Pourquoi se soucier du Concile de la Crète maintenant ? par P. Peter Alban Heers
Conférence donnée lors de la retraite du clergé
du diocèse américain de l’est de l’Église
Orthodoxe Russe à l’Etranger
à Howell, New Jersey, USA
Mardi 21 mars 2017
par Père Peter HEERS
Votre Eminence, Métropolite
HILARION,
Votre Eminence Métropolite
JONAS,
Votre Excellence, Evêque NICOLAS,
Votre Excellence, Evêque IRENEE,
Vénérables Pères et Frères en
Christ, le Christ est parmi nous !
Je considère que c’est un honneur
de me tenir devant vous aujourd'hui, pour parler avec les bergers et les
pasteurs du troupeau spirituel du Christ, et en particulier pour les
successeurs du grand travail initié dans la diaspora russe par ces saints comme
saint Jean le Thaumaturge et les métropolites Antoine, Anastase, Philarète et
Vitaly, l’archevêque Averky et le métropolite Laure et beaucoup d’autres, qui
sont des Pères vénérés non seulement de l’Église russe à l’étranger, mais bien
de l’Église toute entière.
Le témoignage donné par les Pères
de l’Église russe à l’Étranger en ce qui concerne la Sainte Tradition, l’idéal
monastique et ascétique et en particulier l’ecclésiologie de l’Église, continue
d’inspirer et de guider les orthodoxes du monde entier.
Aujourd'hui, alors que l’arche de
l’Église vacille à la suite du décès de l’autoproclamé "Grand et Saint
Concile » de Crète, nous avons grand besoin de leur exactitude dans la vie et
la foi - ou, mieux, nous avons grand besoin de les suivre et de les imiter dans
ce domaine.
Dans le court espace de temps qui
m’est alloué aujourd'hui, j’espère pouvoir brièvement mais clairement vous
présenter ce qui est notable et la signification des événements en Crète en
juin de l’année dernière, afin qu’étant informés vous puissiez agir selon la
volonté de Dieu. En particulier, je vais brièvement examiner et critiquer les
trois aspects suivants du « Concile » et ses conséquences :
1. Organisation et réalisation
2. Documents
3. Résultats et Implications
Nous nous concentrerons, en
particulier sur les aspects de cette réunion qui représentent nécessairement
des écarts par rapport à la Sainte Tradition et à la sainte foi de l’Église,
car ces derniers méritent une réponse de la plénitude de l’Église.
Avant de commencer cette analyse,
il est nécessaire de préciser ce qui suit, afin d’éliminer ce qui est devenu
une sorte de « fausse piste » dans l’ensemble de la discussion de Crète et de
son importance. Les partisans, les sympathisants et les indifférents à
l’événement réagissent aux critiques de celle-ci de diverses façons. On les
entend dire, par exemple :
• Le succès de la réunion a été la
réunion elle-même !
• Ce n’est qu’un début et il va
être amélioré !
• Rien de conséquent n’est apparu,
il n’est pas nécessaire d’en faire toute une histoire !
• Pourquoi même se soucier [du
Concile] de la Crète maintenant ? Il est mort et enterré ! Dans quelques années
il sera oublié. (Et d’autres sentiments semblables.)
Nous pouvons tous éprouver de la
sympathie pour la « puissance de la pensée positive, » toutefois, je crains que
toutes ces belles pensées ne fonctionnent que pour esquiver la question : qu’en
est-il du « Concile » lui-même ? Qu’en est-il de ses décisions et de ses
conséquences ? On ne peut s’attendre à croire que nous avons attendu plus de 50
ans (ou pour d’autres calculs 100 !) pour un grand Concile dont l’objectif
principal était... d’avoir lieu ! Certes, ce qui est arrivé en Crète agira et a
déjà influé sur l’Église (et grandement dans certains endroits) et cela va
devenir un précédent pour le futur.
En effet, c’est pour cette raison
que ces clercs qui l’ignorent ou le minimisent le font pour leur propre bénéfice-
et au détriment de leurs ouailles. Dans l’histoire de l’Église, les Conciles
-Conciles œcuméniques ou faux conciles- sont acceptés ou rejetés par le plérôme
[la plénitude] de l’Église. Ils ne sont pas, et ne doivent pas être ignorés,
surtout quand ils innovent et introduisent de faux enseignements dans l’Église.
Tout comme on doit se repentir d’une chute, et ne pas la dissimuler comme de la
poussière sous un tapis, ainsi trop erreurs présentées et acceptées au Concile
doivent être rejetées et corrigées [idéalement en Concile]. Nous n’ignorons pas
les maladies lorsqu’elles infectent nos corps. Combien plus devrait être notre
soin pour le corps du Christ ! Nous sommes tous coresponsables, chacun portant
le fardeau de l’autre.
1. Organisation et exécution :
Commençons par regarder brièvement
la composition de base statistique du « Concile » :
• Églises participantes : 10 des 14
Églises locales (71 %)
• Représentation des chrétiens
orthodoxes : près de 30 %.
• Participation des évêques
orthodoxes : 162 ont participé sur 350 invités (46 %)
• Représentation des évêques
orthodoxes : 162 sur un total de 850 (19 %)
• Nombre d’évêques votant : 10 des
162 évêques présents (6 %), ou 10 des 850
évêques de l’Église orthodoxe (1,1
%).
Si nous comparons cela avec les
véritables « Grands et Saints Conciles » de l’Église, reconnus plus tard comme
« œcuméniques », la différence est énorme, surtout si l'on considère les
obstacles rencontrés par les anciens hiérarques en termes de voyage et de
communication. Par exemple, le Premier Concile Œcuménique avait 325 Pères, le
Quatrième 630 Pères et le Septième 350 Pères - qui y participaient avec droit
de vote.
Qu’est-ce alors, que le monde est
allé voir en Crète? Un « Grand et Concile ? » Qu’a-t-il vu? Un rassemblement
libre d’évêques orthodoxes de partout dans le monde ? Et voyez, la plupart
d'entre eux n’ont pas été invités, et presque tous ceux qui sont venus ne
reçurent pas le droit de vote. Donc, que sont-ils allés voir en Crète ? « Un
Concile de primats avec leur suite. » [1]
Cette dernière phrase - « un
Concile de primats avec leur suite » - c’est ainsi que le métropolite
Hiérothéos Vlachos de Naupacte caractérise le rassemblement auquel il a assisté
et que maintenant il critique sévèrement pour avoir introduit des nouveautés en
ce qui concerne notre foi. La grande ironie et la tragédie est que pour
l’ensemble des grand organisateurs qui clamaient que la conciliarité dirigerait
et serait montrée en Crète, c’était plutôt une nouvelle forme orientale de
primauté papale - des primats - qui s’est attribuée le devant de la scène. [2]
L’ironie tragique est que, tandis
que les représentants du Patriarcat Œcuménique sillonnaient les autoroutes
d’internet en vantant la conciliarité du processus pré-synodal et du futur
Concile, plusieurs des Saints-Synodes des Églises locales commençaient
seulement à examiner l’Orthodoxie des textes acceptés par leurs Primats sans
leur approbation. Ce qui montre que l’échec de ce « Concile des Primats avec
leur suite » était assuré d’avance.
A. Présages préconciliaires de la
catastrophe imminente
Beaucoup a été dit sur le long
processus conciliaire qui a conduit au rassemblement crétois. Sans aucun
doute, beaucoup de sueur et d’encre avaient été dépensés pour que cette
manifestation ait lieu. Au cours des 55 ans de préparation organisationnelle
active pour la convocation, il y a eu :
• Six réunions de la «
Commission préparatoire inter orthodoxe »
• Trois rassemblements de la «
Commission inter orthodoxe spéciale »
• Cinq conférences préconciliaire
panorthodoxes
• Trois réunions de la synaxe des
primats des Églises locales
• Deux conférences
théologiques spéciales pour la rédaction des règles de fonctionnement des
assemblées épiscopales de la Diaspora
• Deux conférences
universitaires, sur la question d’un calendrier ecclésiastique commun et d’une
célébration commune de la fête de Pâques avec les hétérodoxes, et une autre sur
les questions de bioéthique contemporaines
• Et une conférence universitaire
sur la question de l’Ordination des femmes, à Rhodes, en 1989.
