Saint Abo, jeune arabe de la ville de Bagdad
Saint Abo était un jeune arabe de la ville de Bagdad, la capitale de l'immense califat qui, en cette seconde moitié du huitième siècle, s'étendait jusqu'aux confins de l'ancien empire perse. Elevé dans la religion musulmane et instruit dans l'art des parfums autant que dans les lettres arabes, il rentra au service du prince de Géorgie, Nersès, alors en disgrâce et tenu prisonnier à Bagdad. Lorsque ce dernier fut libéré par le nouveau calife (776) et put reprendre le gouvernement du royaume chrétien de Géorgie, Abo le suivit dans cette terre lointaine, il en apprit la langue, s'intéressa à sa culture et surtout, frappé par la douceur des moeurs des Chrétiens, il se mit avec ferveur à l'étude de l'Ecriture Sainte et des Dogmes de la Sainte Eglise. Rapidement convaincu que là était la Vérité, il ne pouvait cependant recevoir le Saint Baptême, de peur d'être aussitôt mis à mort par les Sarrasins; aussi observait-il en secret le mode de vie des Chrétiens. Trois ans plus tard, Nersès ayant de nouveau perdu les faveurs du calife, Abo l'accompagna dans sa fuite vers le pays des Khazars, (au Nord du Caucase), peuple sauvage et sanguinaire qui reconnaissait pourtant le Dieu Créateur et qui leur fit bon acceuil. Abo put être baptisé au nom de la Sainte Trinité et persévérer librement dans le jeûne et la prière, tout en suivant son maître dans ses tribulations. Pendant le Carême, bien qu'il vécût en ville, il menait des combats semblables à ceux des grands maîtres du désert, soumettant les élans de la chair à l'esprit et repoussant les assauts des démons par le jeûne prolongé, le silence et les veilles.
Comme Nersès avait obtenu la permission de rentrer dans sa patrie, Abo insista pour le suivre et révéler publiquement sa conversion à ses anciens coreligionnaires. «Quel mérite y aurait-il pour moi à rester en ce pays où il n'y a ni danger, ni occasion de mourir pour le Christ?» disait-il. Parvenu à Tiflis, il professa ouvertement sa Foi Chrétienne, en dépit des injures et des tentatives d'intimidation, sans être toutefois sérieusement inquiété: car son heure n'était pas encore venue (cf. Jean 7:30; 8:20). Finalement arrêté (à la fin de l'année 785) et mis en jugement devant l'émir, il fut jeté en prison où, chargé de lourdes chaînes, il resta pendant dix jours dans le jeûne, les hymnes d'action de grâces et la prière incessante. Le dernier jour, après avoir annoncé à ses compagnons que l'heure de son union au Christ était désormais proche, il vendit ses vêtements et demanda qu'on brûlât pour lui dans toutes les églises de la ville encens et cierges, afin qu'il fût fortifié par les prières de l'Eglise. Puis il passa toute la nuit de la Fête de la Théophanie debout au milieu de sa cellule, en tenant en mains deux grands cierges qui achevèrent de se consumer à l'aube. Le Saint dit alors: «Comme mon Seigneur Jésus-Christ est descendu nu en ce jour dans les eaux du Jourdain pour être baptisé, c'est mon tour maintenant de descendre en ville, comme dans les eaux sacrées, pour être baptisé par le feu et l'Esprit dans mon propre sang ... » Il se lava le visage, s'oignit de parfums en chantant: «Courons derrière Toi dans l'effluve de tes parfums» (Cantique des cantiques 1:4); puis, après avoir communié aux précieux Corps et Sang de Notre Seigneur, il suivit docilement ses bourreaux, en consolant sur le chemin les fidèles qui pleuraient. Il leur disait: «Ne pleurez pas sur moi, mais soyez joyeux, car je vais vers mon Seigneur». Quand on lui enleva ses chaînes, il arracha soudain sa tunique, et nu comme au Baptême, les bras en croix et le visage plein de joie, il tendit le cou sous l'épée en invoquant le Christ.
De peur qu'on ne vienne vénérer son corps, les Sarrasins le brûlèrent et jetèrent ses restes dans le fleuve, avec la terre imprégnée de son sang. Mais une colonne de feu apparut bientôt sur le lieu de son exécution et au-dessus des eaux, si bien que les fidèles purent récupérer et dignement vénérer ses précieuses Reliques.
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