L'art Moderne ou la Sophia Désaffectée par Paul Evdokimov [texte 6]
Voici encore, à propos de l'icône, deux extraits du texte que l'on peut lire en entier sur le site Myriobiblos
L'art Moderne ou la Sophia Désaffectée
de Paul Evdokimov
L'art Moderne ou la Sophia Désaffectée
de Paul Evdokimov
"Les iconoclastes croyaient très correctement aux symboles, mais à cause de leur conception «portraitiste» de l'art (imitation, copie), ils refusaient à l'icône le caractère symbolique et par conséquent ne croyaient pas à la présence du Modèle dans l'image. Ils n'arrivaient pas à saisir qu'à côté de la représentation visible d'une réalité visible (copie, portrait), il existe un tout autre art οù l'image présente le «visible de l'invisible» et ainsi se révèle symbole authentique. Ils auraient accepté plus volontiers l'art abstrait dans sa figuration géométrique, par exemple la croix ne portant pas le crucifié. Or, la ressemblance iconique s'oppose radicalement à tout ce qui est portrait et ne se rapporte qu'à l'hypostase (la personne) et à son corps céleste. C'est pourquoi l'icône d'un vivant est impossible et toute recherche d'une ressemblance charnelle, terrestre, est exclue. Dans l'iconosophie, l'hypostase «enhypostasie», s'approprie, nοn pas une substance cosmique (planche de bois, couleur) mais la ressemblance comme telle, la forme idéale, la fιgure céleste de l'hypostase assumant le corps transfiguré que représente l'icône. [...]
Dans sa valeur propre de symbole, l'icône dépasse l'art, mais l'explique aussi. Nous pouvons admirer sans réserve les œuvres des grands Maîtres de tous les siècles et en faire le sommet de l'Art. L'Icone se tiendra un peu à part, comme la Bible se placera au-dessus de la littérature et de la poésie universelles. Sauf quelques exceptions, l'art tout court sera toujours formellement plus parfait que l'art des iconographes car ce dernier, justement, ne cherche pas cette perfection. Son excés même nuirait à l'icône, risquerait de décentrer le regard intérieur de la révélation du Mystère, comme une poésie excessive et recherchée nuirait à la puissance de la parole biblique. La beauté d'une icône est dans un équilibre hiérarchique d'une extrême exigence. Au-dessous d'une certaine limite et immédiatement, ce n'est plus qu'un simple dessin; au-dessus et suivant le génie contemplatif de l'iconographe, l'icône elle-même impose et rayonne la stricte beauté conforme à son sujet."
Dans sa valeur propre de symbole, l'icône dépasse l'art, mais l'explique aussi. Nous pouvons admirer sans réserve les œuvres des grands Maîtres de tous les siècles et en faire le sommet de l'Art. L'Icone se tiendra un peu à part, comme la Bible se placera au-dessus de la littérature et de la poésie universelles. Sauf quelques exceptions, l'art tout court sera toujours formellement plus parfait que l'art des iconographes car ce dernier, justement, ne cherche pas cette perfection. Son excés même nuirait à l'icône, risquerait de décentrer le regard intérieur de la révélation du Mystère, comme une poésie excessive et recherchée nuirait à la puissance de la parole biblique. La beauté d'une icône est dans un équilibre hiérarchique d'une extrême exigence. Au-dessous d'une certaine limite et immédiatement, ce n'est plus qu'un simple dessin; au-dessus et suivant le génie contemplatif de l'iconographe, l'icône elle-même impose et rayonne la stricte beauté conforme à son sujet."
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