Fluctuat nec mergitur : L'Église tangue mais ne sombre pas !
Après le miracle de la multiplication des pains dans le
désert où furent rassasiés cinq mille hommes, Jésus ordonna à ses disciples de
monter dans une barque pour passer de l’autre côté du lac et se rendre dans la
ville de Capernaüm, Jésus en effet,
devant l’enthousiasme des gens assemblés voulait éviter d’éventuels
débordements du peuple qui, ne percevant pas sa double nature humaine et
divine, voulait le proclamer Roi d’Israël, réduisant par là son enseignement, sa mission et sa personne à sa seule nature humaine.
Il s’éloigna donc de
la foule.
Cependant, alors que les
disciples naviguaient pendant que Jésus priait, un vent soudain se mit à
souffler très fort, la mer devint furieuse et la barque était battue par les
flots. Les heures passaient, la nuit recouvrait tout, et les disciples
désespérés tentaient de se sauver avec leur barque.
C’est en peu de mots
que l’Évangile nous décrit la position difficile des disciples au moment où la
mer était démontée.
La petite barque des
disciples est semblable à celle de
chacun des hommes qui navigue « sur
la mer agitée de sa vie ».
Notre vie est
semblable à une navigation sur une mer tantôt calme, tantôt déchaînée et
sauvage. Dans la vie en effet il
n’y a pas seulement des jours de joie et de bonheur, il y a aussi des jours
d’affliction et de malheur. Ces jours de
bonheur – il faut bien le dire – sont peu nombreux à l’opposé, les jours de
tristesse et de malheur ont tendance à être plus nombreux si bien que la terre
est souvent vue comme une « vallée de larmes » tant elle apporte
d’ennuis, de tracas, d’épreuves, de soupirs, de pleurs et de larmes.
Les Saints Pères comparent le bateau des disciples à l’Église du Christ qui vogue entre les
vagues de l’incrédulité, dans les tempêtes de la haine des hommes, et dans les
orages des hérésies. St Nicodème l’hagiorite dans son livre « Le
Gouvernail (du navire métaphorique
de l’Église
Une, Sainte, Catholique et Apostolique des chrétiens
orthodoxes, ou Tous les saints et divins canons» (Πηδαλιον*) écrit :
«Le bateau des disciples représente l’Église universelle du Christ,
La quille en est la foi en la Sainte Trinité,
Les poutrelles et les
planches en sont les dogmes, de notre foi et de nos Traditions,
Le mât représente la croix,
Les voiles et le gréement, l’Espérance et l’Amour,
Le commandant à la barre est le Seigneur,
Les compagnons et les marins sont les Apôtres, et leurs successeurs
Les passagers sont tous les Chrétiens orthodoxes,
Les passagers sont tous les Chrétiens orthodoxes,
La mer est la présente vie
Et le vent peut être tel une brise légère qui gonfle les
voiles du navire, il représente alors le souffle porteur des grâces du Saint
Esprit qui pousse le bateau dans la direction du port du Royaume Céleste mais
il peut être aussi un vent contraire, celui des épreuves, ou celui des tentations
qui déroute le bateau de sa destination. »
L’Église, au cours des siècles jusqu’à nos jours, s’est
trouvée maintes fois dans d’épouvantables tempêtes. Elle a subi de terribles
persécutions, des hérésies inspirées de Satan, des schismes fondés sur la
satisfaction de l’ego, des conflits internes, des scandales et des tentations qui
l’ont menacée de dévastation. Elle a souvent été peinte avec le sang de ses
martyrs, elle est descendue dans les catacombes, a transmis sa foi dans des
écoles clandestines, s’est réfugiée dans les grottes du désert, dans
l’obscurité des forêts, muselée par les puissances du moment, enchaînée,
exilée.
Elle a affronté les « vagues », elle a été
combattue mais n’a pas été vaincue, malmenée par le déchaînement des flots mais
elle n’a pas sombré, bouleversée dans la tourmente mais elle s’est rétablie.
