ANCIEN DIONYSIOS : "L'ennemi intérieur, l'ego" (6) "Le Repentir. Reconnaître nos erreurs et nos péchés, c'est la chose la plus importante que nous puissions faire"
WIE: L'ego est souvent caractérisé dans la littérature spirituelle comme un adversaire rusé et opportuniste, capable de retourner toute situation à son avantage dans sa tentative de faire obstacle à notre progrès spirituel. Que est selon vous la qualité la plus importante de la personne qui peut nous aider à gagner la lutte contre l'habile ego en perpétuel changement ?
P.Dionysios: Le Repentir. Reconnaître nos erreurs et nos péchés, c'est la chose la plus importante que nous puissions faire. Et non pas reconnaître nos péchés afin de réussir quelque chose d'autre, mais simplement pour voir la vérité sur nous-mêmes.
Saint Isaac, le grand mystique de l'Église, dit que celui qui accepte, qui comprend, qui reconnaît son péché devant le Seigneur, en réalité, il est le plus élevé. Il est plus grand que celui qui a gagné le monde entier, qui nourrit tout le peuple, qui fait des miracles, qui ressuscite les morts. Cet homme est le premier, il est plus grand parce qu'il ne peut jamais tomber. Il a une stabilité, un niveau, un lieu où il peut parler au Seigneur. Il a un endroit où il peut inviter le Seigneur avec ses larmes, avec son repentir, avec la compréhension de ce qu'il a fait de mal. Et tout de suite, il devient clair. La lumière émane de lui. Il devient un médecin spirituel, un enseignant ou un père, parce qu'il n'a pas peur de reconnaître ses péchés. Ce n'est pas un problème pour lui de dire: "Excusez-moi, c'était de ma faute." C'est la clé pour échapper à tous les précipices du diable.
WIE: Serait-il exact de qualifier cette qualité que vous décrivez - cette volonté de se regarder avec honnêteté - d'humilité?
P. Dionysios : Pas l'humilité. L'humilité est le résultat. Il serait préférable de parler de "sagesse". Nous nous acharnons à être humble. Mais, reconnaître mes fautes – qu'est-ce que cela a à voir avec l'humilité ? Je dois être humble pour reconnaître mes fautes ? Non. Je dois les voir. C'est une urgence. C'est mon mode d'existence pour le second qui vient. Comment puis-je exister avec mes défauts pendant une seconde existence ? Devant qui ? En face de moi – comment puis-je demeurer avec mes fautes, mes péchés? Je dois dire, "je l'ai fait !"
Dostoïevski exprime bien cela dans Crime et Châtiment. Le personnage principal, Raskolnikov, tue quelqu'un, et presque aussitôt il comprend ce qu'il a fait. Il ne le reconnaît pas par lui-même, mais avec l'aide des mots très sévères d'une prostituée, Sonia, qui lui dit: "Regarde ce que tu as fait." C'est elle qui l'amène au milieu de la place, devant tout le peuple, pour qu'il dise ce qu'il a fait. Et il le fait. Il avoue. Il dit que sinon il ne pourrait pas exister, qu'il aurait commis davantage et de plus en plus de crimes. Et il accepte la sentence du tribunal c'est à dire aller pour au moins vingt ans dans la plus dure des prisons. Et il y va, et c'est là qu'il sent le médicament de son cœur. Et il prend ce médicament. Nous avons des problèmes dans la vie parce que nous ne voulons pas accepter ni reconnaître nos péchés. Et c'est la clé. Quoi d'autre avons-nous offrir aux autres ? De l'or, de l'argent, du désir, de la nourriture ? Une longue vie ? Non, seulement reconnaître nos péchés et nous avons tout de suite un nouveau monde."
(à suivre)
(Version française de Maxime le minime
de L'Entretien réalisé par Craig Hamilton in "What is Enlightenment Magazine")