“Priez… un donateur peut apparaître de nulle part" par Kyriakos C.Markides.


           Mgr Athanasios Métropolite de Limassol.

"Le père Maximos a passé la majeure partie de la matinée dans son bureau à bavarder avec deux camarades de vingt-cinq ans. Ils étaient arrivés au monastère deux semaines plus tôt et vivaient dans une cellule réservée aux visiteurs. J'ai supposé à l'époque qu'il s'agissait de novices potentiels explorant l'option d'une vie monastique. Mais Stephanos, étant une sorte de figure de père laïc pour les moines plus jeunes et ayant donc une connaissance intime de ce qui se passait dans le monastère, m'a informé de manière confidentielle que les nouveaux arrivants avaient un très grave problème de drogue. Ils étaient arrivés dans le but de se libérer de leur dépendance mortelle et n'étaient pas principalement concernés par le salut de leurs âmes. Le père Maximos était leur thérapeute et le monastère servait de centre de désintoxication.

J'étais assis sur le banc en dehors de ma cellule en train de lire lorsque le père Maximos est sorti de son bureau et m'a fait signe de les rejoindre. C'est alors que les deux jeunes hommes se sont portés volontaires pour révéler en détail comment ils étaient devenus toxicomanes. L'un d'entre eux venait d'achever une peine de deux ans d'emprisonnement pour possession et utilisation de cocaïne. L’autre, un ancien grand athlète olympique de Grèce, avait un problème encore plus grave. «Les mauvaises fréquentations!»  a-t-il dit, l'ont conduit à toutes sortes de méfaits et finalement à une dépendance à l'héroïne. Il a été envoyé à Chypre par ses parents désespérés, après avoir eu entendu parler, par un ami chypriote, du Père Maximos à la réputation d'Ancien charismatique.

Sans l'hospitalité et les soins reçus au monastère de la Panagia et les conseils spirituels du Père Maximos, ils seraient retournés dans la rue, m'ont-ils dit. Quand je leur ai demandé s'ils envisageaient de devenir moines, ils ont répondu avec force qu'ils n'avaient pas de telles intentions. Leur séjour temporaire au monastère avait un but purement thérapeutique. Pendant leur séjour, cependant, ils devaient suivre les activités de routine des moines, notamment se lever tous les matins à trois heures et demie pour assister à de longs offices, pratiquer la prière de Jésus, jeûner et travailler dans les jardins. Ce régime a apparemment bien fonctionné pour eux et, tout le temps qu’ils étaient au monastère, les jeunes hommes n'ont présenté aucun symptôme de sevrage. Le père Maximos m'a dit plus tard qu'il craignait qu'un bref séjour au monastère ne soit pas suffisant pour leur rééducation à long terme. Une autre de ses préoccupations concernait la gravité du problème de toxicomanie sur l'île et le peu de mesures prises par le gouvernement à cet égard. Il sentait qu'il devait faire quelque chose lui-même.

Le monastère de la "Panagia Makhaira".

 Cet après-midi-là le père Maximos m'a demandé de le conduire à une demi-heure de la montagne jusqu’au site de la construction du « Saint Refuge », un centre de désintoxication qui avait commencé un an plus tôt à l’initiative du père Maximos. Au cours de la promenade, il m’a décrit les circonstances qui l’ont conduit à la création du centre.
Il y a environ un an et demi, Père Maximos avait commencé à rendre visite à un jeune homme en prison afin de l'aider à résoudre son problème de drogue. Ce garçon était sur le point d'être libéré, mais il n'existait aucune agence capable à ce moment-là de prendre en charge sa rééducation. En entendant cela, le père Maximos a fait ce qu'il savait le mieux , il a prié pour lui. Par la suite, un incident inhabituel s'est produit au monastère qu’il a considéré comme une forme d'intervention divine et une réponse à ses prières.

« C'était très tôt dans la matinée, le 6 janvier 1996, lorsqu'un chien sauvage s'est précipité dans le monastère au moment où la porte a été ouverte. Le chien était incontrôlable. Il a mordu le père Arsenios à la jambe et Isaac qui a essayé d'intervenir, a été mordu au bras droit. C'était terrible. Finalement, nous avons réussi à le chasser par la porte et à la fermer fermement. Le chien ne voulait pas partir et continuait de hurler et d'aboyer à l'extérieur. C'était la Théophanie et nous étions inquiets pour la sécurité des fidèles qui venaient à l’office. Nous avons appelé la police, qui nous a répondu que leur travail n’était pas de s’occuper des chiens errants, mais que nous devrions plutôt contacter tel ou tel organisme. C’est ce que nous avons fait, et que croyez-vous qu’ils ont eu comme réaction ? Ils nous ont avertis de ne pas faire de mal au chien et de bien s’assurer que nous le nourrissions correctement. Avant d’arriver au monastère, ils ont d’ailleurs appelé à plusieurs reprises pour savoir, non pas si quelqu'un avait été blessé, mais au sujet du bien-être du chien. » En racontant cela, Père Maximos riait à sa manière habituelle.

