SUR LA CORRECTION FRATERNELLE [2] par ST JEAN CHRYSOSTOME
St Jean Chrysostome (kremlin XIV°s) |
"Quand le médecin voit le mal s’aggraver, il ne cesse pas son traitement, il ne s'emporte pas ; au contraire, il n'en devient que plus empressé. Tel est le conseil que nous donne ici le divin Maître. Vous avez été faible, vous trouvant seul ; puisez dans la présence de deux amis la force dont vous avez besoin; c'est assez de deux personnes pour reprendre celle qui vous a offensé. Voyez-vous de quelle manière il prend à la fois les intérêts de l'offenseur et ceux de l'offensé. La victime véritable, c'est bien celui que le mal a saisi, celui qui est faible et près de tomber en défaillance. Aussi le Sauveur conduit-il l'un vers l'autre, d'abord l'offensé seul, puis avec deux témoins, puis enfin, si l'offenseur persévère dans son obstination, avec l'Église: « Dites-le à Église.» (Matt. 6 ;17) Or, si les intérêts de l'offensé étaient seul en jeu, le divin Maître ne lui ordonnerait pas de pardonner à un ennemi repentant soixante-dix fois sept fois (Matt. 18 ; 22); il ne chercherait pas si souvent tant de moyen de remédier au mal; après le premier entretien, il eût laissé l'opiniâtre livré à lui-même, tandis que maintenant il commande qu'on essaie de le ramener une, deux, et trois fois; premièrement seul, puis avec deux autres personnes, puis avec un beaucoup plus grand nombre.
S'agit-il des infidèles, le Sauveur ne parle pas de cette manière: « Quelqu’un te frappe-t-il sur la joue droite présente-lui la gauche ». Tel n'est pas présentement son langage. Paul disait aussi: « Pourquoi m'occuperai-je de ceux du dehors ? »
Quant à nos frères, il nous enjoint de les reprendre et de les convertir, de les retrancher de notre société, s'ils refusent, afin que la honte les y détermine (I Cor. 5 ;12). Voilà ce que fait le divin Maître dans les lois qu'il nous prescrit touchant nos frères; il impose au vindicatif trois maîtres, trois juges qui lui mettront sous les yeux ce qu'il a fait au moment de l'ivresse; car, bien que - celui-ci soit l'auteur de toutes ces paroles et de toutes ses actions inconvenantes, il n'en a pas moins besoin qu'on l'en instruise, parce qu'il était plongé dans une ivresse véritable. Il n'y a même pas d'ivresse qui nous jette plus hors de nous-mêmes que la colère et le péché, qui nous réduise à une plus complète insensibilité. Qui donc a jamais surpassé David en intelligence ? Pourtant, lors de son péché, le sens lui fut complètement ravi, parce que la passion avait envahi son esprit et comme inondé son âme d'une obscure fumée. C'est pour cela qu'il eut besoin du flambeau du prophète et du récit que lui rappela son crime. Telle est encore la raison pour laquelle le Sauveur envoie au pécheur des hommes qui viennent l'entretenir de sa conduite passée." (à suivre)
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