Éthiques orthodoxe et protestante

Sur Blog de Laurence 

Chroniques de Pereslavl


extrait
 d'Un article de Mikhaïl Smoline pour Tsargrad traduit par Laurence

[…] M. Weber écrivait à propos de l’éthique protestante :  
« Si Dieu vous montre cette voie, par laquelle vous pouvez sans dommage pour votre âme et sans nuire aux autres, d’une façon légale gagner plus d’argent, et que vous la refusez et choisissez une voie moins rentable, alors vous faites par là même obstacle à l’un des buts de votre vocation, vous refusez d’être dirrigé par Dieu et de recevoir ses dons, afin d’avoir la possibilité de les utiliser pour son bien, quand Il le désirera. Ce n’est pas pour la satisfaction de la chair ou les joies pécheresses, qu’il vous faut travailler et vous enrichir, mais pour Dieu ».
(M .Weber. L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme). 
Mais pourtant l’éthique protestante elle-même n’est pas dans un état statique, elle n’est pas dans le vide et connaît depuis longtemps les problèmes de la pression croissante de l’athéisme et de l’individualisme humaiste, qui travaille seulement pour lui-même. Et met seulement lui-même au centre du monde. 
Le Dieu de la bible a interdit aux protestants les moyens malhonnêtes de s’enrichir, a interdit le gel des salaires, a interdit de régner sur ses subordonnés avec cruauté, le sentiment du devoir obligeait les protestants à travailler, et le droit défendiat leur travail des atteintes extérieures.
Le monde de l’économie actuel ressemble plus à une jungle, dans laquelle se déroulent d’infinies guerres économiques et pas seulement économiques. Qu’est-il resté là de « l’éthique protestante », à laquelle on nous propose de nous convertir ? Vaut-il la peine de passer du code orthodoxe au code protestant, que l’Occident lui-même a renié, se trouvant dans le stade final de ce processus ? L’éthique de l’Occident contemporain et particulièrement les relations économiques réciproques ont depuis longtemps pris congé non seulement de l’éthique chrétienne du catholicisme, mais aussi du protestantisme. La proposition de nos libertaires retarde de cent ans, c’est sûr. Le protestantisme s’est décomposé sous nos yeux, on ne peut plus se convertir à rien…
La différence entre les éthiques orthodoxe et protestante
 Ici, il convient de remarquer une différence fondamentale ente les éthiques protestante et orthodoxe. Non dans le domaine économique mais justement dans celui de la vision du monde, ce qui est beaucoup plus important et plus relatif à sa cause première. 
Le protestantisme, dans son évolution historique, est la renaissance de l’éthique de l’ancien Testament. Pour les théologiens protestants, Jésus Christ n’est guère plus qu’un rabbin juif, qui se contentait d’interpréter la loi vétérotestamentaire et n’apportait rien de nouveau à l’éthique vétérotestamentaire. De là découle l’économocentrisme de tout le monde occidental, n’ayant, par essence, d’autres buts que de gagner de l’argent.
Le Christ, en tant que Nouveau Législateur, d’un point de vue orthodoxe, ne parle pas de ce que doit ou ne doit pas faire l’homme durant sa vie terrestre, mais l’appelle au perfectionnement, à la déification, cela n’a rien à voir avec l’activité économique. 
La loi du nouveau Testament est comparée par les théologiens orthodoxes à une nouvelle plante, pleine de verdeur, de fleurs et de fruits, et celle de l’ancien Testament à la graine d’où elle a cru et s’est développée.
L’incitation à se convertir à « l’éthique protestante », c’est l’incitation à couper l’arbre orthodoxe, à anéantir la civilisation orthodoxe et à chercher chez les « semenciers » occidentaux quelque vielle semence vétérotestamentaire sans aucun espoir qu’elle puisse jamais pousser dans notre « terreau ». Et d’essayer de vivre seulement d’économie, d’égoïsme individuel. 
Soit dit en passant, c’est là la négation métaphysique de la venue du Christ dans le monde. C’est à travers le rachat de nos péchés qu’il nous a donné une nouvelle loi morale : «Agissez envers les autres comme vous voudriez les voir envers avec vous » (Mat. 7,12). La loi de l’amour du prochain, et non celle de son exploitation économique sans cesse perfectionnée.
Et qu’est-ce d’autre, à proprement parler, qu’une économie accomplie, sinon une exploitation accomplie ? Comment peut-on atteindre le bénéfice maximum sans exploitation maximum ? La vie n’a pas de sens, si elle se limite au travail, le gain de la quantité d’argent la plus grande possible. 
Et bien sûr, nos indicateurs économiques ne vont jamais dépasser ceux des sociétés dans lesquelles l’individualisme égoïste se débrouille sans le moindre christianisme. Mais n’est-il pas suicidaire d’échanger le Christ contre Mammon ? […]

Commentaires

Laurence Guillon a dit…
Il est bien, cet article!