’Europe » , Le Monde, 25 mai 1999.

POUTINE par OLIVER STONE : recadrage

CONVERSATIONS avec POUTINE (I)

Pendant deux ans, le réalisateur Oliver Stone a eu l'occasion de s'entretenir avec Vladimir Poutine. Bénéficiant d'un accès sans précédent à l'intimité du président russe, il l'a accompagné au Kremlin ou lors de ses déplacements. A cette occasion, il a pu s'entretenir avec lui et le questionner librement sur les sujets les plus divers, comme ses relations avec les Etats-Unis ou l'histoire récente de la Russie.


mardi 27 juin 2017

FOI et POLITIQUE - Un Chrétien de gauche, ça existe ?

LES GENS "DE GAUCHE " de simples serviteurs du diable…

Peut-on être chrétien "de gauche" ?

Bien sûr qu'il y en a et même pas mal d'Orthodoxes qui le prétendent sans doute…
Pourtant est-ce compatible ? Sont-ce vraiment des chrétiens ?
Je prétends que non. Absolument non.  Je prétends que les idéologues, les militants, les politiques, les faiseurs de lois, et leurs applicateurs zélés, les médias qui les soutiennent, tous gens "de gauche" sont désormais plus nus autant que leur roitelet… on connaît désormais leur pseudo générosité même chez les moins révolutionnaires. En aucun cas ils ne peuvent être chrétiens et pas seulement parce qu'une large partie d'entre eux sont en effet anti-chrétiens par conviction, mais avant tout parce qu'ils sont,  par leur propagande comme par leurs actions, de parfaits serviteurs du diable.

Et là il faut rappeler ce qu'est le diable. 
Non pas ce personnage rouge et cornu ou noir et poilu, selon je ne sais quel folklore, auquel plus personne ne croit (ce qui est une grande réussite du diable)  sauf quelques attardés et naïfs idolâtres de satanistes, mais celui dont toute l'action masquée, hypocrite et trompeuse et éminemment malveillante, malfaisante, et pour finir mortifère ne cesse de pervertir tout ce qu'il touche et tous ceux qu'il touche afin de causer leur perte.
Prenez votre Bailly et lisez bien la définition des mots diaboli (διαβολή)  et diabolos ( διάβολος) en grec, d'où nous vient le mot diable et vous allez comprendre rapidement :




Si l'on considère les fondements des idéologies et des évènements historiques qui s'en sont inspirés et qui nourrissent "la gauche" dans nos contrées (le "libéralisme" outre-Atlantique) depuis quelques siècles jusqu'à l'apothéose  contemporaine, on ne voit qu'exaltation de la division, de la désunion, de l'inimitié, de l'envie, de la haine et de la guerre en effet :
  • classe contre classe
  • sexe contre sexe
  • enfants contre parents
  • élèves contre enseignants 
  • race contre race
  • homosexuels contre hétérosexuels
  • immigrés contre citoyens "de souche"
  • homme contre Dieu
Voilà quelques uns des thèmes favoris de cette "gauche".
Mais leur paradoxe, que l'on peut plutôt qualifier de ruse stratégique, machiavélique ou  "au mieux" de stupide et funeste aveuglement, c'est de prétendre avoir pour noble objectif de défendre dans tous ces thèmes  les victimes d'un pouvoir abusif,   de défendre l'égalité, la justice et la tolérance, alors que leur propagande et leur militance ne font qu'attiser la dissension, la brouille et l'inimitié. Et désormais, de nos jours, ces gens qui nous "gouvernent" ne font pas autre chose avec leurs discours et leurs lois  que de favoriser la médisance, la calomnie, la malveillance, de semer la désunion, de réveiller l'aversion, de développer la haine et de faire germer la guerre civile en tout ce qu'ils touchent. Oui leur action est bien diabolique, sans aucun doute.
  • Plutôt que de favoriser le dialogue au cas par cas dans les entreprises, ils font des lois totalitaires, à appliquer obligatoirement par tous sans le moindre discernement, la moindre souplesse, ni la moindre adéquation à la réalité, qui ne font que durcir "le dialogue social" et contraignent les parties à jouer le jeu d'un rapport de forces dans le travail qui ne fait qu'entériner le principe de l'injustice, c'est à dire la primauté de la loi du plus fort. Peu importe sur quoi se fonde cette force, ni qui gagne, car celui qui a perdu finira par désirer se venger avec ses propres armes et la lutte des classes sera bien entretenue. Un véritable chrétien ne peut se reconnaître dans de telles dispositions. Division.
  • Un chrétien par ailleurs ne peut être machiste pas plus qu'il ne peut être féministe. Ce sont des notions qui lui sont étrangères car ce qui prime ou devrait primer normalement et fondamentalement, chez le chrétien, c'est l'amour et pas le rapport de force entre l'homme et la femme sous le prétexte de la libération du plus "faible". Qu'importe, chez un couple inspiré et nourri par l'amour, qui fait quoi dans l'organisation de la vie conjugale et familiale. Foin de l'idéologie dans un couple qui a pour objectif la construction patiente et l'entretien fervent de l'amour dans la reconnaissance de l'irréductible et dans la persévérance,  dans l'objectif de la sanctification réciproque. La notion de perte et de frustration, due à un sacrifice à cause de l'autre, n'est objet d'aucun rapport de force ni de souci d'égalitarisme. Car si, selon St Paul, la femme est censée suivre son mari, le mari a pour modèle le Sacrifice du Christ car il n'est pas de meilleure preuve d'amour que de donner sa vie pour ceux que l'on aime. Car le premier doit servir le dernier, et l'exemple du plus puissant, le Pantocrator est de se faire humble serviteur pour ceux qui le suivent. Le Christ ne leur lave-t-Il pas les pieds et n'accepte-Il pas de servir, et de souffrir jusqu'à la mort assumée. Certes la société était loin d'avoir réalisé dans les siècles précédents le Royaume sur terre, (pas plus que maintenant) et pour leur majorité,  les femmes demeuraient, mineures aux yeux des hommes. L'intolérable inégalité des salaires, le harcèlement sexuel au travail et désormais dans la rue même, demeurent, scandaleusement. Mais il n'empêche qu'un certain féminisme, devenu "idéologie" d'une guerre des sexes, encore considéré comme une valeur "de gauche",  n'a fait qu'exacerber l'impatience, l'inimitié, et la séparation, et pour finir, par créer les conditions de la  renaissance d'un nouveau machisme venu d'ailleurs, plus abject et violent que le précédent… Les divorces sont en nombre croissant, comme la solitude des célibataires, produits de la division. 
  • Il en est de même avec la survalorisation de la jeunesse. Depuis les années 50, la société marchande n'a cessé de chercher à multiplier et diversifier ses cibles, de façon à augmenter les profits. Les différentes tranches de l'enfance jusqu'à l'adolescence ont subi une propagande de pseudo reconnaissance des "droits de l'enfant", de légitime révolte contre les aînés, de prise en compte de leur spécificité par une différenciation prétendue respectueuse de leurs désirs légitimes. Désirs tôt transformés en revendication, en constitution de groupes et de mouvements auto proclamés avec comme point commun la révolte contre "les vieux". Il n'était plus question d'avancer, chacun à son rythme respecté, en passant certes par l'opposition nécessaire et vitale, vers l'âge adulte, mais de valoriser la séparation, la division en classes d'âge et faire affronter "la jeunesse" à tout ce qui était "institutionnel", donc vieux et réactionnaire. Résultat : plus personne ne veut être "vieux" et le "jeunisme" sévit en tout lieu. Pour lutter contre l'abus de pouvoir parental on a rien trouvé de mieux que de renforcer dès le plus jeune âge l'ego des enfants, en favorisant leur désobéissance et leur désir d'indépendance en tout. Mais on n'a malheureusement pas éradiqué l'abandon des enfants, la solution de l'avortement, la maltraitance, ni l'abominable inceste et l'on constate une augmentation des suicides d'enfants. On a seulement favorisé l'égoïsme grandissant des parents, désirant avant tout "profiter de la vie", et celui des enfants qui ont désormais "le droit" d'avoir leur "indépendance", c'est à dire de ne plus communiquer avec leur parents, d'avoir leur vie séparée. C'est une œuvre de division là encore. Et à l'instar de la lutte des classes, et la guerre des sexes, la guerre des âges est née et s'est développée sous le prétexte en apparence généreux de la reconnaissance des droits de l'enfant, thème de gauche certainement aussi. Division.
  • Évidemment cette même survalorisation de l'état passager de la jeunesse (même si l'on fait tout pour la prolonger et la conserver le plus longtemps possible par tous les moyens) s'est appliquée à l'école et aux relations entre enseignants et élèves. On a voulu en suivant les théories d' idéologues de gauche, autoproclamés spécialistes de la pédagogie, "mettre l'enfant au centre du système" et on a substitué l'éducation ( normalement réservée aux familles et non à l'état sauf dans les régimes totalitaires nazi ou communiste) à l'instruction. On sait ce qu'il en est advenu : de moins en moins de respect de l'enseignant, jusqu'à la remise en cause, l'insulte et les agressions physiques. Un rapport de forces quasi constant. Un souci de démocratie a sans doute motivé une participation croissante des parents d'élèves dans les affaires de l'école jusqu'à l'ingérence directe. Là encore qu'a-t-on obtenu ? Opposition de deux camps. Méfiance, médisance, calomnie, et division entre élèves et enseignants et parents et enseignants. Division.
  • Le bon accueil et le respect de l'étranger, principes bibliques et chrétiens se sont transformés dans le discours "de gauche" en survalorisation  de sa culture et de ses us et coutumes d'origine, fussent-elles en contradiction évidente avec celles de ceux qui accueillaient. Qui plus est,  cela s'est fait contre la culture d'accueil, son mode de vie, son mode de relations humaines, son mode d'éducation des enfants, ses valeurs morales, à partir de ce moment-là critiquées, dévalorisées, dénigrées, chargées de tous les maux du monde, et pour finir réduites à néant avec un acharnement inconcevable et tel qu'il devenait une paradoxale haine de soi, une autoflagellation permanente à tout propos jusqu'à nourrir le désir de remplacement de sa propre culture par celles des autres; tout cela  dans un délirant projet suicidaire d'autodestruction.  Le prétendu respect de l'étranger et de la différence a en réalité favorisé et consolidé la constitution de ghettos, le refus de l'intégration et de l'assimilation des immigrés, jusqu'à nourrir le mépris de la culture d'accueil, voire le désir de la remplacer par celle que l'on a quittée pour des terres meilleures, paradoxalement, de façon incompréhensible. Tout cela a attisé la haine et la division. Clairement encore une fois de Division qu'il s'agit.
  • Le Christianisme authentique abandonné, méconnu voire inconnu, déformé voire même inventé, ne condamne jamais le pécheur mais seulement le péché. L'homosexualité n'est rien d'autre qu'une propension "naturelle" (trop "naturelle") comme une autre, à pécher dans un domaine particulier. Pourquoi est-on infidèle, obsédé par le sexe, goinfre, ivrogne, violent… etc. ? On peut sans doute tenter et même parvenir à "comprendre" pourquoi, pour essayer de changer ce que l'on voit bien comme étant source de mauvaise vie pour soi et d'effets néfastes pour les autres. Et sans aucun doute est-ce condamnable aux yeux des hommes comme au regard de Dieu.  Mais Dieu ne veut pas la mort du pécheur mais qu'il vive et qu'il se retourne vers Lui, et réoriente et dépasse ses passions en les transfigurant pour en utiliser l'énergie non pour jouir de façon éphémère dans cette vie terrestre et matérielle en s'y perdant pour ensuite en goûter l'amertume quand la frustration apparaît inévitablement pour les  raisons diverses de la finitude de la condition humaine…  mais pour jouir de l'incommensurable jouissance de la vie éternelle du Royaume Céleste que vivent déjà les saints, de leur vivant, sur cette terre, en participant des énergies divines. Le vrai Christianisme n'a jamais préconisé le mépris et la persécution des homosexuels parce que la perspective chrétienne offre une transcendance que refusent volontairement et obstinément les "bonnes consciences de gauche".  Aussi, encore une fois, "la reconnaissance des droits des homosexuels", leur réduction à une étiquette (marchande en fait), à une prétendue "identité" (comme si l'on pouvait réduire un homme à ses tendances dans quelque domaine que ce soit) dans le même mouvement de valorisation de la différence, a produit tout le contraire de ce qu'elle prétendait obtenir ; c'est à dire plus que jamais la constitution de ghettos, de lobbies, de démonstrations, d'exhibition et de parades qui n'ont fait que nourrir et augmenter l'intolérance, le mépris, voire la haine et la violence de ceux qui ne supportent pas justement cette "différence".  Et encore une fois c'est le ressentiment et la Division qui ont été nourris et pas du tout l'amour dont on nous rebat les oreilles.
  • Que dire du racisme sinon qu'en tant que méfiance, rejet, exclusion, dévalorisation, mépris de ceux qui ne sont pas de la famille, du même village, de la même région, du même pays, de la même ethnie, de la même classe sociale… etc.  c'est la chose la mieux partagée au monde. L'accusation de "racisme" est devenue pour ceux qui ne l'ont jamais vécu (et qui prétendent abusivement en parler !) un réflexe de prêt à penser automatique que l'on dégaine pour tout et n'importe quoi en suivant servilement (et paresseusement) la doxa médiatique bien pensante. À qui veut-on faire croire   que c'est automatiquement et évidemment le méchant blanc européen qui a l'apanage du racisme ? Pas à moi en tout cas qui ai choisi d'aller vivre et travailler pendant quelques années en Afrique et en Afrique du Nord. Pas à moi qui ai vu de mes propres yeux comment une ethnie dominante exerçait un pouvoir tyrannique sur les toutes les autres,  en persécutait une autre, réduisait en esclavage une autre encore, plus faible. Pas à moi dont un copain bassiste camerounais, avec lequel je faisais de la musique s'était fait traiter de "plus nègre que noir" par un douanier de Centrafrique pays au passage à la frontière. J'avais été élevé par un père athée dans l'indifférence aux races, aux préférences sexuelles et aux classes sociales et j'étais allé  avec enthousiasme "aux sources du jazz" (musique que je pratiquais  en France avant de partir) et j'ai rencontré le racisme, sans m'être douté une seconde que cela existait, entre africains même… Est-ce que le racisme n'existait pas également dans le pays du Maghreb où j'ai travaillé plus tard ? Il y était de bon ton pour certains de se revendiquer comme "descendants du Prophète" et de mépriser les "fils de bergers" indigènes, de traiter les habitants du Souf de "foncés" et de rappeler aux noirs qu'ils étaient "des fils d'esclaves"… J'ai été le témoin de tout cela et je me garderai bien de parler de racisme anti-blancs ou de racisme anti-roumis. Inutile… Ce dont je témoigne seulement c'est du racisme entre des personnes supposées être les victimes privilégiées du racisme européen. J'ai aimé ces pays africains et j'y ai laissé de vrais amis, des personnes hospitalières, honnêtes, conviviales, et à l'esprit critique, elles. Qu'a fait la gauche depuis toutes ces décennies jusqu'à maintenant encore ? Désigner des bourreaux et plaindre des victimes, et tout cela sans connaissance réelle ni expérience, avec des grilles d'interprétation pré-construites qui sont autant de lits de Procuste peu adéquats à rendre compte de la réalité. Avec encore une fois la volonté de réduire les personnes à des étiquettes, diviser, faire affronter des groupes, attiser la haine. Qui alimente la haine réellement ? De quel lieu idéologique sont ceux qui ont contribué à développer des ghettos culturels et urbains sous prétexte (contradictoire) d'"ouverture à l'autre", de "tolérance", de "valorisation de la différence" ?   Qui a alimenté le ressentiment et l'esprit revanchard jusqu'à la haine et le désir de vengeance chez les victimes désignées ? Qui a semé les graines de la guerre civile ? Qui en a cultivé soigneusement les champs ? — Les mêmes. De gauche. Et encore une fois qui sert la Division ? Qui se fait serviteur du diable ?
Peut-on donc être chrétien "de gauche", c'est à dire social-démocrate en gros, "progressiste" comme on dit maintenant ?  
Je prétends que non. Absolument non. 
Je ne parlerai bien sûr pas de tous ceux qui ont persécuté et massacré les chrétiens du temps de l'Union des Républiques SOCIALISTES  soviétiques" pas moins socialistes que les Nazional Socialistes…
Maxime Martinez