La société d’aujourd’hui ressemble également à l’embarcation
des disciples ; dans un environnement de civilisation et de culture
spirituelle artificielles, elle « tangue » soumise à des courants
sournois qui menacent son existence.
Les vagues furieuses du matérialisme, du
« sexualisme », de l’athéisme et du modernisme déferlent
impitoyablement sur ses flancs. La violence, les guerres, le terrorisme, l’abandon,
le mépris et le piétinement des idéaux, l’abolition de toute morale, le manque
d’amour envers son prochain, toutes ces choses ne sont-elles pas les furieuses
vagues qui menacent l’existence de toute société humaine?
Les leaders politiques nous assurent toujours du progrès
social acquis sans retour possible, de la prospérité à venir à coup sûr et des
magnifiques bienfaits systématiques de la science dans tous les domaines, faisant
tour à tour, selon les besoins du marketing électoral assurant leur carrière, l’apologie
des idéologies libérales, socialistes et scientistes, de leur combinaison et de
leurs variantes. Mais derrière cette croyance tranquille en une lumineuse avancée
humaine inéluctable vers un âge d’or à venir d’ici peu, grâce une
« gouvernance éclairée » qu’il est de bon ton de soutenir, les yeux
fermés d’une seule voix contre les forces réactionnaires et rétrogrades de
toute tradition... règne le chaos intellectuel et moral, une monstrueuse
confusion des esprits rarement atteinte
et une crise culturelle et spirituelle
d’une capacité de destruction des hommes et des sociétés qui est l’écho
de toutes les crises monétaire, bancaire, financière de pays dont on annonçait il n’y a pas si
longtemps les exploits d’une croissance assurée exemplaire…
Cependant l’Evangéliste Mathieu nous dit que « Dès
l’arrivée du Seigneur le vent cessa, la mer redevint calme et l’embarcation
poursuivit son voyage sans encombre. »
De cette phrase nous pouvons tirer l’enseignement
suivant :
Lorsque dans les
heures sombres de notre vie, le Christ est absent, nous risquons de nous noyer
dans l'abattement et la tristesse mais dans ces moments de douleur et
d’affliction, le Christ est avec nous, et la maladie, le deuil, le malheur, ne
nous plongent pas dans le désespoir, mais avec patience et espérance nous nous
battons, et comme les disciples, nous crions : « Seigneur,
sauve-nous ! »
Lorsque dans ces moments-là nous sentons à nos côtés la main
puissante de Dieu, cela nous réconforte. La voix du Seigneur disant
« N’ayez pas peur ! » nous remplit de courage et d’optimisme.
Les sociétés ayant le Christ comme guide ne sont pas dévastées
par les vagues du mal. À l’opposé les sociétés qui vivent sans Dieu vont
fatalement plonger dans la boue de leurs idéaux mondains et impurs et
s’effondrer.
C’est pourquoi l’Église, bien qu’elle voyage
continuellement dans les tempêtes, tangue mais ne s’enfonce pas dans l’abîme,
car le commandant qui est sa barre est le Christ, par la présence duquel sont
vaincus non seulement les éléments de la nature mais également ceux du mal.
*Πηδάλιον τῆς νοητῆς
νηὸς τῆς μίας ἁγίας καθολικῆς καὶ ἀποστολικῆς τῶν ὀρθοδόξων Ἐκκλησίας ἤτοι
ἅπαντες οἱ ἱεροὶ καὶ θεῖοι Κανόνες τῶν ἁγίων καὶ πανευφήμων Ἀποστόλων, τῶν
ἁγίων Οἰκουμενικῶν τε καὶ τοπικῶν συνόδων καὶ τῶν κατὰ μέρος θείων Πατέρων
(Version et adaptation en français par Maxime le minime
d'une homélie de Μητ. Φθιώτιδας κ.Νικόλαος)
d'une homélie de Μητ. Φθιώτιδας κ.Νικόλαος)
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