Il est vraiment tragique qu’après
une quantité si considérable de temps et d’efforts, le résultat ne plaît
pratiquement à personne, ni n’apporte l’honneur ou la gloire aux organisateurs
ou à l’Église. Le hiérarque du Patriarcat œcuménique qui caractérisa le Concile
comme un « fiasco » ou le journaliste ecclésiastique qui l’appela « le grand
titre qui a fini en note de bas de page » étaient peut-être injustes ? {Il est
évident que l’adage antique a été accompli en Crète : « La montagne a accouché
d’une souris !» Si seulement il s’agissait uniquement de cela et de rien
de pire ! Tout ce labeur pour donner naissance à un tel « Concile », est une
honte pour toute l’Église).
On peut se demander : quelle faute
a été commise, pour qu’en dépit de tant de labeur, chose unique dans les
annales conciliaires - nous ayons eu une issue aussi tragique ?
Nous avons une expression en Grèce
: « Une bonne journée est évidente dès le départ. » Eh bien, l’inverse est
également vrai dans le cas du Grand Concile. Très tôt dans le processus
conciliaire, il était évident que la Crète normalement ensoleillée ne
brillerait pas pour l’Orthodoxie. Comme je l’ai examiné ailleurs longuement,
[3] les visionnaires derrière ce Concile en Crète ont scellé le sort de leur
Concile en ne suivant pas les pas des Saints Pères par le fait de s’être
imprégnés de « l’esprit » d’un autre concile de mémoire récente, encore
plus grandiose et trois fois défectueux : le Concile Vatican II.
Les deux conciles partagent des
racines et des débuts communs, une méthodologie et des buts similaires et au
moins une allergie superficielle au dogme. Les deux rassemblements entendaient
et affirmaient consolider l’engagement de leurs hiérarchies dans l’œcuménisme
et tous deux autorisaient leurs décrets conciliaires et les documents à être
façonnés par les théologiens académiques. Et, surtout, les deux rassemblements
virent l’introduction d’une nouvelle ecclésiologie « inclusiviste », étrangère
à la foi de l’Église, Une, Sainte, catholique et Apostolique. [4]
Un autre point malheureusement
ferment de parenté entre les deux rassemblements est l’absence de toute
démonologie. Est révélateur quant à l’état d’esprit et aux priorités des
rédacteurs des textes conciliaires, le fait que nulle part, dans aucun des
textes, on ne découvre les termes suivants :
• Diable, démon, diabolique ou
Malin [5]
• Hérésie, hérétique [6], schisme
ou schismatique
Toutefois, le discernement des
méthodes des esprits déchus ou la démonologie, est une exigence dans la
formation de la christologie et de l’ecclésiologie. [7] comme l’écrit
l’Evangéliste Jean, « à cette fin, le fils de Dieu a paru pour détruire les
œuvres du Diable » (1 Jean 3:8). L’absence de toute mention du Malin ou de ses
machinations (hérésie, schisme, etc.) dans n’importe quel texte conciliaire,
est indicative d’une conception mondaine, sécularisée, non d’une mentalité
patristique.
Enfin, suivant Vatican II et non
les Saints Pères, le « Concile » de Crète ne fait non seulement aucune
référence à l’hérésie, mais il invite des représentants des confessions
hérétiques à participer comme observateurs, y compris ceux reconnus comme tels
par les précédents Conciles Œcuméniques. Bien que sans précédent dans
l’histoire des conciles, cela avait été pratiqué dans les conciles du Vatican,
confirmant une nouvelle fois l’esprit et l’état d’esprit qui, malheureusement,
animaient les organisateurs.
B. l’Abolition « conciliaire » de
la Conciliarité
Voyons maintenant plus
particulièrement la conciliarité (ou son absence) de la période pré-synodale et
le Concile lui-même. L’unité de l’Église est manifeste et façonnée par le biais
de la conciliarité. Comme le dit le 34e canon apostolique : « car ainsi il y
aura unanimité, et Dieu sera glorifié par le Seigneur dans l’Esprit Saint.»
Lorsque la voie conciliaire est perdue, la victime première et souvent
immédiate est l’unité de l’Église.
À cet égard, un examen attentif du
« Concile » de Crète révèle que, paradoxalement, il se produisit une abolition
« conciliaire » de conciliarité. Dans l’histoire de l’Église, à l’exception des
conciles connus sous le nom de brigandage, aucun autre concile n’a
montré autant de dédain pour le sens même de conciliarité comme l’a fait le «
Concile » de Crète.
Tout d’abord, le peuple de Dieu, le
plérôme de l’Église (qui comprend le clergé, les moines et les laïcs), a été
contourné entièrement dans la préparation et la réalisation du « Concile ». Ce
n’est pas seulement un oubli majeur, c’est un grave défaut ecclésiologique. En
1848, les patriarches orthodoxes déclarèrent au pape que dans l’Église du
Christ « ni les patriarches, ni les conciles n’auraient pu introduire des
nouveautés parmi nous, parce que le protecteur de la religion est le corps même
de l’Église, le peuple même... ». [8]
Cependant, non seulement le corps
de l’Église a été maintenu dans l’ignorance, mais en outre une grande partie de
la hiérarchie l’a été également. La majorité des évêques et même des synodes
des Églises locales n’étaient pas impliqués dans la préparation du « Concile, »
y compris dans la rédaction de ses textes. À cet égard, nous rappelons le
douloureux cri de protestation émis par le métropolite Hiérothéos de Naupacte,
des mois avant le « Concile » [selon lequel] les textes pré-conciliaires
« étaient inconnus de la plupart des hiérarques et de moi-même, ils demeuraient
retenus en commission et nous ne connaissions pas leur contenu. » [9]
Il n'est pas exagéré dans notre cas
d’affirmer que le décret rendu par le Septième Concile Œcuménique en ce qui
concerne le faux « concile » iconoclaste de Hiéreia est applicable
ici : « les choses ont été dites comme dans un coin reculé, et non sur la
montagne de l’Orthodoxie. » C’est parce que les responsables de l’élaboration
des textes connaissaient très bien l’opposition du peuple de Dieu aux textes
problématiques et pour cette raison refusèrent de les publier. Ainsi que cela
ressort du procès-verbal de la 5ème (et dernière) conférence préconciliaire (en
octobre de 2015), ce fut seulement sur l’insistance du Patriarcat de Géorgie et
(plus tard à la synaxe des Primats en janvier 2016 - juste 5 mois avant le «
Concile»), et à la demande du Patriarcat de Moscou, que les textes ont
finalement été rendus publics pour l’Église. Dans cet esprit, alors, on peut
mieux comprendre pourquoi quatre patriarcats se sont retirés à la dernière
minute.
Irénée, évêque de Bačka (Église
serbe) avait ceci à dire au sujet de cette dernière et cruciale réunion de la
commission préconciliaire qui eut lieu en octobre 2015 :
« En ce qui concerne le texte « Les
Relations de l’Église orthodoxe avec le reste du monde chrétien » une révision
et une correction profonde, se sont malheureusement, avérées impossible, parce
que pendant la majeure partie de la réunion... en dépit de la désapprobation de
nombreux présents et les vives critiques exprimées, le texte - pour des raisons
jamais divulguées - ne fut pas sérieusement réévalué. Il a été plutôt été
envoyé en l’état, essentiellement intact, au Concile, où, en raison du manque
de temps et d’un consensus, des changements seulement cosmétiques furent
effectués. » [10]
Une étude attentive du
procès-verbal de la 5e Conférence panorthodoxe préconciliaire, (octobre 2015)
révèle que le travaux ont été effectués dans une atmosphère de pression et
de hâte, la responsabilité en incombant au Président de la réunion, le
métropolite Jean de Pergame, qui fut remplacé par la suite.
Il est évident, et c’est une
opinion communément admise parmi les critiques du « Concile » qu’une des causes
principales de la transformation du [Concile de] Crète en « fiasco » fut cette
méthodologie anti synodale, peu orthodoxe et le secret préconciliaire appliqué
par les organisateurs.
Nous avons dit précédemment que les
hiérarchies des Églises locales ont été tenues dans l’ignorance à l’égard de la
période préparatoire et des textes. C’est aussi évident si l'on considère que
les règles de préparation du Concile requerraient uniquement les signatures de
deux représentants de chaque Église afin de confirmer les textes préconciliaires
- c'est-à-dire, sans l’approbation des saints synodes. Ainsi, le texte peu
orthodoxe sur les hétérodoxes était considéré comme « approuvé » par les
églises locales après la réunion d’octobre 2015 sans être envoyé, sans être
discuté et sans être confirmé par les Saints-Synodes des Églises locales. De
cette façon, sur la base des signatures de deux représentants, le texte était
considéré comme accepté et contraignant pour l’Église de Grèce, puis transmis
au Concile.