dimanche 25 juin 2017

Le Transhumanisme décrypté par P. Jean Boboc


Présentation du livre du p. Jean Boboc - Le Transhumanisme décrypté. Métamorphose du bateau de Thésée (2017) -, samedi 17 juin 2017, à la Cathédrale des Saints Archanges, Paris 75005. Avec Pierre Magnard, professeur émérite à La Sorbonne



de Jean BOBOC


L'humain est-il en danger de mort ?
Depuis quelques années, le transhumanisme est plus ou moins connu, il devient aujourd'hui de grande actualité. Il s'agit essentiellement des possibilités d'amélioration des performances humaines, tant physiques, psychiques que mentales et cela au-delà de ce que la médecine classique proposait jusqu'à présent. La médecine elle-même change de paradigme, de purement thérapeutique elle se met au service de l'amélioration (enhancement). Une littérature internationale et très inégale est consacrée à cette idéologie et l'insistance médiatique sur les progrès attendus de la convergence des NBIC, lui confère progressivement une aura qui la rend acceptable par le grand public d'autant plus que l'eugénisme est pratiquement acquis pour des raisons compassionnelles et sociétales. L'idéologie de l'amélioration qui inclut les possibilités de modifications génétiques et l'atteinte au patrimoine de l'humanité s'avère une révolution anthropologique majeure mettant en péril l'Homme tel que nous le connaissons encore. Ce que l'on appelle transhumanisme débouche inévitablement sur le posthumanisme et les hommes génétiquement modifiés (HGM), ce dont certains théoriciens de l'idéologie se défendent, tandis que d'autres l'appellent de leurs vœux pour en finir avec l'homme. Les uns veulent des améliorations biologiques si considérables que l'humanité sera fracturée en deux, les autres veulent en finir avec la condition humaine, renoncer à notre biologie et rechercher l'immortalité terrestre de l'homme cyborg, hybride de biologie et de technologie. Les recherches en matière de téléchargement du cerveau humain sur un serveur sont présentées comme une forme de réincarnation de l'esprit dans la machine. Le transhumanisme c'est le déni de notre histoire génétique.

La dénonciation de l'idéologie multiforme du transhumanisme qui constitue une inversion des valeurs fondatrices de la société humaine, et qui s'avère de nature révolutionnaire, totalitaire et luciférienne, entraîne des réactions de bon sens et des contre-propositions d'ordre moral ou religieux sous le prisme du christianisme, aujourd'hui seul véritable rempart pour la sauvegarde de la nature humaine.
A propos de l'auteur :


Le Père Jean Boboc, prêtre économe stavrophore de la Cathédrale orthodoxe roumaine de Paris, est Docteur en médecine de la Faculté de médecine de Paris et Docteur en théologie orthodoxe, il est aussi le Doyen du Centre Orthodoxe d'Études et de Recherche Dumitru Staniloae où il enseigne l'anthropologie et la bioéthique. Auteur notamment d'un important ouvrage d'anthropologie La Grande métamorphose, et de nombreux articles et conférences en France et à l'étranger sur les questions bioéthiques actuelles. Membre du comité de bioéthique auprès du CEC où il représente son patriarcat, il est aussi l'un des principaux traducteurs en langue française de l'œuvre monumentale du grand théologien orthodoxe du XXe siècle, le Père Dumitru Staniloae.

jeudi 22 juin 2017

LES VERTUS DU JEÛNE, une fois de plus… par Slobodan Despot


RECONQUÊTES par Slobodan Despot


Les promesses de la faim

Introduction

Ainsi que je l’annonçais dans le dernier Antipresse, j’ai décidé de créer une nouvelle rubrique «où l’on parlera des choses qui nous concernent et nous affectent au plan le plus concret». Or, comme cela arrive souvent, le choix d’un nom pour cette nouvelle rubrique aura englouti bien plus de temps que la rédaction du premier texte. En fin de compte, elle s’appellera Reconquêtes.

