PRÉPARATION À LA COMMUNION par le regretté P. Élie de bienheureuse mémoire


L’Église nous propose, pour notre cheminement et notre élévation vers Dieu, des règles qui peuvent paraître inabordables par leur sévérité à certains. Mais Elle suit le précepte du Christ : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ». Néanmoins dans toute son approche du fidèle, L’Église agit avec pédagogie (voir, entre autres, les semaines préparatoires au Carême de Pâques et le Grand Carême lui- même dans « Le Grand Carême » du père Alexandre Schmemann). Il convient donc pour lefidèle d’établir des relations de prière et de confiance avec un père spirituel qui, ayant acquis une expérience spirituelle certaine, pourra judicieusement donner des conseils et des instructions pour la croissance spirituelle et le « dosage » des efforts. 

Le sacrement de la Communion a été institué par notre Seigneur Jésus Christ Lui-même. Il a dit lorsqu’il enseignait à Capharnaüm : « Je suis 1e pain vivant, descendu du ciel. Qui mangera ce pain vivra à jamais. »Et même, «le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde » (Jean 6, 51). Et plus loin : « En vérité je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme et ne buvez de son sang, vous n’aurez pas la vie en vous » (Jean 6, 53). Plus tard lors de la Sainte Cène, le Seigneur Jésus prit le pain, le bénit, le rompit et le donna aux disciples en disant : « Prenez, mangez, ceci est mon corps. » Puis, prenant une coupe, il rendit grâces et la leur donna en disant : « Buvez-en tous; car ceci est mon sang, le sang de la nouvelle alliance qui sera répandu pour la multitude en rémission des péchés. » (Matthieu 26, 26-28). Ces paroles du Seigneur Jésus, l’Église les appelle institutionnelles car c'est par elles que fut instituée institué le sacrement de l’Eucharistie. En accomplissant ce sacrement, l’Église (en la personne de l’évêque ou du prêtre qui le remplace) prie : « Et nous tous qui participons au même Pain et au même Calice, fais que nous soyons unis les uns aux autres dans la communion de l’unique Esprit-Saint... » (liturgie de Basile-le-Grand). Cela veut dire que la communion aux Saintes Espèces fait de nous le Corps unique du Christ qui nous lie dans la communion de l’unique Esprit Saint... L’Église prie ensuite «... purifie-nous de toute souillure de la chair et de l’esprit,... afin que, recevant avec le témoignage d’une conscience pure notre part de tes Saints Mystères, nous soyons unis au Corps sacré et au Sang de ton Christ, et, les ayant reçus dignement, nous possédions le Christ demeurant dans nos cœurs et devenions les temples de ton Saint-Esprit » (Lit. de St. Basile, prière avant le « Notre Père »). Dans cette prière comme nous le voyons, l’Église demande que chacun d’entre nous qui communie aux Saintes Espèces soit uni au Christ et que chacun devienne le temple du Saint-Esprit.

Il est entendu qu’il faut éviter de s’approcher d’un si grand sacrement de façon indigne. Le saint Apôtre Paul écrivait : « car celui qui mange et boit de façon indigne, mange et boit pour sa propre condamnation s'il ne discerne pas le Corps du Seigneur. Voilà pourquoi il y a parmi vous beaucoup de malades et d’infirmes, et que bon nombre meurent» (1 Cor. l1, 29-30). 

« Homme , si tu veux manger le corps du Maître, approche avec crainte afin de ne pas être brûlé par le feu » (office avant la communion).