Où est le caractère conciliaire de
l’Église à l’œuvre ici ?
Mais ce n’est pas tout. Pour que le
texte soit modifié, ou même qu’une phrase de celui-ci soit changé en Crète, il
fallait l’approbation de toutes les Églises locales. Si seulement une [Église
locale] était en désaccord avec le changement, il restait comme il était, parce
que l’on le considérait comme déjà approuvé par toutes les Églises à la 5e
Conférence préconciliaire !
Une fois de plus, nous pouvons voir
ici pourquoi les Églises de Bulgarie et de Géorgie ont refusé d’y assister :
elles ont compris que des changements fondamentaux aux textes serait
impossibles.
Ce processus a été à l’œuvre avec
les règles de fonctionnement pour le Concile lui-même. Les textes ont été
approuvés par les primats (à l’exception de l’Église d’Antioche), sans
discussion ni approbation des hiérarchies des Églises locales.
Aussi répréhensible et malheureux
qu’il soit, le processus préconciliaire, est plutôt bénin en comparaison avec
le summum du mépris de la conciliarité manifesté au Concile lui-même. Là, la
fonction juste et appropriée de chaque évêque pour voter sur les textes
proposés a été bafouée et niée, et réservée au seul primat. Incroyable, sans
précédent et totalement irrecevable canoniquement parlant.
L’ironie est que bon nombre des
évêques présents avec enthousiasme, ont déclaré qu’il y avait une grande
liberté et facilité pour les évêques à prendre la parole. Cela est important,
mais c’est évidemment secondaire en importance par rapport au vote. Ce qui
importe, ce n’est pas qui parle en premier, mais qui a le dernier mot,
c'est-à-dire qui décide. Même si tous les 152 évêques non-votants ont
exprimé leur désaccord avec un mot ou un passage ou même un document entier,
cela importait peu, car les votes des 10 primats était tout ce qui était
enregistré.
Comme chacun le sait, selon
l’ecclésiologie orthodoxe, les évêques sont égaux. Le primat n’est pas
au-dessus de tous les évêques. Au contraire, il est le « premier parmi ses
pairs ». Dans ce contexte, alors, la pratique en Crète de reconnaître le vote
du primat seul et non celui de l’ensemble de la hiérarchie, ne représente-t-il
une chute de conciliarité et ne glisse-t-elle pas dans le papisme ? Cette
élévation « papale » des primats est extrêmement dangereuse pour toute l’Église,
car en plus de signifier l’abolition de la conciliarité dans chaque Église
locale, elle conduira rapidement au primat des primats étant élevé au statut de
pape de l’Orient sine paribus (sans pair), pour utiliser le terme
privilégié du métropolite Elpidophore de Prousse.
Je voudrais donner trois exemples
qui illustrent qu’en Crète, se produisit une « abolition conciliaire de la
conciliarité. »
Avant le « Concile» de Crète, la
hiérarchie de l’Église de Grèce a accepté à l’unanimité et a fait connaître sa
position selon laquelle, les communautés hétérodoxes dans les textes
conciliaires, ne doivent pas être qualifiées « d’Églises. » La hiérarchie donna
mandat à l’archevêque et à son entourage de transmettre et de défendre la
présente décision. Il n’y avait aucune autorisation conciliaire pour toute
modification de la décision de la hiérarchie. Néanmoins, l’archevêque d’Athènes
et son entourage (à l’exception du métropolite Hiérothéos du Naupacte)
modifièrent leur position et votèrent en faveur d’une version modifiée du texte
en question (#6) qui contredit clairement la décision unanime de l’ensemble de
la hiérarchie. En faisant cela, lui et ceux qui étaient avec lui méprisaient le
34e Canon apostolique, qui dit : « Mais lui aussi (le premier) ne doit rien
faire sans l'opinion de tous. C'est seulement de cette façon qu'il y aura
unanimité et que Dieu sera glorifié par le Seigneur dans le Saint Esprit.»
Dans notre second exemple, celui de
l’Église de Serbie, nous avons un exemple encore plus flagrant de papisme
rampant. La délégation de l’Église serbe se composait de 24 évêques. 7
seulement parmi eux prirent position en faveur du texte final sur les
hétérodoxes (#6). Dix-sept des 24 hiérarques refusèrent de signer. Néanmoins,
parce que le patriarche de Serbie y était favorable et qu’il signa le texte, le
« Concile » a considéré que l’Église de Serbie avait accepté le texte ! Une
fois de plus, le Concile a dédaigné le 34e Canon apostolique, qui appelle le
premier hiérarque « à ne rien faire sans le consentement de tous. » L’ironie est,
bien sûr, que tandis que les représentants orthodoxes au dialogue avec Rome
soulignent la nécessité pour le Vatican de baser les relations entre un
primat et l’Église locale sur 34e Canon apostolique, le « Concile »
Panorthodoxe l’a violé à plusieurs reprises.
Dans notre troisième exemple, nous
avons l’approche tragique anti-synodale et papiste de l’archevêque de Chypre.
Quatre des 17 évêques de Chypre présents ont refusé de signer le texte
définitif sur les hétérodoxes (#6), y compris Mgr Athanase, métropolite de
Limassol. Après que ces évêques soient partis, la réaction de l’archevêque fut
de signer pour eux, comme s’il avait leur accord ! Dans une interview qu’il
donna plus tard à un journal grec d’Amérique, l’archevêque caractérisa ces
évêques dissidents de son Église comme d’une « cinquième colonne » du Concile.
Ici, il est évident que ces
exemples indiquent non seulement un mépris pour le système conciliaire et même
son abolition, mais aussi le mépris de la dignité épiscopale par les « premiers
hiérarques». Ces innovations et ces détournements ont été non seulement tolérés
et acceptés par le « Grand et Saint Concile » ; c’est sur leur base que
le « Concile » a été réalisé. En effet, sans cette activité
anti-conciliaire, le « Concile » se serait entièrement désintégré. [11]
Avec le recul, compte tenu de la
fondation anti-conciliaire et de l’échec du « Concile » à unir l’Église
orthodoxe, l’expression suivante s’applique : « une maison n’est bonne que par
les fondations sur lesquelles elle est bâtie. » (voir Luc 6:48). La « Grande et
Sainte » Maison du Concile n’a été pas construite sur le roc de la conciliarité
- « il parut bon au Saint-Esprit et à nous » - mais sur le sable du papisme - «
notre Saint Patriarche a parlé !»
2. les Documents et déclarations du
Concile
Passons maintenant de
l’organisation du « Concile», à ses documents.
Trois des six documents
présentaient de graves problèmes pour plusieurs des Églises. Ce sont : la
Mission de l’Église orthodoxe dans le monde contemporain, [12] le sacrement du
mariage et ses obstacles, et les Relations de l’Église orthodoxe avec le reste
du monde chrétien. Je ne parlerai que brièvement du deuxième texte et me
concentrerai sur le troisième, qui est vraiment à la base du Concile.
A. Le sacrement de mariage et ses
empêchements
Dans le document sur le mariage,
les trois déclarations ont été faites successivement au sujet des « mariages
mixtes », i.e. le mariage d’un chrétien orthodoxe avec un membre d’une
confession hétérodoxe ou d’une des religions non chrétiennes du monde :
1. le mariage entre les orthodoxes
et les chrétiens non orthodoxes est interdit selon l’acribie canonique (Canon
72 du Concile œcuménique in Trullo).
2. avec le salut de l’homme comme
but, le Saint-Synode de chaque Église orthodoxe autocéphale apostolique
doit envisager la possibilité de l’exercice de l’économie ecclésiastique en ce
qui concerne les empêchements au mariage selon les principes des saints canons,
et dans un esprit de discernement pastoral.
3. le mariage entre les orthodoxes
et les non-chrétiens est catégoriquement interdit conformément à l’acribie
canonique.
Maintenant, certainement, cette
question des mariages mixtes est un sujet pastoral épineux et difficile,
surtout pour l’Église en dehors des terres orthodoxes traditionnelles, telles
que l’Amérique. Sans vouloir déprécier ce défi pastoral, défi traité par les
pasteurs au cas par cas, il est impératif que la pratique pastorale ne soit
jamais détachée de ses liens dogmatiques. Mon intérêt ici, ce sont les
implications dogmatiques de la présente décision.