Rien de belliqueux dans cette appellation. Ou plutôt si : l’annonce d’une lutte féroce pour la reconquête de territoires qui nous sont propres mais dont nous sommes dépossédés. La modernité, c’est l’aliénation: tous les philosophes vous le diront, mais les philosophes ne savent que broyer du noir. En des termes moins déprimants, notre intégration à la société complexe de l’ère industrielle et technologique se traduit par un pacte de sujétion dont nous sommes rarement conscients. Dans son expression la plus simple, il se traduit ainsi: le confort contre la dépendance. Plus la technologie se perfectionne, plus elle nous «facilite la vie», et plus elle la contrôle. C’est ce que j’ai essayé d’illustrer dans mon récit burlesque sur «la Panne» (Antipresse 68). J’y racontais comment un incident anodin et sans gravité comme une crevaison en ville pouvait devenir un accident, c’est-à-dire impliquer toute une logistique, coûter des sommes folles et vous manger toute une journée… par la magie de ce grand «progrès» de l’industrie automobile consistant à supprimer les roues de secours!
Tous à l’hospice?

La santé est l’un des domaines où la dépendance du citoyen moderne à l’égard du système social s’avère la plus sévère, la plus lucrative, et souvent aussi la plus incontestable — car incontestée. La médecine, les médecins et les assurances qui les financent exercent une autorité intimidante. Tout citoyen, tôt ou tard, devient aussi un patient. Souvent, on est patient avant même d’avoir atteint l’âge d’exercer ses droits de citoyen. Le Dr Knock, il y a bientôt un siècle, a annoncé le citoyen-patient du futur avec son fameux axiome: «Tout homme bien portant est un malade qui s’ignore!».

Constatant le degré de «prise en charge» des individus dans notre société et son évolution vers une «médicalisation» physique et mentale infantilisante, le remuant Edvard Limonov avait écrit dès les années 1990 un essai provocant intitulé Le grand hospice occidental.

Le grand hospice est-il notre destin inévitable? La loi du Dr Knock ne pourrait-elle pas inversée en notre faveur? Et si le malade était un homme bien portant qui s’ignore? Cette interrogation est le point de départ d’une approche radicalement différente de la médecine, et par conséquent aussi de l’être humain. Une approche qui, comme on le verra, a été écartée et même férocement réprimée depuis des décennies. En gros, depuis que la gestion de notre santé a été confisquée à nos petites mains, à notre bon sens et à notre expérience, et entièrement outsourcée à l’autorité impersonnelle et infaillible de la Science.
Le moins, c’est le plus




Voici quelques années, un reportage diffusé sur Arte exhumait pour le public francophone une vaste bibliothèque de connaissances sur la santé du corps et de l’esprit qu’on avait oubliée comme un continent perdu. «Le jeûne, une nouvelle thérapie?» de Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade est l’un des documentaires les plus regardés de la chaîne. On y découvre les étonnants effets de la privation temporaire mais totale de nourriture, non pas au travers des traditions religieuses, ni d’une arbitraire spiritualité «new age», mais des études et des pratiques médicales rigoureuses menées en Allemagne, aux États-Unis ou en Russie.

On y apprend encore que les mêmes mécanismes qui permettent à diverses espèces animales de traverser de longues hibernations, ou aux manchots de se priver de nourriture des mois durant dans la rigueur du climat antarctique, existent également chez l’être humain. Et qu’ils peuvent être mis à profit non pour le simple allégement du corps, mais pour son nettoyage et son renforcement général ainsi que pour le traitement de maladies graves avec des espérances de succès égales ou supérieures à celles de la plupart des thérapies médicamenteuses. Pour cela, aucune technologie n’est nécessaire. Il suffit, pour ainsi dire, d’une bonne connaissance du métabolisme, d’un refuge calme et d’un verre d’eau plate.

Cela n’a rien de nouveau. Les vertus du jeûne ont été reconnues de tout temps et en tout lieu — jusqu’à ce que les «modernes» fassent table rase de l’ensemble des connaissances traditionnelles de l’humanité. Mais les confirmations expérimentales qui tombent en cascade ces dernières années nous conduisent une fois de plus à redécouvrir l’eau chaude.

Dès l’aube de la civilisation, pourtant, l’arsenal du jeûne était connu, pratiqué et codifié. Dans l’ancienne Egypte, on préconisait trois jours d’abstention de nourriture par mois accompagnés de lavements. Pythagore faisait jeûner ses disciples en prescrivant des périodes de 40 jours — la durée exacte de la retraite du Christ dans le désert. Platon en parle également. Hippocrate fait écho en ajoutant que «tout homme porte en lui-même son propre médecin». Même musique chez Plutarque et Celse («plutôt que d’avaler des potions, mieux vaut jeûner un jour»).

La doctrine ne se limite pas au bassin méditerranéen. Au IVe siècle avant Jésus-Christ, les Tibétains compilaient un livre considérable sur la thérapie par le jeûne. Avicenne (980–1037) propose aux malades des jeûnes de trois à cinq semaines accompagnés de mouvements gymnastiques, de massages et de bains — exactement comme dans les cliniques du jeûne actuelles. Mais — comme aujourd’hui — sa méthode «ne plaisait guère dans les cours», car elle était, déjà, trop simple et trop bon marché!

Ainsi jusqu’à l’aube des temps modernes… où l’objection faite à Avicenne dans les cours d’Orient deviendra peu à peu l’attitude officielle de la médecine dite «scientifique». Comment vendre des traitements chroniques et des pilules coûteuses à des clients pourvus de leur «médecin intérieur» selon les mots d’Hippocrate? Simplement: en les persuadant que leur santé est une affaire strictement extérieure!

Pèlerinage aux sources

Approfondissant une découverte qui l’avait manifestement marqué sur un plan personnel, Thierry de Lestrade a publié dans la foulée de son reportage un livre d’enquête. Ce n’est pas le premier ouvrage disponible sur le sujet. On peut, entre autres, accéder depuis des décennies aux traductions des traités pratiques sur le jeûne du grand pionnier américain Herbert Shelton. Mais de Lestrade propose à l’heure actuelle la meilleure vue d’ensemble des mécanismes de la thérapie par le jeûne et de ses domaines d’application. Il commence par narrer l’histoire tumultueuse et souvent stupéfiante des tentatives entreprises pour restaurer la place du jeûne dans la médecine moderne et des oppositions irrationnelles, agressives et souvent crapuleuses auxquelles ses défenseurs ont été confrontés. Les États-Unis auront été le principal théâtre de cette bataille acharnée où les coups bas étaient de règle. C’est là, entre la répression des naturopathes et des «médecines alternatives» au XIXe siècle et l’investissement stratégique de M. Rockefeller dans l’industrie pharmaceutique, que s’est formulée la médecine chimique et technologique qui règne sans partage sur la santé de l’humain massifié et industrialisé.

Dans une deuxième partie, de Lestrade revisite les centres de recherche et de traitement présentés dans le film documentaire. Il évoque en particulier le développement surprenant des connaissances sur le jeûne en URSS dès les années cinquante sous l’impulsion du psychiatre Iouri S. Nikolaïev, un praticien aux vues extraordinairement larges, qui s’en servit avec succès pour traiter la schizophrénie — et s’aperçut du même coup que la méthode soulageait en passant toute une palette de symptômes collatéraux.

La somme colossale de connaissances et de notes accumulées par les médecins russes depuis soixante ans est restée pour l’essentiel inconnue à l’étranger, avant tout pour des problèmes de langue. Elles portent pourtant sur des domaines aussi éloignés que le traitement de l’asthme ou de l’infertilité féminine, la convalescence des vétérans de guerre ou la préparation des cosmonautes. Intrigué par cette science méconnue, je suis remonté à la source. J’ai lu la documentation, parlé avec les praticiens, établi des contacts sur place. Jamais je n’aurais pu prévoir que mon apprentissage de la langue russe m’ouvrirait de tels horizons.

C’est ainsi que j’ai pu, en fin de compte, tenter l’expérience personnellement. Mon séjour d’un mois au bord du lac Baïkal en mars-avril derniers avait pour but d’expérimenter ce levier prodigieux du réarmement personnel qu’est le jeûne total. Avec l’aide des médecins du Centre de médecine orientale d’Oulan-Oudé, en Bouriatie — et de leur filiale sur les bords du grand lac —, je suis allé à la rencontre de mon «médecin intérieur». J’évoquerai cette aventure dans les prochains numéros de l’Antipresse.

Rappel

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lundi 19 juin 2017

Attribuer les peines de cette vie au vice et la prospérité à la piété ? par St GRÉGOIRE le THÉOLOGIEN :

Parmi nous — et cela doit arracher les larmes — il y a des gens qui, loin de compatir aux malheureux et de les aider, les insultent et les attaquent méchamment en de stupides et vaines réflexions ; leur voix vient vraiment de la terre, ils parlent en l'air, leurs propos ne sont pas pour des oreilles prudentes et habituées aux oracles divins ; ils osent dire "C'est de Dieu que vient leur misère et c'est de Dieu que vient notre prospérité. Que suis-je pour aller contre les décrets de Dieu et pour me montrer meilleur que Dieu ? Qu'ils souffrent, qu'ils soient miséreux, calamiteux. Tel est Son bon plaisir."

Ces gens-là n'aiment Dieu que quand il s'agit de garder leur argent et de narguer les malheureux !
Or, ils montrent bien par leur langage qu'ils ne croient pas tenir vraiment de Dieu leur prospérité : qui en effet, pensant que c'est Dieu qui lui a donné ce qu'il possède, pourrait avoir de telles idées au sujet des indigents  ? Quand on tient quelque chose de Dieu, on en use aussi selon Dieu.

