DÉMOCRATIE ? De quoi parle-t-on au juste ?


Extrait

Extrait de la préface de la première édition de Pierre Magnard


Il est malaisé de présenter l'auteur d'un premier livre, lorsque celui dont la jeunesse laissait augurer un simple coup d'essai nous donne un coup de maître. On attendait certes de l'ancien étudiant de Sorbonne une étude critique de son objet d'investigation, la démocratie ; c'est à un réquisitoire en bonne et due forme, parfaitement instruit et argumenté, que l'on a affaire. Toute l'histoire de la pensée politique moderne et contemporaine est citée à comparaître et ses témoignages sont enregistrés avec la plus grande rigueur. Passionné, passionnant, l'ouvrage, convainquant par lui-même n'a nul besoin qu'on abonde en son sens, qu'on le complète ou qu'on le rectifie, on risquerait de lui ôter de sa force. Il reste au présentateur, sinon de jouer la défense, du moins de se poser en tiers pour tenter de percer le mystère de cette farouche âpreté.

Il y a en effet de l'amour trahi dans cette pugnacité, comme si l'adversaire incarnait, retourné en son contraire, quelque chose qui aurait tenu profondément à coeur à notre auteur, comme une image de la mère patrie jetée à terre, humiliée, abîmée, malmenée, violentée par des enfants dénaturés. Fastueux manteau jeté sur une réalité qu'elle voudrait faire valoir quand elle la dissimule, la démocratie n'est-elle pas devenue l'agent d'une volonté de mystification ? A quoi sert-elle aujourd'hui d'alibi dans un Moyen-Orient que ravage la guerre ou dans une Afrique noire en proie à la subversion ? Emballage factice d'impérialismes économiques, comme aussi d'ambitions ou de cupidités sordides, la démocratie est trop souvent le cache-misère de la médiocrité des politiques et la couverture d'intérêts particuliers dissimulés sous un universalisme emprunté. Loin de donner un visage à la réalité nationale, l'invocation de la démocratie constituerait une confiscation des forces vives de la nation appelées à s'engager dans des chemins douteux. La démystification ne peut en être que souhaitable.

   Présentation de l'éditeur (2e édition revue et augmentée) 

La démocratie est aujourd'hui une valeur sacrée, une véritable religion. Dans un ouvrage passionné, passionnant [...] où toute l'histoire de la pensée politique moderne et contemporaine est citée à comparaître " (P. Magnard), Maxence Hecquard revisite les fondements et la genèse de cette religion séculière. L'antique ordre du monde s'est écroulé. La mort de Dieu, définitive depuis Darwin, fait place à un Etat de droit fondé sur une.. vérité scientifique : le progrès. Oui contesterait un tel régime ? La cohérence remarquable du système apparaît ainsi à l'énoncé de la métaphysique sous-jacente : celle d'un univers en évolution peint par Condorcet et Teilhard de Chardin, mais véritablement pensé par Kant, Hegel et Darwin. La démocratie est le moment politique de ce progrès. Hasard et liberté, droit et morale, intérêt et bien commun forment désormais autant de couples indissolubles. Le lien social devient essentiellement économique..
VIDEO :
Maxence Hecquard, auteur de l'ouvrage sur Les Fondements philosophiques de la démocratie moderne a donné une conférence au Cercle de l'Aréopage, en présence de son préfacier le Professeur Pierre Magnard.



La démocratie, cette vache sacrée de la modernité (à propos de la première édition source)

Maxence Hecquard a publié en mai dernier un ouvrage imposant dans lequel il revisite les fondements et la genèse de la démocratie moderne, cette nouvelle religion séculière, ce dogme intouchable, cette "valeur de la République", selon l'expression consacrée. Dans Les Fondements philosophiques de la démocratie moderne, il montre la métaphysique de ce régime en évolution perpétuelle, né des Lumières, pensé notamment par Kant, Hegel et Darwin. Même les représentants de l'Eglise ont fini par adopter la terminologie propre à la démocratie, en en faisant presque un principe non négociable du bien commun. Alors que, le plus souvent, la démocratie moderne écrase le principe de subsidiarité sous un totalitarisme soft. Cet idéal est une utopie, mais une utopie plaisante, à la fois pour les dirigeants mais aussi pour les électeurs qui aiment se plier au jeu :
288.88888888889_450_188"Le vice du régime est contradiction essentielle : faire gouverner un peuple incapable de le faire. Pour que la démocratie fonctionne, il faut que quelque tribun mente au peuple en lui déclarant exécuter ses volontés quand il ne suit que la sienne."
Toute ressemblance avec l'actualité n'est pas fortuite. Et ce théâtre électoral se poursuit alors que l'échec de la démocratie est patent : 
"[D]eux siècles après la grande révolution, le monde n'est toujours pas en paix. Deux guerres mondiales ont eu lieu au XXe siècle en son nom [...]. A l'orée du troisième millénaire force est de constater que la démocratie progresse toujours mieux par les avions bombardiers que par les urnes. Des coalitions occidentales (souvent emmenées par les Etats-Unis...) déstabilisent, voire attaquent, nombre de régimes d'orient ou du sud au prétexte d'"insuffisance démocratique", celle-ci étant certifiée par des autorités "morales" autoproclamées.
Régression culturelle et guerres multiples : la Terre promise par les Lumières semble encore loin...
D'où vient ce paradoxe ? Comment expliquer qu'un régime qui ne vise que la cohabitation tranquille et l'épanouissement des hommes engendre tant de conflits ?
La question est celle du passage. Comment le despotisme pour instaurer la république . Comment briser la dictature pour gagner la liberté ? Comment sortir de l'obscurité ? La réponse des Lumières et unanime : par la violence".
Ainsi fonctionne l'idéologie démocrate : au nom des lendemains qui chantent, tout est possible aujourd'hui. Rousseau, Kant, Hegel sont unanimes là-dessus : la violence et la terreur sont une étape inévitable de la liberté.
Et dans le concert politico-médiatique, il n'est pas possible de s'exprimer sereinement si l'on n'a pas professé son adhésion à la démocratie, laquelle se fait totalitaire :
"Claude Polin explique que le totalitarisme se définit comme l'unicité d'un parti qui se maintient par une police de la pensée : "Une société est totalitaire oosqu'elle tend à se donner en tant que telle, c'est-à-dire en tant que totalité de se membres, pour supérieure à n'importe laquelle de ses parties, sur laquelle le tout entend du même coup exercer un pouvoir total, en lui déniant tout droit à se poser en face de lui comme un être à part entière." Force est de reconnaître que la démocratie répond à cette définition : elle ne souffre pas la contradiction. La démocratie est idéologique et totalitaire car ses valeurs sont exclusives et parce qu'elle prône une métaphysique incompatible avec toute autre vision du monde."

 par Michel Janva

Commentaires

Nikiforos a dit…
La publication de tels ouvrages est le signe évident de la réalité d'un retournement radical de la pensée en Occident francophone. Cette réalité était déjà bien perceptible depuis un certain temps, à travers les démarches de certains "pionniers", mais il s'agit maintenant d'une structuration susceptible de poser les fondement d'un édifice nouveau. Dont nous avons cruellement besoin, et qu'il nous appartient à tous de construire. Ici et maintenant.
Merci Maxime
Nikiforos
PS : Sauf erreur de ma part, le lien suivant ne fonctionne pas dans texte ci-dessus : "La démocratie, cette vache sacrée de la modernité" (à propos de la première édition SOURCE)