Selon le professeur Dimitrios
Tselengidis, le mouvement qui tend à « à légitimer l’office du mariage mixte
[est] quelque chose qui est clairement interdit par le canon 72 du Concile in
Trullo. [Ainsi, il est inacceptable] pour un concile comme le « Grand et Saint
Concile » de Crète de transformer explicitement une décision d’un Concile
œcuménique en quelque chose de relatif. » [13]
Dans l’extrait concerné, que j’ai
lu dans le document conciliaire, remarquez que, si le mariage kat'oikonomian
[selon l’économie] des hétérodoxes avec les orthodoxes, est considéré comme
possible, le même est interdit pour les non-chrétiens. Pourquoi cette
différence ? Sur quelle base les hétérodoxes sont-ils admis à un mystère de l’Église
? Quels sont les critères d’acceptation ?
N’oublions pas le 72è Canon, qui ne
pouvait pas indiquer plus clairement qu’il est basé sur le dogme de l’Église et
n’admet donc pas d’économie :
« Qu'un homme orthodoxe ne doit
pas épouser une femme hérétique.
Qu'il ne soit pas permis a un homme orthodoxe de s'unir à une
femme hérétique, ni à une femme orthodoxe d'épouser un homme hérétique et si
pareil cas s'est présenté pour n'importe qui, le mariage doit être considéré
comme nul et le contrat matrimonial illicite est à casser, car il ne faut pas
mélanger ce qui ne se doit pas, ni réunir un loup a une brebis. Si quelqu'un
transgresse ce que nous avons décidé, qu'il soit excommunié. Quant à ceux qui
étant encore dans l'incrédulité, avant d'être admis au bercail des orthodoxes,
s'engagèrent dans un mariage légitime, puis, l'un d'entre eux ayant choisi la
part la meilleure vint à la lumière de la vérité, tandis que l'autre fut retenu
dans les liens de l'erreur sans vouloir contempler les rayons de la lumière
divine, si l'épouse incroyante veut bien cohabiter avec le mari croyant, ou
vice versa le croyant avec la non-croyante, qu'ils ne se séparent pas, car
selon le divin apôtre, "le mari non croyant est sanctifié par sa femme, et
la femme non croyante est sanctifiée par son mari."»
Ce qui est important ici, c’est que
le Concile de Crète introduit, pour la première fois dans l’histoire, une
décision synodale qui permet l’abolition d’un canon d’un Concile œcuménique et
- surtout – de son fondement dogmatique. Je ne vois pas comment on pourrait le
comprendre autrement, car sur quelle base permettent-ils les mariages mixtes si
ce n’est pas par une certaine considération (nouvelle) de ce qu’est l’Église et
ses limites, y comprenant désormais les hétérodoxes (en quelque sorte - « parce
qu’ils sont baptisés » ?). Car, dans le cas contraire, ce serait folie de
parler de mariage - vrai mystère d’unité en Christ - entre un membre baptisé et
initié au corps de Christ, et un autre qui n’est pas baptisé et non initié.
Par conséquent, l'implication, même
lorsque l’on se réfère ici à la décision «kat'oikonomian» [selon
l’économie], est que les hétérodoxes sont «baptisés» et, sur cette base, ils
(par opposition à ceux d'autres religions) peuvent participer au mystère du
mariage. En effet, c'est ce que l'on entend quand on prête attention au
raisonnement de ces champions des mariages mixtes. Ceci, cependant, signifie
que de la supposée "économie" sous-jacente des mariages mixtes est la
soi-disant théologie baptismale et les théories de l'église inclusive qui sont
au cœur de l'œcuménisme syncrétiste. Ceci est conforme aux fruits que nous
avons vus des mariages mixtes, à savoir que, sur la base des mariages mixtes,
les mentalités œcuméniques justifient d'autres violations des canons, comme la
prière conjointe avec les hérétiques, ou même la communion [des hétérodoxes]
pendant la cérémonie du mariage. (On me dit que, en fait, cela est pratiqué par
un professeur éminent dans un séminaire orthodoxe nord-américain).
Il est clair qu'il n'y a pas de
base théologique pour le mariage mixte, qu'il ne peut pas être considéré comme
étant selon « l’économie » puisqu'il ne conduit pas à
« l’acribie », mais il renverse l'identité d'unité des mystères avec
le Mystère Unique du Christ, et cela ouvre la porte à une nouvelle érosion de
l’ordre canonique et sacramentel de l'Église.
B. Relations de l'Église orthodoxe
avec le reste du monde chrétien
Passons maintenant au texte que
beaucoup considèrent constituer la base du Concile: «Les relations de l'Église
orthodoxe avec le reste du monde chrétien». [14] Il est communément admis que
ce texte, le sixième et dernier texte accepté par le «Concile», est rempli
d'erreurs et de confusion, malgré des passages dignes d’éloges.
1. Le produit d'une perspective
œcuménique
En tant que texte avec une
orientation dogmatique et ecclésiale claire, ce texte aurait dû se distinguer
par une clarté absolue du sens et de l'exactitude dans la formulation, de
manière à exclure la possibilité d'une variété d'interprétations ou de
mauvaises interprétations intentionnelles. Malheureusement, au contraire, dans
les passages clés, nous rencontrons une obscurité et une ambiguïté, ainsi que
des contradictions théologiques et une antinomie, ce qui permet des interprétations
polaires opposées.
Il est caractéristique de noter
avec quelle difficulté le «Concile» a assumé la tâche d'approuver ce texte que
près de trente évêques ont refusé de signer, et que beaucoup d'autres n'ont
signé qu'après la fin du Concile, après que les quatre versions (en quatre
langues) aient finalement été achevées.
Pour voir que le texte est le
produit d'une mentalité œcuméniste - et non vraiment œcuménique au sens
orthodoxe du terme -, il suffit de considérer ce que le métropolite Hiérothéos
(Vlachos) a écrit concernant le texte et le débat qui le concerne au cours du
«Concile»:
"Lorsque les procès-verbaux du
Concile seront publiés, où les vues véritables de ceux qui ont décidé et signé
le texte seront enregistrées, il sera clair que le Concile était dominé par la
théorie des branches, la théologie baptismale et surtout le principe
d'inclusivité, à savoir un recul du principe d'exclusivité en faveur du
principe d'inclusivité. Pendant les travaux du Concile en Crète, diverses
distorsions de la vérité ont été dites [afin de renforcer le texte] concernant
saint Marc d'Ephèse, le Concile de 1484 et l'encyclique synodale des
Patriarches orientaux de 1848, en ce qui concerne le mot «Église» comme
s'appliquant aux chrétiens détachés de l'Église Une, Sainte, Catholique et
Apostolique ».
Le métropolite rapporte ailleurs
que les partisans du texte et de la reconnaissance de «l'ecclésialité» des
confessions occidentales ont employé une agression et beaucoup de pression, y
compris des explications contre ceux qui s’y sont opposés.
2. Approbation de l'œcuménisme
Nous avons déjà mentionné que l'un
des objectifs de ce «Concile» était de solidifier l'engagement de l'Église
orthodoxe envers l'œcuménisme. Ce texte sur les relations avec les hétérodoxes
atteint cet objectif. Il contient des références positives au Conseil
Œcuménique des Églises [COE], faites avec un enthousiasme apparent.
Au paragraphe 21 du texte, il est
indiqué ce qui suit:
L’Église orthodoxe souhaite
renforcer le travail de la commission « Foi et Constitution » et suit
avec un vif intérêt l’apport théologique que celle-ci a réalisé à ce jour. Elle
évalue positivement les textes théologiques publiés par celle-ci, avec
l’appréciable contribution de théologiens orthodoxes, ce qui représente une étape
importante dans le Mouvement œcuménique vers le rapprochement des Églises.
L'évaluation positive des
textes acceptés au sein du COE suffit pour qu'un chrétien orthodoxe rejette le
texte. Est-il possible pour un Concile panorthodoxe de voir favorablement les
documents théologiques du COE lorsque ces mêmes textes sont remplis de vues
protestantes hérétiques qui ont été critiquées à maintes reprises par de
nombreuses Églises orthodoxes locales?
Au paragraphe 19 du texte, on se
réfère positivement à la Déclaration du COE de Toronto, en tant que document
fondamental pour la participation orthodoxe.