Que la souffrance des malheureux soit un châtiment de Dieu. nous n'en pouvons rien savoir tant que nous sommes ballottés, comme sur des flots dans le trouble de ce monde matériel. Qui sait si un tel est châtié a cause de ses vices et si tel autre est élevé parce qu'il est irréprochable,  ou bien si ce n'est pas le contraire, l'un étant élevé à cause de sa scélératesse, et l'autre éprouvé à cause de sa vertu ? L'un n'est-il pas élevé plus haut, afin qu'il tombe plus lamentablement, et ne jouit-il pas d'un délai jusqu'à ce que sa malice pleine et entière se déclare comme une maladie, afin qu'il soit plus justement châtié ? L'autre, au contraire, n'est-il pas accablé contre toute attente, afin d'étre éprouvé comme l'or dans le creuset et de perdre jusqu'à la moindre scorie du mal qu'il peut avoir ? Nul, s'il est né d'une génération humaine, n'est entièrement pur de souillure, ainsi que nous l'avons appris, quand bien même il parait digne de toute estime.

Je me garde bien, pour ma part, d'attribuer d'une façon absolue les peines au vice et la prospérité à la piété. Sans doute il arrive parfois, en vue de quelque avantage, que le vice soit enrayé par le malheur des méchants ou que la vertu soit favorisée par le bonheur des justes ; mais ce n'est pas toujours, ni d'une façon absolue ; cela est réservé à la vie future où les uns recevront la récompense de leurs vertus et les autres le châtiment de leurs vices. "Ils ressusciteront, dit l'Écriture, les uns pour la résurrection de la vie, les autres pour la résurrection du jugement."  Les choses d'ici-bas sont d'un autre ordre et d'une autre conduite, elles tendent toutes vers l'au-delà et ce qui nous parait anomalie est pour Dieu parfaitement normal ; de même, dans un corps il y a des parties supérieures et parties inférieurs, des éléments grands et d'autres qui sont petits, de même, sur la terre il y a des montagnes et des vallées et leur harmonieuse disposition constitue cette beauté qui s'offre à nos regards, de même encore, l'activité d'un artiste à l'égard de la matière qu'il travaille est pendant un certain temps désordonnée et irrégulière, mais elle devient vraiment de l'art lorsqu'elle s'oriente directement à la production d'un objet. 

Cela, nous le comprenons et nous I'admettons lorsque nous voyons la beauté de l'œuvre achevée, mais l'artiste lui-même n'est pas ignorant comme nous. Eh bien, de même les choses de ce monde ne sont pas gouvemées sans ordre pour cette seule raison que nous n'en connaissons pas les principes ! 

Si l'on veut donner une image de l'erreur dont nous parlons, on dira qu'elle ressemble quelque peu à l'état des gens qui ont le mal de mer ou le vertige : ils croient que tout chavire parce qu'eux-mêmes chavirent ! C'est ce qui arrive à ceux dont je vous entretiens en ce moment. Sont-ils  pris de vertige en face de quelque événement, ils ne supportent pas que Dieu en sache plus qu'eux. Ils devraient se donner de la peine pour chercher à comprendre, car la vérité serait peut-être accordée à leurs efforts ; ou bien ils devraient creuser la question avec des hommes plus sages et plus versés dans les choses spirituelles, puisque c'est là un don et que la vraie science n'est pas donnée à tous ; ou bien ils devraient se mettre à "la chasse" de la vérité (comme dit Platon) en menant une vie plus pure et en cherchant la sagesse auprès de la vraie Sagesse. Mais eux - o stupidité ! - se tournent vers la solution la plus facile : ils affirment faussement que le monde est absurde, parce qu'ils n'en connaissent pas l'explication ; et les voilà "sages" par ignorance, ou plutôt sots et ininelligents par suite d'une sagesse que je puis appeler oiseuse !
(in Discours XIV)

jeudi 15 juin 2017

MOURIR "DANS LA DIGNITÉ" mais surtout au bénéfice des assurances


Un médecin accuse les compagnies d'assurance de refuser les traitements aux patients nécessaires à leur survie tout en les poussant au suicide assisté… (source)


Dr Brian Callister (capture d'écran d'une vidéo du Fonds d' action des droits des patients)

L’une des motivations fondamentales, et bien entendu peu souvent mises en avant des partisans de l’euthanasie et du suicide assisté, est économique. Il n’aura pas fallu attendre longtemps, en définitive, pour que cela soit montré au grand jour. Selon le quotidien Washington Times, des assurances santé dans l’Etat du Nevada, où le suicide assisté est légal, ont récemment refusé des traitements onéreux et nécessaire à la survie de leurs clients, proposant de les aider plutôt à mettre fin à leurs jours.

On ne saurait montrer plus clairement l’intérêt économique des législations qui permettent d’échapper à la prise en charge des frais les plus lourds entraînés par la maladie : généralement, ceux qui arrivent en fin de course, étant donné que les derniers mois de vie sont généralement présentés comme les plus « chers » au cours de la vie d’un assuré.

Le journal cite le témoignage d’un médecin, Brian Callister, professeur associé de médecine interne à l’université du Nevada, qui avait cherché à obtenir la prise en charge du transfert de deux de ses patients vers la Californie et vers l’Oregon en vue d’y subir des traitements qui ne sont pas proposés par son propre hôpital.



Le suicide assisté légal : une aubaine pour les compagnies d’assurance ?

Pour les deux patients, assurés auprès de compagnies différentes, la réponse a été identique, donnée par téléphone, sans doute pour éviter la présence d’une trace écrite ? Dans les deux cas, c’est un médecin représentant la société d’assurance qui est entré en contact avec le Pr Callister, en expliquant qu’il n’était pas question de couvrir la procédure ou le transfert envisagé, et demandant dans la foulée : « Seriez-vous prêt à envisager un suicide assisté ? »

Le médecin du Nevada assure que les deux coups de fil sont intervenus en 2016 au cours d’une période d’environ un mois, et il souligne également qu’il n’avait rien fait pour susciter une telle proposition.

Il a également précisé que les deux patients en question n’étaient pas en phase terminale de leur maladie, mais que leur maladie serait entrée en phase terminale en l’absence des traitements médicaux qu’il cherchait à mettre en place. Dans les deux cas, il ne s’agissait pas simplement de prolonger la vie mais d’aller vers une possible guérison, avec 50 % de chances de réussite dans le premier cas, 70 % dans le second.
Le refus de soins onéreux facilité là où le suicide assisté est légal

Le Dr Callister est quant à lui entré en campagne contre la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté, ce dernier étant déjà dépénalisé dans une demi-douzaine d’Etats tandis que douze autres envisagent de le faire. Il a participé à une vidéo de mise en garde proposée par le Parents Rights Action Fund où il déclare :

« Même si la plupart des compagnies d’assurances cherche à se montrer comme votre meilleur ami, ce qu’ils veulent, c’est prendre l’option la moins chère. C’est bien meilleur marché d’attraper quelques médicaments et de vous tuer plutôt que de mettre en place un traitement pour vous maintenir en vie. C’est aussi simple que cela. »

Le même groupe de défense de la vie donne la parole à une Californienne, Stéphanie Packer, très gravement malade, qui témoigne de ce que son assurance maladie a refusé de prendre en charge ces traitements et lui a proposé à la place des pilules euthanasiques peu après que l’Etat de Californie eut adopté sa propre loi de suicide assisté en 2015.

Le groupe a choisi pour plusieurs raisons de ne pas nommer les compagnies d’assurances qu’elle met en cause, notamment pour ne pas révéler l’identité des patients concernés.
Les compagnies d’assurance des Etats-Unis protestent de leur innocence

Du côté des assureurs, on a publié un communiqué signé par le groupe qui représente leurs intérêts communs indiquant que les lois autorisant la mort choisie ne changent rien à la politique de remboursement des soins, et qu’aucune d’entre elles ne se permettrait de s’impliquer dans une décision de suicide assisté. Les militants pour le suicide assisté accusent de leur côté le Dr Callister de ne pas apporter la preuve de ce qu’il avance.

Celui-ci parle de la « prudence » des assureurs qui évitent à tout prix de laisser des traces de ces propositions, même s’il s’en est trouvé pour dire les choses plus ouvertement. Ainsi en 2008, Barbara Wagner, dans l’Oregon, a reçu une lettre de la part de son programme Medicaid refusant le remboursement d’un médicament pour le cancer du poumon revenant à 4.000 dollars par mois, mais proposant de procurer des médicaments en vue d’un suicide assisté, rapporte le Washington Times. Cela dit, les sociétés d’assurances ne sont pas tenues de préciser les motifs de refus de remboursement, ce qui permet d’avancer masqué.
(version française Jeanne Smits)

Autorisation d’Adolf Hitler pour le programme d’”euthanasie” (Opération T4),
 signé en octobre 1939 mais datée du 1er septembre 1939.
— National Archives and Records Administration, College Park, Md.



mercredi 14 juin 2017

LA STRATÉGIE DE CONQUÊTE du TOTALITARISME ISLAMISTE


Ajoutée le 30 oct. 2016
Thierry Ardisson reçoit Alexandre del Valle dans "Salut les Terriens!" sur C8 le 29 octobre 2016 pour son dernier livre « Les Vrais Ennemis de l'Occident » publié aux éditions du Toucan/L'Artilleur. Lire la suite (...)

Livre disponible - sur le site de l'éditeur : http://bit.ly/2emMbcf
- en librairie près de chez vous avec Place Des Libraires.fr : http://bit.ly/2eL7Coz
- sur Amazon: http://bit.ly/amazon-alexandre-del-valle

Page Facebook: https://www.facebook.com/alexandredel...
Site officiel: http://www.alexandredelvalle.com/

« Alexandre del Valle fut précurseur en évoquant dès 1997 le totalitarisme islamiste et en annonçant la dérive de la Turquie néo-ottomane. Trente ans après la dissolution de l’ex-URSS, il montre que les pays de l’OTAN n’ont pas toujours changé leurs « logiciels » hérités de la Guerre froide, désignant la Russie comme l’Ennemi suprême. A cette erreur sur l’Ennemi correspond une erreur sur l’Ami, l’Occident demeurant allié aux « pôles de l’islamisme sunnite » (Arabie saoudite, Qatar, Koweit, Pakistan, Turquie, OCI, Frères musulmans) qui oeuvrent, dans le cadre d’un projet d’expansion planétaire, à saper de l’intérieur les valeurs des sociétés ouvertes sous couvert de défense de la religion.

