Homélie sur l'Ascension de St Léon Le Grand

"Le mystère de notre salut, que le Créateur de l’univers a estimé au prix de son sang, il l’a accompli, depuis le jour de sa naissance corporelle jusqu’au terme de sa passion par une humilité continuelle. Et bien que, même dans sa forme d’esclave, ait rayonné l’éclat de sa divinité, sa vie de ce temps a eu pour but de nous prouver qu’il avait vraiment pris la nature humaine. Après sa passion il brisa les liens de la mort qui avait perdu toute sa puissance en s’emparant de celui qui ignorait le péché ; la faiblesse se changea en puissance, la mortalité en immortalité, les affronts en gloire ; et c’est cette gloire que le Seigneur Jésus-Christ a manifestée aux yeux d’un grand nombre par des preuves nombreuses et évidentes, et en plusieurs manières, jusqu’au jour où il porta aussi dans le ciel le triomphe de la victoire qu’il avait remportée sur la mort.

Ainsi, de même que la Résurrection du Seigneur a été le sujet de notre joie dans la fête de Pâques ; son Ascension au ciel est la cause de notre allégresse présente ; car nous nous le rappelons et nous le vénérons à juste titre, ce jour où la bassesse de notre nature fut élevée, dans le Christ, au-dessus de toutes les armées célestes, de tous les ordres des Anges, au-dessus de la hauteur de toutes les puissances, et jusqu’au trône de Dieu le Père. C’est par cette économie des œuvres divines que l’édifice de notre salut a été élevé sur de solides fondements ; ainsi la grâce de Dieu est devenue plus digne d’admiration, en ce que le jour où fut soustraite au regard des hommes cette présence visible qui imposait par elle-même un juste sentiment de respect, la foi chrétienne ne défaillit point, l’espérance ne devint pas hésitante et la charité ne se refroidit pas.

C’est la force des grandes âmes et la lumière des cœurs vraiment fidèles, de croire sans hésiter des choses que le regard corporel ne peut atteindre, et de fixer ses désirs là où l’on ne peut porter la vue. Mais d’où cette piété naîtrait-elle dans nos cœurs, et comment quelqu’un pourrait-il être justifié par la foi, si notre salut ne consistait que dans ces choses qui se trouvent placées sous nos regards ? Aussi est-ce pour cela qu’au disciple qui semblait douter de la résurrection du Christ, s’il ne voyait dans sa chair les traces de ses plaies, et s’il ne les constatait par la vue et le toucher, le Seigneur dit : « Parce que tu m’as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n’ont point vu et qui ont cru » (Jn. 20, 29)"

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