Cependant, qu'exprime cette
déclaration? Entre autres choses, elle indique que le COE comprend des églises
qui considèrent que:
° L'Église est
essentiellement invisible,
° Il y a une
distinction entre le corps visible et invisible de l'Église,
° Le baptême des autres
églises est valable et véritable,
° Il y a des «éléments
d'une véritable Église» et des «traces d'Église» dans d'autres églises membres
du COE et le mouvement œcuménique est basé sur cela.
° Il y a des membres de
l'Église extra muros (à l'extérieur des murs), et
° Ceux-ci aliquo
modo (d’une certaine manière) appartiennent à l'Église, et
° Il y a une «Église
dans une Église».
Sur cette base, les orthodoxes
participent au COE, organisation dans laquelle la théorie anti-orthodoxe
«Église invisible et visible» domine clairement, renversant toute
l'ecclésiologie orthodoxe.
Le «Concile» de Crète est le seul
concile des évêques à reconnaître, promouvoir, louer et accepter l'œcuménisme
et le Conseil Œcuménique des Églises. Cela s'oppose directement au témoignage
du chœur des saints, y compris - parmi beaucoup d'autres [Pères] - du grand
staretz Éphrem de Katounakia qui, par révélation, a été informé que
l'œcuménisme est dominé par les esprits impurs.
Les implications sont énormes:
quelle expérience et inspiration du Saint-Esprit pourraient être exprimée en
Crète quand elles sont en opposition aux saints de l'Église?
3 Un long chemin vers la
reconnaissance de l’ecclésialité des hétérodoxes
Ce chemin vers l’acceptation
conciliaire de l’œcuménisme a été long et tumultueux. L’adoption de ce texte
sur l’œcuménisme est clairement l’objectif numéro un des visionnaires du «
Concile » - objectif qui était évident, dès 1971. Le premier texte produit au
sein du processus préconciliaire qui reconnaît la soi-disant ecclésialité des
confessions hétérodoxes est le texte la Commission préparatoire inter-orthodoxe
de 1971 intitulé « L’économie dans l’Église orthodoxe, » où il est dit : « car
notre Église orthodoxe reconnaît - bien qu’elle soit, l’Église Une, Sainte,
catholique et apostolique - l’existence ontologique de toutes les Églises et
Confessions chrétiennes. » [15] (ce texte fut sévèrement critiqué par les
théologiens de Grèce à l’époque et finalement retiré). Cette phrase a été
modifiée par la suite à la troisième réunion de la commission en 1986 en «
reconnaît l’existence réelle de toutes les Églises et Confessions chrétiennes.
»Elle a été changée de nouveau en 2015, lors de la cinquième réunion de la
commission préparatoire, en « reconnaît l’existence historique d’autres Églises
et Confessions chrétiennes qui ne sont pas en communion avec elle. »
Quand, en janvier 2016, le texte
final a été finalement rendu public, cette phrase a provoqué une foule de
réactions et de protestations du plérôme de l’Église et des synodes d’Églises
locales, y compris l’Église russe à l’Etranger. Après que la proposition de
dernière minute en Crète en juin 2016 par l’archevêque d’Athènes ait été
généralement acceptée par les primats et leur entourage (bien que près de 30
évêques aient refusé de signer), le texte final inclue la formulation : « L’Église
orthodoxe accepte le nom historique des autres Églises et Confessions
chrétiennes [16] qui ne se trouvent pas en communion avec elle. » On peut voir
que progressivement, au cours des 45 dernières années, ce membre de phrase a
été modifié en réponse aux objections avancées par les Églises locales.
Néanmoins, la version finale reste peu orthodoxe et inacceptable ou, comme
l’écrit le métropolite Hiérothéos (Vlachos), « anti-orthodoxe. » Il y a
plusieurs points importants à soulever à cet égard.
4. Anti orthodoxe et condamné
synodalement comme hérésie
Tout d’abord, comme le remarque le
métropolite Hiérothéos, peut-être que, en acceptant le terme « église » pour
les confessions hétérodoxes, une distinction importante a été perdue par les
hiérarques participants. Saint Grégoire Palamas a clairement défini cette
question dans le Tomos synodique du neuvième Concile œcuménique de 1351. Il y
écrit : « c’est une chose d’utiliser les contre-arguments en faveur de la piété
et autre chose de confesser la foi. » Autrement dit, il faut utiliser tous les
arguments dans la lutte contre quelque chose, alors que la confession doit être
brève et précise doctrinalement. Par conséquent, dans ce contexte, au Concile,
dans un souci de précision doctrinale l’utilisation du terme « église » pour
les hétérodoxes est manifestement irrecevable. Nous pouvons seulement espérer,
ainsi que le métropolite Hiérothéos, que les hiérarques en Crète « ont été «
induits en erreur » par ceux qui ont soutenu -sans nombreuses références -
qu’au cours du deuxième millénaire, les orthodoxes caractérisent les groupes
hérétiques comme Églises. La vérité est que ce ne fut pas avant le XXe siècle
que le christianisme occidental a été caractérisée comme église, lorsque la
terminologie et la théologie orthodoxes se sont différenciées de la
terminologie et de la théologie du passé, surtout avec [et après] l’encyclique
de 1920 du Patriarcat œcuménique » « aux Églises du Christ dans le monde. » Il
faut seulement se rappeler que Saint Grégoire Palamas a comparé l’hérésie
latine comme apparentée à l’arianisme, et les Latins comme étant des organes
obéissants du Malin.
Le terme Église n’est pas utilisé
seulement comme une description ou une image. Au contraire, il indique le
véritable Corps de notre Seigneur Jésus-Christ. L’Église est identifiée avec le
même corps Théanthropique [« Divino-humain »] du Christ et parce
qu’en tant que Chef, il est Un, son Corps est Un. Comme l’apôtre Paul l’écrit
:«… Il a tout mis sous ses pieds, et il l'a donné pour chef suprême à
l'Église, qui est son corps, la plénitude de celui qui remplit tout en
tous.» (Éphésiens 1:22-23)« Il y a un seul corps et un seul Esprit, comme aussi
vous avez été appelés à une seule espérance par votre vocation; il y a un seul
Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous,
qui est au-dessus de tous, et parmi tous, et en tous.» (Éph. 4 : 4-6). Bien
qu’il ait été affirmé que l’expression choquante se référant aux « églises »,
particulièrement dans sa dernière forme, est conforme à l’ecclésiologie
orthodoxe et à l’apôtre Paul, la vérité est qu’elle est, au contraire, conforme
à la nouvelle, ecclésiologie « inclusiviste ». Comme le métropolite Hiérothéos
l’a déclaré : « bien que prima facie, elle semble inoffensive, elle est
anti-orthodoxe. » Pourquoi « anti-orthodoxe ? » Tout d’abord, il est impossible
de parler de « simplement » « accepter le nom historique » des « autres Églises
chrétiennes hétérodoxes, » car il n’y a aucun nom sans existence, parce que
sinon un nominalisme ecclésiologique est exprimé.
Deuxièmement, loin de faire écho à
l’apôtre Paul, « la bouche du Christ, » l’expression « L’Église orthodoxe
accepte le nom historique d’autres Églises chrétiennes hétérodoxes, » si cela
est compris dans le contexte, cela rappelle la théorie de l’église invisible de
Calvin et de Zwingli, ce que Vladimir Lossky appela une « ecclésiologie
nestorienne. » Cette ecclésiologie suppose que l’Église est divisée en parties
visibles et invisibles, tout comme Nestorius imaginait que les natures divine
et humaine en Christ étaient séparées. D’autres théories hérétiques sont venues
de cette idée, comme la théorie des branches, la théologie baptismale et
l’inclusivisme ecclésiologique. Cette théorie d’église invisible a en fait déjà
été rejetée en Concile par l’Église orthodoxe.
L’idée qu’une église puisse être
caractérisée comme hétérodoxe (hérétique) a été condamnée par les conciles du
XVIIe siècle à l’occasion de la soi-disant « Confession de Loukaris, » supposée
avoir été rédigée ou adoptée par Cyrille Loukaris, patriarche de
Constantinople. L’expression condamnée était : « il est vrai et certain que
l’église peut pécher et adopter le mensonge au lieu de la vérité. » Au
contraire, les Conciles de l’Église de l’époque condamnèrent cette infidélité
au Christ, déclarant que l’Église ne peut pas commettre d’erreur.