Del Valle dresse un bilan des « révolutions de couleurs » appuyées par nombre d’ONG américaines en Europe de l’Est et les relie à l’interventionnisme occidental en Irak ou en Libye puis au printemps arabe, devenu « hiver islamiste ». Il dévoile de façon détaillée les stratégies et buts de guerre des islamistes, qu'il s'agisse des pôles « institutionnels » et étatiques, véritables ennemis, ou des djihadistes, simple face immergée de l'iceberg. Après avoir exposé leur double matrice théocratique et totalitaire, l’auteur démontre que pour résister à cette offensive bien plus planifiée et massive qu’on l’imagine, l’Occident doit de toute urgence définir la Menace et l’Ennemi dans leur globalité puis revoir totalement ses alliances et visions stratégiques.

L’enjeu n’est autre que de préserver les valeurs des sociétés ouvertes sans renier leurs racines civilisationnelles. La priorité est de les défendre chez nous avant de donner des leçons de droits de l’homme ou de démocratie au reste du monde.

Docteur en Histoire contemporaine, consultant, P.-D.G. de Geopol Consultings chercheur associé au Center of Political and Foreign Affairs, Alexandre Del Valle est professeur de géopolitique et de relations internationales. Il a publié plusieurs essais remarqués, dont Le Complexe occidental (2014) et Comprendre le chaos syrien (2015). »

mardi 13 juin 2017

CHRONIQUES FRANCO-RUSSES… pas du gâteau

Deux extraits du Blog de Laurence : Chroniques de Pereslav

Le petit Vladik, privé de ses parents au Donbass,
 et luttant lui-même contre la mort dans un hôpital de Donetsk


[…] Je raconte à Yana ce qui se passe en France. Elle me répond que je lui décris exactement ce qu'elle et son mari observent chez eux, la destruction du patrimoine, de l'éducation, le mépris de la culture indigène, l'importation forcée d'étrangers musulmans, De tout cela, ils rendent le gouvernement responsable. Le malheur, c'est que chez les fonctionnaires, et dans les médias, on trouve à l'oeuvre les mêmes pourris que chez nous, et ils servent les mêmes commanditaires. Ils dirigent la rancœur provoquée par leurs agissements sur leurs adversaires politiques. Je suis persuadée que Poutine et son équipe proche font à peu près ce qu'ils peuvent, mais qu'ils sont loin de tout pouvoir, et que la gangrène des années Elstine, et même de l’appareil soviétique antérieur sous forme mutante, continue à nuire. Cela dit, Yana a tort, son pays n'en est pas au point où nous en sommes. Il est plus pauvre par bien des aspects, mais il ne me semble pas aussi profondément malade, aussi menacé de disparition prochaine. Elle était sidérée d'apprendre par exemple que l'éducation sexuelle commencerait dès la maternelle,.. Elle avait lu Houellebecq. "Eh bien voyez, lui ai-je dit, nous y sommes!"
Je pense que si des Russes traduisaient des infos françaises, comme certains d'entre nous traduisent parfois des articles russes, cela donnerait à davantage de gens une vue d'ensemble. Car ils ne faut pas compter sur la presse pour le faire à notre place: elle est pourrie de fond en comble... […]  (in Echanges de vues politiques)


[…]


Je suis consternée par ce qui se passe en France, mais très inquiète des menées de Navalny, le Macron russe, et de l’enrôlement dans ses combines des petits ados gâtés moscovites qui « en ont assez de la pauvreté », et rêvent de l’Europe, elle-même au seuil de l’abîme, grâce aux mêmes oligarques et mafieux internationaux qui financent leur idole et ont plongé leur pays dans la merde par deux fois, en 17, en 90 et rêveraient d’achever le travail pour fêter l’anniversaire du viol et de la défiguration acharnée de la sainte Russie. Navalny a le même profil que Macron : un bellâtre qui peut faire illusion sur les insensés, avec une expression fausse et prédatrice de traître de mélodrame, à qui on ne confierait pas son enfant pour aller faire une course, quand on est encore dans son bon sens. Une marionnette prête à tous les coups bas, aux ordres de Soros et de la CIA qui ne s’en cachent même pas. Je regarde ces petits ados tout farauds, qui jouent au cow-boys avec une police bien gentille. Et je regarde le petit Vladik, privé de ses parents au Donbass, et luttant lui-même contre la mort dans un hôpital de Donetsk. Les petits merdeux de Moscou sont du côté de ses bourreaux et ont de grandes chances de subir son sort, si les commanditaires des bataillons punitifs ukrainiens comme de Navalny parviennent à leurs fins. Naturellement, devant le petit Vladik, il y a toujours des imbéciles, en Europe, mais aussi, plus grave, en Russie, pour glapir que c’est la faute aux « troupes russes » fantômes qui soit-disant occupent le Donbass depuis trois ans sans avoir été fichues, contre une armée aussi lamentable que l’armée ukrainienne, d’arriver jusqu’à Kiev pour renverser ce régime de laquais sanglants et d’oligarques rapaces. J’ai même lu l’émoi d’une jeune femme que je connais, libérale, devant ces affreuses brutes de policiers russes qui « tordent les bras » de ces gentils petits ados. Et je propose, ces ados, de les envoyer à Donestk, dans un de ces villages pilonnés par les démocrates, et de leur faire passer leurs vacances scolaires dans une des caves où leurs frères russophones passent leur vie sans eau ni chauffage, ni pouvoir aller normalement à l’école, comme ils ont la chance de le faire.
J’ai peur, Poutine n’étant pas éternel, et la pieuvre s’efforçant de lui faire la peau, que le bordel tant rêvé par les malfaisants qui détruisent l’Europe avec le Moyen Orient, ne finisse par s’installer, porté, comme d’habitude, par cette frange de parasites qu’on appelle l’intelligentsia et qui, sous tous les cieux depuis deux cents ans, méprise et méconnaît son peuple et couche avec ses bourreaux., 
Les raisons d’être mécontent en Russie, malheureusement, ne manquent pas, et les Russes, comme tout le monde, ne voient pas plus loin que le bout de leur cour d’immeuble. Pas tous, mais en partie, c’est humain. Les fonctionnaires pourris, les juges iniques, la destruction du patrimoine au nom du profit débridé, sans frein, sans scrupules. La destruction de la culture et des valeurs ancestrales, tournées en dérision, comme chez nous, l’adoption de modèles occidentaux qui ont fait chez nous les preuves de leur nocivité, à croire que certains fonctionnaires prennent leurs ordres à Bruxelles ou Washington, et non au Kremlin. Aussi, c’est malheureux à dire, pour une partie d’entre eux, seul l’écroulement de l’Europe, en marche irrévocable confirmée par la victoire de Macron en France, pourra constituer un désenchantement susceptible de leur ouvrir les yeux. Si Poutine gagne du temps, c’est peut-être aussi là-dessus qu’il compte. Car bien entendu, nous savons, nous, quand nous ne sommes pas hypnotisés par notre téléviseur ou nos journaux, que le paradis des petites culottes en dentelles en a pris un bon coup dans l’aile, que la pauvreté, la précarité, la corruption vont croissant, et les libertés civiques en diminuant, qu’actuellement, nous en avons moins que les Russes, que notre presse est beaucoup plus unanimement aux ordres, et que nous n’avons plus de gouvernement national, mais une équipe de compradores qui font ce que les banquiers et la CIA leur disent.
Si la Russie ne tient pas, alors ce sera l’épouvante générale…[…] (in Le dernier bateau)

samedi 10 juin 2017

RENCONTRE avec Saint JUSTIN de Tchélié en 1981

SOURCE
Komnen Becirovic avec le père Justin Popović
 dans le monastère Theil, en été 1976.
 (Photo: hiéromoine Amphilochie Radovitch)
J'étais étudiant à la Faculté des Lettres de Belgrade, à la fin des années cinquante, lorsque j'entendis parler pour la première fois du père Justin. On racontait alors que le professeur de théologie Justin Popovitch était certes notre meilleur connaisseur de Dostoïevski mais que, à force de s'en pénétrer, il était devenu fou et vivait confiné sur l'ordre du patriarche, dans quelque monastère de Serbie. Il fallait donc se méfier des aspects et des interprétations néfastes de l'œuvre de Dostoïevski, d'autant plus qu'il existait un moyen sur et infaillible pour l'approcher, la doctrine marxiste, dont nous étions bon gré malgré des adeptes. Quant au père Justin, victime, croyais-je, du génie de Dostoïevski, il allait se confondre désormais dans mon imagination avec les héros de celui-ci. Je finissais bientôt mes études et partais à l'étranger où, après bien du temps et des changements intervenus en moi, je devais appren­dre la vérité sur le père Justin et cesser de croire à la fable de sa folie. Néanmoins, mes connaissances en demeurèrent étroites jusqu'au moment où, à la fin de 1974, je rencontrai à Paris le hiéromoine Amphilochie Radovitch. Originaires tous deux de la région de la Moratcha, dans le Monté­négro central, nous étions camarades de classe tout au début des années cinquante dans l'enceinte du monastère Matcha dont les bâtiments annexes avaient été transformés par le pouvoir communiste en école, en bureaux de l'administration et en caserne de la milice locale. A l'époque l'athéisme faisait tellement rage que la célèbre laure, fondation pieuse du prince Stéphane Némanitch de 1252, au bord de la Moratcha, dédiée à l'Assomption de la Vierge, échappa de justesse à la destruction par le feu.

Nous nous étions séparés alors à peine adolescents, et voici que nous nous retrou­vions à présent hommes murs, nous reconnaissant l'un l'autre à l'in­flexion de la voix ou à la couleur des yeux. Spirituellement, nous nous reconnûmes plus aisément : je venais d'effectuer l'été précédent un pèlerinage à Ostrog, sanctuaire de nos pères ou j'avais autrefois reçu le baptême. Aussi avais-je mené, au début des années 70, une campagne internationale contre le projet sacrilège du régime visant la profanation et la destruction de l'un des hauts lieux de la nation serbe : l'humble église au sommet du mont Lovcen que fit élever, en 1845, le prince-métropolite du Monténégro et le plus grand poète serbe, Pierre Petrovitch Négoce pour qu'elle abritât ses cendres.