Il poursuivit : « Après cette expérience, j’ai pensé que si on se préoccupait autant du bien-être des chiens sauvages, pourquoi n’en ferait-on pas autant pour les toxicomanes? S'il existe des foyers pour chiens errants, pourquoi pas un foyer pour les toxicomanes ?» « Cet épisode avec le chien, continua le père Maximos, me donna l’idée de commencer à rechercher de l’argent afin de créer une clinique de désintoxication. La première chose que j'ai faite a été de donner une conférence à Nicosie. À ma grande surprise, le soir même, de nombreuses personnes se sont portées volontaires pour faire des dons et quatre mille livres sterling (huit mille dollars à l'époque) ont été collectées. Je ne savais pas quoi faire de cet argent. Le lendemain, j'ai reçu un appel téléphonique d'une femme de soixante-cinq ans qui était une réfugiée. Elle avait hérité de cinq mille livres et souhaitait en faire don pour le projet. Nous avons donc placé tout l'argent que nous avions collecté, alors neuf mille livres sterling, sur un compte spécial. »

« Le samedi suivant, poursuivit le père Maximos, tandis que je conduisais prudemment la voiture sur le terrain accidenté, j'ai invité les pèlerins à se confesser et cela dura toute la journée. Il était tard dans l'après-midi quand j’ai fini et c'est épuisé que j'ai descendu les marches. Une femme qui, je pensais, voulait me voir pour la confession m'attendait. Je lui ai dit: « Ma chère dame, je suis très fatigué. S'il vous plaît, venez un autre jour. »  Je pouvais à peine me tenir debout. « Mais, mon père, a-t-elle persisté, je veux vous parler d'une question très importante ». « Je suis vraiment désolé mais je ne peux pas vous aider » ai-je répondu.» J'ai vu qu'il y avait deux autres femmes assises sur les marches et j’ai présumé qu’elles venaient aussi pour se confesser. « Père, a-t-elle annoncé, nous aimerions faire un don pour le centre que vous créez.» « Merci beaucoup ai-je répondu, mais pourriez-vous, s'il vous plaît, donner l'argent au père Arsenios. Il vous fera un reçu. » « Mais, Père, insista-t-elle, je veux parler de beaucoup d'argent. » Je pensais qu'elle parlait de quelque chose comme une centaine de livres. «Père, vous ne comprenez pas, dit-elle, je parle d'un demi-million de livres!» [Un million de dollars à cette époque]. J’en suis resté figé. Elle répéta: «M'avez-vous entendu? Des livres, pas des drachmes.» «Êtes-vous sérieuse ? ai-je demandé, ou est-ce une plaisanterie ? »« Vous voyez ces deux femmes assises sur les marches ? répondit-elle, vous ne savez pas qui elles sont? » Comment aurais-je pu savoir qu’elles étaient les épouses d'armateurs grecs ? Elles avaient entendu parler du projet et étaient venues à Chypre pour apporter leur aide. Ce jour-là, elles ont promis un quart de million de livres chacune.

clinique de désintoxication "Agia Skepy".
«Le lendemain, poursuivit Père Maximos, alors que je conduisais en secouant la tête avec incrédulité, un très riche Chypriote et sa femme sont venus visiter le monastère. Quand ils ont entendu parler du don, ils ont eux-mêmes promis un quart de million de livres supplémentaires, sans qu'on le leur demande. »

 «Incroyable!»

«Kyriaco, déclara avec sérieux Père Maximos en se tournant vers moi, les amis fortunés de ce couple ont promis cent mille livres supplémentaires. En l'espace d'une semaine à peine, un million de livres ont été récoltées sans aucun effort de notre part. »

Père Maximos a ajouté que le monastère avait fait don de sa meilleure parcelle de terrain, située à plusieurs kilomètres de la montagne, pour le projet et que la construction en était maintenant au stade d'achèvement. « Le seul problème qui demeure, a-t-il ajouté, c’est de trouver des donateurs pour les frais de fonctionnement. »

« C'est un problème grave. Qu'allez-vous faire à ce sujet ?» ai-je demandé en approchant du chantier.

Avec un large sourire, il m’a répondu : « Prier un peu plus. » Père Maximos avait la conviction que lorsque les gens prient sincèrement, du fond du cœur, pour le bien des autres, le Tout-Puissant répond toujours sous une forme ou une autre.

Le centre de désintoxication se trouvait au milieu d’une ancienne oliveraie, un lieu serein qui convenait à l’objectif pour lequel il avait été créé. Le bâtiment carré de deux étages était presque terminé et ressemblait à un monastère avec une grande cour au milieu et des arches traditionnelles tout autour. Le père Maximos était particulièrement méticuleux en matière d’esthétique et s’assurait que le bâtiment se fondrait dans la campagne environnante. « Vous savez, dit-il en me faisant visiter les lieux, cet endroit aurait été un merveilleux séminaire. »

« Eh bien, priez un peu plus et vous ne savez pas, un donneur peut apparaître venu de nulle part » plaisantai-je.




Activités quotidiennes dans le centre
Les produits du centre.
 Note : Père Maximos dans le livre "La montagne du silence" représente Mgr Athanasios le métropolite de Limassol, et le centre de réhabilitation est la fondation "Agia Skepy", qui appartient au monastère "Machaira". Il a été fondé en 1999 par son éminence qui était alors l’higoumène du monastère.

Version française par Maxime le minime de la source 

Référence : "The Mountain of Silence", Kyriakos C.Markides, (2002)

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