Cet enseignement conciliaire est
très important et il convient de le souligner à nouveau de nos jours, car il
s’agit de guérir le délire parmi nous de ces humanistes qui ont perdu la foi en
Christ et la suite de l’Incarnation. C’est cette incrédulité qui se cache derrière
la réticence de plusieurs à embrasser le « scandale du particulier, » le
scandale de l’Incarnation et de déclarer que l’Église est Une comme Christ est
Un, et qu’elle est dans une époque et un lieu particulier, la
continuation de l’Incarnation et l’Église Une, Sainte, catholique et
apostolique. Cette infidélité équivaut à un abandon de l’Orthodoxie comme
condition sine qua non d’ecclésialité, et ce n’est pas simplement une
crise de convictions, mais, comme le Père Georges Florovsky l’a écrit il y a
quelques 60 ans, cela indique que les gens « ont abandonné le Christ. »
Certes, les formes contemporaines
que prennent les théories de l’hérésie de « l’Église invisible » sont un
peu plus nuancées que celles du XVIe siècle, mais pas de beaucoup. Regardons à
nouveau l’expression offensive en contexte, et nous allons en voir plus
clairement les similitudes. Le texte dit ceci : «D’après la nature ontologique
de l’Église, son unité ne saurait être perturbée. Cependant, l’Église orthodoxe
accepte l’appellation historique des autres Églises et Confessions chrétiennes
hétérodoxes qui ne se trouvent pas en communion avec elle, mais elle croit
aussi que ses relations avec ces dernières doivent se fonder sur une
clarification aussi rapide et objective que possible, de la question
ecclésiologique dans son ensemble et, plus particulièrement de l’enseignement
général que celles-ci professent sur les sacrements, la grâce, le sacerdoce et
la succession apostolique.» (Paragraphe 6)
Cela commence en disant que, selon
la nature ontologique de l’Église, l’unité ne peut être perturbée. Ici l’église
invisible, unie dans les cieux est implicite. C’est le sens « d’ontologique ».
Ceci est immédiatement suivi par « mais malgré cela... » et il est fait
référence à l’aspect fracturé, visible de l’Église, avec l’acceptation des
autres, « églises hétérodoxes. »
5. Une Expression déjà acceptée de
la nouvelle ecclésiologie
Ce n’est pas la première fois que
cette dichotomie de l’Église Unie ontologiquement dans le ciel, hors du temps,
avec l’Église divisée sur la terre, dans le temps, est apparue parmi la
hiérarchie orthodoxe. Voici comment le patriarche de Constantinople,
Bartholomée, l’exprime au Saint-Sépulcre à Jérusalem en 2014 :
« L’Église Une, Sainte,
Catholique et Apostolique, fondée par le « Verbe au commencement, »
par Celui « vraiment avec Dieu » et Verbe « Dieu véritable», selon
l’Evangéliste de l’amour, malheureusement, elle a été divisée dans le temps au
cours de son engagement sur la terre, en raison de la prédominance de la faiblesse
humaine et de l’impermanence de la volonté de l’intellect humain. Celle-ci
amena diverses conditions et groupes, dont chacun a réclamé pour lui-même «
authenticité » et « vérité ». La Vérité, cependant, est Une, le Christ et l’Église
Une fondée par Lui.
Avant et après le grand Schisme de
1054 entre Orient et Occident, notre Sainte Église orthodoxe fit des tentatives
pour surmonter les divergences, qui dès le début et pour la plupart proviennent
de facteurs extérieurs à l’Église. Malheureusement, l’élément humain
prévalut, et à cause de l’accumulation d’ajouts « théologiques », «
pratiques » et « sociaux », les Églises locales ont été conduites dans la
division de l’unité de la foi, dans l’isolement, qui s’est développé parfois en
polémiques hostiles. »
La similitude avec la théorie d’Église
invisible condamnée par l’Église et ces paroles du patriarche sont manifestes
dans la nette distinction entre l’Église céleste ontologiquement Une avec
l’église terrestre, censée elle être fragmentée. Cela reflète la division «
nestorienne » des natures divines et humaines du Corps de Christ. Ce point de
vue, cela n’est pas surprenant, est en harmonie avec la nouvelle ecclésiologie
proposée au Concile Vatican II, qui postule une église terrestre avec des
degrés plus ou moins grands de plénitude [17] en raison des soi-disant «
disputes de l’histoire humaine ». [18] Ces points de vue sur l’Église
impliquent l’identification de l’Église avec l’hérésie, des choses saintes avec
les choses déchues et mondaines.
Le cœur douloureux, les paroles de
saint Taraise, patriarche de Constantinople, aux Pères du Septième Concile
Œcuménique, sont présentes à l’esprit, quand il blâmait les décisions du faux
concile des iconoclastes de Hiéreia :
« Ô le désordre et la folie de ces
[hommes]. Ils n’ont pas séparé le profane et le sacré, et comme les
cabaretiers mélangent le vin avec de l’eau, ils mélangent la parole véritable
avec la parole pervertie, le mensonge avec la fausseté, tout comme [comme
s’ils mélangeaient] le poison avec du miel, à eux, le Christ notre Dieu
s’adresse par le prophète : « les prêtres a annulé ma loi et profané mes
sanctuaires. Ils n’ont fait aucune distinction entre le profane et le sacré. »
Il devrait être clair, alors que ce
texte choquant avec son ecclésiologie hérétique doit être rejeté par l’Église
(par chaque Église locale séparément, puis dans un futur Concile), et remplacé,
car sans aucun doute il sera la source d’une déchéance de l’Orthodoxie. Il est
encore temps d’en corriger le cours et de guérir la plaie déjà infligée à l’Église.
Une solution pratique, donnée par le métropolite Hiérothéos, qui contribuerait
à faciliter la restauration de l’Orthodoxie, serait pour un futur Concile de
corriger les erreurs et de publier un nouveau document orthodoxe. Il y a à la
fois un soutien contemporain pour cela (venant des patriarcats
d’Antioche, de Serbie, de Russie, de Géorgie, de Bulgarie et même de Roumanie)
aussi bien qu’un précédent historique (les réunions des Conciles œcuméniques
s’étendirent pendant des mois et des années, le Concile in Trullo acheva les Ve
et VIe Conciles et le IXe Concile Œcuménique était en fait quatre Conciles
séparés). Nous espérons que partout les évêques prendront immédiatement des
mesures dans ce sens, car la question est des plus urgente dans les Églises
locales qui ont accepté le texte et le Concile.
3. les conséquences et les
Implications du « Conseil » de la Crète
A. les réponses des églises locales
Tournons-nous maintenant brièvement
sur la suite du Concile et sur l’état actuel des choses. Tout d’abord, parmi
ceux qui ont participé au Concile, il y a près de 30 évêques qui ont refusé de
signer son document final sur les hétérodoxes et l’œcuménisme. Parmi eux sont
les évêques bien connus, les métropolites Hiérothéos (Vlachos) de Naupacte
(Grèce), Athanase de Limassol (Chypre), Néophytos de Morphou (Chypre),
Amphilochios du Monténégro (Serbie) et Irénée de Bačka (Serbie).
Irénée, évêque de Bačka en Serbie a
résumé la position de beaucoup sur l’après Concile: « Concernant le « Grand et
Saint Concile » de notre Église à Colombari en Crète qui vient de s’achever,
triomphalement mais pas tout à fait convaincant : il n’est déjà pas reconnu
comme tel par les Églises qui étaient absentes, voire même caractérisé par
elles comme « rassemblement en Crète », et il a également été contesté
par la plupart des hiérarques orthodoxes participants! »
Les partisans et sympathisants du
Concile en appellent au précédent du Deuxième Concile œcuménique, à titre d’exemple
de concile au cours duquel certaines églises locales étaient absentes (Rome et
Alexandrie). Ce qu’ils ne disent pas, cependant, c’est que ce Deuxième
Concile œcuménique ne s’appelait pas œcuménique ou Concile panorthodoxe
pour commencer, mais plutôt comme l’un des nombreux Conciles locaux de l’Empire
d’Orient, qui en raison des décisions orthodoxes qui avaient été prises, fut
plus tard accepté par toutes les Églises locales comme œcuménique.
En Crète, nous avons fait le
contraire : il a été appelé panorthodoxe et quatre patriarcats ont refusé d’y
assister. En outre et surtout, ils ont également refusé de le reconnaître comme
Concile, même après coup.