Le jour de notre rencontre à l'Institut Saint-Serge où il ensei­gnait, après plusieurs années de sacerdoce en Grèce où il avait brillamment soutenu une thèse sur Saint Grégoire de Palamas, le moine Amphilochie me parla du starets Justin, son père et maître spirituel. « Il incarne aujourd'hui la conscience de notre Eglise, il est la fontaine des pleurs du peuple serbe », me dit-il lors d'un entretien ultérieur. Il me montra parmi les ouvrages qu'il avait du père Justin, celui sur Dostoïevski qui, comme nous l'avons vu, était à l'origine de la gloire et de la prétendue perte de son auteur. Nous en fîmes cadeau, avec un livre sur la destruction du sanctuaire par le pouvoir titiste du mont Lovcen et un album de fresques des monastères serbes, à Soljenitsyne, lorsqu'il vint le printemps suivant à Paris. Le père Amphilochie lui donna aussi une petite croix en bois, travail des moines athonites, sur laquelle il écrivit : A Alexandre por­teur de croix. Naturellement, lorsque nous nous réunîmes plus tard, en été 1976, à Belgrade, le père Amphilochie m'emmena voir le starets Jus­tin dans son monastère de Tchélié, dédié au Saint Archange Michel, a une centaine de kilomètres au sud-ouest de la capitale, près de la ville de Valjevo. Nous quittâmes Belgrade par un chaud après-midi de juillet, mais le père Justin se trouvant toujours dans la disgrâce du pouvoir, nous fumes retardés par plusieurs contrôles de police sur la route, et même retenus par elle pendant deux heures dans la ville d'Obrénovats, si bien que nous n'arrivâmes à Valjevo qu'au crépuscule accompagné d'un violent orage. Ayant traversé la ville déserte sous un véritable déluge, nous nous mîmes d'abord à monter, puis à descendre lentement une pente boisée par un chemin cahoteux et détrempé, vers le monastère dont nous aperçûmes enfin les lumières.

Prévenu de notre visite, le père Justin nous attendait dans la cour du couvent, debout sous une lanterne, entouré de deux ou trois sœurs un peu à l'écart. La noirceur de sa soutane et de sa soufi ne faisait que souligner la blancheur de la barbe lui tombant sur la poitrine. Il nous accueillit en échangeant avec chacun de nous une triple accolade et en nous bénissant, avant de dire : « Nous nous faisions du souci pour vous, mère Glykhéria a téléphoné à Belgrade. » Quoi­que ses traits et son entière attitude fussent empreints d'une grande douceur et de gravité, sa robuste taille, sa voix chaude un peu bou­gonne, son nez accentué, son visage plein respirant une belle santé, me donnèrent aussi l'impression d'être en présence d'un lutteur. Impression, ô combien rassurante, a une époque où l'Orthodoxie se porte mal.

 Monastère Tchélié (Photo Kome Becirovic)
« Long et épineux est le chemin qui mène jusqu'à vous, Père Archimandrite », répondis-je à sa remarque, ce qui le fit sourire dans sa barbe. Puis il nous conduisit d'une démarche lente qui seule trahis­sait son âge, le long de la nouvelle église et du bâtiment adjacent, le konak, que la communauté de Tchélié, avec l'aide des habitants du pays, avait élevés une quinzaine d'années auparavant. Nous entrâmes dans une spacieuse salle à manger ornée d'icônes du Seigneur et de divers saints, peintes par la Sœur Antonina. Notre hôte, que je voyais mieux à présent, avait un regard profond où sommeillait un feu bleu. Une petite croix en argent perlait sur sa soufi , tirée sur le front.

Bientôt commença le dîner, précédé d'une brève prière, le père Justin bénissant la table. Le repas est sobre et simple : de la truite d'une rivière voisine, des légumes du jardin monastique, et d'excel­lents gâteaux préparés par les sœurs. « Ce que le Seigneur a donné », dit humblement père Justin, assis au haut bout d'une longue table et veillant en maître de maison attentif, tout comme les sœurs qui nous servent, silencieuses et discrètes. Aussi bien par l'accueil qui nous est fait que géographiquement et, comme nous le verrons, histo­riquement et spirituellement, on est ici en Serbie profonde. Le repas terminé, toujours sur une prière, nous sortîmes sur la terrasse où, dans la nuit déjà avancée, la conversation se poursuivit. Malgré ses quatre-vingt-deux ans passés, le starets a un esprit vif et limpide, des réactions justes et immédiates, des connaissances vastes et un naturel admirable, ce qui fait de lui un interlocuteur idéal. Et même si un sujet est nouveau pour lui, il le saisit vite et peu d'élé­ments lui suffisent pour qu'il s'en fasse une idée exacte. Ainsi lorsque je lui parle du génocide que commettent les Khmers rouges au Cam­bodge, il en est bouleversé et dit : « Ce ne sont pas des êtres humains mais des bêtes cruelles. » Ensuite, il me demande : « Et que se passe-t-il en Occident ?»

 « La grande question de l'homme en Occident demeure la tentation constante de transgresser les limites de la liberté, déjà consi­dérable, dont il dispose, répondis-je. C'est ainsi que l'on voit cette liberté prendre, dans tous les domaines, des allures inquiétantes. On va, par exemple, jusqu'à blâmer chez soi la démocratie et louer chez les autres la tyrannie, pourvu qu'elle soit de gauche, bien sûr. Si vous saviez seulement de quel prestige jouit un tyran comme Mao en Occident ! Ou quels efforts on y a déployés pour mettre le Vietnam ou le Cambodge aux fers ! Généralement, on favorise la naissance et l'instauration d'un fléau, puis on s'émeut ou s'indigne des ravages qu'il fait... Bref, le mot de Dostoïevski disant que rien pour l'homme n'est plus insupportable que sa liberté, semble se vérifier aujourd'hui en Occident, puisque l'homme occidental fait tout pour perdre la sienne. »

« Ce suicide dont vous parlez est la conséquence du meurtre de Dieu en Occident où l'on a ainsi remplacé la foi dans le Dieu­-homme par la foi en l'homme, répliqua vivement le père Justin. Et l'homme, bien qu'il soit à l'image de Dieu, est imparfait et, comme tel, ne peut être la mesure de tout. L'homme européen est en train d'échouer parce qu'il croit qu'il peut résoudre le problème de la vie sans résoudre celui de la mort, et cela est impossible. »

 Il se tut un instant puis, sur un ton plus calme, reprit :
« Le Christ est le seul qui ait été ressuscité et ait vaincu la mort. L'Église orthodoxe est la seule vraie Église ou Dieu et l'homme forment une unité indivisible. Là est la force du Seigneur Jésus-Christ et du christianisme. Le Seigneur a embrassé toutes choses sur terre, en particulier les êtres humains, et leur a donné les réponses néces­saires aux questions éternelles. Il a introduit l'ordre divin dans l'exis­tence des choses depuis le moindre insecte jusqu'au premier ange de Dieu, tout cela fait partie de l'Église de Dieu. »

 La foi se fait chant dans l'âme du père Justin. Un chant intaris­sable qui commença dès son plus jeune âge lorsque, enfant, né en 1894 a Vranié en Serbie orientale, il s'éprit de l'Évangile. Le jeune Blagoyé, tel était son nom de baptême, fit ses études de théologie à Bel­grade auprès de l'évêque Nikolai Vélimirovitch, déjà célèbre écrivain et prédicateur, qui vit très vite en son disciple l'un des espoirs de l'Orthodoxie. Mobilisé comme infirmier pendant la guerre de 1914, l'étudiant Blagoyé prit part au douloureux exode qu'entreprit l'armée serbe à la fin de 1915 à travers les montagnes albanaises pour éviter l'écrasement complet par les armées austro-hongroises, allemandes et bulgares occupant alors la Serbie ; celle-ci leur avait opposé une résistance surhumaine pendant seize mois. Durant cette retraite, sans doute la plus tragique de l'histoire des guerres, plus de cent mille Serbes périrent de froid, de faim, de maladie, d'épuisement, de chutes dans les précipices et des attaques des tribus indigènes. Les autres deux cent mille qui en réchappèrent et atteignirent les côtes de l'Adriatique y furent encore décimés par les épidémies. Parmi les survivants se trouvait, avec une partie de la jeune intelligentsia serbe, le théologien Blagoyé que les épreuves qu'il venait de vivre, loin de l'ébranler, n'avaient fait qu'affermir en sa foi en Dieu. Dans une église de Scutari, il se fit moine sous le nom de Justin, et partit en Russie afin que son âme s'abreuve d'Orthodoxie, comme le lui avait dit le métropolite de Serbie, Dimitri, en l'y envoyant. Il y arriva in extremis, car le cataclysme approchait. Ce que Dostoïevski avait tant redouté allait se produire et la millénaire Russie vivait ses ultimes heures. C'est elle que le moine Justin, après quelque six mois passés à l'Académie ecclésiastique de Petrograd, emporta dans son coeur. De grands maîtres spirituels comme Dostoïevski et saint Séraphim de Sarov, devinrent désormais les compagnons inséparables de sa vie, vouée à la mission évangélique.

De retour dans la patrie que l'armée serbe ressuscitée avec l'aide alliée avait libérée, le père Justin développa une féconde activité d'auteur théologique, de professeur et d'animateur de publications religieuses. Il fit, dans les années vingt, de fréquents séjours en Grèce ou il soutint sa thèse sur Saint Macaire l'Égyptien, en même temps qu'il traduisait saint Jean Chrysostome en serbe et publia un ouvrage sur La philosophie et la religion de Dostoïevski, ouvrage qu'il repren­dra plus tard, sous sa forme définitive : Dostoïevski, le monde slave et l'Europe. Il se lia à cette époque d'une amitié spirituelle profonde avec le métropolite Antoine de Kiev, ce grand hiérarque orthodoxe qui, devant le fléau qui meurtrissait la Russie, avait trouvé, avec beau­coup de ses frères, refuge sur la terre serbe.