La condition indispensable à la participation au Saint Mystère est de n’avoir aucune animosité dans l’âme et le coeur — c’est la réconciliation avec tous : « afin de boire le Sang Divin de la communion, commence par te réconcilier avec ceux qui t’ont chagriné ». Puis ose manger la nourriture du mystère (dans la même prière). D’autre part, il existe des empêchements à la communion tels que : excommu- nication ou interdiction de communier prononcées par l’évêque ou par le confesseur. L’Église appelle «d’une voix de mère » les croyants à communier au moins cinq fois par an (à chacun des quatre carêmes et le jour de la commémoration de leur saint) et prescrit avant la communion une préparation spéciale (говение en russe) qui consiste en un jeûne renforcé et en la lecture de canons et de prières de pénitence. Le temps de la préparation est fixé par le confesseur et varie de sept à un jour selon les « besoins » (instructions pour le prêtre). Il est bien entendu que le degré du jeûne et le caractère de la préparation sont adaptés par le confesseur à l’état physique et spirituel du pénitent. Pendant cette préparation, ceux qui sont mariés doivent également s’abstenir de rapports conjugaux. Avant la communion « il faut que celui qui se prépare, confesse au prêtre tous ses péchés... qu’il s’abstienne à partir de minuit de tout (c’est-à-dire : ne rien manger, ne rien boire et, bien sûr, ne pas fumer, note l'auteur), afin de s’adonner à la prière, aux métanies et aux méditations spirituelles (instructions pour leprêtre) ». La veille et le matin même, il faut lire les prières avant la sainte communion qui se trouvent dans tous les livres de prières. Il est bien sûr indispensable d’arriver à l’heure à l’église pour la liturgie (et non pas au moment de l’hymne des Chérubins, comme beaucoup le font). En général il faut remarquer que la meilleure préparation à la communion est la participation aux offices à l’église. Le fait d’arriver en retard sous le pieux prétexte de : «je n’ai pas fini le canon »... «je n’ai pas accompli la règle » n’est pas une excuse, mais une faute qui prouve notre méconnaissance de l’Église en tant qu’organisme plein de grâces, en tant que Corps du Christ.

Par ailleurs la grâce qui illumine nos âmes lors des offices religieux ne se résume pas à l’action de tel ou tel texte. La disposition de ces textes, la conjonction en eux des cycles journalier, hebdomadaire et annuel constituent la structure même des offices et rythment toute notre vie. Les chants et les lectures dans l’église (indépendamment du fait qu’ils soient bien ou mal exécutés, bien qu’une bonne exécution soit préférable !) rendent aux mots l’intonation perdue dans notre parler quotidien. Tout cela donne la plénitude à la Parole de Dieu qui s'adresse à nous. Ceci, bien évidemment, ne peut pas se retrouver dans la lecture des canons et des prières à la maison. Ceci s’applique surtout aux offices du Grand Carême. Ceux qui ont la possibilité de suivre avec l’Église le cycle des offices du Grand Carême en ressentent l’action bienfaisante et émouvante et ceux qui jeûnent se préparent par là-même à la communion et doivent communier chaque fois qu’ils le désirent. Il est indispensable de désirer communier. Il ne faut pas communier si on ne le désire pas. Ceux qui ne vont pas régulièrement aux offices, ou n’ont pas cette possibilité, devraient se préparer selon la règle décrite ci-dessus.

D’autre part la prière à l’église est une prière en commun de la communauté ecclésiale qui représente effectivement l’Église. Le fait même d’être créé par Dieu consiste à se tenir devant son Créateur avec «crainte et frémissement », personnellement et en communauté. L’Église en prière représente toute la création lorsqu’elle prie pour « l’union de tous ». Nous nous tenons personnellement devant Dieu dans notre humilité, avec la conscience de nos péchés et de notre indignité; néanmoins en tant que membre de l’Église le « pouvoir d’être les enfants de Dieu » (Jean I, l2) nous est donné. Le mystère de la communion actualise ce don (dont personne n’est digne et dont personne ne peut être digne) et nous associe à « la communion de l’Unique Esprit-Saint » nous créant membres du Corps du Christ. En tant que tels ce mystère nous unit, chacun d’entre nous qui L’avons « reçu dignement » (c’est-à-dire, en ayant conscience de notre indignité), au « saint Corps et saint Sang de ton Christ »; afin que « les ayant reçus dignement, nous possédions le Christ demeurant dans nos coeurs et devenions les temples de ton Saint-Esprit ». Ensuite c’est nous « qui avons le Christ vivant dans nos cœurs » que l’Église renvoie dans le monde avec une mission apostolique. Tout cela signifie que nous sommes appelés à participer au sacrement qui nous rend dignes de la grâce de la sainte communion non seulement pour notre salut, mais aussi pour l'affermis sement de l’Église et le salut du monde.

Archiprêtre Elie SHMAIN de bienheureuse mémoire
(source Messager diocésain avril 1996 n° 5)
Que le Seigneur se souvienne de son serviteur   Père Élie dans son Royaume

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