Le patriarcat d’Antioche, dans sa décision de l’an dernier du 27 juin, a déclaré qu’il
considérait la rencontre de Crète comme « une réunion préliminaire pour le
Concile panorthodoxe, » qu’il « refuse d’attribuer un caractère conciliaire à
toute réunion orthodoxe qui n’implique pas l’ensemble des églises orthodoxes
autocéphales, » et, ainsi, « l’Église d’Antioche refuse d’accepter que
l’Assemblée de Crète soit appelée « Grand Concile orthodoxe » ou « Grand
et Saint Concile. »
Le Patriarcat de Moscou (dans la décision de son Saint-Synode du 15 juillet 2016) a
déclaré que « le Concile qui s’est déroulé en Crète ne saurait être considéré
panorthodoxe, et que les documents qu’il a ratifiés ne constituent pas une
expression du consensus panorthodoxe ».
Le Patriarcat de Bulgarie (dans sa décision datée du 15 novembre 2016) a déclaré lors
d’un rassemblement de l’ensemble de sa hiérarchie que « le Concile de Crète
n’est ni grand, ni saint, ni panorthodoxe. C’est en raison de la
non-participation d’un certain nombre d’Églises autocéphales locales, ainsi que
des erreurs d’organisation et des erreurs théologiques acceptées. Une étude
attentive des documents adoptés lors du Concile de Crète nous amène à la
conclusion que certains d'entre eux contiennent des contradictions avec
l’enseignement de l’Église orthodoxe, avec la Tradition dogmatique et canonique
de l’Église, et l’esprit et la lettre des Conciles Œcuméniques locaux. Les
documents adoptés en Crète doivent faire l’objet d’un examen théologique plus
approfondi dans le but de modification, de révision et de correction ou de
remplacement par d’autres (nouveaux documents) dans l’esprit et la Tradition de
l’Église. »
Le Patriarcat de Géorgie s’est réuni en décembre dernier et a rendu une décision finale
sur le Concile de Crète. Dans celle-ci, il dit qu’il n’est pas un concile
panorthodoxe, qu’il abolit le principe de consensus, et que ses décisions ne
sont pas obligatoires pour l’Église orthodoxe de Géorgie. En outre, les
documents délivrés par le Concile de Crète ne tiennent pas compte des critiques
importantes faites par les Églises locales et ils ont besoin de correction. Un
véritable Grand et Saint Concile a besoin d’être tenu et l’Église géorgienne
est confiante qu’il aura lieu à l’avenir, et qu’il prendra des décisions par
consensus, basé sur l’enseignement de l’Église orthodoxe. Pour atteindre cet
objectif, le Saint Synode a formé une commission théologique pour examiner les
documents acceptés en Crète et se préparer à un futur Concile qui sera
panorthodoxe.
Le Patriarcat de Roumanie, qui a participé au Concile, a déclaré plus tard que « les
textes peuvent être expliqués, en partie nuancés, ou encore développés par un
futur Grand et Saint Concile de l’Église orthodoxe. Cependant, leur
interprétation et la rédaction des nouveaux textes sur diverses questions ne
doivent pas être prises dans la précipitation ou sans accord panorthodoxe,
sinon ils doivent être retardés et amendés jusqu'à ce que l’accord puisse être
trouvé ».
L’Église orthodoxe autocéphale de
Grèce, tout en ne statuant pas cataphatiquement en
faveur de la décision finale du Concile, a publié une encyclique qui le
représente comme un Concile orthodoxe. Beaucoup ont conclu que cette position
impliquait un accord, même si au sein de la hiérarchie il y a des évêques qui
ont fortement rejeté et condamné le « Concile ». Cette confusion a provoqué du
dégoût de la part des fidèles.
B. l’évolution après la Crète en
Grèce et en Roumanie
Avant de terminer, je crois qu’il
est également important de vous informer des derniers développements en ce qui
concerne la réception ou le rejet du « Concile » crétois par le peuple de Dieu.
Il y a eu des réponses positives,
surtout parmi les organes officiels des Églises participantes, qui ont
pris la forme de conférences et de petites causeries sur l’importance du
« Concile, » impliquant parfois les hétérodoxes. On peut également observer une
insatisfaction surprenante des partisans jugeant que « le Concile » n’en a pas
fait assez ,ou n’est pas allé assez loin dans la reconnaissance des hétérodoxes
ou en ce qui concerne les autres questions « brûlantes » pour, principalement,
les universitaires orthodoxes d’Occident. Nul doute qu’il y aura un effort
continu pour influencer les fidèles en faveur du « Concile » - tâche difficile,
étant donné que la plupart n’ont jamais ressenti que le « Concile » les
concernait.
En dépit de l’accueil officiel
positif du « Concile » en Grèce et en Roumanie, la réponse prépondérante parmi
le peuple de Dieu a été négative. Les implications du Concile crétois sont
considérables pour beaucoup dans les Églises locales qui ont accepté le
Concile. La réponse de nombreux clercs, moines et théologiens à l’accueil
favorable réservé au « Concile » par leur hiérarchie a varié du rejet
écrit et verbal par les théologiens connus, à la grave décision par les moines
et pasteurs, de cesser la commémoration des évêques égarés.
La cessation de la commémoration du
patriarche de Constantinople qui a commencé sur le Mont Athos à l’automne de
l’année dernière, avec peut-être 100 moines y participant, s’est maintenant
propagée à plusieurs diocèses de l’Église de Grèce, mais aussi en Roumanie, où
plusieurs monastères et clercs cessé de commémorer leurs évêques.
Un des développements plus
importants a eu lieu il y a tout juste deux semaines. L’éminent professeur de
patrologie le protopresbytre Théodore Zisis a annoncé, le Dimanche de
l’Orthodoxie, qu’il cessait la commémoration de son évêque, le métropolite de
Thessalonique, Anthimos, à cause de son accueil enthousiaste du « Concile »
crétois et de ses textes. Par sa stature et son grand renom (il fut le
professeur de nombreux hiérarques actuels en Grèce), cette décision en a
influencé d’autres et a « bousculé » le statu quo ecclésiastique en Grèce.
Cette voie a été suivie par quatre membres du clergé sur l’île de Crète, trois
monastères dans le diocèse de Florina, du clergé et des moines dans les
diocèses de Thessalonique, de Céphalonie, de Syros, d’Andros et d’ailleurs.
En outre, il y a quelques jours,
l’archimandrite Chrysostome, higoumène du saint monastère de la Source
Vivifiante à Paros (Grèce) (où le saint staretz Philothéos [Zervakos] s’est
illustré dans la vie ascétique) a soumis au Saint-Synode de l’Église de Grèce
une accusation formelle historique d’hérésie contre le patriarche Bartholomée.
L’higoumène Chrysostome a demandé au Saint-Synode de reconnaître, de rejeter et
de condamner les enseignements hétérodoxes (« eterodidaskalia ») du
patriarche comme étant contraires à l’enseignement correct, de l’Église du
Christ Une, Sainte, Catholique et Apostolique.
Il a écrit au Saint Synode :
« En vous soumettant cette
lettre, nous exposons devant le corps honorable de la hiérarchie de l’Église de
Grèce le scandale pour moi-même, notre fraternité, le clergé, les moines et
laïcs innombrables, causé par des vagues successives d’enseignements
hétérodoxes qui ont été exprimés à différents moments par sa Sainteté le
patriarche œcuménique, Bartholomée, le summum duquel [a été exprimé ] au Saint
et Grand Concile tenu à Colombari en Crète. »
La plainte officielle fournit 12
exemples d’enseignements hétérodoxes émis par le patriarche au cours des
dernières décennies, ainsi que 9 des canons de l’Église qui s’y rapportent, et
elle se termine par une liste de 13 évêques, 14 higoumènes, hiéromoines et
clercs, et 9 théologiens, que l’higoumène suggère d’appeler comme témoins
favorables à sa cause devant le Saint-Synode lorsqu’il sera officiellement
appelé à défendre son accusation.
Vos Éminences, vos Excellences et
très révérends Pères,
Ceux-ci, ainsi que d’autres
développements similaires en Ukraine, Moldavie et Roumanie soulignent les
pressions croissantes sur tous les bergers de l’Église, enjoints de répondre patristiquement
au danger posé à l’unité de l’Église par le « Concile » crétois
mal planifié, mal réalisé et enfin anti-orthodoxe.
L’histoire de l’Église nous indique
clairement que cette unité inestimable en Christ existe et se développe
seulement quand tous sont « unanimes », et confessent la même foi dans l’Église
Une. En outre, l’histoire récente nous apprend aussi que l’accommodation ou
l’indifférence, une ecclésiologie novatrice, telles que celles exprimées en
paroles et en actes, en Crète, ne sont pas une option et conduiront seulement
vers plus de polarisation et de naufrages à gauche et à droite de la Voie
Royale.