Se situant dans la pure tradition évangélique et patristique, le père Justin entreprit, au début des années trente, l'élaboration d'une Dogmatique de l'Église orthodoxe en trois tomes dont deux furent alors achevés. Opposé aux réformes au sein de l'Église et au Concordat, qui était à l'époque à l'ordre du jour, le père Justin entra en conflit avec une partie de la hiérarchie ecclésiastique, conflit qui devait s'approfondir par la suite. Cependant, son influence au sein de l'Église allait grandissant. Il fut promu archimandrite, mais déclina l'offre de la dignité épiscopale, estimant ses forces trop faibles pour cette tâche.

Les nuages se faisaient sombres sur l'Europe. L'autre abomina­tion esclavagiste du siècle levait la tête. L'assassinat du roi Alexandre par les oustachis croates en 1934 à Marseille, préluda à de nouveaux malheurs pour le peuple serbe, comme pour la plupart des peuples de l'Europe. A l'occupation et au démembrement de la Yougoslavie par les puissances fascistes, s'ajouta une guerre fratricide qui, en particulier dans le cadre d'une Croatie fantoche et fanatique, créée par Hitler, prit les proportions d'un véritable génocide national. Des cen­taines de milliers de Serbes y furent persécutés, massacrés, brulés, jetés dans des gouffres et des rivières. Dans le seul camp de la mort de Yassénovats, on en extermina près d'un demi-million. On faisait aussi des conversions forcées au catholicisme romain, tandis que Rome gardait, et garde toujours, hélas, le silence. Quand un pape viendra-t-il enfin s'agenouiller à Yassénovats ?

Comme toujours dans le passé, l'Église orthodoxe serbe partagea pleinement le sort de son peuple : des centaines de ses prêtres, dont quatre évêques, furent tués, le patriarche Gavrilo et l'évêque Nikolaï, le Chrysostome serbe, déportés à Dachau, de nombreux temples pro­fanés, pillés, détruits ou incendiés parfois même avec les fidèles à l'intérieur. Pour réagir à ce déchaînement du mal et lui opposer un démenti de lumière, le père Justin retiré au monastère de Kalénitch, se mit alors à raconter, en une admirable langue serbe, la chronique de Dieu à travers Les vies des saints, œuvre qu'il poursuivra pendant de longues années au monastère de Tchélié où il se fixa peu après la guerre. Dans les nouvelles circonstances nées de la victoire du commu­nisme en Yougoslavie, le père Justin, malgré les limites qui lui furent imposées, demeura un défenseur intransigeant de la foi, si bien que l'Église orthodoxe serbe dans ses forces vives se tourna vers lui, tout en pratiquant officiellement une politique de compromis et d'accom­modement avec le pouvoir séculier. Aujourd'hui, l'influence du père Justin dépasse largement les frontières de notre pays. Telle est en bref la vie de cet homme de Dieu. Il en évoque devant nous certains épisodes, tandis que la nuit se fait plus pro­fonde et répand sa paix sur la Serbie. Chaque fois que les épreuves de sa vie se confondent avec celles de la nation, sa voix se noue d'émo­tion et son regard bleu s'embrume.

Parlant du sort actuel du monde orthodoxe, nous en arrivâmes tout naturellement à Soljenitsyne dont le combat avait été suivi par le père Justin dans la prière, jusqu'à mentionner son nom dans la liturgie.

« Dieu l'a chargé d'une grande mission : s'élever du simple esclave du goulag jusqu'à la conscience de la Russie, voici bien la preuve du plus grand miracle », dit le starets émerveillé. Et le père Amphilochie d’enchaîner : « Surtout lorsqu'on pense à tout ce qu'on a fait là-bas durant soixante ans pour arracher Dieu du cœur des hommes et pour leur imposer la fatalité marxiste. »

« Soljenitsyne a justement brisé cette fatalité. Il est la seule figure de taille que l'on puisse opposer à Lénine depuis l'apparition de celui-ci », fis-je observer. « Oui, oui, une figure du bien face à une figure du mal », reprit vivement le père archimandrite en se signant. « Et Dostoïevski ?» demandai-je.

« Dieu lui avait donné des pouvoirs prophétiques, de sorte qu'il a prévu et décrit notre siècle tel qu'il allait se dérouler. Ses anti-héros, comme il les appelle, Raskolnikov, Ivan Karamazov, Stavroguine, Smerdiakov, sont des promoteurs du monde et de l'homme d’aujourd’hui », conclut le starets soudainement pensif. « Parmi les grands apôtres slaves modernes, c'est sans doute vladika Nikolai qui, après Dostoïevski, est allé le plus loin dans la vision des maux qui devaient s'abattre sur le monde orthodoxe », dis-je.

 « Oui, le saint vladika, inspiré par Dieu, porteur de Dieu, tendu vers le Christ », répliqua le starets, le visage éclairé. « Quel prédicateur prodigieux il était ! Lorsqu'il parlait en tenant la croix, son regard intense était presque insoutenable. Un frisson sacré parcou­rait ceux qui l'écoutaient. Tout le monde venait l'entendre, même le roi Alexandre que j'ai vu plus d'une fois assister à ses sermons.

Le saint vladika m'a paternellement soutenu et encouragé dès le début. Un jour, à l'époque ou parurent ses merveilleuses Prières sur le lac, que je saluai dans « La vie chrétienne », il m'envoya un Acathiste au Christ vainqueur de la mort, calligraphié de sa propre main, avec cette dédicace : « Au hiéromoine Justin, le moine Nikolai. » Imaginez un peu ! Lui qui était évêque !» s'exclama le starets en riant, avant de poursuivre : « Et lorsqu'en 1941 les barbares nazis détruisirent sous les bombes notre sainte Jitcha, ils arrêtèrent bien sur vladika Nikolai qui en occupait le siège. Quand on l'amena devant le général allemand, celui-ci lui offrit de s'asseoir, mais vladika Nikolai refusa en disant :

« Je n'ai ni à parler ni à m'asseoir avec vous qui avez réduit mon peuple en esclavage. » Il endura la captivité, puis l'exil et la mort loin de sa Serbie bien-aimée. Mais il a gagné la Serbie céleste d'où il nous aide et nous secourt par ses prières. »

Des larmes coulaient des yeux du vieil homme qui se tut. Puis il se leva, se signa et s'écria avec ardeur : « Oui, il est notre grand maître à nous tous, Serbes, le plus grand depuis Saint Sava !»

 En disant cela, le starets avait l'air de s'adresser à un autre audi­toire que nous et de lui porter la contradiction. Peu après, calmé, il se retira, après nous avoir bénis et souhaité une nuit propice. Un son de cloche appelant à la liturgie me réveilla tôt le matin, après un sommeil paisible. Le pays était noyé dans un brouillard que seuls perçaient quelques chants d'oiseaux, succédant au son de la cloche. J'entrevis à l'autre bout du jardin, face au bâtiment ou nous nous trouvions, l'édifice de l'ancienne église a coupole, entourée de hauts pins. Elle date en partie du XIII e siècle, lorsque le roi Darguine, cinquième souverain de la dynastie des Néma ides, la fit cons­truire en la dédiant aux saints archanges. Lieu de culte, l'église de Tchélié, comme toutes les églises de l'époque némanide à travers la Serbie, devint aussi sous l'occupation turque un foyer d'esprit natio­nal et d'espoir de libération. L'un de ses martyrs, Ilya Birtchanine, décapité par les Turcs à Valjevo à la veille de l'insurrection de Kara­georges en 1804, repose ici à côté du temple, sous une haute stèle que l'on dirait une sentinelle. C'est également ici que vladika Niko­lai, né dans les environs, apprit, enfant, à lire et à écrire auprès de l'higoumène.

Aujourd'hui, comme tous les jours depuis près de trente ans qu'il est à Tchélié, le père archimandrite arrive à l'église pour l'office. Il tient en effet, malgré son grand âge, à le célébrer lui-même au moins un jour par semaine, ayant finalement accepté d'être remplacé le reste du temps par le père Amphilochie ou le père Athanassie, son autre infatigable fils spirituel. Mais naturellement, il assiste à cha­cune de ces célébrations et il y participe. Dès son entrée, de sa main droite haut levée, il trace d'un geste large le signe de la croix sur sa poitrine. Les sœurs sont déjà là, rassemblées en troupeau fidèle, dans le chour. C'est grâce au sacrifice et au dévouement de ces femmes et de leurs pareilles que nos monastères auront été sauvés de l'abandon dans un temps mécréant. Les flammes des cierges qu'elles ont allumés illuminent et égaient l'intérieur du temple orné d'une iconostase en bois sculpté. Les icônes qu'elle porte sont, elles aussi, l'ouvre de la Sour Antonina aux mains d'or, comme la qualifie le père archivant droite. Parmi les fresques, je reconnais sur un mur à ma gauche celle de saint Justin le Philosophe dont notre starets porte si dignement le nom ; dans la main droite, il tient une croix, dans la gauche un rouleau de parchemin sur lequel est écrit : « Vous pouvez nous tuer, mais vous ne pouvez pas nous nuire. »

Les pères Justin et Amphilochie sont dans le sanctuaire, derrière l'iconostase, revêtus de leur chasuble. Nous les apercevons derrière le rideau écarté de la Porte Royale. Grave et concentré, l'encensoir a la main, le père Amphilochie sort par la porte Nord pour encenser le temple et les fidèles, puis regagne le sanctuaire d'où le père Justin, d'une voix haute qui se répand à travers l'église, prononce :

