QU'EST-CE QUE L'ORTHODOXIE ? par Père André BORRÉLY
"Pour être pleinement orthodoxe,
la théologie, inséparable de la sagesse et de la prière,
exclut deux comportements hélas fort répandus : le dualisme et le juridisme".
On nous montre encore, une fois de plus, une rencontre "fraternelle" entre le Pape et un hiérarque orthodoxe, en nous vantant les progrès de la réconciliation qui s'accomplissent chaque jour davantage entre l' 'Orient' et l' 'Occident' chrétien comme s'il s'agissait d'une vieille querelle aux effets jadis mortels quelquefois et souvent dérisoire dans son contenu eu égard aux idéaux d'universalité non seulement souhaitable mais désormais obligatoire et à la quantité de choses qui nous sont communes. On nous trompe en insistant sur le plan psycho-historique à propos de vieilles blessures devant être enfin cicatrisées et sur le plan juridictionnel à propos d'arrangements raisonnables et équitables de pouvoir de juridiction d'églises enfin "sœurs". Il ne s'agit pas de cela, c'est beaucoup plus profond que cela. Bien sûr, culturellement, géo-politiquement, il y a une nécessaire communication à cultiver et à approfondir, une communauté à conforter, une solidarité à entretenir, un front commun à constituer et à renforcer vu les contextes d'affaiblissement du "Christianisme" avec la sécularisation, la dissolution totale de la morale, la confusion des valeurs, la multiplication des sectes, l'activisme de l'Islam, la multiplication des persécutions morales et physiques à travers le monde entier etc. Bien sûr, il vaudrait mieux que l'on entende "Voyez comme ils s'aiment..."
Mais cette union, cette réunion, cette unité, qu'on l'appelle comme on veut, (au fait ne s'agirait-il pas plutôt de communion entre frères ?) entre chrétiens ne sera que de surface si elle ne se fonde pas sur le roc de la foi authentique partagée par tous, et si les erreurs profondes, qui ne mènent depuis des siècles qu'à la confusion des esprits, à la dénaturation de la doctrine, au relativisme personnel ou communautaire aveugle, et pour finir à l'hérésie et à la perdition des âmes, et si donc ces erreurs mortelles ne sont pas corrigées à temps et à contre-temps.
Bien heureusement nous avons des serviteurs de Dieu comme le Père André à qui l'on ne peut reprocher d'avoir des comptes à régler mais qui bien au contraire aiment l'homme - tous les hommes - autant que leur foi et leur Dieu, et qui, bien qu'à la retraite de leur service à l'autel, ne cesseront de témoigner jusqu'à leur mort avec toute leur intelligence et toute leur foi de la Vérité. Lisez son article :
"Le dualisme est responsable d'une multitude de déchirures que l'œcuménisme est jusqu'ici impuissant à raccommoder. Si les chrétiens sont désunis, c'est bien parce qu'ils ont introduit la division entre la sainte Écriture et la Tradition, entre la parole et les rites sacramentels, entre les clercs et les laïcs, entre l'autorité et la liberté, entre la foi et les œuvres, entre le corps et l'âme, entre la pensée et la vie, entre la connaissance et l'amour, entre la foi et la raison, entre la philosophie et la théologie, entre les réalités spirituelles et les choses sensibles, entre le terrestre et le céleste, entre le temps et l'éternité, entre la contemplation et l'action, entre la nature et la personne, entre la nature et la grâce, ou entre la nature et le surnaturel. Et ce dualisme paraît s'être prolongé dans la société déchristianisée avec la théorie marxiste de la lutte des bourgeois et des prolétaires. On peut même se demander s'il n'y a pas quelque chose de cela dans un certain féminisme.
Quant au juridisme, c'est un fait bien établi que la propension du droit est de nous donner un pouvoir: avoir un droit, c'est détenir un pouvoir. Le droit nous habilite à revendiquer, à exiger, au besoin par la contrainte, ce qui nous est dû. Le droit constitue une barrière qui s'oppose aux empiètements d'autrui sur notre individualité. Il délimite la sphère en laquelle nous pouvons agir en toute indépendance sans que notre activité puisse être entravée par autrui. En outre, le droit est essentiellement rationnel. Il se fonde sur l'esprit humain en tant que faculté d'ordre et puissance normative, comme raison qui légitime notre action et rend ses conditions moralement et socialement exigibles. La mentalité juridique nous accoutume inévitablement à une objectivation des situations existentielles, elle développe en nous la propension à substituer à l'indétermination dynamique de la vie, à l'unicité de l’évènement survenu dans la vie personnelle, des modèles de vie définitifs et impersonnels se référant à l'objectivité du cas général. Plus une théologie est juridique, plus elle tend à rationaliser le mystère, moins elle est capable de réconcilier la pensée et la vie, la science et la sagesse, la connaissance et l'amour, et, plus généralement, toutes les réalités que divise la mentalité dualiste. Les Byzantins furent toujours étrangers au présupposé occidental selon lequel l'Église est une institution divine dont l'existence interne pourrait être définie de façon appropriée en des termes juridiques. Les concepts juridiques ne sauraient épuiser la réalité la plus profonde de l'Eglise. Et c'est l'honneur et la grandeur de l'Orthodoxie d'avoir toujours témoigné de cette manière de sentir la vie en Christ." LIRE LE TEXTE intégral > ICI
(extrait d'un article du Père André Borrély "Qu'est-ce que l'Orthodoxie ?" in Orthodoxes à Marseille bulletin n°138 sept-oct 2011 - abonnement (20 euros) par chèque bancaire à l'adresse : 1 rue Raoul Ponchon 13010 Marseille)
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