C’est dans ces mers spirituelles
pleines de récifs comme celles-ci que l’habileté du chef spirituel est testée
et confirmée, montrant que non seulement il connaît la vérité, mais qu’il est
aussi versé dans la VOIE par laquelle tous peuvent y parvenir en toute
sécurité.
Par la Providence de Dieu, l’Église
orthodoxe russe à l’étranger continue d’occuper une place unique dans l’Église
orthodoxe, d’où elle peut parler librement et même prophétiquement annoncer la
Parole de Vérité - « une parole» qui unit les fidèles, guérit les vieux
schismes et en prévient de nouveaux. L’Église catholique [i.e. orthodoxe] a
besoin d’elle maintenant en ces temps difficiles.
Par les prières de nos saints pères
et surtout des saints nouveaux martyrs et confesseurs, et par la sage conduite
pastorale de nos premiers pasteurs nous tous pouvons continuer dans la
confession salvatrice de la foi dans l’Église, de celle qui est la continuation
de l’Incarnation – pour l’édification de l’Église et le salut du monde ! Je
vous remercie tous pour votre attention et votre bienveillance de m’avoir
écouté aujourd'hui et je vous souhaite à tous une Pâques lumineuse et radieuse
!
BIBLIOGRAPHIE CHOISIE :
Γκοτσόπουλος, Ἀναστάσιος, Πρωτοπρεσβύτερος, «Πῶς δ’ αὖθις Ἁγία καί Μεγάλη, ἣν οὔτε..., οὔτε..., οὔτε...;»
10 Δεκεμβρίου 2016 (En grec)
Metropolitan Hiérothéos of
Nafpaktos and St. Vlassios, Intervention and Text in the Hierarchy of the
Church of Greece (November 2016) regarding the Cretan Council: https://orthodoxethos.com/post/intervention-and-text-in-the-hierarchy-of-the-church-of-
greece-november-2016-regarding-the-cretan-council. (En anglais)
Notes:
[1] Métropolite Hiérothéos
(Vlachos), Intervention and Text in the Hierarchy of the Church of Greece
(Novembre 2016, en anglais)
Concernant le « Concile de
Crête »: https://orthodoxethos.com/post/intervention-and-text-in-the-hierarchy-of-the-church-of-
greece-november-2016-regarding-the-cretan-council. (En anglais)
[2] Ce n'est qu'une des nombreuses
innovations ecclésiologiques alarmantes introduites en Crète, dépassées en
gravité uniquement par l'acceptation des termes contradictoires «Églises
hétérodoxes». C'était, cependant, le premier – la séparation de la conciliarité
- qui a rendu possible ce dernier - l'acceptation de l'incongruité (sinon la
monstruosité) que sont les termes «églises hétérodoxes». Cela est vrai dans
plusieurs sens. Si tous les évêques avaient voté, et pas seulement les primats,
il est peu probable que le texte choquant sur les hétérodoxes aurait été
accepté. Cependant, il est également vrai que si l'archevêque d'Athènes avait
respecté le mandat clair et conciliaire qui lui avait été conféré par sa
hiérarchie, qui a voté à l'unanimité pour refuser d'accepter le terme «Église»
pour les hétérodoxes, il n'aurait pas accepté la correction spécieuse et peu
judicieuse.
[3] voir aussi: From the Second
Vatican Council (1965) to the Pan-Orthodox Council (2016): Signposts on the Way
to Crete: https://orthodoxethos.com/post/from-the-second-vatican-
council-1965-to-the-pan-orthodox-council-2016-signposts-on-the-way-to-crete.
(En anglais)
[4] Dans un article datant de
l’époque où le patriarche œcuménique Bartholomée était encore métropolite, dans
la revue The National Catholic Reporter, le patriarche dit la chose
suivante, révélant ses intentions pour le Concile the panorthodoxe: “ Nos buts
sont les mêmes que ceux de Jean (Le pape Jean XXIII): moderniser l’Église et
promouvoir l’unité chrétienne... Ce Concile signifiera aussi une ouverture de
l'Église orthodoxe aux religions non-chrétiennes, à l'humanité dans son
ensemble. Cela signifie une nouvelle attitude envers l'islam, le
bouddhisme, la culture contemporaine, aux aspirations pour une société
fraternelle libre de discrimination raciale... En d'autres termes, il marquera
la fin de 12 siècles d'isolement de l'Église orthodoxe. Voir: “Council
Coming for Orthodox", interview by Desmond O'Grady, The National Catholic
Reporter, in the January 21, 1977 edition. Voir aussi :http://orthodoxinfo.com/ecumenism/towards.aspx.
(En anglais)
[5] Dans les textes du Concile de
Vatican II, les choses sont légèrement mieux exprimées. Dans Lumen Gentium,
le Malin est mentionné quatre fois, bien que dans Unitatis Redintegratio,
il ne soit pas mentionné.
[6] La seule exception à ce dernier
cas, est lorsque l’hérésie ecclésiologique du phylétisme est mentionnée dans
l’encyclique des Primats, ce qui montre bien aussi les priorités de la réunion.
[7] See: J. S. Romanides, “The
Ecclesiology of St. Ignatius of Antioch,” The Greek Orthodox Theological Review
7:1 and 2 (1961–62), 53–77. (En anglais)
[8] http://orthodoxinfo.com/ecumenism/encyc_1848.aspx.
(En anglais)
[9] http://www.parembasis.gr/index.php/menu-prosfata-a...
(En grec)
[10] http://www.romfea.gr/epikairotita-xronika/9264-mpa...
(En grec)
[11] Cette section de ma conférence
est largement basée sur la recherche et la publication excellentes du Père
Anastasios Gotsopoulos, Recteur de l’Église St. Nicolas du diocèse de Patras,
en Grèce, avec sa permission.
[12] A cause de l’importance et de
la nature de ce sujet, une analyse de ce texte sera faite dans une étude
séparée.
[13] See: http://www.pravoslavie.ru/english/90489.htm.
(En anglais)
[14] Suivra mon analyse qui sera
largement basée sur celle du métropolite Hiérothéos (Vlachos) of Nafpaktos, en
Grèce.
[15] Συνοδικἀ, ΙΧ, σ. 107, Γραμματεία Προπαρασκευής της Αγίας και Μεγάλης
Συνόδου της Ορθοδόξου Εκκλησίας, Διορθόδοξος Προπαρασκευαστική Επιτροπή της
Αγίας και Μεγάλης Συνόδου 16-28 Ιουλίου 1971, έκδ. Ορθόδοξο Κέντρο Οικουμενικού
Πατριαρχείου (en grec) Chambesy Γενεύης 1973, σ. 143, και Γραμματεία Προπαρα-σκευής
της Αγίας και Μεγάλης Συνόδου της Ορθοδόξου Εκκλησίας, Προς την Μεγάλην Σύνοδον,
1, Εισηγήσεις, της Διορθοδόξου Προπαρασκευαστική Επιτροπή επί των εξ θεμάτων
του πρώτου σταδίου, έκδ. Ορθόδοξο Κέντρο Οικουμενικού Πατριαρχείου
Chambesy Γενεύης 1971, σ. 63. (en grec)
[16] Note du traducteur: La version
officielle dit « non orthodoxe » alors que l’original grec dit
« hétérodoxe ».
[17] « On peut penser que l’Église
universelle est une communion à divers niveaux de plénitude d’organismes qui
sont plus ou moins complètement des églises… C’est une communion véritable,
réalisée à divers degrés d’intensité ou de plénitude, d’organismes qui tous,
ont un véritable caractère ecclésial, bien que certains l’aient plus que
d’autres », in (Francis A. Sullivan, S.J., “The Significance
of the Vatican II Declaration that the Church of Christ ‘Subsists in’ the Roman
Catholic Church,” in René Latourelle, ed., Vatican II: Assessment and
Perspectives, Twenty-five Years After (1962– 1987) (New York: Paulist Press,
1989), 283). (en anglais)
[18] 267. Joseph Ratzinger, “The
Ecclesiology of Vatican II,” a talk given at the Pastoral Congress of the
Diocese of Aversa (Italy), Sept. 15, 2001, http://www.ewtn.com/library/CURIA/CDFECCV2.HTM.
(en anglais)
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