"Béni soit le Royaume du Père et du Fils et du Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen", répondent les sœurs, avant que le père Amphilochie ne commence la grande ecténie : "En paix prions le Seigneur. Kyrie eleison, chantent les sœurs  le répétant après chaque demande de l'ecténie que le père Amphilochie, d'une voix profon­dément fervente, continue :
Pour la paix céleste et le salut de nos âmes, prions le Seigneur.
Pour la paix du monde entier, la permanence des saintes églises de Dieu et l'union de tous, prions le Seigneur.
Pour ce saint temple et pour ceux qui y entrent avec foi, piété et crainte de Dieu, prions le Seigneur. Pour notre saint évêque Jean, pour l'ordre vénérable des prêtres, le diaconat en Christ, pour tout le clergé et le peuple fidèle, prions le Seigneur.
Pour tous les pieux chrétiens orthodoxes, prions le Seigneur,
Pour ce saint monastère, pour toute ville et tout village, pour tout pays et ceux qui y vivent avec foi, prions le Seigneur.
Pour la pureté de l'air, l'abondance des fruits de la terre et des temps de paix, prions le Seigneur.
Pour ceux qui sont en mer et dans les airs, pour les voyageurs, les malades, les prisonniers et les proscrits, et pour leur salut, prions le Seigneur.
Pour qu'il nous préserve de toute misère, haine, péril et nécessité, prions le Seigneur.
Protège-nous, sauve-nous, aie pitié de nous et garde-nous, Dieu, par ta grâce.
Faisant mémoire de notre toute sainte, toute pure, toute bénie et glorieuse Souveraine la Génitrice de Dieu et toujours vierge Marie, et de tous les saints, confions-nous nous-mêmes les uns les autres et toute notre vie au Christ notre Dieu.
À Toi Seigneur, acquiescent les sœurs, avant que le père Justin ne commence d'une voix basse mais audible, la prière de la première antienne :
Seigneur notre Dieu dont la puissance est incommensurable et la gloire ineffable, dont la miséricorde est infinie et l'amour pour les hommes indicibles, Toi-même, Maître, dans ta tendresse, jette le regard sur nous et sur cette sainte demeure, et répand sur nous et sur ceux qui prient avec nous l'abondance de ta grâce et de ta bonté.
Puis d'une voix haute : Car à Toi sont toute gloire, honneur et adoration, Père, Fils et Saint-Esprit, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen, répondent les sœurs.

Le temple bruit. D'autres invocations, louanges, prières, jaillies de l'âme de Saint Jean Chrysostome voici seize siècles, suivent, telle celle de l'Entrée, du Trisagion, des fidèles, de l'Evangile, ecténie des morts, prière de l'Offrande et bien d'autres alternant avec les can­tiques. Hymne universel, la liturgie, tel un fleuve pur emportant la lumière, suit son cours majestueux. A la Grande Entrée, les deux prêtres, précédés d'une moniale portant un cierge sur un haut candélabre doré, sortit du sanctuaire par la porte Nord, s'arrêtèrent devant l'iconostase, face aux fidèles, le père Justin tenant le calice et le diskos, le père Amphilochie a sa droite, une petite croix liturgique luisant dans sa main. Les voici, comme descendus d'une fresque, l'un, la tête blanchie et le front dégarni par l'âge, le reste de sa crinière tombant sur ses épaules, l'œil bleu illuminé par la piété ; l'autre, jeune, élancé, le regard brun allu­mé du même feu, le visage émacié orné d'une barbe noire qui se mêle à sa chevelure, un peu courbé comme sous un grand vent ; le maître et le disciple, pénétrés du mystère sacré dont ils sont les serviteurs. S'avançant de quelques pas encore sous la coupole, le père Justin reprit d'une voix claire et intense, suppliante et joyeuse, la grande prière du début, mais sous une forme commémorative cette fois-ci, associant les morts aux vivants, dans la demande d'une grâce univer­selle. Le service se termina sur un beau sermon du père Amphilochie. Si cela ne tenait qu'à ses seules capacités, de même qu'à celles de son frère Athanase, ils seraient tous les deux déjà évêques. Naturelle­ment, le père archimandrite déplore cette disgrâce dont sont l'objet ses disciples, mais ne désespère point. A présent que nous sommes tous sortis de l'église, il nous donne sa bénédiction sous les pins. Le brouillard s'étant dissipé et le jour levé radieux, ce n'est qu'à ce moment-là que je découvris le lieu où nous nous trouvions : une vaste clairière sur un flanc boisé qui s'adoucit en terrain plat à l'endroit où est sis le monastère, avant de retomber vers le fond de la vallée ou coule la rivière Gradats. Au-delà d'une palissade de bois noirci s’étend le verger et les champs monastiques, délimités par le foret de chênes et de hêtres qui envahit les versants des monts alentour. Plus près de nous, au nord, a la lisière du bois, quelques humbles tombes ou reposent les membres de la communauté ayant achevé leur parcours terrestre. D'autres tombes, plus anciennes, sont autour de la vieille église dont l'entrée, protégée par une grille basse, demeure ouverte toute la journée afin que la fraîcheur et les parfums, les papil­lons, les abeilles et les oiseaux du ciel puissent pénétrer dans la mai­son de Dieu. L'église et son clocher, au pied duquel nous nous trou­vons, portent d'étranges coupoles pointues. « C’est que ce temple fut autrefois restauré grâce aux dons des négociants arméniens de Valjevo », dit le père Amphilochie dont le regard avait retrouvé son habi­tuel calme pensif.



L'église récente, dédiée par le père Hiéromoine Amphilochie Radovitch Près du monument à Ilya Birtchanine, en été 1976. (Photo Komnen Becirovic) Justin a saint jean Chrysostome, de même que le kanak, sont en style serbe médiéval.

Après le petit déjeuner, le père Amphilochie, s'accompagnant à la gouala, chanta quelques vers de Niégoch, ce qui une fois de plus émut le vieillard. Puis nous ressortîmes dans le jardin soigneusement entre­tenu par les moniales, une vingtaine, la plupart de Serbie, mais aussi de Bosnie et même de Dalmatie. Je les vois passer comme des ombres entre les bâtiments monastiques et plus loin dans les champs, accomplissant leurs travaux agricoles, principale source de leurs revenus. L'aide que leur apportent les gens du pays est le plus souvent béné­vole. « Qu'à tous ceux qui nous aident, Dieu le rende au centuple », dit le père Justin qui en dépit des deux heures passées debout durant le service, paraît au mieux de sa forme. Assis sous un jeune sapin, il prolonge ses réflexions de la veille en observant :« Le mystère du monde est le mystère du Logos. Et le monde créé porte l'empreinte du Logos. Comment le Seigneur a-t-Il créé le monde ? Par ses énergies divines qu'il a mises en toute chose. » Puis, montrant le tapis de fleurs s'étendant devant nous :« Voyez combien la Providence divine est dans la moindre de ces fleurs : pour qu'elle pousse et sorte de terre, bleuisse où se teinte d'or. Ou bien, je vous prie, comment un minuscule insecte peut-il voir et entendre, que se passe-t-il donc, d'où vient cela ?!»
Comme celui d'un enfant, l'enchantement du saint homme de­vant le souffle et le frémissement divins dans les êtres, est infini.

Nous passâmes ainsi avec lui le reste de la matinée qu'il consacre d'habitude, comme la plupart de son temps en dehors des offices, à l'élaboration de ses ouvrages. Ayant mené à bien le travail monu­mental que représentent ses Vies des saints en douze volumes, le voici en train de compléter sa célèbre Dogmatique par un troisième tome, en même temps qu'il s'adonne à une Exégèse de l'Évangile selon saint Mathieu. Tous ces travaux depuis la guerre voient le jour grâce aux efforts de son monastère et de ses amis en Serbie et à l'étranger. Pour les faire paraître, il n'a généralement besoin que de la bénédic­tion de son évêque Jean de Chabat et de Valjevo, qui la lui accorde bien volontiers.

Comme nous devions partir le jour même, le starets abrégea son habituel repos après le déjeuner, pour nous gratifier de sa compagnie une bonne heure encore. Nous nous retrouvâmes sur la terrasse du konak, avec vue sur l'église des archanges a la coupole arménienne. Et là encore, le starets agréable à Dieu, tel une source, continua son murmure. Je finis par me rendre compte qu'il vivait dans un état quasi-liturgique permanent ou le temps ne semblait pas le concerner. Comme pour le psalmiste, Dieu est sa ville fortifiée, ou il est à l'abri aussi bien du temps que du mal de l'histoire. Ainsi va-t-il atteint par la foi cette paix et cette sérénité de l'âme qui font si cruellement dé­faut aux hommes de notre époque. Et cet éblouissement constant dans lequel il vit, vous gagne aussi.

Nous eûmes du mal à nous séparer de lui qui, de son côté, nous retint jusqu'au moment où le soleil commença à décliner vers le mont au-dessus du monastère. En partant, mon regard dériva un instant vers les forêts et les cieux environnants, ce qui n'échappa pas au père Justin qui, comme en traduisant l'aspiration qui soudain me gagnait, me dit : « Emportez un peu de cette beauté dans vos yeux ». Ensuite, il nous bénit en nous souhaitant bonne route et resta en se signant, la barbe baignée de soleil, a ce même endroit ou nous l'avions trouvé la veille. Et il ne cessa de se signer derrière nous jusqu'au moment où, ayant pénétré dans la forêt, nous le perdîmes de vue. Voyant mon émerveillement devant de tels adieux, le père Amphilochie dit en souriant : « Je le connais bien, il restera debout là-bas à se signer jusqu'à ce que nous ayons atteint le sommet. » Moi, je n'avais qu'un seul regret : celui d'avoir vécu si longtemps dans la méconnaissance de ce juste.

Lorsque nous gravîmes la crête du Pressad qui sépare Valiévo de Tchélié et d'où le chemin monte vers Lilith, village natal du vladika Nikolai, nous aperçûmes haut dans ciel des nuages blancs et immobiles avec de grands lacs d'azur au-dessus de la Serbie. Monastère Tchélié, juillet 1976.

 Ce texte, rédigé par l'auteur peu de temps après sa rencontre avec le père Justin, a été publié dans le numéro 88 de la revue Le Messager orthodoxe, consacré au père Justin Popović, à Paris 1981. Seules quelques phrases ont été légèrement complétées ou ajoutées à la suite de la relecture du texte, plus d'un quart du siècle après, pour sa mise sur Internet.

Archimandrite Amfilohije Radovic et Komnen Becirovic à Paris en 1975

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